Partie X - 22 v’la l’Tarot   Chapitre I - Passe-moi le celte   Vertus/fées : Force, Tempérance, Justice, (Prudence)   

Le Tombeau de François II à Nantes, commandé par Anne de Bretagne pour honorer la mémoire de ses parents, est considéré comme un chef-d'œuvre de la sculpture française.

Le monument est constitué d'un sarcophage massif, rectangulaire, de 3,90 par 2,33 m et de 1,27 de haut. Dessus sont allongés les deux gisants aux mains jointes en prière. Leurs têtes reposent sur d'épais coussins ou " carreaux " maintenus par trois anges, et à leurs pieds se tiennent le lévrier, symbole de fidélité, et le lion qui représente la force. Aux quatre coins du tombeau se dressent quatre statues en pied, représentant chacune une des Vertus majeures : on y reconnaît la Justice, la Force Morale, la Tempérance et la Prudence. Le tour du tombeau présente d'autres sculptures délicates, dans de petites niches de marbre rose, représentant tour à tour les douze apôtres, les saints patrons des deux gisants (saint François d'Assise et sainte Marguerite), ainsi que Charlemagne et Saint Louis (fr.wikipedia.org - Tombeau de François II de Bretagne).

Les Fées

Selon Brunet, l'unique édition in folio porte un privilège de 1522 " Ysaie le Triste, filz Tristan de Léonois, jadis chevalier de la Table Ronde, et de la princesse Yseult. Paris, Caillot du Pré II cite en outre deux autres éditions en caractères gothiques.

Dans les poètes antérieurs à l'invention de l'imprimerie nous n'avons rencontré ni citation ni allusion qui ait trait à Ysaie le Triste, circonstance qui indiquerait, a défaut d'autres preuves, que le roman émane d'un siècle postérieur aux autres productions du cycle; et de fait il n'offre qu'une artificielle reproduction de ces types primitifs.

La trame principale, historique, de l'action est représentée par la guerre de défense victorieuse des Chrétiens contre les Musulmans, les Sarrasins venus de régions et de villes d'Espagne mais aussi des pays païens du Moyen Orient. Si le roman a été composé au début du XVe siècle, comme le pense son éditeur, on ne se tromperait guère en l'interprétant dans le contexte externe qui est celui de l'expansion des Turcs, de la Reconquête espagnole et de la Guerre de Cent Ans (le ms de base, copie portant l'année 1449, a d'ailleurs fait partie de la bibliothèque des ducs de Bourgogne). Quoi qu'il en soit, l'esprit de croisade ainsi que les batailles entre Chrétiens imprègnent le roman. Un élément historiquement intéressant à analyser aussi est celui de la part importante donnée aux descriptions des armoiries des chevaliers.

Naguères symboles de la puissance occulte ou d'êtres élémentaires, voici qu'elles personnifient les vertus allégoriques. Ainsi les quatre fées qui font chacune un don à Ysaie , peu d'instants après sa naissance, représentent les quatre vertus cardinales (I). La tempérance, Orphée, " La fée vigoureuse donne la santé (II). " La valeur, " La fée courageuse donne la valeur (III). " La justice, " La fée sincère donne le sentiment de l'honneur et la générosité. " (IV). La sagesse , " La fée rare donne le jugement , l'art d'apprécier les choses à leur valeur. " Certes il n'est pas sans importance, de surprendre la philosophie de l'époque formulant à sa manière les vertus angéliques, et cette pensée que la sagesse est le don de la fée rare a bien son mérite.

Ysaye et Marcq sont là pour secourir tous ceux qui sont victimes des mauvaises "coutumes" et réinstaurer la justice (Mémoires de la Société des Antiquaires de La Morinie,1845, Jonna Kjær , Ysaye le Triste - Texte présenté et annoté par André Giacchetti).

Traditionnellement, ces vertus cardinales correspondent à l'archange Gabriel (fêté le 23 mars, équinoxe de printemps), saint Jean Baptiste (24 juin solstice d'été), l'archange Michel (29 septembre, équinoxe d'automne) et saint Jean l'Evangéliste (27 décembre, solstice d'hiver). Les deux saints Jean sont les portes de l'année (Jean Hani, Le symbolisme du temple chrétien, Volume 6 de La Colombe, 1962).

