Partie XIII - La Croix d’Huriel   La Croix d’Huriel et Léonard de Vinci   A quatre mains   
CROIX HURIEL LEONARD DE VINCI MAINS STOICISME

La Cassaigne et Venise

Nicolò Boccasino, serie dei Quaranta domenicani illustri, ex convento di San Niccolò, Sala del Capitolo, Treviso, 1352 - Risorto Celebrano it.wikipedia.org - Papa Benedetto XI

Nicolas Bocasini, depuis Pape sous le nom de Benoît XI, était de la ville de Trévise, qui formait alors un état indépendant, mais qui, depuis l'an 1336, est soumise aux Vénitiens. Il vint au monde en 1240, et commença ses études dans sa patrie; il alla les achever à Venise, où il prit l'habit de saint Dominique étant encore fort jeune. [...] Quatorze ans après son entrée chez les Dominicains, il fut envoyé, en qualité de professeur et de prédicateur, à Venise et à Bologne, afin qu'il fît part aux autres des trésors spirituels qu'il avait amassés dans le silence et la retraite.

Il fit durant cette période un nouveau séjour à Venise au monastère des Saints Jean et Paul, sans doute en qualité d'élève d'un studium solemne. Nous savons en effet qu'à une certaine époque il se consacra comme précepteur à l'éducation des enfants d'un noble vénitien, Romeo Querini.

Ayant été élu général de son ordre en 1296, il écrivit une lettre circulaire, dans laquelle il exhortait ses frères d'une manière fort touchante à l'amour de la pauvreté, de l'obéissance, de la retraite, de la prière et de la charité. L'année suivante, le Pape Boniface VIII l'envoya en France, avec la qualité de nonce, pour être médiateur de la paix entre ce royaume et celui d'Angleterre. Pendant qu'il travaillait à ce grand ouvrage, il fut créé cardinal.

Après le chapitre de Metz de 1298, il parcourut probablement la France du Nord au Sud, à petites journées, car six mois plus tard, le 4 décembre, il arrivait au monastère de Prouille près de Saint Papoul. Il y séjourna un mois entier. Le jour de Noël, tandis qu'il célébrait la messe, des personnes de sa suite averties sans doute par des lettres privées lui annoncèrent qu'il venait d'être nommé cardinal. Comme ce bruit n'avait rien d'officiel, il s'abstint d'en faire part à ceux qui l'entouraient. Mais le 3 janvier 1299, s'étant rendu de Prouille à Carcassonne, il reçut dans cette ville plusieurs messages qui lui confirmaient la nouvelle de son élévation ; alors il se décida à la publier. Il demeura une dizaine de jours au couvent de Carcassonne, sans rien changer à ses habitudes de simplicité et d'austérité, ce qui excita chez ses frères une vive admiration. Enfin, le 14, s'étant remis en route dans la direction de Narbonne, il atteignit vers le soir le bourg de Lézignan, où il rencontra les envoyés pontificaux chargés de lui remettre sa bulle d'investiture. Elle était datée de Chieti, 5 décembre 1298. Dans sa lettre Boniface VIII, après avoir comme de coutume fait l'éloge du nouveau cardinal, l'invitait à rejoindre sa cour dans le plus bref délai. Nicolas était agrégé à l'ordre des cardinaux prêtres sans désignation de titre; on lui assigna peu après celui de Sainte Sabine. Le lendemain il entra à Narbonne dans la matinée et se rendit aussitôt au couvent des Frères Prêcheurs, où étaient réunis le provincial de Provence, les prieurs et les lecteurs des environs, et un grand nombre de seigneurs, de bourgeois, d'ecclésiastiques, venus pour le saluer au passage. Là il donna publiquement lecture de la bulle qui le nommait membre du Sacré Collège, puis, fondant en larmes, il demanda à ses frères s'il pouvait vraiment accepter une dignité qui allait le rendre étranger à l'Ordre de Saint Dominique dont il faisait partie depuis quarante quatre ans.

Peu de temps après, il fut nommé évêque d'Ostie et doyen du sacré collège. En 1301, il passa en Hongrie, avec le titre de légat à latere, pour étouffer l'esprit de discorde qui avait formé diverses factions, et qui avait déjà causé beaucoup de ravages dans le pays. Il se conduisit avec tant de sagesse, que la paix succéda aux troubles. Il abolit aussi certaines pratiques superstitieuses, et d'autres abus d'où résultaient de grands scandales. Les légations qu'il exerça en Autriche et à Venise ne firent pas moins d'honneur à la sagesse et à la vivacité de son zèle. Boniface VIII étant mort le 11 Octobre 1303, les cardinaux entrèrent au conclave onze jours après, et dès le lendemain ils élurent tout d'une voix Bocasini pour lui succéder.

Rome était alors déchirée par des dissensions civiles, et surtout par les factions des Colonnes, ennemis de Boniface VIII. Benoît, par sa prudence, sa modération et sa douceur, rétablit la tranquillité publique. Il pardonna à tous les rebelles , excepté à Sciarra Colonne et à Guillaume de Nogaret, qui restèrent toujours sous la première sentence de proscription. Il pacifia le Danemarck et les autres royaumes du nord; il fit aussi cesser les troubles qui agitaient l'état et l'église de France. Par ses soins, Venise et Padoue se réconcilièrent sans répandre de sang. Il travailla de concert avec Hélène, Reine de Servie, à procurer la conversion d'Orose, fils de cette Princesse. Enfin, ce bon Pape fut le martyr de la paix, de la conservation de laquelle il avait été occupé toute sa vie. Il mourut à Pérouse [...], à l'âge de soixante-trois ans, n'ayant siégé que huit mois et dix-sept jours. On dit que sa mort fut causée par du poison que lui donnèrent secrètement quelques-uns des ennemis de la tranquillité publique. Il s'opéra à son tombeau des miracles dont la vérité fut constatée par l'évêque de Pérouse, et qui sont rapportés par Platine et les autres historiens (Alban Butler, Jean François Godescard, Charles Butler, Vies des péres, des martyrs, et des autres principaux saints, Volume 9, Vanlinthout et Vandenzande, 1830 - books.google.fr, Charles Grandjean, Benoît XI avant son pontificat. In: Mélanges d'archéologie et d'histoire T. 8, 1888 - www.persee.fr).

Selon les obligationes du temps de Benoît XI, et le témoignage du cardinal Stephaneschi, son ami, le pape Benoît XI est mort le 7 juillet 1304 (Charles Grandjean, La date de la mort de Benoît XI. In: Mélanges d'archéologie et d'histoire T. 14, 1894 - www.persee.fr).

A une date incertaine (entre 1286 et 1297), en août à Paris, Philippe le Bel confirme la vente du Mortier et de La Cassaigne faite par Gui de Lévis III, seigneur de Mirepoix, au monastère de Prouille. Les biens acquis devaient être, à l'avenir, considérés comme étant de mainmorte.

Une autre date est proposé à 1302 (Cartulaire de Notre-Dame de Prouille, présenté par Jean Guiraud, Volume 2, 1907 - books.google.fr).

Des moines d'obédience franciscaine, convaincus qu'ils ont recueilli le vrai message du saint d'Assise (fils d'une Avignonnaise et de culture troubadouresque dans sa jeunesse), essaiment dans la nouvelle province de Langue d'oc, sans doute sur les traces laissées par le catharisme. Occitans, ils le sont, et patriotes. L'un d'eux, Bernard Délicieux, est avec les Carcassonnais qui qui en 1295 appellent le roi d'Aragon à les délivrer des Français. La papauté est alors en Avignon, les papes sont des Occitans, mais du parti français qui les a installés. Ils vont sévir contre les Spirituels. Les bûchers se rallument (Robert Lafont, L'État et la langue, Archéologie de la modernité, 2008 - books.google.fr).

Dans le sein de le franciscanisme, mondanisé et asservi à Rome, une réforme s'accomplit qui remontait à l'Ordre indépendant et mystique, à Joachim, son premier patriarche. Le réformateur, en Italie, fut Jean de Parme. Ses disciples furent en Provence, Ugo d'Hières, ce moine qui ne voulut pas se charger de la conscience de saint Louis ; en Languedoc, Joan d'Oliva, chef des Spirituels de Narbonne. Les Oliva étaient une tribu cathare du Languedoc. Elle afourni Pons d'Oliva, diacre albigeois, et Bernard d'Oliva, évêque cathare de Toulouse, réfugié â Sirmione, et Pierre d'Oliva, connu sous le nom de Nolasco, fondateur de l'ordre catalan de la Merci. Joan d'Oliva, catholique, comme Nolasque, né à Sérignan, entra dans le couvent des Frères Mineurs de Béziers. Il était distingué par l'intelligence, l'austérité, et de certaines ardeurs mystiques. L'Apocalyse, l'Évangile et les Épîtres de saint Jean étaient les objets de ses perpétuelles méditations. Sa foi était johannite comme sa race était cathare. Sa théologie fut censurée; mais broyée au pressoir comme l'olive, elle se répandit, semblable àune huile enflammée, dans le diocèse de Narbonne. Oliva mourut en 1298, l'année même ou éclata Délicios. Oliva fut le théologien de la secte dont Bernard devait être l'orateur. Bernard lui-même confirmera sa descendance et de Joan d'Oliva et de Joachim de Flore.

Bernard Délicieux est certainement, avec Pierre Jean-Olieu, la personnalité majeure du franciscanisme languedocien entre 1280 et 1330. D'Albi à Limoux, de Toulouse en Avignon, par Carcassonne, Narbonne, Béziers et Montpellier, il vit successivement en symbiose avec les milieux du catharisme et avec le mouvement des Spirituels et des béguins. La liaison qu'il établit entre eux paraît dépasser l'aventure individuelle pour s'inscrire dans un donné structurel ; en outre, l'analyse de son action illustre le souci et la capacité des Mineurs de répondre aux problèmes du temps par une pastorale ouverte.

Bernard Délicios portait le nom de Montpellier. Ce nom probablement indique non-seulement son berceau, mais encore sa race. Il descendait vraisemblablement du dernier comte Guilhem IX, comme Saïsset était issu de Ramon VII. Il se trouverait ainsi cousin des vicomtes de Carcassonne et des rois d'Aragon. Cette conjecture explique son nom, son rôle politique et ses relations avec l'infant de Mayorque. Il entra dans l'ordre des Franciscains (1284), et fréquenta les couvents de Béziers, de Narbonne, de Carcassonne. ANarbonne il dut connaître le fameux Joan d'Olive et recevoir de sa bouche la doctrine de Joachim de Flore. Bernard apparaît à la mort de Joan avec la robe et l'esprit de ce mystique Élie dont il sera l'Élisée Johannite. Il lui succède dans sa chaire : il est lecteur, c'est-à.dire, professeur dans les cloîtres franciscains; docte, il est en relation avec les savants de son siècle. Il est l'ami de Ramon Lulle, le philosophe baléare, et le correspondant d'Arnaud de Villeneuve, le grand médecin et alchimiste valencien: deux noms d'origine albigeoise. Car il va de ville en ville, de royaume en royaume. Il a visité la France, l'Italie, l'Espagne. S'il est docte, il est encore plus éloquent; il est né orateur, tribun religieux ; il a des séductions, des enchantements de sirène; De là son surnom. populaire de Déliciosæ. Quoi qu'il en soit, franciscain, il est l'adversaire des dominicains ; Albigeois, il est l'ennemi de Rome. Sa mission historique commence avec le siècle, bien qu'il fût probablement mêlé aux troubles antérieurs de Carcassonne. Son cloître était le forumdes conjurés ; à leur mort, c'est là qu'ils choisissent leur sépulture.

