Partie X - 22 v’la l’Tarot   

Les plus anciens exemplaires connus d'un tarot datent du milieu du XVème siècle ; ils proviennent d'Italie du Nord et sont assez éloignés du tarot de Marseille classique - ils n'ont même pas toujours le même nombre de cartes. Jusqu'au XVIIème siècle, bien des versions seront éditées un peu partout, en France et en Italie principalement, avec des figures souvent différentes ou ordonnées autrement, ou portant des noms différents aussi.

Le plus ancien jeu de Tarot français conservé aujourd'hui est celui de Catelin Geoffroy à Lyon en 1557 dont il reste trente-huit cartes, aux enseignes atypiques mais rassemblant apparemment les vingt-deux atouts (mavoyanceweb.com - Tarots de Catelin Geoffroy).

La version de Marseille pourrait faire partie des plus tardives, faute d'exemplaires aussi anciens conservés, les plus vieux documents datant du XVIIIème siècle. A cet argument fondé sur une absence de documents s'ajoute celui d'une certaine perfection dans la réalisation des gravures, dans les proportions et la précision du dessin, plus proche de la Renaissance que de la figuration médiévale. Mais cette assurance dans l'exécution peut au contraire être la marque d'une date très ancienne du modèle primitif, en suggérant une tradition iconographique bien établie et surtout précise, aboutie, une maturité acquise depuis longtemps, qui fait un peu défaut dans les autres versions plus anciennes conservées par ailleurs, plus " approximatives ". Et loin de ne dater que du XVIIIème siècle, cet art très Renaissance des proportions et du trait permettrait au moins de remonter au XVIème siècle pour la version marseillaise du tarot. […] La multiplicité des versions dès le XVème siècle montre qu'un original avait déjà subi plusieurs séries d'altérations et de modifications successives, sur plusieurs générations, en se diffusant largement dans le même temps. Cette constatation permet donc de remonter plus haut encore l'origine de cette série iconographique que ce que les versions qui nous sont parvenues indiquent par la mode vestimentaire. […] A chaque fois seulement quelques cartes divergent ici et là du modèle marseillais, et pas toujours les mêmes, et par la proportion générale des éléments constants entre tous les tarots, le tarot de Marseille s'impose soit comme le modèle premier, soit comme la synthèse achevée des autres variantes. La seconde proposition soulève une grosse difficulté : il aurait en effet fallu que l'auteur de ce tarot connût tous les autres et en sélectionnât les points les plus constants entre eux, les plus significatifs. La première reste la plus plausible (www.bacchos.org - Introduction).

Lames

Contrôle oghamique

Contrôle calendaire

Saints du jour

Le Chariot

Bouleau

31 décembre

Lughna/Ethernan

Le Bateleur

Orme

16 janvier

Fursy

La Papesse

Aulne

31 janvier

Brigitte

Le Mat

Saule

15 février

Berach

L'Impératrice

Frêne

2 mars

Jaoua/Ceadda

La Force

Aubépine

17 mars

Patrick

La Joie

Chêne

2 avril

Bronach

Le Jugement

Houx

17 avril

Donnan

La Roue de la Fortune

Coudrier

2 mai

Germain l'Ecossais

L'Etoile

Pommier sauvage

17 mai

Brendan

Le Pendu

Ronces

1er juin

Ronan

La Tempérance

Lierre

17 juin

Moling Luachra

La Lune

Prunellier

2 juillet

Filles de Cathbad

L'Empereur

Sureau

17 juillet

Aubierge

Le Soleil

Pin

1er août

Saran

Le Pape

Ajoncs

17 août

Ernan

L'Amoureux

Pomme

1er septembre

Sceallan/Fiacre

La Justice

Tremble

16 septembre

Ninian

La Mort

If

1er octobre

Clothra

La Maison Dieu

Aunée

16 octobre

Kiara/Gall

Le Monde

Fusain

1er novembre

Lonan

L'Ermite

Chèvrefeuille

16 novembre

Gobrien/Malo

Le Diable

Groseillier

1er décembre

Nessan

La Prudence

Double Noisetier

16 décembre

Beanus

Le jeu de Tara

Certains pensent que le terme de Tarocco/Tarocchi prend pour origine la decoration des cartes elles-mêmes appelée Tara, du latin Taràre (percer), une variante du verbe classique Térere (battre). Tàra, ou impression faite de petits points allignés aurait donnée son nom aux cartes de tarot (www.associazioneletarot.it - Etymologie du Tarot, Franz Bopp, Grammaire comparée des langues indo-européennes, Volume 2, 1868).

L'adverbe tara se retrouve identiquement dans l'irlandais tar, tair, et même tairis (avec le suffixe primitif ai affaibli en is), qui signifie trans. Le changement du t en d n'a rien qui doive surprendre, et se rencontre même en irlandais dans des formes identiques. En irlandais deirmide (absence de respect) est l'opposé de airmhid (respect), comme tarômaiti est l'opposé de ârmaiti en zend (Académie des inscriptions & belles-lettres (France), Journal des Savants, 1837).

Le celte (irlandais) a tar, tair "au delà, à travers, par-dessus", et tri, "à travers, par". Le Latin trans et le Gothique thair-h, notre "durch," proviennent de la même racine. Trans pour terans (cf. terminus.) est un participe présent. Le Gothique thair-kan signifie "trou", "oreille". Le nom de la ville de Tara est cependant une forme anglicisée de la forme irlandaise Temair. Tara a pu être réinterprété en langue irlandaise.

Mais ce qui est important, c'est systématiquement la " transgression " (racine *ter-) des principes du " mariage " qui fait qu'il existe toujours dans l'histoire un " cocu " en général " chasseur ", " guerrier " ou " voyageur " qui laisse sa place dans le couple " uni " à une " tierce " personne.

Cette étymologie se double de l'interprétation de la carte du pendu qui trouve un pendant dans les Aventures de Nera, héros qui, en se rendant dans un sid, trouve sur son chemin un pendu par les pieds (selon Jean Markale) à une potence comme sur la lame du tarot et non à un arbre. Les lames seont analysées dans les chapitres suivants.

L'Hypothèse

L'hypothèse serait l'élaboration en France [à Meaux ? Meaux par son étymologie Meldunum (meldae : jouissance, joie) est un Mag Mell (champs Elysées irlandais) gaulois] du tarot dans un milieu où graviteraient principalement des Irlandais exilés et où se seraient faites sentir des influences bretonnes (avec ses saints d'origine irlandaise en fait) et des influences de la culture classique et du catholicisme romain. Ces Irlandais auraient apportés leurs tablettes ou lames avec leurs symboles oghamiques et mythologiques ainsi que l'histoire de la chrétienté celtique d'Irlande. Cela se serait fait vers le milieu du XIVème siècle (pontificat d'Urbain V dont l'apparence rhabille la lame du Pape). Ce premier jeu de tarots serait parvenu en Italie alors que tout le légendaire arthurien avec son arrière-plan celtique irlandais y était déjà connu.

Le contexte culturel irlandais

Quatre grands cycles irlandais, définis par la recherche contemporaine, composent l'important corpus de la littérature mythique et épique de l'Irlande ancienne : Le cycle mythologique qui retrace les origines et les peuplements mythiques de l'Irlande (Ce groupe est représenté principalement par les légendes du "Livre de la Conquête" (Lebor Gabála), qui retrace le destin des différentes races qui se sont succédé sur la terre d'Irlande (les "célèbres" Tuatha Dé DanannI notamment).