La Force - 17 mars

La majeure partie des traits qui constituent la personnalité légendaire de saint Patrick a été empruntée aux traditions mythologiques et épiques de l'Irlande. Elle servait la cause d'édification, que les hagiographes s'étaient imposée. Dans un pays comme l'Irlande, encore à demi païen d'esprit, sinon de nom, très attaché à ses traditions, on ne pouvait frapper autrement les imaginations. Pour imposer l'enseignement qui se dégage de la légende de saint Patrick à un peuple encore tout à la mémoire de ses héros antiques, il n'était point de meilleur moyen que de faire de Patrick un héros, plus grand et plus puissant que les autres (" the most powerful saint in all Ireland "). Il est deux héros qui tiennent dans la tradition irlandaise une place comparable à celle de saint Patrick. Ce sont Cuchulainn et Finn mac Cumail (Stefan Czarnowski, Le culte des héros et ses conditions sociales : Saint Patrick, héros national de l'Irlande).

Saint Patrick effectue une navigation, dans la mer Tyrrhénienne, comme Cuchulainn dans le Tain Bo Cuailgne où le héros combat un certain Gorman qui n'est autre que saint Germain l'Auxerrois, maître de saint Patrick et de saint Germain l'Ecossais, ce qui est signe de l'interpénétration des deux légendes.

Saint Patrick chassa les serpents venimeux d'Irlande du haut de Croagh Patrick près de Westport (County Mayo). L'Irlande est le pays des Tours rondes (Round Towers). La plupart des monastères irlandais en possède une. Si l'on considère que les Irlandais ont été en contact avec les Amérindiens à une époque indéterminée, les " round towers " des Indiens Hopis qui les appellent " snake's houses " (maisons des serpents) semblent le confirmer.

La Force extirpant un dragon de la tour ronde du Tombeau de François II, symbolise bien le miracle de saint Patrick.

Un peu de 9

Le purgatoire de saint Patrice devint le cadre d'une autre série de fables embrassant toutes les idées celtiques sur l'autre vie et ses états divers. L'instinct le plus profond peut-être des peuples celtiques, c'est le désir de pénétrer l'inconnu. En face de la mer, ils veulent savoir ce qu'il y a au-delà; ils rêvent la terre de promission. En face de l'inconnu de la tombe, ils rêvent ce grand voyage qui, sous la plume de Dante, est arrivé à une popularité si universelle. La légende raconte que, saint Patrice prêchant aux Irlandais le paradis et l'enfer, ceux-ci lui avouèrent qu'ils se tiendraient plus assurés de la réalité de ces lieux, s'il voulait permettre qu'un des leurs y descendît, et vînt ensuite leur en donner des nouvelles. Patrice y consentit. On creusa une fosse par laquelle un Irlandais entreprit le voyage souterrain. D'autres voulurent après lui tenter l'aventure. On descendait dans le trou avec la permission de l'abbé du monastère voisin, on traversait les tourmens de l'enfer et du purgatoire, puis chacun racontait ce qu'il avait vu. Quelques-uns n'en sortaient pas; ceux qui en sortaient ne riaient plus et ne pouvaient désormais prendre part à aucune gaieté. Le chevalier Owenn y descendit en 1153, et fit une relation de son voyage qui eut un succès prodigieux. D'autres disaient que quand saint Patrice chassa les gobelins (esprits follets) de l'Irlande, il fut fort tourmenté en cet endroit, durant quarante jours, par des légions d'oiseaux noirs. Les Irlandais y allaient et éprouvaient les mêmes assauts, qui leur valaient pour le purgatoire. Suivant le récit de Girault de Cambrie, l'île qui servait de théâtre à cette superstition bizarre était divisée en deux parties; l'une appartenait aux moines, l'autre était occupée par des racodêmons qui y faisaient la procession à leur manière avec un vacarme infernal. Quelques personnes, pour l'expiation de leurs péchés, s'exposaient volontairement dès cette vie à la fureur de ces êtres médians. Il y avait neuf fosses où l'on se couchait la nuit, et où l'on était tourmenté de mille manières. Il fallait pour y descendre la permission de l'évêque. Celui-ci devait détourner le pénitent de tenter l'aventure et lui exposer combien de gens y étaient entrés qui n'en étaient jamais sortis. S'il persistait, on le conduisait au trou en cérémonie. On le descendait au moyen d'une corde, avec un pain et une écuelle d'eau, pour le réconforter dans le combat qu'il allait livrer au démon. Le lendemain matin, le sacriste tendait de nouveau une corde au patient. S'il remontait, on le reconduisait à l'église avec la croix et en chantant des psaumes. Si on ne le retrouvait pas, le sacriste fermait la porte et s'en allait. Dans des temps plus modernes, la visite aux îles sacrées durait neuf jours. On y passait sur une barque creusée dans un tronc d'arbre, on buvait de l'eau du lac une fois par jour; on faisait des processions et des stations dans les lits ou cellules des saints. Le neuvième jour, les pénitens entraient dans le puits. On les prêchait, on les avertissait du danger qu'ils allaient courir, et on leur racontait de terribles exemples. Ils pardonnaient à leurs ennemis et se faisaient leurs derniers adieux les uns aux autres, comme s'ils étaient à l'agonie. Le puits, selon les récits contemporains, était un four bas et étroit où l'on entrait neuf par neuf, et où les pénitens passaient un jour et une nuit entassés et serrés les uns contre les autres. La croyance populaire creusa au-dessous un gouffre pour engloutir les indignes et ceux qui ne croyaient pas. Au sortir du puits, on allait se baigner dans le lac, et ainsi l'on avait accompli son purgatoire. Il résulte du rapport de témoins oculaires qu'aujourd'hui encore les choses se passent à peu près de la même façon. L'immense réputation du purgatoire de saint Patrice remplit tout le moyen âge. Les prédicateurs en appelaient à la notoriété publique de ce grand fait contre ceux qui doutaient du purgatoire. En l'an 1358, Edouard III donne à un noble hongrois, venu tout exprès de Hongrie pour visiter le puits mystérieux, des lettres patentes attestant qu'il avait fait son purgatoire (Ernest Renan, La Poésie des races celtiques, La revue des deux mondes, 1854).