En 1302-1303, il parut obtenir gain de cause auprès du roi (devant lequel il put s'exprimer lors d'un conseil royal à Senlis en octobre 1301). En août 1303, par exemple, Bernard Délicieux, organise à Carcassonne de tels remous que le vidame d'Amiens, commissaire royal, accepte de transférer les emmurés des geôles de l'Inquisition dans celles du roi ; il convient toutefois de noter que cet acte, humiliant une juridiction immédiatement dépendante du pape, se situe dans le moment où l'on prépare Anagni, de sorte que, peut-être, il dépasse très largement le contexte languedocien.

De nombreux témoins décrivent les événements de 1303, la destruction des maisons des prétendus partisans de l’Inquisition, l’attaque sur le couvent dominicain, et surtout l’assaut de la prison inquisitoriale comme très grand soulèvement du peuple du Bourg. Guillaume de Villeneuve, chevalier de Palaja, Gui Sicre et plusieurs autres témoins accusent Bernard d’avoir excité les masses populaires qui ont détruits les maisons dans le Bourg.

Carcassonnais et Albigeois n'obtiennent plus rien ensuite. Le souverain, qui vient à Toulouse pour la Noël de 1303, leur refuse la libération des prisonniers ; il n'a plus besoin d'exercer une pression sur Boniface VIII, vaincu et défunt (octobre 1303), et il ne se soucie pas de favoriser des troubles dans le Midi où ses commissaires sont venus pour couper court aux menaces de sécession que laissaient planer les déclarations de Bernard Saisset ; il n'entend pas, non plus tolérer l'hérésie. Quant au nouveau pape, Benoît XI, c'est un Prêcheur; il soutient ses frères inquisiteurs et, dès avril 1304, il donne l'ordre d'arrêter Bernard Délicieux, bien qu'un chapitre provincial des Mineurs ait relevé ce dernier de l'excommunication qu'il avait encourue et l'ait mis hors de cause.

Il semble qu'il ait alors incité les consuls de Carcassonne à tenter un complot contre le pouvoir royal en Languedoc au profit de l'héritier du roi de Majorque. En 1305, les consuls de Carcassonne, démasqués, furent pendus pour trahison, mais Bernard Délicieux ne fut pas inquiété. La bienveillance du pape Clément V (1305-1314) lui offrit quelques années de tranquillité. Mais l'avènement du pape Jean XXII en 1316 sonna la revanche des inquisiteurs en Languedoc.

Délicios est cité devant le pape. Le 19 mai (1317), il quitte Béziers ; le 22, il arrive à Avignon; le 24, il est mis sur la sellette. Son procès est instruit par Guillaume Méchin, évêque de Troyes, et Pierre le Texier, abbé de SaintSaturnin de Toulouse. Bernard est interrogé sur soixante articles. Les soixante crimes se réduisent enfin à trois : il a pendant vingt ans soulevé contre l'inquisition les peuples albigeois. Il a conspiré avec les consuls de Carcassonne, et l'infant de Mayorque contre le roi de France. Enfin, il a fait empoisonner le pape Benoît XI. Les deux premiers chefs sont aussi évidents que le soleil; mais ils sont couverts par l'amnistie du roi Philippe et du pape Clément V. Il ne reste donc debout que l'empoisonnement pontifical. Bernard est accusé d'avoir envoyé à maître Arnauld de Villeneuve, son illustre ami et médecin du pape, un messager porteur d'un coffret contenant une lettre de sa main, avec des poudres et des philtres par lesquels il a produit la mort du pontife, mort dont il a prédit l'instant aux gens d'Albi, et qu'il connaissait par un livre rempli de cercles et de signes cabalistiques. Benoît, on le sait, était mort d'indigestion, et le seul crime de Bernard était d'avoir ri et fait rire de ce trépas gastronomique, et de s'être réjoui de l'avénement prévu du tolérant et patriote Clément V. Délicios, d'abord, refusa de répondre, mais comme l'accusation se prévalait de son silence, il s'expliqua avec une fière et dédaigneuse brièveté. Il se plaignit aussi qu'au lieu de commissaires obscurs on ne lui eûtpas donné pour juges les cardinaux présents à la cour d'Avignon. Les inquisiteurs, pourle confondre, appelèrent des témoins, ses anciens amis, maintenant ses accusateurs involontaires, Bès, Fransa, Castanet, les syndics d'Albi. Ils déposent qu'un jour Délicios, en présence de Fransa, envoie Bès chercher de la toile et de la cire, charge Bès et Fransa d'ènvelopper un certain coffret de cuir avec la toile cirée, et un certain Estèbe, son acolyte, de porter le mystérieux coffret en cour romaine, à Me Arnauld de Villeneuve. C'est sur cette historiette en l'air que les inquisiteurs échafaudèrent l'accusation de l'empoisonnement de Benoît XI. Cette conjecture devient certitude dans la bouche d'un pape superstitieux et qui croyait à la magie, et Jean XXII, de sa science infaillible, affirma que Bernard a fait mourir le seigneur Benoît, veneni poculo. Dans tous les cas, Délicios n'aurait été que le complice; c'est Arnauld qui serait l'exécuteur : et quelle vraisemblance que Clément V eût choisi pour son médecin l'assassin de son prédécesseur ? Villeneuve, en effet, se rendait, en cette qualité, près du nouveau pontife, lorsqu'il mourut en mer sur le vaisseau qui l'apportait à Avignon.

Au terme d'un procès mené par Bernard Gui au cours duquel il fut torturé, en décembre 1319, Bernard Délicieux fut condamné à la prison à perpétuité. Il mourut peu après au cachot (Jean-Louis Biget, Autour de Bernard Délicieux : franciscanisme et société en Languedoc entre 1295 et 1330. In: Revue d'histoire de l'Église de France. Tome 70. N°184, 1984 - www.persee.fr, Napoléon Peyrat, Histoire des Albigeois: Les Albigeois & l'Inquisition, Volume 3, 1872 - books.google.fr, fr.wikipedia.org - Bernard Délicieux, Ekaterina Denisova, La « rage carcassonnaise » (1295-1305) et ses acteurs : la révolte anti-inquisitoriale dans le Languedoc et la société carcassonnaise au tournant des XIIIe et XIVe siècles, 2011 - academiedesartsetdessciencesdecarcassonne.blogs.midilibre.com).

Le messiansime de la maison d'Aragon, qui a été promu par Arnaud de Villeneuve, est vu dans (Le Serpent rouge : Le voyage de l’âme : La chauve-souris 2).

Madonna del Latte (XIII-XIV sec.) - L’icona raffigura la Vergine che allatta Cristo, circondata da una serie di santi tra cui si riconoscono Pietro e Paolo in alto e San Marco al centro. Realizzata tra la fine del XIII e l’inizio del XIV secolo, è ricordata nella basilica dal 1517 ed è considerata capostipite delle successive icone veneziane - www.arte.it

Notre Dame du Lait

Le thème de la Vierge allaitant se retrouve aussi bien dans les lieux de culte publics (Andrea Pisano pour l'église Santa Caterina de Pise, Ambrogio Lorenzetti pour le couvent augustinien de Lecceto) que pour un usage votif privé (toute la série de médaillons peints par l‘atelier de Hans Memling « qui étaient suspendus dans la chambre ou dans le lit à baldaquin comme un talisman religieux. »). Pour la Madonna Litta, il est difficile de trancher faute de documents, mais le petit format du tableau fait plutôt penser à un usage privé. Comme souvent dans les Madonne del latte, L’Enfant Jésus tient dans sa main gauche un chardonneret captif, symbole de la Passion.

La Madone Litta (vers 1490), dans les collections de la famille Litta (d’où elle tire son nom) à Milan, en 1813, est un tableau représentant une Vierge à l'Enfant allaitant (Madonna del latte). Trois études préparatoires, l’une au Louvre attribuée à Léonard de Vinci et les deux autres, à l'Institut néerlandais de Paris et au Staatliche Museum de Berlin attribuées à Boltraffio confortent la théorie qui s’est dessinée ces dernières années : Léonard aurait conçu le cadre général de la composition, et l’un de ses élèves aurait été chargé de peindre le tableau. Le motif de la vierge allaitante est encore attesté par des esquisses de la main de Léonard de Vinci, notamment un dessin conservé à Windsor.

La Madone Litta est conservée dans les collections du Musée de l'Ermitage de Saint-Pétersbourg. Elle est gravée dès le XVIe siècle par Zoan de Andrea. Marcantonio Michiel parle en 1543 d’une Vierge allaitant de Léonard de Vinci qu’il aurait vu dans la collection Contarini, à Venise. Peut-être s’agit-il du tableau de Saint-Pétersbourg ou de La Madone de Laroque, tableau récemment découvert dans le sud de la France (1998) (fr.wikipedia.org - Madone Litta).

Madonna Litta (vers 1490)

La Madone de Laroque est un tableau peint a tempera sur un panneau de peuplier (48 cm × 59 cm) recouvert d'une toile de lin très fine. L'image en est assez altérée en surface par les nombreux repeints, les différents vernis devenus opaques et les salissures incrustées. Il fut exécuté, selon les différentes analyses effectuées, entre 1480 et 1500. Son attribution à Léonard de Vinci reste contestée. Il a été retrouvé le 10 octobre 1998 à Laroque (Hérault) par trois amateurs d'art (fr.wikipedia.org - La Madone de Laroque, Arsène Lupin et la Croix d’Huriel : Arsène Lupin et l’ange Gabriel).

Les vertus du lait

Selon le témoignage de Conrad Kilian : "Quand les Touaregs ne peuvent le soir couvrir les coupes de lait, ils posent dessus deux bâtons en croix. Lorsque j'ai demandé pourquoi, il m'a été répondu que c'était pour empêcheur les démons de la nuit de souiller le lait. J'ai observé moi-même les Touaregs faisant une croix sur leur pain primtif avant de la rompre".

Le Petit Albert, encore une fois, donne des recettes à toute épreuve sous le chapitre bien évocateur «Réparations du Pucelage». (Heinz Weinmann, Du Canada Au Québec: Généalogie D'une Histoire, 1987 - books.google.fr).

Prenez terre bénite de Venise demi-once, un peu de lait provenant des feuilles d'Asperges, un quart d'once de cristal minéral infusé dans un jus de Citron, ou jus de Prunes, vertes, un blanc d'œuf frais avec un peu de farine d'avoine ; de tout cela faites un bolus qui ait un peu de consistence, & vous le mettrez dans la nature de la fille déflorée, après l'avoir seringué avec du lait de Chévre & oint de pommade de blanc Rasis. Vous n'aurez pas pratiqué ce Secret quatre ou cinq fois que la fille reviendra en état de tromper la Matrone qui la voudroit visiter. L'eau d'Espargoute distillée avec du jus de Citron étant seringuée plusieurs jours de suite dans la nature de la fille produit le même effet, en oignant la partie avec pommade, comme est dit ci-devant (Secrets merveilleux de la magie naturelle et cabalistique du Petit Albert, 1752 - books.google.fr).