Le cycle historique, ou cycle des rois, qui relate les légendes des grands rois irlandais, comme Labraid Loingsech, Conn ou Cormac

Le cycle d'Ulster ou de la "Branche Rouge" (Craobh ruadh, nom du palais d'Emain Macha (aujourd'hui Navan Fort) "capitale" de l'Ulster et résidence du roi Conchobar qui n'est en fait que le plus célèbre et le plus riche des cycles royaux et qui rapporte l'épopée des héros ulates comme le roi Conchobar ou le guerrier Cuchulainn

Le cycle ossianique qui conte les aventures des Fianna, guerriers poètes vivant en marge de la sociétéI menés par Finn mac Cumaill et son fils Oisín (Ossian)

Les aventures du Chien de Culann (kon = chien, sous entendu chien tueur; en anglais : hound, chien de chasse) sont une geste épique par excellence où n'apparaît (presque) aucune adjonction chevaleresque ou courtoise, au contraire des cycles arthuriens, par exemple, revus et adaptés à l'idéologie et aux valeurs médiévales. Malgré une transcription par les clercs du Moyen Age, le christianisme n'est mentionné qu'à l'extrême fin des aventures de notre héros qui prédit, après sa mort, l'arrivée en Irlande des "têtes rasées" (les moines) et dans la mise en garde finale du rédacteur, en l'occurrence probablement le scribe Mael Muire du grand monastère de Clonmacnois (centre de l'Irlande). Ce moine est le premier transcripteur dont le manuscrit (daté des environs de l'an 1100) ait subsisté, mais le barde Senchan Torpéist serait, si l'on croit la tradition, le premier à avoir consigné la geste d'Ulster par écrit aux alentours de 640 : "Mais moi qui ai écrit cette histoire, ou plutôt cette fable, je n'accorde à certaines choses [ ] aucune confiance. Car une partie en est artifices de démons, une autre partie fictions poétiques. Une partie est vraisemblable, une partie ne l'est pas, une partie est pour le plaisir des sots". La transmission orale a probablement entraîné une évolution de la matière originale du mythe (comme par exemple l'apparition des ogams), mais semble-t-il peu de déformations ou de modifications significatives. La tradition, en effet, était protégée par de puissants interdits dans le monde celtique, au point même que le rédacteur chrétien de la Razzia des vaches de Cooley, malgré sa désapprobation avouée pour ce qu'il était chargé de transcrire, reprendra sous forme de bénédiction le geiss des poètes, dont la pire faute était de trahir le sens d'un récit (Thierry Luginbühl, Le chien de Culan).

La quasi absence de sources écrites non-chrétiennes postérieures au Vème siècle ne signifie pas la disparition du paganisme mais son occultation dans les livres et les écoles. L'absence d'ouvrages non-chrétiens ne pourrait non plus être interprétée comme la disparition d'une caste de lettrés païens mais davantage comme son empêchement à écrire. Depuis le règne de Théodose, les interdits chrétiens deviennent de plus en plus pressants. Après les emplois dans la fonction impériale, les païens sont sont interdits d'exercer les métiers d'avocat en 468 et de professeur en 527 [ce qui rappele les lois vichistes à l'encontre des juifs]. La mainmise chrétienne sur les idées veut être absolue. Le nouvel empire ne peut tolérer la moindre référence à l'ancien temps. Il s'agit de façonner un homme nouveau et par conséquent de rompre avec un passé en faisant table rase, en censurant, en pourchassant les intellectuels rétifs à la normalisation. Pour appauvrir les lettres qui sous-tendent le paganisme, le pouvoir vide les bibliothèques en limitant les références à quelques bribes classiques et inoffensives. L'accès aux fonctions publiques est interdit aux lettrés païens. C'est une révolution culturelle permanente que les évêques prônent. Il faut oublier le passé non chrétien pour construire un monde nouveau (Bernard Rio, L'arbre philosophal, 2001).

On désigne par l'expression " chrétientés celtiques " la forme particulière de christianisme qui s'est développée dans les pays celtiques pendant tout le haut Moyen Âge - laquelle commence en Irlande avec saint Patrick en 432 et se termine officiellement en Bretagne à Landévennec en 818 ; mais cette fin est toute théorique. Même réintégré dans le cadre rigide de l'Église catholique ou dans celui, plus strict encore, des Églises protestantes, le christianisme celtique garde une profonde originalité, marquée en Irlande par le culte de saint Patrick et de sainte Brigitte et, en Bretagne, par celui de saint Yves et de sainte Anne. Subsistent en outre quelques traces de paganisme contre lesquelles l'Église a toujours été impuissante

La force extraordinaire du christianisme irlandais est due tout d'abord à la très haute qualité d'un personnel sacerdotal qui avait hérité toutes les aptitudes intellectuelles des druides. Ensuite, elle est la conséquence de l'insularité de l'Irlande qui, jusqu'à la fin du VIIIe siècle, a été préservée de toute invasion et n'a pas été touchée par les bouleversements qui ont marqué la fin de l'Empire romain sur le continent et en Bretagne insulaire.

Les controverses ont porté pendant très longtemps sur la date de la fête de Pâques, pour laquelle les insulaires ont maintenu le cycle de quatre-vingt-quatre ans qui faisait osciller la fête pascale entre le quatorzième et le vingtième jour de la lune et coïncider la Résurrection avec la Pâque juive lorsque le quatorzième jour tombait un dimanche. Malgré tous les efforts de la papauté, l'usage romain du cycle de dix-neuf ans ne fut adopté que très tard, au VIIIe siècle, en Irlande et au pays de Galles. En Bretagne, l'abbaye de Landévennec conserva le vieux comput jusqu'en 818.

Une autre source de dissensions a été la tonsure celtique obstinément gardée par les moines insulaires : la partie antérieure de la tête, en avant d'une ligne allant d'une oreille à l'autre, était complètement rasée alors que, en arrière de cette ligne, la chevelure était intacte. C'est cette tonsure que le célèbre saint Colomban de Luxeuil avait conservée en arrivant d'Irlande sur le continent. Peut-être était-elle d'origine druidique. Plus grave était l'habitude des Celtes insulaires de conférer la consécration épiscopale par un seul évêque au lieu de trois. Et plus grave encore la coutume, attestée en Bretagne péninsulaire vers le VIème siècle, d'associer des femmes, sous le nom de conhospitae, à la célébration de la messe. Il ne semble pas que ce dernier abus ait perduré très longtemps (Christian Guyonvarc'h, Les chrétientés celtiques).

La chrétienté celtique était un rempart contre l'idéologie trifonctionnelle qui avait été conservée presque intacte en Irlande. Lorsque l'Eglise celte dut rendre les armes, l'idéologie trifonctionnelle inégalitaire put s'imposer à toute l'Eglise et à toute l'Europe. La partition de la société portée par le monachisme celte qui se répandit en Europe du VI au VIIIème siècles ne distinguait pas un ordre parmi les laïcs qui cohabitaient avec les clercs et les moines auxquels était attribuée naturellement la prééminence. Le monachisme s'opposait aux évêques qui revendiquaient la première place parmi l'ensemble des religieux et qui étaient porteurs de l'idéologie trifonctionnelle avec en plus de ceux-ci les nobles et le bas peuple. Joachim de Flore apparaît bien comme le continuateur d'une Eglise celtique dominée par les monastères, faisant la promotion d'un troisième âge conduit justement par les ordres monastiques, qui, rappelons-le, élisaient leurs abbés (Points particuliers : Ploufragan).

Les Oghams

Seul "purement" celtique (équivalent de la Saga scandinave), le mythe de Cuchulainn présente un monde païen et archaïque proche, malgré quelques rares anachronismes, de celui de l'Age du Fer irlandais dévoilé par l'archéologie. Sans vouloir perdre de temps à discuter le degré d'historicité des descriptions et des situations du récit (Emain Mach était bel et bien un site "princier" et le roi Conchobar a peut-être existé), il est nécessaire de relever que la société et la civilisation matérielle décrites dans le mythe correspondent fort bien à ce que l'on sait aujourd'hui de celles des Celtes insulaires des derniers siècles avant notre ère, perpétuée en Irlande jusqu'à la conversion de l'île au Christianisme durant le Vème siècle. Certains détailI comme le char de combat, encore en usage dans les îles britanniques au temps de César, mais tombé en désuétude en Gaule dès le début de la Tène Finale, sont des traits manifestement archaïques qui permettent de situer les origines du mythe à une date antérieure à la naissance du Christ.

Les ogams, cependant, n'apparaissent pas avant le début de notre ère sur les pierres tombales (environ 300) qui constituent leur seule documentation épigraphique. Cette apparente contradiction montre clairement la vanité de vouloir dater précisément une légende dont les racines se perdent d'ailleurs probablement dans un vieux fond indo-européen commun aux traditions de populations disséminées de l'Inde à l'Atlantique. Le monde de Cuchulainn, avec ses druides, ses rois, ses héros à tendance suicidaire et ses magiciennes portées sur les choses du sexe et de la guerre, n'en reste pas moins spécifiquement celtique et se distingue des autres sources épiques européennes par l'importance des rites, du surnaturel et de la magie (Thierry Luginbühl, Le chien de Culan).