L'épisode du trou ou du puits de saint Patrice reste, encore au XVIème siècle, le plus riche de suggestions mythiques autour du célèbre saint irlandais. Au départ de cette tradition se trouve un lieu géographique parfaitement réel : le trou de l'île de Derg. Il ne s'agit pas d'un gouffre imaginaire mais d'un important lieu de pèlerinage irlandais qui attira les foules pendant des siècles. Le site présentait une construction voûtée, probablement d'origine préhistorique, qui avait été organisée en chambre de visions à une époque qu'il est impossible de déterminé. On a supposé, en se fondant sur un texte de Strabon, que des mystères analogues à ceux de l'antre de Trophonius auraient été transportés et pratiqués en en Irlande dès le début de l'ère chrétienne. Rien n'est bien certain. Toutefois, on peut dire que les moines qui bâtirent un monastère dans l'île de Régis, durant le règne de Henri II (1154-1189), organisèrent une sorte de pèlerinage et de descente au "trou de saint Patrice". Une fois descendus dans le gouffre, les pèlerins "voyaient" les âmes des morts subissant la purgation de leurs fautes terrestres. Confrontés à cette vision des supplices de l'au-delà, ils pouvaient retirer de cette épreuve une indulgence particulière qui leur vaudrait après leur mort l'économie de nombreuses années de Purgatoire. Jacques Le Goff a retracé l'histoire médiévale de l'imaginaire du Purgatoire et souligne l'importance du site voué à saint Patrice. Au douzième siècle, Marie de France écrit L'Espurgatoire saint Patrice qui constitue le plus ancien témoignage en français sur l'imaginaire du Purgatoire. Au début du seizième siècle paraît un fascicule intitulé Le Voyage du Puys Sainct Patrix qui reprend cette tradition médiévale.

Le Purgatoire de saint Patrice n'est pas inconnu de Rabelais qui le mentionne dans le Gargantua (ch. 2) sous la désignation de "trou de sainct Patrice".

En fait, Pantagruel comme saint Patrice et comme tant de grands héros de la mythologie est à la recherche de l'au-delà, de l'autre monde qui prend, dans l'univers chrétien, le nom de Purgatoire. On peut alors supposer que le 17 mars, jour de saint Patrice, serait une date symbolique qui fonderait la quête pantagruélique sous son double aspect de quête intellectuelle et d'aventure romanesque vers l'au-delà puisque les romans rabelaisiens reprennent tous sans exception le schéma romanesque de la quête. Le 17 mars, Pantagruel est incité par son père à entreprendre la traversée initiatique du savoir. Et l'abîme de science de la célèbre devise ne pourrait-il pas suggérer quelque peu le "puits métaphysique" du Purgatoire, autre monde de la connaissance, c'est-à-dire un lieu éminemment "utopique" et atopique puisque la lettre, précisément, est envoyée d'Utopie ? (Philippe Walter, Ce dixseptiesme jour du moys de mars, Études rabelaisiennes, Volume 39, 2000).