Le Petit Albert est un recueil apocryphe édité la première fois en France en 1668. Connu sous le titre latin de Alberti Parvi Lucii, Libellus de mirabilibus Naturae Arcanis, il entremêle recettes, images de magie et de sorcellerie. Il est attribué en Albert le Grand, dans la lignée du Grand Albert écrit lui vers 1245 s'inspirant des enseignements du saint (Gilles Van Grasdorff, Le Grand et le petit Albert, 2013 - books.google.fr).

C'est dans cet état que ce malade se rendit aux Bains de Rennes dans le mois de septembre de la même année. Je fus consulté, et lui ordonnai de boire le matin à jeun , et à demi-heure de distance , quatre verres d'eau du Pont , coupée avec égale quantité de lait de chèvre; de prendre immédiatement le Bain doux , et de recevoir, le soir à six heures , la douche tempérée sur la partie douloureuse pendant six minutes. Le dixième jour , cette douleur ostéocope disparut subitement : il ne restait à cette partie que le gonflement , qui céda à la quinzième douche. Cette personne quitta Rennes parfaitement guérie , et j'ai appris depuis qu'il jouissait d'une bonne santé. [...] Mme *** se rendit aux Bains de Rennes ; je lui conseillaide boire chaque matin, et à demi-heure de distance, quatre verres d'eau de la source du Cercle, coupée avec une égale quantité de lait de chèvre, et de recevoir matin et soir la douche ascendante froide pendant six minutes. A la treizième douche, l'écoulement fut moins abondant, les douleurs moins vives. A la quarantième, ces deux symptômes n'exitaient plus ; Mme *** repartit parfaitement guérie (François-Marie-Fortuné Cazaintre, Notice sur les eaux thermales et minérales de Rennes, département de l'Aude, arrondissement de Limoux avec quelques considérations thérapeutiques, 1833 - archive.org).

Bues le matin, à la dose de deux ou trois verres, les eaux d'Enghien augmentent sensiblement l'appétit. Chez quelques malades, cependant, elles déterminent de la pesanteur à l'estomac : il faut alors en diminuer la quantité, les faire tiédir légèrement, ou les couper avec du lait. Vous trouvez, près de la buvette, trois espèces de laits différents, disposées dans autant de petits barils, savoir : du lait d'ânesse, du lait de chèvre et du lait de vache, ainsi que de l'eau sulfureuse élevée au degré de température le plus convenable.

Les médecins de Bade se font si peu illusion sur la valeur thérapeutique de leurs eaux, qu'il est rare qu'ils les prescrivent seules. Voyez plutôt comment les choses se passent, le matin, à la Trinkale. Les malades qui s'y rendent peuvent être divisés en trois catégories. Les uns viennent boire l'eau minérale, mais ils y mêlent presque toujours une dose de sels de Carlsbad; d'autres vont, dans une pièce voisine, remplir leurs verres avec du lait de chèvre, auquel ils ajoutent quelquefois l'eau de la buvette; enfin, vous y rencontrez des malades qui ne boivent les eaux de Bade ni pures ni mélangées, et qui suivent une cure d'eaux minérales tout à fait étrangères à celles de la localité. Aussi a-t-on établi à la Trinkale un dépôt très bien approvisionné des principales sources de l'Europe.

L'action des bains est puissamment secondée par la boisson de petit-lait. Des trois espèces de petit-lait dent on fait usage à Ischl, savoir, le petit-lait de vache, le petit-lait de chèvre et le petit-lait de brebis, c'est au petit-lait de vache qu'on donne souvent la préférence. Bu le matin à la dose de trois à quatre gobelets, Il agit à la manière d'un léger purgatif; les deux autres espèces de petit-lait, et en particulier le petit-lait de brebis, purgent moins franchement. La saveur de ces divers liquides, si elle diffère par quelques nuances, a cependant pour caractère commun d'être aromatique, un peu sucrée, et tout à fait agréable, surtout quand la végétation est dans sa primeur, parce qu'alors les animaux ont une alimentation plus savoureuse. C'est au point que les petits enfants boivent le petit-lait avec plaisir : ceci s'applique surtout au petit-lait de chèvre et de brebis (Consulter pour plus de détails le Mémoire sur le petit-lait alpestre du docteur Mastalier, et la Notice sur Ischl du docteur Folak, tous les deux médecins des plus distingués à Ischl) (Constantin James, Guide pratique du médecin et du malade aux eaux minérales de France, de Belgique, d'Allemagne, de Suisse, de Savoie, d'Italie et aux bains de mer..., 1856 - books.google.fr).

Conrad-Antoine Zwierlein, médecin, né en 1755, à Bruckenau en Franconie, fut médecin des eaux minérales de cette ville, et membre de plusieurs académies. Il mourut à Fulde le 26 avril 1825. Les écrits qu'il a publiés sont principalement relatifs aux différentes eaux thermales. On a de lui L'Usage du lait de chèvre, Stendal, 1816 ; réimprimé en 1821, avec une seconde partie (Louis Gabriel Michaud, Biographie universelle, ancienne et moderne, etc, Volume 52, 1828 - books.google.fr).

Indirectement

La Cassaigne et Caudeval sont associés aux étoiles de la Grande Ourse Merak et Dubhe. Merak-La Cassaigne et Dubhe-Caudeval pointent comme dans le ciel des constellations vers l'Etoile polaire-Planès (Autour de Rennes le Château : Rennes les Bains, la Petite Ourse et le Dragon).

L'origine de la chapelle Sainte Marie de Planès reste obscure. Par son style de construction, on pourrait la dater du XIII° siècle. Un des documents des plus anciens concernent cette chapelle date de l’année 1282. Le lieu de Planès appartenait à la paroisse de Saint Pierre dels Forcats et dépendait du monastère de Saint Michel de Cuxa. La paroisse de Planès fut soumise à Saint Pierre del Forcats jusqu’à la Révolution française. Le plan de cette chapelle fait l'objet de nombreuses controverses. Certains y voient une volonté symbolique, à rapprocher de Saint-Michel-de-Cuxa, le plan trêflé a pu être inspiré du mystère de la Sainte Trinité. D'autres ont pensé à un mausolée d'origine arabe. Parmi les fonctions supposées, on peut encore se demander aujourd'hui si cet édifice est une chapelle, un oratoire, un édifice défensif ou un tombeau (www.cg66.fr).

Saint Michel de Cuxa correspond à l'étoile zeta de la Petite Ourse appelée aussi Akhfa al Farkadain ("la moins brillante des deux veaux" en arabe) qui était l'ancien nom de Pherka ("veau" en arabe).

L'abbaye Saint Michel a accueilli deux vénitiens au Xème siècle.

Romuald et Marin accompagnèrent Pietro Orseolo. Romuald vécut dans la solitude, près de l'abbaye Saint-Michel de Cuxa. Romuald marque la charnière entre la spiritualité orientale et occidentale. Né dans l'orientalisme italien (à Ravenne) il étudie et découvre en profondeur les pères du désert dans un monastère très occidental, l'abbaye Saint-Michel de Cuxa, où il passe près de dix ans. Sa contribution se trouve dans cette dimension d'enracinement ecclésial de l'érémitisme chrétien.

Fondateur de l'ordre monastique des Camaldules (branche autonome de l'Ordre de Saint-Benoît), le dernier des pères du désert fut d'abord célébré le 7 février (jour de la translation de ses reliques), canonisé en 1595 par le pape Clément VIII.

Romuald et Pierre Orseolo font partie d'une vague d'Italiens qui essaimèrent en Occident, comme Guillaume de Volpiano, abbé du Mont-Saint-Michel (1024-1031), au XIème siècle. Anastase, vénitien peut-être d'origine grecque, et Robert, moines du Mont Saint Michel, se retirèrent sur l'îlot de Tombelaine pendant un certain temps.

Leur arrivée entraîne le renouveau des études et de l'observance dans les monastères; elle a pour conséquence immédiate l'apparition de l'érémitisme, forme la plus rude et la plus admirée de la vie monastique à l'époque. En effet, chez les moines du Mont-Saint-Michel comme dans la mouvance romualdienne, l'érémitisme est arrimé au monachisme bénédictin dont il constitue le prolongement tout en en respectant la règle. C'est ainsi que l'on comprend le départ d'Anastase de son ermitage pyrénéen [près de l'abbaye de Lézat] au bout de trois ans, lorsqu'il reçoit une lettre de rappel d'Hugues de Semur [abbé de Cluny (1049-1109)] (Piroska Nagy, Le Don des larmes au Moyen-Age, 2000 - books.google.fr, fr.wikipedia.org - Romuald de Ravenne).

Le séjour effectué à Cuxa par Romuald et le doge Pietro Orseolo témoigne en revanche du prestige acquis jusqu'en Italie par l'abbaye de Gari. Au cours d'un voyage à Rome (le second ?), Gari fit le détour par Venise. Ayant rencontré le doge, qui exerçait avec répugnance une charge à laquelle il avait été promu en 976 dans des circonstances dramatiques, il lui conseille de se retirer dans une abbaye. Le 1er septembre 978, une petite troupe à laquelle se sont joints Romuald, Marin, Jean Mauroceni, son gendre, et Jean Gradenigo, quitte secrètement Venise. Le doge fait profession monastique à Cuxa où il devient sacristain, puis custode, cependant que Romuald s'initie à la vie érémitique. Le séjour du groupe marque fortement le pays. À la suite de diverses rencontres avec Romuald, le comte de Cerdagne Oliba Cabreta décide de se retirer au Mont-Cassin à l'occasion d'un pèlerinage à Rome ; il y meurt en 993. La mort d'Orseolo (988) entraîne la dispersion du groupe : Gari se rend en Terre sainte et y reste cinq ans avant de revenir à Lézat, où il meurt en 998 ; quant à Romuald, il retourne à Ravenne et fonde peu après les camaldules (Michel Zimmermann, Ecrire et lire en Catalogne: IXe-XIIe siècle, Volume 2, 2003 - books.google.fr, Société Agricole, Scientifique et Littéraire des Pyrénées-Orientales, Volume 17, 1868 - books.google.fr).

Garin est ami avec Gerbert d'Aurillac futur pape Sylvestre II (lycee-charles-renouvier.com - Personnalités).

Le pape Clément XII, sur les instances du sénat de Venise, déclara que Pierre Orseolo avait été canonisé par l'abbé Oliba d'après les usages et le rite de cette époque, fixa sa fête au 19 des calendes de février (14 janvier), et permit à la république de Venise et au monastère de Saint-Michel de Cuxa, de célébrer son office, ce qui se fit pour la première fois en 1732. Le Martyrologe romain fixe la fête d'Orseolo au 10 janvier (Société Agricole, Scientifique et Littéraire des Pyrénées-Orientales, Volume 17, 1868 - books.google.fr).

Le 7 février est l'axe nonagonal de Saint Gaultier, Chateauponsac, Excideuil, Lectoure, Auch, Burjassot (Le Calendrier de La Vraie Langue Celtique 2 : 7 février - Romuald - Burjassot - books.google.fr).