Dans le Loinges Mac nDuil nDermait, ou l'Exil des fils de Dermait de Duil Dermait, une histoire du temps de Concobhar Mac Nessa, Cuchulainn grave des signes oghamiques sur une lance.

Les Irlandais se glorifient d'avoir eu un alphabet particulier, avant leur conversion à la Religion chrétienne. Ils l'appellent Beth-luis-nion : parce que le b, l et n en furent les trois premières lettres, et que ces mots en leur langue signifient trois sortes d'arbres fort communs, dont ils tiraient les tables et les écorces, sur lesquelles ils avoient coutume d'écrire. Ils donnaient encore aux lettres en général les noms de bois ou de forêt. II est singulier, que leur alphabet ne s'accordât pas mieux, selon Kennedy, avec ceux des Grecs et des Latins, qu'avec aucun autre du monde, ni pour le nombre des éléments, ni pour l'ordre, ni pour la figure, ni pour les dénominations. Les Irlandais avaient de plus une autre écriture réservée à leurs doctes. Elle représentait des branches, des chiffres et des points, sur de petites lames, dont l'arrangement était une science et dont les caractères renfermaient, nous disent-ils, bien des choses en peu de figures. Kennedy, qui nous apprend tout ce détail, dans sa dissertation anglaise sur la famille royale des Stuarts, ajoute que Dubhaltach mac Firbisigh (Dudley Mac Firbis), qui meurt en 1670, avait entre les mains cent cinquante de ces lames, et que le Chevalier Ware en conservait un livre tout rempli. "And here I can not but remark to the Reader, that the learned had, many ages before, a peculiar way of writing by certain rods, or virgular characters,and other marks and signs for syllables , and whole words, diftind from the ordinary known letters, which, requiring a particular study, the Vulgar and common people could not at all understand. Of these Dudly-Mac Firbiss, very knowing in the Irish antiquitys, declares he had in his possession 150, all of different shapes, and Sir James Ware owns his having a fall book of these characters, his refertum habeo libellum membraneum antiquum." (Matthew Kennedy, A chronological genealogical and historical dissertation of the royal family of the Stuarts: beginning with Milesius..., 1705).

Au reste il s'en faut bien, que Ware porte aussi haut que Kennedy les antiquités hibernoises. L'auteur de L'Essai critique sur les anciens habitants des parties septentrionales de la grande Bretagne ou de l'Ecosse, imprimé à Londres en 1719, observe, que les termes hibernois, qui signifient lettre, livre, lire, écrire, sont radicalement latins, avec une terminaison irlandaise. Or, comme les Romains ne firent point la conquête de l'Irlande ; il conclut, que ces expressions avec l'art d'écrire, n'y auront été introduites, qu'au cinquième siècle par saint Patrice et les autres missionnaires (Nouveau traité de diplomatique: où l'on examine les fondemens de cet art, Volume 2, 1755).

Le matériel d'écritures des Irlandais s'appelait Taibhail Fileadh, "tablettes de poètes" ou Tamhlorg Fileadh, expression plus originalement irlandaise qui est traduite par O'Curry par " supports sans tête " des poètes, selon le Agallamh na Seanorach (" Dialogue des anciens hommes ") preservé dans un ancien manuscrit de la Bodleian Library, Oxford, et dans le Book of Lismore de la Royal Irish Academy (Douglas Hyde, A Literary History of Ireland, Eugene O'Curry, Lectures on the manuscript materials of ancient Irish, 1861).

Sir James Ware (1594 - 1666) était un historien irlandais. Sa première œuvre publiée en 1626, est Archiepisco Porum Cassiliensium & Tuamensium Vitae, suivi de Caenobia Cistertientia Hiberniae et De Praesulibus Lageniae, en 1631. En 1633, il édite trois oeuvres d'auteurs différents : View of the State of Ireland de Edmund Spenser ; History of Ireland de Meredith Hanmer ; et History of Ireland de Edmund Campion (en.wikipedia.org - James Ware).

C'est par le site de Yves Kodratoff que nous aurons un aperçu des oghams et de leurs diverses interprétations www.nordic-life.org.

Les noms de lettres de l'Ogam, leurs équivalents végétaux et leurs équivalents poétiques ('kennings') dans l'Auraicept et le Traité de l'Ogam édités par Calder et McManus à partir des textes irlandais anciens et du Moyen âge.

En fait, ce tableau vous explique comment on peut reconstituer l'Ogam tel que les anciens les connaissaient, dans l'orthographe qu'ils utilisaient et avec le sens qu'ils lui donnaient. Vous verrez que les anciens cherchaient à justifier leurs affirmations, eux, mais n'avaient pas une seule opinion sur les lettres ogamiques. Par exemple, que la deuxième lettre, Luis, soit associée au sorbier des oiseleurs et à la flamme (à cause de la splendeur de ses baies) ou à l'orme (du fait de l'abondance de ses chatons), ou aux deux (ce que je crois), je ne saurais vous dire qui a raison. Ma présentation est inspirée par les traductions depuis l'Irlandais Moyen de Calder et de McManus. Ma traduction depuis l'Irlandais est placée entre (" "). Elle essaie toujours de suivre celle de Calder, mais elle peut quand même en différer fortement et je vous renvoie aux textes complets de la traduction que je vous présente ailleurs pour trouver les raisons de cette différence. Les noms de ces lettres ont été décrits six fois : 1. au début de l'Auraicept (en abrégé 'DebAur') comme des noms de personnes, 2. par Fenius (en abrégé 'Fen'), 3. par Ogma ('Ogm'), 4. par Morann Mac Main ('Mor'), 5. par Mac ind Oic ('Mac'), 6. (publié par McManus et non par Calder, voir ci-dessous) par Cú Chulainn ('CC'), avec la traduction en Anglais de McManus ('MM'). Certains textes fournissent en plus du nom de la lettre et de l'arbre qui lui est associé, une métaphore pour le décrire. Je suis l'usage de McManus qui appelle ces métaphores des 'kennings' (en fait, le nominatif pluriel Vieux Norrois est 'kenningar' mais je préfère franciser ce mot).

B, beith ou beithe

Mac: Ogm: LETTRE et ARBRE : beithi, bethi. KENNING : Glaisium cnis -i- beithi sin in ogaim o bethi na cailli (" Le plus argenté de peau, c. à d. le bouleau de l'Ogam d'après le bouleau de la forêt "). (MM : Irl. : 'Glaisium cnis'; Eng. 'Greyest of skin' ; Fr. 'Celui qui a la peau la plus grise').

L, luis

Mac: Cara ceathra (-i- lem). Cara -i- dil lasna ceathra in lem ar a blath 7 ar canach. Tucad uad-side for luis in ogaim, ar is uad tuccad luis fair. ("Ami du bétail (c. à d. orme). Ami, c. à d. cher au bétail est l'orme pour sa floraison et ses chatons. La cause de l'usage poétique correct de luis dans les Ogams, c'est la place de luis dans l'inspiration poétique. ")

F, fern

Mac: LETTRE : fernn. ARBRE : fern. KENNING : Comet lachta -i- ferrn in ogaim sin o fern na caill, ar is i coimetas in lacht, ar is di doniter lestair imon lacht. (" La garde du lait, à savoir l'aulne de l'Ogam d'après l'aulne des forêts, car c'est ce qui garde le lait car les récipients contenant le lait sont faits de lui. ")

S, sail

Mac: LETTRE et ARBRE : saule. KENNING : Lut[h] bech -i- sail sin ara blath 7 ar a canach. Tucad uad-side ara fid coibhnesa in ogaim. ("Activité des abeilles, à savoir, c. à d. le saule pour ses fleurs et ses chatons. Ainsi, il est mis pour la lettre correspondante de l'Ogam.")