La belle Una de la Reine des fées de Spenser, vierge sainte égarée au milieu des bois et suivie du lion dompté par sa beauté , personnifie la faiblesse, la grâce, la pureté, exposées sans défense aux orages du sort, et triomphant par la seule force morale.

Una et Lion par Briton Rivière (1840-1920)

Ogham : l'aubépine

Dans le village de Saint-Patrice, sur la Loire, on conserve le souvenir du saint irlandais dans un buisson d'aubépine qui fleurit miraculeusement l'hiver depuis que saint Patrick s'y logea, en chemin vers Marmoutier.

Joseph d'Arimathie aurait fondé la première communauté chrétienne et introduit l'aubépine de Glastonbury. L'Épine de Glastonbury se trouve derrière la chapelle de St Patrick. D'après la légende, cet arbre a poussé à partir de la canne de Joseph d'Arimathie, oncle de Jésus-Christ et fondateur ici du sanctuaire chrétien en 68 après Jésus-Christ. On raconte qu'il avait apporté avec lui d'anciennes reliques.

Le monastère de Glastonbury, vraisemblablement fondé par des missionnaires continentaux, passait pour avoir été le lieu de rencontre des grands saints de la chrétienté celtique. La Charte de saint Patrick, fausse charte datée de 430 attribuée au saint et forgée à Glastonbury entre 1184 et 1247, faisait de lui le premier abbé du monastère.

L'attribution à saint Patrick du premier Graal n'est fortuite ni en lieu, ni en temps. En lieu : la tradition voulait que le saint ait terminé ses jours à Glastonbury, ou du moins que son corps y ait été translaté, en 901, à en croire la Vie anonyme de saint Dunstan du Xème siècle.

Une aubépine sacrée est perchée sur le rocher de Saint-Patrick (St. Patrick's Stone) sur une île de la rivière Shannon.

"Huathe", en irlandais, (hawthorn) prend ses feuilles à partir de mars et fait partie des trois arbes des fées tant en Irlande qu'en Grande-Bretagne : "Oak, Ash and Thorn" (chêne, frêne et aubépine).

La Tempérance - 17 juin

Le motif de l'horloge dans les mains de la Tempérance de Nantes est assez répandu.

Charles Bazin correspondant du Comité historique des arts et monuments donne une description du tombeau de François de Lannoy et de Marie de Hangest, sa femme dans l'église de Folleville : au cadran de l'horloge que tient la Tempérance sculptée sur le tombeau de François de Lannoy, il signale la division par douze heures; tandis qu'à la même époque un cadran semblable porte vingt-quatre heures au tombeau des d'Amboise, à Rouen […] Il a trouvé la signature italienne et latine des deux artistes, un oncle et un neveu, qui ont exécuté les tombeaux de Folleville ; il a nommé les statuettes et les feuillages qui animent ou décorent ces tombeaux. Le houblon, le lierre, la vigne, les pois en fleurs ou en gousses qui tapissent ces monuments funéraires, il les explique par une symbolique que nous admettons très-volontiers. Dans la décoration et la statuaire de ces monuments, il fait, avec une pénétration remarquable, la part des artistes italiens qui ont sculpté le marbre, et celle des artistes français qui ont travaillé la pierre. L'église de Folleville, avec les monuments qui l'occupent encore, est une sorte d'église de Brou en petit; les deux édifices datent à peu près de la même époque, des premières années du XVIème siècle, et elles offrent de frappantes analogies (Adolphe N. Didron, Edouard Didron, Annales archéologiques, Volume 10, 1850).

C'est aussi la tempérance qui a esté la regie de S. Jean Baptiste dans toute la conduite de la vie. C'est par elle que nostre divin Sauveur a commencé à se manifester au monde (Basile le Grand, Les ascétiques, ou traités spirituels).

Le saint du jour

Faelan était un paysan à Luachair, aujourd'hui Slieve Lougher, près de Castle Island dans le Kerry. S'étant enrichi, il retourna dans son pays natal, Hy Degha, sur la rivière Barrow. Sa femme, Eamnat de Ciarraighe (Kerry), avait une sœur très belle dont Faelan tomba amoureux. Vers 614, elle se retrouva enceinte et quitta la maison de sa soeur, pour regagnant son lieu de naissance. Sur le plateau de Lougher battu par les vents, elle se trouva dans une tempête de neige et accoucha subitement. Elle fut tentée d'étrangler son bébé, mais une colombe envoyée du paradis battit des ailes sur son visage et la dissuada de commettre l'irréparable. Saint Brendan de Clonfert recueillit ma mere et l'enfant qu'il baptisa Taircell (réunion : en souvenir de la colombe qui réunit la mère et son fils).