Fronsac et la Madone aux Fuseaux

Si Florimond Robertet avait montré, en vrai connaisseur, tout le cas qu’il faisait de la pièce maîtresse de ses collections en l’érigeant à la place d’honneur au centre de la cour, il ne pouvait cependant s’attribuer le mérite d’une commande si importante, ni vraiment se flatter des conditions de cette acquisition. C’est en effet, son prédésseur dans la charge de trésorier, Pierre de Rohan, maréchal de Gié, qui, séduit par le David de Donatello, avait demandé à la seigneurie de Florence (1501) qu’une autre statue du même genre, en bronze, soit réalisée à son intention. La seigneurie s’était alors adréssée à Michel-Ange qui avait mis huit ans pour l’achever, le temps pour le maréchal de tomber en disgrâce et pour Robertet de manœuvrer pour l’obtenir (1508). En revanche, c’est bien Robertet qui avait commandé à Léonard de Vinci une Madone aux fuseaux , qui représente une Vierge à l’enfant jouant avec un fuseau dont la forme préfigure celle de la Croix. Mais était-ce pour lui-même ou pour le compte du roi ? Ce tableau, sans doute le premier de Léonard introduit en France, aurait joué un rôle important dans l’engouement du roi pour l’œuvre de l’artiste et fortement contribué au développement de sa notoriété (Claude de Montclos, La mémoire des ruines, anthologie des monuments disparus en France, Mengès, 1992 - www.promenadeartistique-molineuf.com).

Avant le XVIème siècle on fabriquait en France des broderies sur étoile ou lancés, par exemple sur toile claire de Quintin (Emile Levasseur, Histoire des classes ouvrières et de l'industrie en France avant 1789, Volume 1, 1901 - books.google.fr).

La losange est une figure quadrangulaire dont les côtés sont égaux, mais qui a deux angles aigus et deux obtus. Dans son assiette ordinaire, sa hauteur et sa largeur doivent être dans la proportion de sept à cinq. La fusée est une losange allongée ; sa hauteur est double de sa largeur. Les étymologistes disent que la racine de ce mot est fuseau, parce que la fusée se rapproche de laforme du morceau de bois dont les femmes se servent pour filer. Le fuseau lui-même s'emploie quelquefois en armoiries. La macle est une losange percée de telle sorte que le vide, au travers duquel on aperçoit le champ, a lui-même la forme d'une losange. Meaultis, en-Normandie, pi. 10, n° 88, porte : de gueules, à trois macles d'or. Si la partie évidée de la macle est arrondie, la figure prend le nom de rustre. Le rustre est fort rare dans les armoiries françaises. Son origine allemande lui a fait donner pour étymologie le mot raute, qui signifie un petit morceau de fer en forme d'écrou. Les losanges, les macles, les fusées, les rustres peuvent être accolés, c'est-à-dire se toucher par un de leurs angles obtus, comme les macles des armes de la maison de Rohan (André F. Borel d'Hauterive, Annuaire de la pairie et de la noblesse de France et des maisons souveraines de l'Europe et de la diplomatie, Volume 3, 1845 - books.google.fr).

Jean de Laval, époux, en 1482, de Jeanne du Perrier, héritière de Quintin, importa dans celte ville cette industrie, déjà établie à Laval, deux siècles auparavant, par Béatrix de Gaure, épouse de Guy IX de Laval. Jeanne du Perrier, héritière de la branche aînée de celte famille, possédait de nombreux domaines au pays de Goëllo; elle dut entreprendre dans ses domaines les premiers essais de culture, continués sans nul doute par Nicolas de Laval, son fils, (Pierre de Rohan, son second mari, mourut sans hoirs), pour assurer au pays le bienfait de l'importation de la fabrique de toiles, faite par son père et sa mère. Sauf la simultanéité de l'établissement de la fabrique à Quintin et à Laval et par une dame de Quintin originaire de Flandre, la tradition vient confirmer ce fait historique. Elle rapporte, en effet, qu'une dame de Quintin et de Laval amena dans celle première ville plusieurs fileuses, au XVe siècle. D'après cette même tradition, la culture du lin et du chanvre aurait eu lieu d'abord dans l'ancien évêché de Tréguier, d'où elle se serait étendue de proche en proche, suivant les besoins et les progrès de la manufacture. Aux efforts de la famille de Laval vinrent se joindre ceux de la famille de Rohan, et ceux des moines répandus dans les différentes abbayes et qui, tous, ont encouragé la culture du lin et la fabrication de la toile. Pierre de Rohan, second mari de Jeanne du Perrier, a pu faire les essais de fabrication des toiles dans le pays de Loudéac, où cette industrie aurait été généralisée ou perfectionnée, en 1567 par des Flamands, qui fuyaient les rigueurs du duc d'Albe (Gaultier de Kermoal, Les Etats de Bretagne et l'industrie des toiles, Revue de Bretagne et de Vendée, 1866 - books.google.fr).

Jeanne du Perrier est mariée le 20 novembre 1484 à Pierre de Rohan († vers le 24 juin 1491), baron de Pontchâteau, et baron consort de Quintin, dont Christophe de Rohan, mort, certainement avant son père, sans postérité (fr.wikipedia.org - Liste des seigneurs, barons et ducs de Quintin).

D'après M. Lefébure, la plus ancienne mention, aujourd'hui connue en Italie, de la dentelle aux fuseaux, se trouve trouve dans le partage fait à Milan, en 1493, entre Angelo et Ippolita Sforza Visconti. On y voit « una binda lavorata a poncto de doii fuxi per une lenzolo » (une bande travaillée à point de douze fuseaux pour une bordure de drap). Le même document mentionne un a punto a redexalo », un point sur réseuil. M. Lefébure ajoute que le plus ancien tableau peut-être qui montre de la dentelle est un portrait de dame, par Carpaccio, au Musée de Venise (La Broderie et les Dentelles. Paris, Quantin, p. 182, 196, 255) (Eugène Müntz, Histoire de l'art pendant la Renaissance, Volume 3, 1891 - books.google.fr).

Madone aux Fuseaux, version Buccleuch, Scottish National Gallery, Edinburgh - en.wikipedia.org - Madonna of the Yarnwinder

Grâce au point coupé, le linge entra ostensiblement dans le costume et y mit ces belles taches blanches dont les grands portraitistes de la Renaissance et du dix- septième siècle ont tiré un si heureux parti. On broda aussi à fils tirés, c'est-à-dire en retirant de la toile certains fils, ne conservant que ceux qui étaient nécessaires pour soutenir et relier entre eux les points de la broderie. Comme il y fallait beaucoup de temps et de patience, on imagina, pour abréger, de broder sur une toile claire appelée quintin, du nom d'une petite ville de Bretagne où on la fabriquait. Puis on élargit de plus en plus les mailles du quintin jusqu'à en faire un véritable filet, qu'on appela réseuil ou lacis, et sur lequel on brodait en reprise, autrement dit en toilé. Le lacis qui pouvait se diviser en petits carrés eut une très grande d'autel, des garnitures de lits et de fenêtres, des nappes de salle à manger, en faisant alterner les parties de lacis avec des carrés de toile unie pour en augmenter l'effet par contraste. Catherine de Médicis, qui aimait si fort les broderies, était encore plus folle du lacis. Elle en faisait son plus grand amusement ; elle y occupait ses filles, ses demoiselles d'honneur, ses chambrières. A sa mort, on trouva dans ses coffres neuf cent dix-huit carrés non montés de ce filet brodé (Berthe Vadier, Les travaux des femmes dans les temps anciens et modernes, Bibliothèque universelle et revue suisse, 1893 - books.google.fr).

Rochemaure et la Madonne aux deux Enfants

La famille de Lévis était originaire de Lévis-Saint-Nom, près de Chevreuse, en Île-de-France. Elle aimait laisser dire que sa véritable origine était la tribu de Lévy, à laquelle appartenait la Sainte Vierge. Elle s'illustra en fait dans l'histoire d'abord par la participation de Guy de Lévis à la croisade contre les albigeois, à l'issue de laquelle il obtint les seigneuries de Mirepoix en Ariège, et de Florensac dans l'Hérault, ainsi que la main de de Guiburge, fille de Simon de Montfort. Les Lévis arrivèrent en Vivarais grâce au mariage de Philippe de Lévis avec l'héritière de la famille de Roche-en-Régnier, possessionnée dans les Boutières, et vers Meyras et Jaujac. L'un de ses descendants, Philippe IV de Lévis, épousa Antoinette d'Anduze, héritière de la baronnie de la Voulte. La fortune des Lévis commença avec ce prince, qui servit le dauphin Charles en Languedoc, avec 200 hommes d'armes, et vendit pour les payer jusqu'à sa vaisselle d'or et d'argent. Charles VII le dédommagea par la suite, et fit de la seigneurie de la Voulte un comté en 1432. Ses fils Antoine et Bermond continuèrent à servir le roi, après sa mort survenue en 1440. Louis de Lévis, fils de Bermond, suivit Charles VIII dans son expédition à Naples. Il avait épousé, en 1472, Blanche de Ventadour, et ce fut à la suite de ce mariage que la famille prit le nom de Lévis-Ventadour. Il mourut en 1521. Leur fils, Gilbert Ier, fut enfant d'honneur de Charles VIII, puis son panetier en 1496. Par la suite, Gilbert de Lévis-Ventadour combattit à la bataille de Marignan, et il y fut blessé. Gilbert Ier avait épousé Jacqueline du Mas, qui vivait pendant l'été dans son château des Éperviers, près de Saint-Cirgues-en- Montagne, et en hiver soit à Meyras soit à la Voulte. C'est elle qui a laissé le nom de Ventadour au château de Meyras, car elle y passa une bonne part de son long veuvage. Gilbert Ier mourut en effet dès 1529, et leur fils Gilbert II suivra François Ier, puis Henri II, à Amboise et à Fontainebleau. Gilbert II fut lui aussi enfant d'honneur, puis panetier de François Ier. Mais ce fut son fils Gilbert III (1547-1598) qui entra vraiment dans la carrière des honneurs : gentilhomme de la chambre du roi en 1555, gouverneur du Limousin en 1571, puis du Lyonnais, Forez et Beaujolais. Il devint duc de Ventadour en 1578, pair de France en 1589. La raison principale de cette ascension fut son mariage en 1553 avec Catherine de Montmorency, fille d'Anne de Montmorency qui était, en même temps que le cardinal de Tournon, le conseiller très écouté des rois François Ier et Henri II (Michel Riou, Ardèche, terre d'histoire: histoire de l'Ardèche et de l'ancien Vivarais, 2007 - books.google.fr, Michel Riou, Ardèche, terre de châteaux, 2002 - books.google.fr).

Leonardo da Vinci (Vinci, 1452 - Amboise, 1519), Designs for a Nativity or Adoration of the Christ Child (1480-1485) - www.metmuseum.org

A Rochemaure, le célèbre carré SATOR de la chapelle Saint Laurent renvoie à ses qualités supposées prophylactiques pour les femmes enceintes. La position agenouillée peut être mise en relation avec le mode d'accouchement grec antique (La Croix d’Huriel et la Ligne gnostique : Ligne de vie et Ligne gnostique : parallèles, Faucher les Marguerite : Sainte Marguerite, le talisman d’Aurillac, carré SATOR, Marcolès).