N, nin

Mac: LETTRE et ARBRE : nin (frêne). KENNING : Bag ban -i- nin garmna -i- ginol garmna. Uad-side fora fid coibnesa. (" Pure menace (ou: combat non sanglant), à savoir, nin de la barre du tisserand, c. à d. mâchoire de la barre du tisserand. Ainsi pour sa lettre correspondante. ") (MM : Irl. : 'Bág ban'; Eng. 'Boast of women'; Fr. 'Vantardise des femmes', la même traduction que Calder. En tant que préfixe, 'ban*' signifie en effet 'féminin*'. Cependant, les combats de vantardises, normalement sans effusion de sang, ne sont pas inconnus dans le monde celtique).

Note sur le sens de Nin : le texte le plus ancien sur l'Ogam, l'Auraicept, le désigne souvent par : le 'beith luis nin de l'Ogam' (beithi luis nin in ogaim) ce qui a fait croire à de nombreuses personnes (y compris un grand linguiste français, Vendryes!) qu'il s'agit des trois premières lettres de l'Ogam. Par contre, l'Auraicept présente les lettres de l'Ogam dans un ordre immuable, celui que je reproduis ici (pas de contradictions, pour une fois, y compris avec la graphie des lettres. Vous verrez la seule petite déviation à cette règle absolue avec la lettre Getal.) et place toujours Nin en cinquième. Cette apparente contradiction est levée par le sens de 'lettre en général' de Nin : on traduit alors beithi luis nin in ogaim par 'beith luis lettres de l'Ogam'.

H, úath ou huath

Fen: LETTRE : úath ou huath (sens : lettre 'H' ou aubépine, aussi : terreur, terrible, 'nom d'une couleur', un petit nombre, la terre (matière), l'argile). ARBRE : úath ou scé (aubépine). KENNING : comdal cuan huath -i- sce: no ar is uathmar hi ara deilghibh. ("une assemblée de chiens est huath, c. à d. l'aubépine: ou parce que c'est terrifiant à cause de la piqure des épines ")

Mac: Banadh gnuisi -i- uath, ar is ban gnuis in duine in tan doberar uat[h] no uamun uimi. Uad-side for fid in ogaim ar aentaid anma aturu fen -i- uath cechtar de. (" Face exsangue (ou pâle), c'est-à-dire terreur, car exsangue est la face de celui qui est confronté à la terreur ou à la peur de la tombe (uamun uimi). D'où pour la lettre de l'Ogam du fait de l'identité des noms entre eux, c. à d. la terreur est en place pour les deux. ")

D, duir

Mac: Gres saír -i- daír. Tucad uad-side fora fidh coibnesa in ogaim. (" Œuvre d'art faite avec métier, c. à d. le chêne. C'est pourquoi il a été choisi pour désigner la lettre de l'Ogam de même sens. ") [Note : Calder traduit gres saír par 'œuvre de charpentier' alors que les mots grés et sairse (ou soíre) signifient tous les deux 'connaissance d'un métier' (Eng. : craftmanship) avec un aspect artistique et même spécifiquement féminin pour grés.] (MM : Irl. : 'Grés soír'; Eng. 'Handicraft of an artificer'; Fr. 'L'art du faiseur d'artifices').

T, tinne

Mac: Smir guailí -i- cuillenn sen. Uad-side fora fidh coibnesa in ogaim -i- tinne secundum alios; ar is ainm tindi do cuillenn, ut alii dicunt. [Notes: smér = la mûre (fruit) ou le feu (sens trouvé seulement dans les dictionnaires) ; smir = 'la moëlle osseuse', au figuré : la vitalité ; gúal = charbon " d'où Calder : " les feux du charbon "]. ("La force vitale du charbon c. à d. le houx. Ainsi pour la lettre correspondante de l'Ogam, c. à d. tinne (le houx) d'après les autres; car tindi est un nom pour le houx, comme d'autres disent ".) Note : C. à d. que le houx est vu comme un os vivant dans lequel se trouve une " moelle " qui donnera le charbon de bois de la meilleure qualité. Note (d'auto-satisfaction) : McManus lit 'smiur gúaile' et le traduit en effet par 'la moelle du charbon (de bois)'.

C, coll

Mac: Cara bloisc -i- [coll]. Uad-side fora fidh coibnesa in ogaim. (" Ami du craquement (le bruit) c. à d. le noisetier. Ainsi pour la lettre correspondante de l'Ogam "). Note : sans doute, " ami du bruit fait quand on craque les noisettes ". (MM : Irl. : 'Carae blóesc'; Eng. 'Friend of nutshells'; Fr. 'Ami des coquilles de noisettes').

Q, quert ou queirt

Mac: Brigh annum [Calder lit: an duine à la place de annum. C. à d. que le 'nn' est souvent équivalent à 'nd' et que me 'm' est souvent écrit de façon peu lisible et peut être confondu avec un 'in'.]-i- quert. Uad-side fora fidh coibnesa. (" Force d'un homme, à savoir, quert (pommier). Ainsi pour sa lettre correspondante. ") (MM : Irl. : ''Brig anduini; Eng. 'Substance of an insignificant person'; Fr. 'Substance d'une personne insignifiante'). Note : il est assez clair que l'hypothèse de McManus, c. à d. annum = anduin est très raisonnable. Mais anduine signifie 'personne de statut inférieur, personne mauvaise' et brig ou brigh exprime une force, une valeur positive. Donc ce serait plutôt : 'force d'un humble' ou 'force d'un méchant'.

M, muin

Fen: Muin dono -i- finemhain, ut dicitur, airdi masi muiri -i- iarsinni fhasas a n-airde -i- finemhain. (" Muin, encore, c. à d. la richesse de la vigne, comme on dit: la plus haute en beauté muin, c. à d. parce qu'elle croît en hauteur, c. à d. la richesse de la vigne. ")

Mac: Aruusc n-arrligh -i- muin duine. Uad-side fora fidh comainmnig[th]ech. [Calder lit Arusc n-airlig à la place de Aruusc n-arrligh] ("Condition du (ou paroles de) massacre, à savoir, le haut du dos d'un homme. Ainsi pour sa lettre synonyme. ")

G, gort

Mac: Mednercc, -i- gort. Uad-side fora fidh comainm-nigthech. ("[Mednercc à savoir, le lierre. Ainsi pour sa lettre synonyme. ") Note : Pour une fois, Calder ne traduit pas 'mednercc'. DIL cite ce kenning sans le traduire. med = balance, poids à peser, nercc = ?. McManus résout ce mystère en proposant : med -> ined -> inde -> inne = 'la partie la plus centrale d'un lieu', c. à d. au figuré : 1. 'la valeur réelle', 2. la signification, et, au sens physique : 3. le milieu, 4. le cœur, 5. la richesse; nercc -> erc = 1. les cieux, 2. tacheté , 3. poisson tacheté (saumon ou truite) , 4. vache tachetée ou aux oreilles rouges , 5. un lézard , 6. une abeille , 7. une tromperie. Il propose de traduire par : " un endroit convenable pour les vaches ". Bien entendu, 'le cœur de la ruche' ou 'le centre des cieux' etc. sont aussi possibles.]

NG ou GG, getal ou cath

Fen: Ngetal dono -i- gilcach no raith ut dicitur : luth lega getal -i- cilcach no raith. (" Ngetal, encore, c. à d. genêt ou fougère, comme on dit: la vigueur du médecin est getal, à savoir, genêt ou fougère. ") [gilcach : aussi roseau (reed)]

Ogm: LETTRE :Getal. ARBRE :getal (genêt) ou gilcach (genêt). DÉFINITION : Getal -i- gilcach.

Mor: Luth legha getal sen -i- ar is luth lasna leigib, 7 coibnius etir cath 7 getal. (" La vigueur du médecin, le genêt et la lettre 'ng' en sont le signe, c'est, dit-on, la vigueur accompagnant les médecins, et il existe une forte affinité entre le combat et le genêt ").

(NOTE : Voilà donc la seule infraction à l'absolu de la règle de l'unicité de l'ordre des lettres chez tous les auteurs. En effet, une autre définition a été ajoutée entre le 'o' et le 'u' de Morann Mac Main) Etiud midach -i- cath. Tucad ua-side for getal. (" Le vêtement des médecins, à savoir, cath, combat. C'est pourquoi il a été mis pour getal, genêt"). [McManus, à la place du mot 'vêtement', utilise raiment, c. à d. 'les atours'.]