Un jour, alors qu'il retournait visiter Lougher, il fut arête par une bande de voleur à l'aspect de spectres. Taircell s'échappa en faisant trois formidables sauts par lesquels il passa par dessus le Lougher, atterrissant dans l'enclos de l'église. Son tuteur lui donna alors le nom de Moling (Mullin) de Lougher (Moling Luachra) (brigid-undertheoak.blogspot.com - Moling Luachra).

" Mullin- bridle " est une sorte de bride avec des oeillères pour les chevaux, " Molan ", un mors. Henry L. Savage explique molaynes, dans Sir Gawain and the Green Knight (anonyme du XIVème siècle), comme un pluriel de molan, "mors". C'est une bride avec un mors que la Tempérance du Tombeau de François II tient de sa main droite.

Ogham : Lierre

Le Lierre, associé à la Tempérance, semble d'inspiration italienne comme on le voit dans le palais ducal d'Urbino. Au revers des portraits du duc Frédéric d'Urbino et de sa femme Battista Sforza (Uffiezi), qui sont de véritables médailles peintes, Piero della Francesca n'a pas cru pouvoir mieux exalter le couple princier qu'en l'associant au triomphe des Vertus : le duc, accompagné des 4 Vertus cardinales, est assis sur un char que traînent deux chevaux blancs. La Tempérance, couronnée de lierre, verse de l'eau dans son vin. Ce thème est repris un peu plus tard, en 1362, par Bonino da Campiglione dans la châsse de saint Augustin à San Pietro in Ciel d'Oro de Pavie (Louis Réau, Iconographie de l'art chrétien, Volume 1, 1959).

La Justice - 16 septembre

On trouve dans les annales des Quatre Maîtres que " Arthga, " fils de Cathal, roi de Connaught, prit le bâton de pèlerin " et partit pour Hiona dia ailithre. " c'est-à-dire en Pèlerinage ; (ce mot ailithre est composé de all, un roc ou pierre droite, et de itriallam, aller autour) et il n'existe pas, aujourd'hui même en irlandais, pour exprimer les pèlerinages des chrétiens à Iona, à Jérusalem ou à Home, d'autre mot que celui d'ailithre, dont se servaient les Irlandais païens pour désigner un pèlerinage à la pierre sacrée du Carne ou du Tobar, le dieu emblématique des druides. Smith a donné une description minutieuse du culte des Scellys, sur la côte de Kerry, dans cette partie de l'Irlande qui fut envahie d'abord par les Espagnols. Un immense concours de peuple, composé en partie de personnes infirmes, visite tous les ans, le 29 septembre, la fontaine de Saint-Michel, près Ballynascellig, sur la côte de Kerry, dans l'espoir d'être guéri par cette eau miraculeuse. Ainsi la fête de Saint-Michel coïncide avec l'équinoxe de l'automne (Daniel O'Sullivan, Irlande: Poesies des bardes, legendes, ballades, chants populaires, 1850).

L'établissement définitif du culte de saint Michel en Irlande est lié au développement du mouvement des Céli Dé entre 730 et 750. Longtemps décrit comme un ordre monastique, ce mouvement est en fait lié au renouveau de l' ascétisme dans certains monastères 19. Issus du mouvement ascétique du VIe siècle, les monastères irlandais s'étaient enrichis au cours du VIIe siècle et, au VIIIe siècle, nombre d'abbés se comportaient comme des seigneurs séculiers, faisant bonne chère et assurant le futur de dynasties familiales. Le terme Céli Dé, qui signifie littéralement " client de Dieu " utilise la terminologie juridique séculière, où le terme céle fait référence à un rapport de clientèle de type vassalique. Le Céli Dé se proclame vassal direct de Dieu, possédant un statut supérieur aux autres moines qui ne sont que vassaux de l'abbé, mais aussi soumis à des obligations plus exigeantes en matière de jeûnes, prières et mortifications. Ce mouvement s'est exprimé de différentes façons selon les personnes et les lieux, soit sous forme d'un groupe d'ascètes résidant à l'extérieur de l'enceinte du monastère (comme à Roscrea), soit sous forme de groupe résidant au sein du monastère, soit sous forme de groupe résidant au sein du monastère (comme à Armagh), soit sous forme de nouveaux monastères indépendants comme à Terryglass. L'un de ces nouveaux monastères est celui de Tallaght, dans la vallée de la Dodder, à l'ouest de Dublin, fondé par Maelruain à la fin des années 760. Maelruain (†792) vouait un culte particulier à l'archange Michel. Il est l'auteur d'une hymne abécédaire complet en son honneur, intitulée Archangelum mirum magnum. Cette hymne reprend la forme et les éléments de celle de Colmán mac Murchon, auteur de la première hymne irlandaise en l'honneur de saint Michel (avant 736 date de sa mort), et fils de Muirchu, qui écrivit la Vita Patricii vers 690.