L'accouchement et le Sceau de Palaja sont rapprochés par l'entremise d'Artémis, la déesse qui servit de modèle à sainte Marguerite dans sa fonction de protection des femmes enceintes, sainte qui est présente à Rennes-les-Bains (Autour de Rennes le Château: Villemaury, Ligne gnostique et Sceau de Palaja : Stella luti, Le Serpent rouge : Le voyage de l’âme : La chauve-souris 2).

Le corps accouche de l'âme comme la vie accouche de la mort.

Si Socrate montre dans Phédon 72c en quel sens il existe une réciprocité au niveau de la naissance, de l'engendrement, autrement dit qu'entre "tous ces couples de contraires", il y a une "double-naissance", la démonstration n'a-t-elle pas pour but avant tout de faire savoir que "les vivants naissent des morts" : que la Vie naît de la Mort, et que la grande accoucheuse, avant d'être la sage-femme ou le philosophe, c'est surtout la Mort. Le ens de la démonstration de Socrate, c'est d'abord le souci de disqualifier le mot d'Anaxagore : "tout était confondu ensemble". Le souci donc, de la séparation qui coupe court à la "confusion-ensemble", mais de la séparation qui s'ancre dans la Mort comme source de Vie. Bien sûr, Socrate insiste sur le fait que dans l'absence d'une telle séparation, "la génération s'arrêterait", "qu'inévitablement à la fin tout serait mort et il n'y aurait plus rien de vivant". Donc, dans ce discours de Socrate, pointe un certain souci de la naissance, de la Vie. Mais ce souci de la naissance et de la Vie ne saurait masquer le souci essentiel qui se profile à travers lui : faire apparaître la supériorité de la Mort comme Origine, de la Mort comme Accoucheuse de Vie. Car, si Socrate reconnaît la réciprocité, la circularité du procès d'enfantement (la Vie accouche de la Mort et la Mort accouche de la Vie), il va montrer pourtant, en réponse à une objection de Simmias et de Cébès, la situation privilégiée de la Mort quant au procès d'enfantement. En fait, l'objection de Simmias et de Cébès consiste à expliquer que "Socrate n'a prouvé que la moitié de ce qu'il fallait démontrer, c'est-à-dire que notre âme existait avant notre naissance". Autrement dit que "tout ce qui vit naît de ce qui est mort." En effet, pour que l'explication de Socrate soit complète, il faudrait aussi prouver que "l'âme n'existera pas moins après notre mort". face à cette objection, Socrate rétorque ceci : "Si en effet, l'âme existe déjà avant nous et si, quand elle vient à la vie et naît, elle ne peut naître d'aucune autre chose que de la mort et de ce qui est mort, ne faut-il pas nécessairement aussi qu'elle existe encore après la mort, puisqu'elle doit revenir à la vie ?" Par cette réponse donc, Socrate montre bien la suprématie de la Mort dans le cycle de la naissance, dans le "cercle" de l'accouchement. Car la perpétuité de la Vie se fonde dans la perpétuité de la Mort. Car lorsque la Vie qui est née de la Mort, s'abîme dans la Mort, ne faut-il pas, pour que cette Vie revienne à la Vie, que la Mort accouche à de cette Vie ? La Mort apparaît dès lors comme point de départ et point d'aboutissement d'une circularité qui n'arrête pas de circuler : la Vie apparaît comme Retour éternel de la Mort, comme circuit éternel de la Mort. La Mort n'accouche que de la Mort, puisque la Vie dont elle accouche ne conduit qu'à ses propres conditions de reproduction. Puisqu'il n'y a de Retour, de re-naissance que dans la Mort. Il n'y aurait donc que de la Mort, si comme le dit Socrate dans un autre texte (Gorgias), reprenant Euripide : "qui sait si vivre n'est pas mourir et si mourir n'est pas vivre ?" Et Socrate d'ajouter : "Et il est possible que réellement nous soyons morts comme je l'ai entendu dire à un savant homme, qui prétendait que notre vie actuelle est une mort, que notre corps est un tombeau..." Ainsi, la réminiscence, en tant que Mémoire de la Mort comme source et accoucheuse de Vie, de la Mort comme naissance et génération supérieures : comme enfantement supérieur. La réminiscence, comme Retour et conversion, n'est-elle pas mémoire de la coupe de la Mort, souvenir de l'infanticide : de la Mort comme mort d'enfants qu'on coupe ? Et si apprendre n'est autre que se ressouvenir, la pédagogie ne consiste-t-elle pas à se souvenir de soi comme Ame : c'est-à-dire comme enfant mort ? Mémoire immémoriale du Bien-Beau, en tant qu'il ne serait pas autre chose que cette mémoire d'un accouchement stérile, d'une mort d'enfant ? L'âme (déjà la Mort) ne se souvient que de la Mort, que de ce qui la coupe vers le Bien-Beau. L'âme ne se souvient que de cette Odyssée de la Mort, que de ce retournement éternel à la Mort : l'âme qui n'est autre que cette coupe mortelle, cette conversion. Ainsi, ce qu'il y a de supérieur dans l'enfant-élève (son âme), le fait ressouvenir de la coupe qui réunit (mais qui sépare aussi) autour d'une même fête, d'un même repas, d'une même table (celle du Banquet par exemple), où cette coupe n'est pas simplement celle qui, pleine de vin ("large coupe qui circulait de gauche à droite"), est capable d'enivrer les convives et de les endormir jusqu'au lendemain matin ; mais aussi et surtout cette coupe qu'effectue la Beauté, à travers l'Amour comme désir de cette coupe de la Beauté (coupe sans doute en rapport avec celle dont il est question à la fin du Phédon, coupe de poison : "tout en disant cela, il portait la coupe à ses lèvres, et il la vida jusqu'à la dernière goutte avec une aisance et un calme parfaits"). Mais quelle est donc cette coupe du Banquet, cette coupe de l'Amour et du Beau ? Et est-elle véritablement différente de la coupe-poison du Phédon ? Or, si nous continuons notre lecture et notre enquête dans le Banquet, c'est que dans ce dialogue aussi se trouve présente (et pas du tout à titre anecdotique) la question de la philosophie comme enfantement. En fait, une phrase du Banquet nous fascine, en 206c : "Car l'amour, ajouta-t-elle, n'est pas l'amour du Beau, Socrate, comme tu le crois... Mais l'amour de la génération et de l'enfantement dans le Beau". Voilà donc un texte qui réunit à nouveau la question de l'enfantement déjà rencontrée dans le Théétète, et la question du Beau-Bien déjà rencontrée dans La République : un même texte donc, qui réunit les deux questions rencontrées séparément, et dont nous tentions de montrer le lien. Et en effet, la question de la fécondité (de l'enfantement) n'est pas traitée ici de façon anecdotique (comment cela se pourrait-il d'ailleurs, dans un dialogue dont le sous-titre est : de l'amour ?). De même que la question du Beau-Bien, que que nous avons reconnue comme question de la Mort et plus précisément de la mort d'enfants, n'y est pas non plus anecdotique : c'est ce que nous allons voir. En fait ce texte, de 206c à 207c, présente une profusion de mots et et d'expressions signifiant, de même que dans le Théétète, le lien de la philosophie et de l'enfantement : la vocation maternelle de la philosophie. Exprimant donc la philosophie comme fécondité : "Tous les hommes, dit-elle, sont féconds, Socrate, selon le corps et selon l'esprit. Quand nous sommes en âge, notre nature sent le désir d'engendrer, mais elle ne peut engendrer dans le laid, elle ne le peut que dans le beau ; et en effet l'union de l'homme et de la femme est enfantement. C'est là une oeuvre divine, et l'être mortel participe à l'immortalité par la fécondité et la génération... Aussi quand l'être pressé d'enfanter s'approche du beau, il devient joyeux et, dans son allégresse, il se dilate et enfante et produit ; quand au, il s'approche du laid, renfrogné et chagrin, il se resserre sur lui-même, se détourne, se replie et n'engendre pas ; il garde son germe, et il souffre" (Bernard Puech, Comprachicos, 1992 - books.google.fr).

Celle qui parle est Diotime, femme "accoucheuse" de Mantinée (Autour de Rennes : Les Bergers d’Arcadie ts ts !).

Diotime de Mantinée est une prêtresse et une prophétesse qui joue un rôle important dans le Banquet de Platon. En effet, avec Diotime, c’est la philosophie qui rentre en scène dans le dialogue. Plusieurs autres personnes sont présentes, mais elles n'ont pas de rôle majeur au cours de la réception. Diotime n'est pas présente lors du banquet, mais Socrate rapporte son enseignement lors de son intervention. En dehors du Banquet, il n’existe pas d’autre source mentionnant le nom de Diotime. Diotime signifierait « honorée par Zeus » ou « honorant Zeus » et Platon aurait choisi de rendre le personnage originaire de Mantinée car le nom de cette ville d’Arcadie évoque mantis, qui signifie « le devin » en grec ancien : on a donc là un nom sur mesure pour une prêtresse et une prophétesse (fr.wikipedia.org - Diotime).

Si donc l'œuvre du génie grec fut reprise par la Renaissance, c'est que les hommes de ce temps rentrèrent en possession de l'instrument premier de toute sagesse et de toute science, que les Grecs avaient merveilleusement façonné, la faculté dialectique, qui, par l'intelligence des choses réelles, atteint l'idéal, et par le raisonnement sur les vérités contingenter s'élève à la vérité nécessaire. Ce que le philosophe, le politique, le savant appellent l'absolu , ou la loi, l'artiste et le poète l'appellent la beauté. Par le même travail de l'esprit les premiers s'élèvent des phénomènes à l'absolu, et rattachent à l'éternelle loi les choses visibles et périssables ; les seconds passent des formes imparfaites à l'idéal qu'elles voilent, et transfigurent les réalités que les sens connaissent par la beauté suprême que la raison seule contemple. La théorie de Socrate dans le Banquet est encore la philosophie la plus juste de la Renaissance. Les Italiens, renonçant alors aux idées préconçues dans les sciences naturelles et géographiques, aux axiomes à priori dans les sciences politiques et la morale, au mysticisme traditionnel dans les arts, à la scolastique en philosophie, abordèrent de face la réalité, analysèrent les phénomènes et les faits, et raisonnant du connu à l'inconnu, du particulier au général, fixèrent quelques-unes des lois de nature et de l'histoire, déterminèrent la forme du monde et certaines conditions de la critique en matière d'antiquités; par la perspective, l'anatomie, l'étude des mouvements du corps et des sentiments les plus delicats et les plus fuyants de l'âme, par la couleur enfin, ils montrèrent une fois de plus, dans leurs ouvrages de sculpture et de peinture, la beauté vivante (Emile Gréhart, Les historiens florentins de la Renaissance , Séances et travaux de l'Académie des sciences morales et politiques, compte rendu, Volume 4, Volume 104, 1875 - books.google.fr).

Pour éclaircir le Livre de Tobie : la Cène et La Cassaigne

Selon une lecture animiste, le Livre de Tobie présenterait en fait un double mariage : celui de Sarah-Esprit avec Asmodée-Âme puis celui de Tobie-Corps avec Sarah-Asmodée.

Tobie : corps

Le père de Tobie, Tobit, a un étroit rapport avec les corps (matériels) puisqu'il est le fossoyeur clandestin de ses corréligionnaires en Assyrie. Lors du banquet de retrouvailles avec sa femme Anna et son fils Tobie, celui-ci avertit son père que le corps d'un juif assassiné a été retrouvé. Il l'enterrera lui-même, et deviendra aveugle dans la suite des événements.