Mac: pas de définition, sans doute rajoutée entre le 'o' et le 'u' de Morann Mac Main par un scribe qui voulait corriger un oubli et qui a mis cette définition là où il avait de la place.

CC: Tosach n-échto (MM : Beginning of slaying). Notes sur la traduction de McManus : Tosach = début, principe, 'partie en avant'; écht = massacre, deuil, exploit. Autre traduction possible : " Le principe des exploits (guerriers, c. à d. des massacres) ".

S, straif (str)

Mac: Moridrun -i- straif. Tucad uad-side fora fidh comainm-nightech. (" Morad run (accroissement des secrets), c. à d. prunellier. Ainsi il a été mis pour sa lettre synonyme. ")

R ruis

Mac: Ruamna dreach [drech = face, attitude]-i- sug in rois doní ruamna na ndrech co mbi ruidead intib. Ruamna drech dano do rad fri ruis in ogaim on ruidead no on rus, ar is tri ruis scribthar side fen. (" Rougeur des visages, à savoir, sug in rois [Calder : la sève de la rose ; peut être aussi : 'la vigueur de la bonne santé'] qui cause la rougeur des visages, de sorte que la rougeur [de la honte ou de l'embarras] soit en eux. Rougeur des visages, encore, dit de ruis de l'Ogam, de la rougeur de honte ou non, car c'est par le sureau qu'elle est écrite. ")

A, ailm

Mac: Tosach fregra -i- ailm sin ; ar is i cetlabra gach duine iarna genemain a. (" Début d'une réponse, c. à d. le pin; car la première expression de chaque humain après sa naissance est a.")

O, onn

Fen: Onn -i- aiten (" Onn, c. à d. le 'genêt épineux'. ") [Note: ici, je suis le sens donné par Vendryes. Onn signifie plus classiquement les ajoncs. Il existe en effet une telle espèce de plante, appelée en Latin Genista anglica mais il n'a rien à voir avec les ajoncs.]

Mac: Fethim saire no fedem -i- onn -i- o. (" Le plus facile des artisanats ou fedem (la contemplation) c. à d. onn c. à d. o. ") Note : Le mot fedem n'est pas compris, Calder suggère 'la pierre', DIL suggère une " vox nihili ", un mot vide de sens. Je suggère de comprendre fethem : 'le fait de regarder' ce qui constitue un jeu de mot avec le fethim du début de la phrase et qui est bien un travail facile.

U, ur ou uir

Mac: Siladh clann, ur les-[s]ium sin, ar is i uir in talman dogni silad na clann cuirtir inti. Silad clann dono do rad o uir in talman do radh frisin fid n-ogaim rogab comainm fria -i- ur cechtar de. (" La multiplication des plantes, c. à d. ur avec elle, car c'est uir, le 'sol de la terre' qui cause la reproduction des plantes qu'on y met dessus. Multiplication des plantes, encore est dit du sol de la terre est aussi dit de la lettre de l'Ogam qui a pris le même nom, à savoir, chacun d'entre eux est ur. ")

[On verra que le conte de Baile à la claire v oix induit que cette lettre représente ubull, la pomme.]

E, edad

Mac: Comainm carat -i- edadh isin caill. Uad-side fora fidh comainmnigthech i n-ogam. (" Du même nom qu'un ami, à savoir, le tremble dans la forêt. Ainsi pour sa lettre synonyme de l'Ogam. ")

I, ida ou idad

Mac: Crinem feada no claidem -i- ibar. Uad-side forin fidh n-ogaim, rogab ainm aile uadh -i- idadh. (" Crinem feda, le plus ratatiné des arbres ou une épée, c. à d. l'if. Ainsi pour la lettre de l'Ogam, qui a pris un autre nom, c. à d. l'if. ") (MM : Irl. : 'Caínem sen' ; Eng. 'Fairest of the ancients' ; Fr. 'le plus beau des anciens (ceux qui durent longtemps)')

EA

Ogm: LETTRE : Ebad. ARBRE : ebad (1. le tremble; 2. une fleur: l'aunée) ou elend (nom d'un arbre, peut-être le tremble). DÉFINITION : Ebad -i- elend.

Mac: Cosc lobair -i- elenn for in fid in ogaim, rogab ainm uad -i- ebad. (" Réprimande (ou châtiment) de la faiblesse, c. à d. 'un arbre peut-être le tremble' pour la lettre de l'Ogam, qui a pris un nom autre, c. à d. le tremble. ")

OI, oir

Fen: Oir -i- feorus no edind (" Oir, c. à d. fusain ou lierre. " [eidenn = lierre])

Mac: Lí crotha -i- or. Uad-side fora fid comainmnigthech or in ogaim. (" Beauté de forme, c. à d. la bruyère. Ainsi pour sa lettre synonyme de l'Ogam 'or'. ")

UI, uilleann

Mac: Cubat n-oll -i- uilleann -i- edlenn. Uad-side forsin fid in ogaim rogab uaide -i- uilleann. (" Également grand, c. à d. le chèvrefeuille (uilleann), c. à d. chèvrefeuille (edlenn). Ainsi pour la lettre de l'Ogam qui a pris de celui-ci, c. à d. chèvrefeuille (uilleann). ")

IO, pin ou ifin ou iphin

Mac: Amram blais -i- pin no ifin. Uad-side forsin fidh rogab ainm uaid -i- pin no iphin. (" Le plus merveilleux des goûts, c. à d. pin ou ifin (la groseille à maquereau). Ainsi pour la lettre qui a pris son nom d'elle, à savoir, pin ou iphin. ")

AE ou CS, emancoll

Ogm: LETTRE :. ARBRE :. DÉFINITION : Emancoll dono -i- coll emnaide iar ret no iar fuath -i- coll dar coll ina fuath. (" Le noisetier jumeau [peut aussi signifier : " le triple noisetier " et, ici, aussi le 'c jumeau'] encore, à savoir, c doublé en accord avec le fait et avec la forme, à savoir, c croisant c dans sa forme ") Note: emancoll = emoncholl. emon = jumeau. coll signifie 'noisetier', mais d'après le contexte, les trois 'coll' de la définition désignent la lettre et non l'arbre.

Mac: LETTRE absente.

Oghams du Livre de Ballymote (XIVème siècle)

Présence irlandaise en France

Au moyen âge on confondait fréquemment les Ecossais avec les Irlandais, leurs voisins. C'est ainsi qu'un écrivain célèbre du IXe siècle, qui vécut et mourut en France, est indifféremment surnommé Scot ou Erigène, du nom latin de sa patrie, et que Jean Bodel, parlant de Gilemers l'Escot, l'un des vassaux de Charlemagne, ajoute : "Sire fu de Illande, une terre où mers clôt." On sait, au reste, que ce n'est qu'au XIème siècle que l'Écosse a commencé à être désignée par le nom qu'elle porte aujourd'hui. Écossais, Irlandais, tous trouvaient en France une bienveillante hospitalité. Saint Colomban passa à Meaux en 610, où il fonde un monastère. L'Irlandais saint Killen habita le monastère Saint-Faron, originellement Sainte-Croix, près de Meaux, appelé du nom de son fondateur saint Faron et destiné particulièrement à servir d'hospice aux Anglais et aux Irlandais, qui dès lors aimaient fort à voyager. Mais la dévotion avait plus de part que la curiosité à leurs voyages, qui n'étaient guère que des pèlerinages. Les Vies de saint Fiacre en font un disciple irlandais de Faron qui lui donne une terre, le " Breuil " à deux lieues de Meaux, pour y fonder un prieuré. La Vita prima attribue 24 miracles à saint Fiacre, 24 comme la division en 24 du calendrier (Jacques Dubois (O.S.B.), Livret du pélérinage de Saint-Fiacre, Francisque Michel, Les Ecossais en France, les Français en Écosse, Volume 1, 1862).