Les reliques de Michel, sous forme d'épître et de motte envoyées du ciel, s'inscrivent dans le contexte de l'idéologie des Céli Dé, qui se veulent les qui se veulent les vassaux de Dieu et refusent le principe de l'allégeance au prince séculier ou ecclésiastique qui a dû faire don de cette terre. Ainsi les moines de Tallaght chantaient Sancte Michael ora pro nobis plus de 27000 fois dans l'année par rapport à 75 fois seulement pour saint Patrick ou sainte Brigitte.

Désormais inscrit sur la liste du Patrimoine mondial depuis 1996, le Roc de Saint-Michel (Skellig Michael en anglais, Sceilig Mhichil en gaélique) est un îlot de 218 m de haut, situé à une douzaine de kilomètres de la côte irlandaise, à l'extrême ouest de l'Europe. C'est en ce lieu difficile d'accès qu'une communauté d'ascètes installa à la fin du VIe ou au début du VIIe siècle un petit monastère sur une étroite platebande située à 182 m d'altitude, puis un ermitage sur une plateforme du pic sud à 200 m d'altitude. Dans les maigres entrées annalistiques des IXe et Xe siècles, le lieu saint est tout simplement appelé " Le Roc ". Ce n'est qu'au XIe siècle qu'apparaît, sous l'année 1044, la première référence écrite au Roc sous le nom de Roc de Michel (Sceilec Mhichil). Mais la présence de saint Michel semble y remonter au IXème siècle. Loin d'avoir été un monastère inconnu, isolé au bout du monde, le Roc semble avoir été un lieu insigne au sein du mouvement des Céli Dé. À quelques kilomètres au sud de Skellig Michael se trouve un autre roc marin appelé Tech nDuind " La demeure de Donn ". Donn était le Dieu des Enfers dans la mythologie irlandaise. Situées à l'extrémité du monde connu, ces îles se trouvent à la se trouvent à la frontière de l'Autre-Monde. Quand saint Brendan part de la même région pour sa longue navigation les îles qu'il découvre sont celles de l'Au-delà. Ce lieu privilégié a probablement abrité une communauté de Céli Dé, ou a du moins fait partie d'un groupe de monastères liés par une union de prière et par une vénération spéciale à saint Michel.

Le saint du jour

La Tradition tient Ninian pour un Breton qui étudia à Rome, qu'il établit son siège Episcopal à Candida Casa à Whithorn, qu'il voua à saint Martin of Tours, et qu'il convertit les Pictes. La Vita Sancti Niniani ou Vita Niniani a été écrite par Ailred of Rievaulx à la requête de l'évêque de Galloway. Une variante da sa légende le fait quitter l'Ecosse pour l'Irlande et y mourir. Ussher dit que Ninian s'installa à Cluayn- coner ; que sa mère était une princesse ; qu'une cloche descendit du paradis pour rassembler ses disciples. Il ajoute qu'un forgeron et son fils appelés respectivement "Terna" et "Wyn", furent les témoins d'un miracle de Ninian qui appela le lieu où il s'était installé "Wytterna".

Le nom de Ninian serait un Uinniau, Uinniauus ou Vennianus forme mentionnée par saint Colomban Uinniau est une forme hypocoristique de Uindobarros, correspodant en ancien irlandais à Finniau et Finnian (en.wikipedia.org - Vita Sancti Niniani, en.wikipedia.org - Saint Ninian).

Il n'est pas improbable que saint Ninian de Candida Casa ait pu être le même que saint Monean ou Maioneann de Cluain Conaire en Irlande dont la fête tombe le même jour. Les Irlandais l'appellent Ringan.

La Fée

A la suite de Gaston Paris, Michel Rousse privilégie l'antériorité de la forme Niniane et la rapproche du nom de saint Ninian, évangélisateur de l'Écosse, dont le nom a été attribué à un affluent de l'Yvel, rivière du Morbihan, près de la forêt de Lanouée.

Un texte tiré d'Ingomar relate la guérison d'un lépreux sur un gué de la rivière Ninian attestée bien avant que des textes littéraires relatifs à Merlin mentionnent une Niniane/Viviane : "Une fois advint que le roi Judicael après my nuict...". Saint Judicaël, Roi et Confesseur est fêté le le 16 décembre à Quimper.