Sarra/Sarah : esprit

L'épouse de Tobie porte le nom de la femme d'Abraham : Sarah ou Sarra.

Philon note Sarra (en grec), traduit de même en latin, pour Sarah, femme d'Abraham (Oeuvres de Philon, Sacrarum legum allegoriarum, Livre III, annoté par Thomas Mangey, 1742 - books.google.fr).

L'ouvrage où Philon traite le plus clairement de ce qu'il appelle ta enkuklia est le De congressu eruditionis gratia (Du commerce de l'âme avec les connaissances préparatoires, en abrégé De congressu). Juif hellénisé, autant imprégné de culture grecque que pétri par l'Ecriture, il applique à la Genèse la technique du commentaire allégorique et se concentre ici sur l'épisode d'Agar. Celle-ci, dit-il, symbolise les connaissances préparatoires (ta enkuklia, ta propaideumatd) tandis que Sarah incarne la sagesse, identifiée tout à la fois à la vertu, à la science, à la contemplation de Dieu et à sa parole. Le propos de Philon est de présenter Abraham comme un exemple à suivre: pour s'unir à à la sagesse, il faut au préalable avoir commerce avec les connaissances préparatoires, puis s'en écarter, comme Abraham a fait un enfant à Agar puis l'a rejetée avant d'en faire un à Sarah. L'exégète rappelle ici que c'est sur la demande de Sarah que son époux s'est approché de sa servante: c'est la sagesse elle-même qui demande que l'on ne l'aborde pas directement, et que l'on passe par une instruction préliminaire. Mais cela implique que cette dernière n'ait de valeur que propédeutique et transitoire; il faut savoir, le moment venu, s'en détacher et ne pas «vieillir avec Agar». Un tel discours connaît un écho considérable chez les Pères grecs, et en particulier chez Clément d'Alexandrie, dont certains passages des Stromates démarquent le De congressu

La figure d'Agar offre un concentré de signifiés qui favorisent son identification aux connaissances préparatoires. C'est une servante, une paidiskè, mot dérivé de pais, l'enfant, ce qui l'associe à la jeunesse, temps où l'on doit cantonner ces apprentissages. D'autre part, s'occupant des tâches matérielles, elle incarne le corporel, dont il faut, pour Philon, pour Philon, se détacher progressivement afin de s'élever vers la spéculation (tbeôria). En outre, elle vient d'Egypte: or les enkuklia constituent une culture étrangère (Philon les appelle également ta exothen) en ce qu'elles n'appartiennent pas en propre à l'âme de l'homme, à la différence de la sagesse. il existe déjà tout une tradition païenne d'assimilation des connaissances préparatoires à une figure servile, avec l'image des servantes de Pénélope utilisée par Aristippe de Cyrène (cité dans Diogène Laërce, II, 79) et par Ariston de Chios (cité par Strobée, III,21) (Hélène Parenty, La philologie à moments perdus, Bulletin de la Société de l'Histoire du Protestantisme Français, Volume 148, 2002 - books.google.fr).

Quelle idée Luc se fait-il de la sagesse ? Plus précisément : quel rapport voit-il entre sagesse et Esprit Saint ? Seulement quatre occurrences, groupées en deux chapitres consécutifs : celui qui relate l'institution des « Sept » (Ac 6,3) adjoints aux apôtres, avec mention d'Étienne (Ac 6,10), et celui qui rapporte le long discours de ce dernier devant le sanhédrin, où le narrateur semble avoir introduit ce terme de manière délibérée (Ac 7,10 et 22). [...] Les deux termes « sagesse » et « Esprit » sont tellement liés l'un à l'autre qu'on les prendrait facilement pour des synonymes. Ainsi, l'expression serait proche de l'hendiadys. Les mots « grâce et puissance » interviennent dans le même contexte, remplacés par le binôme « grâce et foi » dans les variantes du texte. [...] L'action de l'Esprit Saint, dans Luc 12,12, et celle de la Sagesse sont encore une fois jumelées pour Luc. Déjà le livre de la Sagesse opère ce jumelage, dans le sens de l'identification : Sg 1,4-7; 7,22.25; 8,1 ; 9,2-3.10-12.17 (Jean Radermakers, Sagesse et Esprit saint en Luc-Actes, Toute la sagesse du monde: hommage à Maurice Gilbert, s.j., pour le 65e anniversaire de l'exégète et du recteur, 1999 - books.google.fr).

Selon l'évêque de Cyrène Synésius, l'âme préexistante au corps acquiert, lors de sa descente pour s'incarner, une enveloppe de matière subtile, l'esprit, dans laquelle s'incrivent les "dons" des planètes, - les qualités et la destinée de l'individu futur. Le sort posthume de l'âme dépendra de la purification de son pneuma durant sa vie terrestre (R. Klein, Spirito peregrino, Revue des études italiennes, 1965 - books.google.fr).

Tel le chandelier à sept branches, qui représentait le système planétaire dans le temple de Jérusalem, les sept enceintes du temple, celles de la ville d'Ecbatane, également au nombre de sept, et teintes de couleurs affectées aux planètes (Charles Dupuis, Abrégé de l'Origine de tous les cultes, Tome I, 1830 - books.google.fr).

Les 7 maris de Sarah représentent ainsi les influences des 7 planètes liées au pneuma purifié par l'âme pieuse Asmodée qui les fait "disparaître" (les maris "meurent").

Les influences planétaires nous pénétrent de tendances animiques, de sentiments et de passions, mais l'âme animale est attirée en nous vers l'âme humaine et se soumet à son génie, tout comme, dans le Cosmos, les planètes gravitent autour du soleil. Ainsi l'homme transforme, par son moi supérieur, les tendances passionnelles de son âme et se libère des influences astrales qui le liaient (Déodat Roché, Survivance et immortalité de l'âme: fantômes des vivants et des morts, vies successives, corps lumineux de résurrection, 1955 - books.google.fr).

Thomas déclame une « Ode à la Vierge Sophia », le chant des épousailles du Christ et de Sophia. L'Ode contient des éléments valentiniens: elle établit un double mariage entre le Christ et Sophia et le Christ et l'âme. Celle-ci est louée, comme la Bien-Aimée du Cantique des Cantiques pour sa langue, son cou, ses mains jointes, semblables au rideau du Temple à l'envolée des marches ou à l'emplacement de l'arbre de vie. « Sa chambre nuptiale est éclairée et pleine des senteurs du salut » {Act. I, v.l 1). « La jeune fille est fille de la lumière... Ses vêtements sont semblables à des fleurs de printemps... Sa chambre nuptiale est splendide. Elle est parfumée avec avec toutes sortes de parfums. Les paranymphes l'entourent, au nombre de sept, choisis par elle... » (Actes de Thomas 6-7). Il y a toute une cosmologie dans la disposition des sept paranymphes, représentant les sept archontes et cieux planétaires, et des douze servants, les douze signes du Zodiaque, qui l'entourent (Ysabel de Andia, La Chambre nuptiale du cœur, Les dossiers H, 2005 - books.google.fr).

Asmodée : âme

Asmodée est présenté comme "le pire des démons" et les 7 maris promis à être de "bon maris". On peut ainsi douter qu'Asmodée représente une âme pieuse. Plutôt une âme déchue empêchant les bonnes influences planétaires. Si c'était le cas, après la défaite d'Asmodée, on pourrait s'attendre au retour de 7 autres maris, mais il n'y en a qu'un : Tobie. D'ailleurs Tobie est lié, à l'exemple de son père Tobit, à une tombe que son beau-père creuse avant la nuit de noces qu'il pense fatale. Selon Pythagore, le corps est en effet un tombeau.

Philon d'Alexandrie utilise lui aussi les vocables de daimon et d'aggelos mais sans les distinguer, comme deux synonymes. Il va même jusqu'à définir ces « anges » ou ces « démons » comme des « âmes » "Les êtres que les autres philosophes appellent des démons (daimones), Moïse les appelle généralement des anges (aggeloi) : ce sont des âmes volant dans les airs" ((De Gig. II, 6 : commentaire de Gen. 6,2 ; cf. De Somniis I,41) (Bernard Pouderon, Athénagore d'Athênes, 1989 - books.google.fr).

Quant à Tobie, ce n'est pas sans raison qu'il oppose à Raphaël «le pire des démons », Asmodée. Non seulement son nom mais son titre viennent de l'Avesta : l'hymne au Xvarenah, à la « Gloire royale » que se disputent les deux Esprits présente Aesma, "la Fureur", comme "la pire des daeva". Dans le cas oùune connaissance des Amesha Spentaserait par ailleurs attestée chez les Juifs – et cette condition est remplie – les « sept anges quise tiennent sans cesse prêts à pénétrer auprès de la Gloire du Seigneur» (Job. 12,15) pourraient transposer les sept "saints" du "Seigneur Sage" (Bernard Teyssedre, Anges, Astres et Cieux: Figures de la destinée et du salut, 1986 - books.google.fr).

Son opposition à Raphaël marquerait deux états de l'âme.

« La fureur divine, Pasithée, est l'unique escalier par lequel l'âme peut trouver le chemin qui la conduit à la source de son souverain bien ». La fureur divine aura donc quatre degrés correspondant aux quatre degrés par lesquels l'âme s'est abaissée : « En quatre sortes, ... peut l'homme estre espris de divine fureur. La première est par la fureur poétique procedant du don des Muses ; la seconde est par l'intelligence des mysteres et secrets des religions souz Bacchus : la troisieme par ravissement de prophetie, vaticination ou divination souz Apollon ; et quatrieme par la violence de l'amoureuse affection souz Amour et Venus » Il n'y a pas de différence de nature entre ces quatre inspirations, mais seulement de degré. L'âme abaissée et comme disloquée par les fonctions qu'exige le corps se recueille, s'harmonise, d'abord par la musique et la poésie. La religion y aide plus encore et « la sainte communication des mysteres et secrets religieux au moyen desquels les purifications et devotieux offices incitent l'âme à se rassembler en soy-mesme » Alors survient la troisième fureur qui éloigne « les ratiocinations intellectuelles » et « reduit l'entendement en union avec l'âme, ce qui advient par le ravissement des propheties et divinations. Aussi quiconque est esmeu de fureur divinatrice ou prophetique, tout ravi en interieure contemplation il conjoint son ame et tous les esprits ensemble... pour aller puiser aux plus intimes, profonds et retirez secrets divins la prediction de choses qui doivent advenir » Enfin l'âme ainsi unifiée se joint à l'Un par l'amour, c'est-à-dire « par un fervent et incomparable desir que l'âme ainsi eslevée a de jouir de la divine et eternelle beauté ». Telle est la théorie de Pontus de Tyard et elle ne manque point de grandeur ni même de logique dans son étrangeté. Elle n'est du reste que le développement d'une page de Ion déjà expliquée, en ce qui concerne les poètes du moins, par Ficin et Pomponazzi — et bien avant eux par Cicéron et Plutarque (Le rationalisme dans la littérature française de la Renaissance (1533-1601), 1971 - books.google.fr, Marc Carnel, Le sang embaumé des roses: sang et passion dans la poésie amoureuse de Pierre de Ronsard, 2004 - books.google.fr).