L'ermitage de Saint-Fiacre est devenu un bourg de la Brie, fameux par ses pèlerinages ; l'église ou chapelle est desservie par les-bénédictins, les femmes n'entrent point dans le sanctuaire ; et l'on remarque que la reine Anne d'Autriche, y venant en pèlerinage en 1641, se conforma à cet usage, et qu'elle fit même, à pied, le chemin depuis Monceau jusqu'à Saint-Fiacre. Dom du Plessis, qui donne un article curieux sur ce saint solitaire, observe que dans sa chapelle il y a une pierre, sur laquelle vont s'asseoir pieusement les pèlerins, pour guérir des hémorrhoïdes, ou, selon d'autres, du fic ou mal de Saint-Fiacre (Viscus, cancri yenus, carnosis partibus adhcerere solitus, primo quidem calti instar durescit ; postea caltus in pus conversus, proximas partes depascitur. C'est ainsi que Mabillon désigne cette maladie dans les annales de son ordre) (François-Xavier Feller, Franc?ois Marie Pérennès, Jean Baptiste Pérennès, Biographie universelle, Volume 5, 1834).

Relations commerciales avec la France

Le Bois d'Illande ou Bois d'Irlande était un bois de choix, particulièrement employé pour les lambris, les revêtements intérieurs et pour les gros meubles; il semble avoir été reconnu bon pour en faire des panneaux de peintures, et en même temps propre à la sculpture. On trouve aussi l'expression de bort d'Yllande, c'est la même chose. Charles V acheta de ce bois pour son château du Louvre en particulier dans la Librairie. La chambre du roi ou Chambre de bois d'Irlande du Palais de la Cité était décorée de lambris faits en ce même bois. Des chambres en furent lambrissées, le bois ayant été sculpté. Sous Charles VII, l'ameublement de l'Hôtel de Bourbon était réalisé en partie en bois d'Irlande. Il existait aussi du bois de Dannemarc, sans savoir si c'est le même.

Etudiants irlandais

Dès le principe, une division naturelle s'établit entre les jeunes gens que la réputation des écoles parisiennes y faisait affluer de tous les points de la chrétienté. L'analogie de langues, d'intérêts, de sympathies, les groupa tout d'abord par nations. Peu à peu ces réunions spontanées prirent une forme plus régulière, et pourvurent au gouvernement de leurs intérêts communs. Il y avait quatre Nations : celle de France, celle de Picardie, celle de Normandie et celle d'Angleterre ou d'Allemagne.

La nation d'Angleterre embrassait toutes les contrées du Nord et de l'Est étrangères à la France actuelle. Au quinzième siècle, ce nom étant devenu un objet d'exécration pour les Français au sein même de la capitale, soumise alors au joug britannique, on y substitua le nom d'Allemagne; et, depuis la rentrée de Charles VII à Paris, en 1436, cette nouvelle dénomination se substitua peu à peu et définitivement à l'ancienne dans les actes publics.

Ce changement avait été sollicité dès 1377, pendant le séjour à Paris de l'empereur Charles IV, hôte du pape Urbain V (le Pape rhabillé) à Avignon et à Rome sous son pontificat en 1365 et 1368. A la fin du règne de Charles VI, les écoliers anglais étaient déjà très-rares; la nation se composait presque exclusivement d'Allemands, d'Irlandais et d'Écossais. En 1426, elle était réduite à 3, puis, en 1434, à 2 suppôts : il fut alors question de supprimer son suffrage. Lorsque Charles VII rentra dans Paris, le procureur de la nation d'Allemagne se présenta au nom de son corps pour assister à l'entérinement des lettres obtenues par l'Université, portant confirmation de ses privilèges (Auguste Vallet de Viriville, Ferdinand Seré, Histoire de l'instruction publique en Europe et principalement en France, 1849).

Retour à Meaux

La prise de Meaux en 1422 par le roi Henri V d'Angleterre concerne les exilés irlandais. Meaux lui avait coûté la moitié de son armée, dévorée par l'hiver, la maladie et les assauts. Louis de Gast, bailli de Meaux, le bâtard de Vauru et plusieurs autres des chefs, avec les Écossais, Irlandais et Gallois faisant partie de la garnison, furent livrés sans réserve à la volonté du roi Henri. Les soudoyers d'Ecosse, d'Irlande et de Galles, furent aussi mis à mort (Henri Martin, Histoire de France depuis les temps les plus reculés jusqu'en 1789, Volume 6).

Les 25 arcanes majeures

En effet, si nombre des Triomphes du Tarot sont bien présents à ces dates et même antérieurement, rien n'atteste, de façon non-ambigüe, qu'il s'agissait d'un ensemble organisé de 22. Comme expliqué précédemment, le jeu demeurant du Visconti- Sforza ne constitue pas une évidence au sens historique du terme : Il ne contient pas les 22 en intégralité. Le fait que l'on suppose raisonnablement que certaines cartes aient disparu de ce jeu comme dans d'autres jeux appartenant à la même famille ou à des proches, ne constitue qu'une inférence rationnelle, non une preuve avec caractère d'évidence scientifique (www.officieldelavoyance.org).

On pourrait croire que Justice et Jugement soient redondants. Mais dans le contexte chrétien de ce tarot, le Psaume XCVII, Psaume prophétique du Messie et de son régne justifie cette distinction : " 1. L'Eternel règne; que la terre tressaille de joie, et que toutes les îles se réjouissent. 2. La nuée et l'obscurité sont autour de lui; la justice et le jugement sont la base de son trône. "

Selon la structure calendaire celte avec ses 4 fêtes Imbolc, Beltaine, Lugnasad et Samain, et si l'on met en correspondance tarot et calendrier, alors on en déduit l'existence d'au moins 24 lames majeures qui se déclinent en 6 séries de 4 cartes.

Le placement des cartes sur le calendrier commence avec les 4 Vertus cardinales qui sont associées traditionnellement avec les solstices et les équinoxes. Elles sont sans doute d'inspiration italienne.

Remis en honneur par les poètes et les artistes humanistes de la Pré-Renaissance, dès le XIVème siècle par Pétrarque, au XVème siècle par Mantegna, le thème du triomphe est une des caractéristiques de l'art italien : c'est sous la forme d'un cortège triomphal qu'il glorifie indifféremment l'Amour et la Mort, les Sacrements ou les Vertus.

Au revers des portraits du duc Frédéric d'Urbino et de sa femme Battsita Sforza (Uffiezi), qui sont de véritables médailles peintes, Piero delia Francesca n'a pas cru pouvoir mieux exalter le couple princier qu'en l'associant au triomphe des Vertus : le duc, accompagné des 4 Vertus cardinales, est assis sur un char que traînent deux chevaux blancs (Louis Réau, Iconographie de l'art chrétien, Volume 1, 1959).

La "Vertu" est l'apanage du Prince du XVème siècle et le portrait la représente sous de multiples formes. Le plus célèbre est sans doute celui peint par Piero Délia Francesca (1472) où le portrait de Batistta Sforza fait pendant à celui de Federico di Montefeltro. Pour ce dernier, la "Gloire" acquise comme Vicaire du Pape, défenseur des Etats de l'Eglise, se lit sur son visage fracassé. Au revers, les sept vertus partagées avec son épouse défunte figurent sur leur char triomphal : au Duc les quatre vertus cardinales (Force, Tempérance, Prudence, Justice) à la Duchesse, les vertus théologales (Foi, Espérance et Charité) (http://www.reims-florence.fr - Cours d'Italie).

Sachant que la Saint Patrick commémore aussi le printemps en Irlande et que la symbolique de la Force du Tombeau de François II à Nantes lui correspond, les autres Vertus se placent suivant leur association avec les saints dont la date est proche de celle du calendrier.

4 Vertus cardinales ou Fées : la Force (Gabriel/Patrick), Tempérance (Jean-Baptiste), la Justice (Michel), la Prudence (Jean l'Evangéliste)

La croix suivante est une interprétation selon les fêtes celtiques des 4 personnifications rationnalistes de la religion romaine que sont Fortune, Nécessité, Espérance et Foi (Fortuna, Nécessitas, Spes, Fides)

Fêtes celtes / destin : la Papesse (imbolc, la Foi), la Roue de la Fortune (beltaine, la Fortune), le Soleil (lugnasad, l'Espérance), le Monde (samain, la Nécessité)

Eros ou Amour profane : l'Impératrice, le Pendu, l'Amoureux, le Diable

Péché / absolution (dans le rapport Cuchulainn/Indra) : le Chariot, (la Joie), la Lune, la Mort

4 Feux de saint Fursy : le Bateleur (dissension), le Jugement (mensonge), l'Empereur (cruauté), la Maison Dieu (cupidité)

Itinérance / Pénitence : le Mat, l'Etoile, le Pape, l'Ermite

Dans le Tarot de Marseille, manquent la Prudence, la Charité et l'on verra aussi la Joie qui s'imbrique à partir de réminiscences védiques intimement liées à la saga de Cuchulainn.