Et comme Niniane peut être considéré comme le féminin de Ninian, on en vient à confirmer la signification de son nom : la Dame du Lac est vraiment " Céleste ", d'autant qu'il serait possible de retrouver dans la forme Nimue le vieux terme celtique nem qui signifie " ciel ". On peut reconnaître aussi une racine indo-européenne à Ninian, Nigw qui veut dire laver, terme en rapport avec la justice.

La Dame du Lac est l'esprit tutélaire qui protège, élève, rend la justice, et assiste les braves dans leurs derniers moments. Elle est la contrepartie du guerrier, le miroir dans lequel il se voit, et elle ne manque pas de prendre souvent en défaut ses idéaux chevaleresques. En corrigeant ses actions souvent insensées, elle amoindrit la domination du mâle sur la société médiévale et en réduit l'influence, pour le plus grand bien des dames de ce temps-là, à qui elle donne des raisons d'espérer en des jours meilleurs, quand elles pourront enfin disposer librement d'elles-mêmes.

Dans le Lancelot en prose, le discours de la Dame du Lac à Lancelot avant son adoubement avait quelque peu redistribué les rôles en réservant la fonction guerrière au héros chevalier.

À la fin, elle retournera dans son élément originel, recueillie par la même main, celle de la Dame du Lac, la fée Viviane, éducatrice de Lancelot. Dans la magie des contes celtiques, la femme est gardienne de l'Épée, symbole ultime de la Tradition vivante.

Le récit tardif de Sir Thomas Malory (né vers 1405 et mort le 14 mars 1471) sur la vie et la mort du roi Arthur, La Morte d'Arthur, parle de la récupération de l'épée magique Excalibur dans un lac. Pour qu'Arthur puisse récupérer Excalibur, Merlin devait le conduire chez la Dame du Lac, la gardienne des eaux sacrées et de leurs contenus. Arthur devait lui faire don de quelque chose en échange de l'arme merveilleuse. Ayant été jetée cérémoniellement dans le lac à une époque antérieure, l'épée avait été emmenée dans l'Autre Monde. Quand Arthur la retrouva miraculeusement, l'épée devint un symbole de la renaissance de l'ancien pouvoir. À un niveau plus pratique, cette arme aurait été une des plus belles de son époque, donnant un avantage tant physique que spirituel à ceux qui la portaient (Nigel Pennick, Runes et magie: histoire et pratique des anciennes traditions runiques).

On sait que Lancelot est ce chevalier de la Table-Ronde qui, ayant été déposé dans son enfance par la reine sa mère au bord d'un lac, fut enlevé par la fée Viviane, connue sous le nom de la Dame du Lac, nourri, élevé par cette fée, et fait chevalier par le roi Artus, à 18 ans.

Ainsi, Lancelot est entré comme un météore dans la vie de chevalier, longuement et soigneusement préparé par la Dame du Lac. Il est sans fortune, et ne sait même pas s'il a une famille.

Toujours d'après les paroles de la Dame du Lac, le chevalier doit être dur, impitoyable, ne jamais pardonner l'offense, préférer la mort à la honte et la justice à la charité. Où sont donc, dans tout cela, les grands principes de la fraternité universelle des êtres et des choses ?

Ogham : le tremble

On apprend chez Napier que dans le folklore de l'ouest de l'Ecosse, comme en Russie, Judas se serait pendu à un tremble (T. F. Thiselton Dyer, Folklore of Shakespeare, 2004).

Toujours en Ecosse, la croix de la crucifixion aurait été faite de bois de tremble. On raconte encore que lors de la crucifixion, le tremble fut le seul arbre à ne pas trembler, pour cela il y fut condamner à perpétuité.

La Prudence - 16 décembre

Raoul Glaber né en 985 en Bourgogne et mort après 1047, est un moine chroniqueur de son temps. Il donne une grande place au mysticisme des nombres, et particulièrement du nombre quatre1. Il divise le monde en quatre âges ; et, pour montrer l'importance de cette division, il rappelle qu'il y a quatre Évangiles, quatre vertus, quatre éléments, quatre sens ; car il en réunit deux pour avoir son chiffre favori. De plus, il trouve des analogies entre les termes de ces diverses séries quaternaires. Ainsi le feu, parmi les éléments, répond à la prudence parmi les vertus, parce que le feu monte vers le ciel, suivant les idées de l'ancienne physique, et que la prudence ou la science nous élève vers Dieu. Entre les Evangiles, celui de saint Jean correspond au feu et à la prudence, et, entre les sens, à la vue, à laquelle l'ouïe est jointe par Glaber (Jean Jacques Ampère, Histoire littéraire de la France sous Charlemagne et durant les Xe et XIe siècles, 1868).