C'est en Egypte qu'Asmodée est lié par Raphaël. L'Egypte est l'image de la matière et du corps déjà chez Philon.

Sans doute subsiste-t~il, entre Israélites et Egyptiens, le vif souvenir d'une antinomie que, pour les premiers, la lecture du livre de l'Exode vient sans cesse raviver. C'est à tel point que, tout particulièement chez Philon, se développe constamment un ensemble d'allégories que recueilleront ensuite fidelement les exégètes chrétiens: l'Egypte - la «Maison de Servitude» - et le Nil sont l'image de la matière et du corps esclave des passions, tandis que Pharaon lui-même représente la dispersion de l'âme loin du bien, et l'asservissement au plaisir ! Pour l'Ancien Testament, l'Egypte est l'image de la «terre de servitude». Certains passages de l'Exode (par exemple II, 23) ont ete interprétés en ce sens; selon Philon (Legum Allegoria III, 212 et 236, et Sacrifices d'Abel et de Cain 48-51), l'Egypte est de type meme de la matière et du corps lié aux passions tandis que Pharaon - seigneur et maître de Madame Putiphar ! - est l'esprit attache au plaisir, dispersant l'âme et la détournant du bien. Le fait que l'égyptienne Agar était esclave (Genese XVI, 1-16) allait être compris comme un symbole de même nature : cf. Galates, IV, 23-31, puis les Extraits du gnostique Theodote (édition Sagnard, Paris, 1948, § 56,5) (Jean Doresse, Des Hiéroglyphes à la croix, ce que le passé pharaonqiue a légué au christianisme, 1960 - www.nino-leiden.nl).

La corporéité de Dieu est une notion des Stoïciens qui, selon un texte médical, avaient introduit l'hexis, un "pneuma", à côté de la phusis et de la psykhè, elle même se subdivisant selon une échelle allant de l'âme sensitive à l'intellect constituant une tripartition.

La causalité exigeant le contact, Dieu est donc corporel, comme l'âme qui a une action sur le corps est aussi corporelle que lui (La Croix d’Huriel, ses anges et les humeurs : Au nom du Père, du Fils et du saint Esprit, Amen - books.google.fr, Jean-Joël Duhot, La conception stoïcienne de la causalité, 1989 - books.google.fr).

Raphaël : encore l'âme

Autre mariage biblique : celui de Tobie et Sarra, que la Bible de Roda présente encore selon un mode narratif en choisissant le schéma du repas de noces. Le destinateur de ces noces, l'ange Raphaël, occupe la place d'honneur, au centre du banquet ; à sa gauche, les époux s'embrassent, tandis que Ragouël boit et que sa femme Edna s'apprête à découper les mets. L'atmosphère est à la fête, toute profane, même si la présidence de l'ange confère à la scène une valeur eschatologique (Colette Manhès, Jean-Paul Deremble, Les vitraux narratifs de la cathédrale de Chartres, 1993 - books.google.fr).

Biblia Sancti Petri Rodensis (folio 127 recto), Latin 6 (3) (901-1100) - BNF - gallica.bnf.fr

Nous, chrétiens, pour travailler et traiter la grande affaire de notre salut, nous avons à notre service plus que le guide du jeune Tobie. Notre Raphaël à nous, c'est Jésus-Christ lui-même, les sacrements qu'il a établis, ses exemples et sa divine doctrine. Nous avons surtout, o res mirabilis! ô chose inexprimable! nous avons la Sainte Communion, ce Pain des anges, devenu la nourriture des hommes, ce banquet sacré où le Seigneur a convié d'abord les apôtres, sa très sainte Mère et les premiers martyrs de la foi naissante (Mgr Basilios Aggiar, Le dogme eucharistique, Congrès des oeuvres eucharistiques tenu à Jérusalem en 1893 - books.google.fr).

La Cène

Dans la suite de conception de Christ-Âme, les paroles de Jésus lors de son dernier repas ont une résonnance animique, même si tous les épisodes des Evangiles ne peuvent être traduits de cette manières : "Ceci est mon corps" : évidemment le "corps" ; "ceci est mon sang" : le pneuma, le Christ étant l'âme donnant le mouvement (action) à l'ensemble.

Selon le chapitre X du Corpus Hermeticum, "la nature de ce souffle vital n'est guère douteuse, puisque l'âme s'en est revêtue en descendant vers la terre et en passant par les orbites planétaires : il est de la même nature que la substance aérienne qui nous entoure et dans laquelle les planètes suivent leur parcours régulier. Le terme pneuma est d'ailleurs employé fréquemment dans les écrits hermétiques pour désigner la couche d'air située entre la terre et le ciel. C'est en raison de la connaturalité existant entre l'enveloppe de l'âme et la région des planètes, que ce même terme a été employé : il désigne donc bien la nature aérienne de cette enveloppe psychique. Si dans certains textes il est question d'un "pneuma aitherion" ou "ieron", nous croyons que ces épithètes proviennent de la présence, dans cette région, des planètes qui sont regardées comme des êtres supérieurs. Par suite de sa position intermédiaire entre l'âme et le corps, le pneuma exerce une grande influence sur ces deux principes constitutifs de l'homme. Comme il circule dans les artères, avec le sang, il tient pour ainsi dire l'organisme tout entier" (Gérard Verbeke, L'Evolution de Doctrien du Pneuma, 1945 - books.google.fr).

Léonard de Vinci, La Cène (1495–1498), Milan - fr.wikipedia.org - La Cène

En 1460, un manuscrit de 14 brefs traités en grec fut rapporté à Florence de Macédoine par un moine, Leonardo de Pistoia, et vendu à Cosme de Médicis. Cosme en confia la traduction au jeune Marsile Ficin, prioritairement à celle des dialogues de Platon. Ces textes forment les quatorze premiers traités du Corpus Hermeticum moderne (Chapitres I à XIV).

Selon Bloomfield (The Seven Deadly Sins), "ces écrits sont essentiellement le produit de néoplatoniciens égyptiens qui subissaient la nette influence du stoïcisme, du judaïsme, de la théologie persane et, peut-être, des croyances égyptiennes indigènes, en même temps, bien sûr, que celle de Platon, surtout le 'Timée'. Il s'agissait peut-être de la bible d'un culte de Mystères égyptien dont le noyau remonte peut-être jusqu'au IIe s. av. J.-C." (fr.wikipedia.org - Hermetica).

Huriel

Huriel a un rapport avec la Joconde qu'un professeur italien a identifiée comme étant Philiberte de Savoie, la petite-fille de Jean II de Brosse, baron d'Huriel, et épouse de Julien de Médicis. Huriel est encore lié à la Vierge aux rochers, qui semble être un plan de la croix d'Huriel, par la présence de l'ange Uriel (Les sommets de la La Croix d’Huriel : Huriel, La Croix d’Huriel et Rennes le Château : Sot Pêcheur et Par ce signe tu le vaincras 2).

Les mains en raccourci

Les quatre tableaux mis en rapport avec les sommets de la Croix d'Huriel présentent une "main en raccourci", paume en dessous et les doigts à moitié pliés.

Aucun original de la main de Léonard ne peut être associé à la Vierge au dévidoir. Seules différentes versions de l'école du maître évoquent cette composition. Il s'agit d'œuvres de petites dimensions, à usage domestique et dévotionnel, probablement destinées à la vente. Lorsque la composition générale est établie, les membres de l'atelier reproduisent l'invention, Léonard intervenant alors plus plus ou moins en cours d'exécutionM. Une telle reconstitution est basée non seulement sur les analyses stylistiques mais aussi sur les sources, qui attestent ce type de collaboration entre le maître et ses élèves. [...] Ainsi, les meilleures versions de la Vierge au dévidoir - celle conservée en Ecosse, à Durmlanrig Castle, dans la collection du duc de Buccleuch et celle d'une collection particulière de New York, qui provient de la collection Battersea et Reford - ont-elles été réalisées en collaboration. En effet, les réflectographies en infrarouge qui ont été effectuées sur ces deux exemplaires révèlent des changements dans la composition, notamment dans l'arrière-plan qui présente une Nativité qui, finalement, n'a pas été peinte. Or, de tels repentirs prouvent qu'on a affaire à des œuvres réalisées, sans doute simultanément, sous la direction de Léonard.

Ces peintures démontrent aussi que le maître ne répugne pas aux répétitions : pour la Vierge, il réemploie la main vue en raccourci, qu'il avait utilisée dans la Vierge aux rochers (Musée du Louvre) ; de même, la position de l'Enfant, dont le corps forme une ligne oblique, annonce celle qu'il adoptera dans la Saine Anne (National Gallery de Londres). La commande de Florimond Robertet n'est pas documentée mais on présume qu'elle date de 1499, d'avant le départ de Léonard pour Florence. Toutefois, il semble que l'artiste ne se soit véritablement mis au travail qu'aux environs de 1501 : Isabelle d'Este n'est informée de la commande qu'à cette date ; le paysage qui s'étend derrière la Madone reflète les Alpes de la Vénétie, un panorama que Léonard ne découvre qu'en mars 1500, lors de son séjour à Venise. Par conséquent, en 1501, Fra Pietro da Novellara ne voit pas une œuvre terminée mais un tableau en cours de réalisation. C'est également ce que suggère la description du moine, qui ne peut jamais être associée à à l'une des versions connues de la Vierge au dévidoir. En effet, d'après la lettre, Léonard peint une Vierge qui s'apprête à dévider des fils placés sur un fuseau afin de les mettre en pelote. Fra Pietro da Novellara évoque précisément cette corbeille de fuseaux, située, selon lui, en dessous du pied de l'Enfant. Or, dans les œuvres des leonardeschi qui nous sont parvenues, l'Enfant ne pose jamais le pied dans le panier aux aux fuseaux. Par ailleurs, les traverses du dévidoir sont habituellement réduites de façon à évoquer immédiatement la croix. Ainsi Jésus ne joue-t-il pas avec le dérouleur, comme Fra Pietro da Novellara le prétendait, mais il contemple gravement l'instrument de sa future Passion. De ce fait, les allusions symboliques ont été renforcées. L'expédition de la Vierge au dévidoir en France et la livraison à Florimond Robertet ne sont pas documentées. On a supposé qu'elles datent des environs de 1507 : dans une lettre du 12 janvier 1507, l'ambassadeur florentin en France, Francesco Pandolfini, rapporte que Louis XII a vu « un piccol quadro suto condocto ultimamente di qua di mano sua quale è stuto tenuto cosa molto excellente », un tableau que l'on rapproche habituellement la Vierge au dévidoir, même si rien n'indique qu'il s'agit assurément d'une telle composition. Après 1507, l'histoire de l'œuvre s'avère tout aussi difficile à reconstituer : elle ne figure pas dans l'inventaire du château de Bury que la femme de Robertet, Michelle Gaillard, dresse le 4 août 1532. Puisque cet acte ne mentionne aucune œuvre de Léonard, on en a conclu que la Vierge au dévidoir avait quitté les collections de Robertet avant 1532. Si elle était passée dans la collection royale française - ce qui a parfois été avancé - elle serait mentionnée dans les sources. Or, aucune peinture identifiable à la Vierge au dévidoir n'apparaît dans les inventaires de la collection royale de peintures. En revanche, on sait que la version aujourd'hui conservée dans la collection du duc de Buccleuch appartenait, au XVIIIème siècle, au duc d'Hostun et de Tallard et que, selon Martin Kemp, Florimond Robertet fréquentait, de son vivant, fréquentait, de son vivant, un seigneur de Tallard. Au vu de ces éléments, l'auteur a estimé que la version du duc de Buccleuch coïncidait avec l'œuvre destinée au secrétaire des finances. Finalement, les certitudes sont rares pour étayer une telle reconstitution (Laure Fagnart, Léonard de Vinci en France, 2009 - books.google.fr).