La 25ème carte

La 25ème lame pourrait être la Charité qui a son arbre et qui apparaît dans l'œuvre de William Langdan Visio Willelmi de Petro Plowman (William's Vision of Piers Plowman).

Robert ou Wiliam Langland, moine de Malvern, né, dit-on, à Cleobury Mortimer, dans le Shropshire, fut élevé, suivant Buchanan, à Aberdeen, et vivait vers l'an 1360. Langland, auquel on a aussi donné le nom de Guillaume, passe pour avoir composé un poème célèbre intitulé la Vition de Pieri le laboureur {the Vision of Piers Ploughman). Toutefois il règne encore beaucoup d'incertitude sur le véritable auteur de ce livre singulier. Diverses allusions qu'on y rencontre montrent qu'il avait été écrit sur les frontières du pays de Galles et que son auteur résidait aux environs de MalvernHilles. Des allusions au traité de Brétigny, à la grande contagion de 1361 et 1362, en font porter la date à la fin de l'année 1362. La Vision de Piers Ploughman est un poëme allégorique qui appartient à la même classe d'ouvrages que le célèbre Roman de la Rose.

La Vision de Piers Ploughman paraît avoir été composée sur les frontières du pays de Galles, c'est-à-dire dans cette partie de l'Angleterre où le caractère celtique s'est conservé assez tranché, en dépit du mélange du sang anglo-saxon. L'indépendance et la hardiesse bretonnes respirent dans ce poême où n'est épargné aucun des vices et des défauts qui, au XIVème siècle, déshonoraient le clergé. Cette vision du laboureur anglais est une suite de songes où le héros passe en revue tous les désordres qu'il stigmatise. Il y a vingt songes différents qui forment comme autant de chants du poème. Piers Ploughman s'endort nu bord d'un ruisseau qui arrose le magnifique paysage des Malvern Hills. Il voit alors apparaître devant lui la multitude des peuplée de l'univers réunis dansune nouvelle vallée de Josaphat. D'uncôté s'élève sur la crête d'une montagne la tour delà Vérité; de l'autre, la prison du Souci, le lieu où habite l'Erreur. C'est vers la première que l'homme doit diriger son pèlerinage ; mais il est exposé à être enfermé dans la seconde. On devine tout de suite par là à quels personnages on a affaire dans le poëme. C'est lady Mede, c'est- à-dire dame Récompense; c'est Cycyle, autrement dit la Loi, fiancée à Fausseté; puis viennent Simonie, Flatterie, Raison, Conscience, Fortune, Espérance, etc.

Piers n'est pas le laboureur mystique, semant le bon grain ; c'est le vrai laboureur anglais, puisqu'il se charge de nourrir la nation. C'est un humble, et les imaginations populaires ont fait de lui le symbole de la simplicité et de la pureté. Piers Ploughman ne pouvait pas être et n'a jamais été revendiqué ni par sainte Église, ni par Noblesse, ni par les gens de loi (Biographie universelle (Michaud) ancienne et moderne, Volume 23, 1854, Ludovic Lalanne, Louis Vivien de Saint-Martin, L'Athenaeum français, 1856).

John Ball, un prêtre impliqué dans le Great Rising of 1381 (connu comme la révolte des paysans), mentionne souvent Piers dans ses écrits. Ball était un Lollard, partisans de la réforme de l'Eglise et disciple de Wycclif. La révolte narurellement de donnera rien. Il est vain d'être chrétien pour lutter contre les inégalités et l'injustice.

Cette lame " de trop " correspondrait à la lettre ignorée des oghams de Mac Ind Oic (Oengus ou Maoc Oc, fils du Dagda), au Ngetal : roseau ou genêt, en tant que charité humaine et non divine.

Il appartient à la charité chrétienne de marcher sur les traces du Sauveur, de se pénétrer de l'esprit de sa doctrine, d'étendre ses bienfaits à tous les genres d'infortune, de ne point briser le roseau cassé, de ne pas éteindre la mèche qui fume encore. (Isaïe, XLII, 3.) (Monseigneur Laurence, évêque de Tarbes, 1846) (Jacques-Paul Migne, Collection intégrale et universelle des orateurs sacrés du premier et du second ordre, Volume 84, 1836).

Selon François de Sales : " Et à ce roseau de l'Apocalypse que la charité change en or, et dont on mesure la Jérusalem céleste, parce que la gloire éternelle n'est distribuée aux Anges et aux hommes qu'à proportion de leur charité. "

Remontons plus haut au Moyen Âge : " Notre charité n'est qu'une charité de roseau, pour me servir de la comparaison de saint Bernard, Charitat arundinea, comment soutiendra-t'elle les vents et les orages ? Ce n'est qu'une faible étincelle." (E. B. Bourée, Panegiriques des principaux saints, Volume 1, 1702).

Si le " Tree of Charity " de Pierre le Laboureur porte des pommes (apples) notons que " The early Anglo-Saxons classified all fruits as apples or berries. Interestingly, in most early languages, all fruits including citrus were called apples." (Leatrice Eiseman, Colors for Your Every Mood, 2000).

En anglais le roseau vulgaire est connu comme bulrush, bullrush, ou reedmace. C'est la massette.

" Est-ce vrai que Madeleine "la belle pécheresse, qui se retire du monde et qui participe dans l'extase à la Divinité, était un exemple apparemment facile à suivre"? Le premier exemple d'imitation qui vient à l'esprit est celui de la fameuse Macette de Mathurin Régnier. Peut-on imaginer une pécheresse plus représentative que cette Madeleine qui "… n'eust avant que pleurer son délit Autre ciel pour objet que le ciel de son lict ? "

[La Massette ou tipha latifolia porte aussi le nom de Matraras, c'est-à-dire matelas car de son " fruit " on faisoit des matelas.]

Et peut-on souhaiter pénitente plus docile que l'ancienne pécheresse Macette imitant avec ses pleurs la sainte pécheresse, s'habillant sans art, lisant saint Bernard, la Guide des Pécheurs, les Méditations de la mère Thérèse, visitant les saints lieux, se confessant souvent ? Hélas, la fameuse Macette ne va pas jusqu'au bout de sa pénitence. Sa métamorphose, doublement baroque, n'est qu'un trompe-l'œil. Régnier n'est pas le seul auteur irrespectueux à parler de la Madeleine et à témoigner même avec son manque de respect de l'ascendant que ce personnage mythique a dû avoir sur les contemporains des poètes satiriques et libertins. Dans l'Histoire comique de Francion nous rencontrons une autre Madeleine virtuelle : Agathe […] Faire dire à Agathe que c'est "par charité chrétienne" qu'elle éteint "la concupiscence des hommes" signifie qu'on refuse d'admettre l'exemplarité de la vraie Madeleine. " (Wolfgang Leiner, Métamorphoses magdaléennes).