Les autres vertus correspondent cependant aux autres évangélistes.

Le saint du jour

Giraldus de Cambrie dit que Beanus est le protecteur non seulement des oiseaux mais aussi de leurs œufs. A ce sujet on raconte que si tu tends la main pour saisir les œufs, vous verrez immédiatement poulets nus et rouge, comme s'ils sortaient de leur coquille ; si tu retires la main, vous voyez les poulets de retourner dans l'œuf (John Lynch, Cambrensis eversus, seu potius Historica fides in rebus hibernicis Giraldo Cambrensi abrogata, Volume 1).

Le Beóán, peut-être mentionné dans la Vie de Saint Cathróe (Kaddroé) de Metz, est commémoré le 16 décembre (en.wikipedia.org - Beoan).

La vision de Beanus explique probablement le double visage de la statue de la Prudence du Tombeau de François II.

Les visions de Beanus, un Irlandais d'Albanie connu sousle nom de Mo beoc - si c'est le même - qui vivait au dixième siècle, et dont la vie fut écrite à la fin du même siècle en France, semblent porter le sceau du pays et de l'époque. La première est emblématique, mais l'emblème est devenu savant ; on dirait que Beanus dans la vision même se ressouvient de l'école, et que l'esprit de l'école se joint à l'esprit de Dieu pour composer l'allégorie. Kaddroé devait être saint; Dieu l'avait marqué avant sa naissance. Mais son père et ses compagnons entraînaient sa jeunesse, et il allait se jeter avec eux dans cette vie violente, batailleuse et sanglante que menaient alors les Scots, ceux d'Albanie aussi bien que ceux d'Irlande. Beanus pourtant, un saint vieillard, ne l'abandonnait pas. Un jour donc, pendant que Kaddroé dormait avec ses compagnons, Beanus, non loin de lui, reposait de son côté ses membres fatigués. Mais voilà qu'une vierge se montre à ses yeux. L'éclat de son visage surpassait l'éclat du soleil; elle paraissait jeune, et pourtant ses années étaient nombreuses, et on voyait qu'elle n'appartenait point à notre siècle. Ses vêtements avaient sept formes diverses, et leur tissu représentait tout ce que la parole peut dire, tout ce que la pensée peut concevoir.

Le vieillard l'admira longtemps, et enfin : " Qui es tu, lui demanda-t-il, et d'où viens-tu ? " Elle lui répondit : " Je suis la Sagesse; je fais mon séjour parmi les bons conseils et les méditations savantes, et je suis venue ici pour réclamer Kaddroé, qui est à moi. " Et en même temps elle disparut (L. Tachet de Barneval, Histoire légendaire de l'Irlande, 1856).

Le sage est celui qui agit avec prudence.

Le compas de la Prudence du Tombeau de François II est semble-t-il celui de la sagesse. Selon le Proverbe VIII, 27 : la sagesse était là "quand il a gravé le cercle à la surface de l'abîme", ou "quand il constituoit par le compas le dessus des abymes", selon les leçons rabbiniques.

Servius rappelle qu'on voyait à Rome, à la base d'une grande statue de Minerve, un serpent enroulé sur lui-même, dont la tête s'élevait vers le bouclier de la déesse. La Renaissance, sans doute sous l'influence du texte de Matthieu (X, 16 : Voici, je vous envoie comme des brebis au milieu des loups. Soyez donc prudents comme les serpents, et simples comme les colombes), a vu dans le serpent de Minerve un symbole de la prudence, laquelle est en effet la qualité dominante.

Ogham : double noisetier

Dans le vieux texte irlandais du VIIème siècle intitulé Le chaudron de poésie, on trouve l'affirmation claire de ce que les filidh trouvaient l'inspiration en mâchant les noisettes de sagesse. Le texte explique que l'inspiration poétique et le don de poésie proviennent de trois chaudrons qui se trouvent à l'intérieur même du corps du fili. La poésie est sensée naître de l'expérience du chagrin et de la joie, et l'une des parties de la joie éprouvée par le fili - laquelle mène à l'imbas, le don de la sagesse prophétique - est la joie d'endosser la frénésie poétique en pilant et éparpillant les belles noisettes des neuf noisetiers de la fontaine de Segais dans le royaume du sidhe.