Cette référence-ci tirée de l'œuvre de Mathurin Régnier (XVIIème siècle) un peu tardive pour notre hypothèse, tient pour l'ancienneté de son modèle. La Macette ou Macée prostituée est un type folklorique que l'on rencontre au XVIème dans la Légende de Pierre Faifeu du prêtre angevin Charles Bourdigné (mentionné en 1531) et chez Villon :

" Mais qu'à la peticte Macé(e)

qui ot ma seinture,

L'amende en soit bien hault tauxée

C'est une mauvaise ordure "

Tarot de Mantegna - La Charité

En 1312, près de Montfort, Amauri de Leva se fit disciple de Fra Dolcino. Selon ce qu'en disent ses détracteurs : " Doucin disoit que l'ancienne Loi avoit été le régne du Pere; que le fils avoit regné depuis son incarnation jusqu'à sa mort, que le saint Esprit regnoit depuis fa descente fur les apôtres, & regneroit jusqu'à la fin du monde ; que la premiere Loi étoit une loi de justice; la seconde une loi de sagesse ; la troisième une loi d'amour ; que tout ce qui étoit accordé par charité, la prostitution même , n'étoit point un péché; & ce qui paroîtroit incroyable , s'il n'étoit attesté par une foule d'écrivains véridiques, qu'une semme ne poúvoit fans péché refuser un homme, qui, sous le beau nom de charité, sollicitent à son déshonneur. On fut obligé de publier une croisade contre ces infâmes sectaires, qui, réduits à s'enfuir des villes, vivoient fur les montagnes & dans les forêts comme des bêtes. Doucin fut pris avec Marguerite de Trente fa concubine, qui paffoit pour sorcière : tous deux furent déclarés hérétiques, livré à la cour séculière, démembrés, coupés en piéces, & brûlés : ce qui n'éteignit point la secte. " (Paul Francois Velly (Abbé), Histoire de France depuis l'établissement de la monarchie jusqu'au regne de Louis XIV, 1769).

Diffusion du tarot par la mode des romans arthuriens

Les romans de la Table ronde sont copiés et enluminés dans les mêmes circuits que les autres manuscrits destinés au public laïque : il y avait sans doute des copistes et des peintres auprès des comtes de Champagne ou des Plantagenêt, à la fin du XIIe siècle. Des centres de production se développent, principalement dans le Nord de la France et à Paris, ainsi qu'en Italie. Des artistes, sans doute itinérants, y réalisent des manuscrits : chansons de geste, romans antiques, textes arthuriens, livres d'heures à destination d'un public majoritairement aristocratique.

À la fin du Moyen Âge, deux types de production de manuscrits arthuriens cohabitent : d'une part, des copies richement enluminées, commandées par de grands mécènes comme le duc de Berry, les ducs de Bourgogne et Jacques d'Armagnac, ou en Italie les Gonzague de Mantoue et les Visconti-Sforza de Milan ; d'autre part, une production plus courante, que des libraires vendent à une clientèle variée de nobles et de bourgeois. La Tavola ritonda présente, sous forme de cycle, le roman d'Arthur.

Les modes de vie restent longtemps emprunts de la culture "féodale". L'humanisme cohabite encore avec les romans de la Table Ronde et Platon a du mal à détrôner le Roi Arthur. Comme le rappelle Michel Pastoureau, les seigneurs de Milan, de Rimini ou Ferrare, se prénomment Galeazzo (Galehaut), Isotta (Yseult), Léonello (Lionel). Les premières fresques de Pisanello à Mantoue ont pour thème le cycle arthurien (www.reims-florence.fr - Cours d'Italie).

81 cartes

Avec les 56 lames mineures nous aurions 81 cartes (9x9) formant un carré magique de la Lune avec les 25 cartes centrales et la Charité au milieu. Comme un labyrinthe sculpté sur une croix celtique (nous en avons 6) : les entrelacs sur les nombreuses croix que conserve l'Angleterre, jusqu'aux miniatures de Kells. La Charité s'oppose au " Minotaure vorace, vivant rappel d'amours ignomineuses " (Pétrarque, Liber sine nomine).

Comme le buisson inextricable et ardent de la Charité. " Sara signifie en effet un charbon. Cela convient parfaitement à Marie, qui a été ardente, comme un charbon du feu de la charité […] Le buisson ardent signifie le Fils de Dieu, qui nous a apparu par l'Incarnation dans le feu de la charité, et qui a répandu tant de bénédictions sur la tête des fidèles. O Marie, charbon vraiment bénit, qui avez donné une flamme si bénite, en mettant au monde un Fils si béni. " (Conrad de Saxe ou saint Bonaventure, Miroir de la Sainte Vierge).

C'est d'ailleurs au cœur du labyrinthe que se cache le sens profond de la révélation. Le cœur flambant est traditionnellement symbole de vertu, et en particulier de charité. Si Israël est enraciné dans l'espérance, et la Chrétienté vouée à la charité, l'Islam est centré sur la foi. (Léon Constantin, Psychologie de la négociation: économie privée, 1971).

56 lames mineures

On pourra voir que les 4 couleurs des lames mineures sont en fait la représentation d'une " quadrifonctionnalité " plus réelle que la trifonctionnalité théorique étudiée par Georges Dumézil. La coupe, l'épée et le bâton (sans doute initialement la branche porteuse de fruits) correspondent au sacré (druides, religieux), à la force (guerriers, nobles) et à la fécondité (les producteurs, le " bas-peuple "). Le denier va avec la fonction de marchand, de financiers - qui n'est pas née avec le capitalisme financier de 2008. Une référence géographiquement lointaine mais culturellement proche et non musulmane indiquant ce passage de trois à quatre fonctions se trouve dans le Shahnameh du perse Firdousi (Les lames mineures).

Dans la culture indo-européenne pour le moins, les classes sociales portaient en effet chacune une couleur.

Limites de l'hypothèse

Jeux

Ont été utilisés, pour interpréter le sens des lames, deux jeux de tarots anciens : celui de Jean Noblet et celui de Dodal.

Le tarot gravé par Jean Noblet, maitre-cartier parisien attesté, est le plus ancien tarot au motif dit de Marseille actuellement conservé (1650). L'original est à la réserve du cabinet des estampes de la Bibliothèque nationale de France qui le reçut en dation en 1972.

"Il est nécessaire de toujours distinguer les graveurs des "cartiers" proprement dits car ils ne sont la plus part du temps que des éditeurs et des marchands d'images : des vendeurs de papier. Depuis 1701, il était interdit aux éditeurs de graver eux-mêmes leurs moules pour des raisons de contrôle fiscal. Pour mettre à plat l'imposition et repartir sur des bases que l'administration trouvait saines, les anciens moules furent détruits par la maréchaussée sur l'ensemble de la France. C'est pour cette raison qu'il a fallu refaire les moules et que l'on peut dater avec une quasi-certitude ce tarot de 1701. Jacques Mermé, graveur du tarot de Jean Dodal, a un coup de main délié que copiera son confrère tardif du Conver, mais peut-être pas la virile maîtrise du Noblet. " (letarot.com - Jean Dodal).

Dodal pourrait être un nom britannique. En 1369, le Prince Noir nomme Chandos sénéchal du Poitou. La guerre est alors en train de reprendre contre la France. Le 31 décembre lors d'une escarmouche au pont de Lussac-les-Châteaux, Jean Chandos défend Simekins (Simkin) Dodale (Dugdale), son écuyer, alors qu'il est attaqué par un Breton. Chandos est blessé mortellement. On le transporte à Morthemer où il meurt le 1er janvier 1370 (Chroniques de Froissart, Volume 5).

William Dugdale, historien et antiquaire anglais, né en 1605 dans le comté de Warwick, mort en 1686, est roi d'armes de l'ordre de la Jarretière.

Oghams

L'alphabet oghamique employé est celui nommé de Mac Ind Oic (L'Oengus de la mythologie) qui ne reconnaît pas le Ngetal. Dans la disposition des cartes en 6 croix sur le calendrier, la lettre Ngetal était en trop : en l'incluant, la Mort était décalée d'un cran avec l'if. Sans cette lettre, l'ordre s'ajuste assez correctement avec les cartes. Reste la dernière lettre de l'alphabet l'emancoll, le double noisetier, elle n'est pas mentionnée dans le Mac Ind Oic. Mais la vertu du noisetier et de ses noisettes magiques dans la mythologie irlandaise correspond bien avec la Sagesse qu'elles procurent quand on les mange, synonyme de Prudence.

Saints

Si la Sainte Brigitte tombe le 1er février, le 31 janvier est sa vigile, mais surtout un doublet de la sainte, Brig, est fêté ce 31.

Brendan est fêté normalement le 16 mai, mais au Pays de Galles, on trouve en certains lieux la commémoration au 17, de même qu'en Allemagne.

Fiacre, du 30 août, était célébré aussi le 31 août et le 1er septembre.

Le Mat

Le Mat non numéroté dans le tarot de Marseille est pleinement réintégré au jeu et c'est la Charité, figure ambiguë, qui est hors-jeu, centrale.