The foreshortened hand which features in the Madonna of the Yarnwinder is a case in point. It first appears in the Virgin of the Rocks, and is reworked to provide the right hand of Christ and the hand of St. James the Greater in the Last Supper, subsequently reappearing in remodelled form in the versions of the Madonna with the Yarnwinder (in two variants, as we will see), in the composition of the Madonna with the Holy Children at Play, and with minor modifications in the second version of the Virgin of the Rocks (Martin John Kemp, The 'Madonna of the Yarnwinder' in the Buccleuch Collection reconsidered in the context of Leonardo's studio practice, I Leonardeschi a Milano: fortuna e collezionismo, 1991).

The 'Madonna of the Yarn Winder' was close in style to the Paris 'Virgin of the Rocks'. In spirit it is similar to the kneeling Madonna with the playing Children, and shows that Leonardo could still relax into the happy, tender mood of his first Florentine drawings. We must suppose that in execution it was similar to the Mona Lisa, subtler and solider than the early Madonnas, but of this our only evidence is a red chalk drawing at Windsor (12,514), a study from the model of the Virgin's shoulders, which combines firmness of structure with the delicate pearly quality of a Watteau (Kenneth Clark, Leonardo Da Vinci: An Account of His Development as an Artist, 1958 - books.google.fr).

La main de Marie de la Vierge aux rochers et de la Vierge aux fuseaux est dans une position entre fermeture et ouverture, avec des doigts à moitié pliés. Signe de protection ?

La Logique des stoïciens anciens avait été poussée assez loin. De leur matérialisme, selon lequel il n'existe que les corps, les stoïciens tiraient cette conséquence que la réalité connaissable ne consiste qu'en individus agissant actuellement sur d'autres individus : c'est la notion de fait. Les termes d'une proposition énoncent des faits (ta tugkanonta), des événements, non des concepts (qui sont de l'incorporel, donc de l'irréel). En ce sens, il n'y a de réel que l'action présente, et il n'y a de prédicat réel que le verbe. En ce sens encore, c'est seulement dans la quatrième catégorie, celle de la relation, que les trois autres (substance, qualité, mode) trouvent réalisation. La question du critère et celle du raisonnement tirent de ce point de départ leur principe de solution.

Toute connaissance se réduit à la sensation; car la représentation (phantasia) n'en est qu'une suite, la mémoire n'en est qu'une conservation et les concepts universels (koinai ennoai) ne sont que le résultat de plusieurs sensations d'objets pareils. Mais il est difficile de s'assurer que notre connaissance saisit vraiment un objet réel; bref, qu'elle est compréhensive (katalèptikè). Il ne peut s'agir ici de pure sensation, car qui dit sensation, dit passivité; mais seulement de la représentation phantasia. Or, il y a plusieurs degrés dans la façon de saisir par la connaissance, comme dans la façon de saisir par la main. La comparaison est de Zénon : Zénon, tenant sa main ouverte devant lui avec les doigts étendus, disait : « Voici ce qu'est la représentation. » Puis, les refermant un peu, il ajoutait : « et voici ce qu'est l'assentiment ». Et quand il avait serré complètement les doigts et avait fermé le poing, il disait que c'était la compréhension. Et c'est de cette comparaison qu'il tira le nom, jamais encore utilisé, de compréhension. Puis, quand il avait renfermé dans sa main gauche la main droite fermée en poing et comprimé ce poing exprès et de toutes ses forces, il disait que la science était comme cela, la science que nul ne possède, sauf le sage (Cicéron, Académiques pr., II, 144) (Paul-Bernard Grenet, Histoire de la philosophie ancienne, 1965 - books.google.fr).

La symbolique de la main Zénon compare, d'une façon très parlante, le mouvement de la connaissance à celui de la main : ouverte, elle symbolise la représentation ; en train de se fermer, elle symbolise l'assentiment ; fermée, elle symbolise la compréhension ; serrée, elle symbolise la science.

La vérité se manifeste dans ce que les stoïciens nomment la « représentation » (phantasia, en grec) qui, pour être vraie, doit obéir à des critères: la clarté, la compréhensibilité. Voilà pourquoi, ils sont les premiers à élaborer une théorie de l'évidence (energia, en grec) : la vérité de la représentation présuppose un « assentiment » (= acte par lequel on approuve la représentation) (Claude-Henry du Bord, La philosophie, Tout simplement !, 2011 - books.google.fr).

L'impression d'une chose réelle (uparchon), passivement reçue par l'âme comme une empreinte (Cléanthe, et peut-être Zénon), ou plutôt comme une altération (Chrysippe), produit en celle-ci une représentation (phantasia, visum) : elle est alors, selon la fameuse comparaison de Zénon, pareille àla main largement ouverte. Une légère contraction des doigts vers la paume sera maintenant le symbole de l'assentiment (sugkatathesis, assensus) donné àla représentation par le principe dirigeant ; à côté de la représentation, cause prochaine et en un sens extérieure, possédant d'ailleurs son poids et sa marque propres, voici une cause principale : en accueillant la représentation, nous lui conférons l'évidence. Puis la main se ferme complètement sur sa « prise » : c'est la compréhension (katalepsis) ; la représentation est alors compréhensive, c'est une perception. Enfin, pour garder ce que j'ai ainsi appréhendé, je peux serrer de l'autre main ma main fermée : c'est l'image non de l'opinion, fruit d'un assentiment faible, mais de l'art et de la science, systèmes de représentations compréhensives, le premier, empirique et orienté vers une fin,le second, assuré, ferme, irréfutable (Léon Robin, La Pensée grecque et les origines de l'esprit scientifique, 1923 - books.google.fr).

La séquence constitutive de la connaissance dans le stoïcisme de Chrysippe suit la séquence : représentation, assentiment, ormè, action (Carlos Lévy, Plutarque juge et partie : à propos des débats entre l’Académie, le Jardin et le Portique, 2013 - aitia.revues.org).

Le concept d’assentiment (sugkatathesis) occupe une place essentielle dans le système stoïcien dont il fonde à la fois la cognition et l’éthique, ce qui explique qu’il fut une pomme de discorde dans les débats qui opposèrent stoïciens et académiciens. Ce mouvement psychique de nature corporelle, produit dans l’hégémonique par le pneuma de la faculté rationnelle de l’âme et doté d’une tension plus ou moins forte, est un jugement qui valide nos représentations (Marie-Odile Goulet-Cazé, A propos de l’assentiment stoïcien, 2011 - books.google.fr).

Le passionné a eu la malchance de donner son assentiment à une aperception incomplète, mais tout le monde n'est pas un athlète assez musclé : pour ne pas le donner, il aurait fallu que la tension fût moins relâchée. Une erreur est un « assentiment fait sous faible tension », une synkatathesis asthenês. Galien objectait, au monisme stoïcien, que la passion prouvait qu'il y avait deux parties dans l'âme, en lutte l'une contre l'autre ; aux yeux d'un stoïcien, l'objection est sans portée : la droite raison a pour condition une tension suffisante, dont elle est la conséquence, et la passion n'est que la conséquence d'un manque de tension dans l'âme qui est une. Ce n'est pas tout : une tension trop faible ne se borne pas à ôter le moyen de bien juger où est le vrai bonheur stable, elle empêche de jouir de tout bonheur. En effet, elle produit dans le pneuma les irrégularités, les troubles parasites du flux et qui ne sont autre chose que cette affectivité qui fait le malheur de nos existences (Paul Veyne, L'Empire gréco-romain, 2005 - books.google.fr).

Dans la physique des stoïciens, l'univers tout entier est pénétré d'une espèce de fluide, de souffle vital, le pneuma dont la tension (tonos, en grec) maintient la cohésion des parties du monde, assure l'individualité de chaque être ; il n'est en somme rien d'autre que le Logos universel (Claude-Henry du Bord, La philosophie, Tout simplement !, 2011 - books.google.fr).

Le bonheur de la Vierge est d'avoir accepté ce message divin et de s'y être conformée par un assentiment plénier. La valeur morale de cet assentiment était renforcée par le libre acte de foi qui y avait présidé. « Heureuse, dira Elisabeth sous l'inspiration divine, celle qui a cru que s'accompliraient les choses qui lui avaient été dites de la part du Seigneur ! » (Luc, I,45). Le mérite de Marie est d'avoir accueilli le message avec foi et avec entière soumission; sa sainteté subjective s'est accrue par là, et c'est à ce titre, suivant les deux déclarations de l'Évangile, qu'elle est heureuse (Hubert Du Manoir, Maria : études sur la sainte vierge, Tome VI, 1958 - books.google.fr).

Déjà saint Augustin et saint Bernard disaient :

L'entrée nous est permise, si vous prêtez votre assentiment : Est nobis aditus, si assensus tuus fuerit commodatus. Vous nous sauvez en vous rendant heureuse, parce que notre peine disparaît, et le Père fera les noces de son Fils en vous : Et nobis succurris et tibi, quia nobis pœna succurrit, et tibi nuptias Filio suo in tuo thalamo Pater prœparabit (Saint Augustin, Serm 17, super Natal. Domini) ;

Heureuse Vierge, ouvre ton cœur à la foi, tes lèvres à l'assentiment, ton sein au Créateur (Saint Bernard, Serm. 4 super Missus est, 1153) (Jean-Paul Dufour, En l'honneur de la Vierge Marie: Choix de prières, méditations, chants, 2005 - books.google.fr, (Jean-André Barbier, La Sainte Vierge d'après les Pères, 1867 - books.google.fr).

Va pour la Vierge, mais Jésus avec sa main droite à moitié ouverte derrière le verre de vin ("ceci est mon sang") tandis que la gauche désigne un petit pain ("ceci est mon corps") ? Assentiment à son destin, à sa mise à mort, et avant, à la trahison de Judas ("Ce que tu fais, fais le promptement, Jean 13,27).

Les mains du Christ dans la Cène

Chez les Stoïciens, "dans la mesure où elle est aussi la raison, la partie directrice de l'âme humaine peut examiner, évaluer et éventuellement valider ce qui se passe en elle; il est même impératif qu'elle donne son « assentiment » (sugkatathesis) à ses représentations et ses impulsions pour que celles-ci deviennent effectives, c'est-à-dire donnent à voir une réalité ou suscitent une action. Cette capacité propre à la raison d'assumer ou de censurer ses perceptions et ses intentions, est le fondement de l'autonomie humaine et conduit les stoïciens à imputer à la seule partie directrice de l'âme la responsabilité de toutes ses affections, dans la mesure où celles-ci ne peuvent se développer qu'avec son accord, qu'il soit implicite ou explicite" (Thomas Bénatouïl, Faire usage: la pratique du stoïcisme, 2006 - books.google.fr).

Christ-Âme est ainsi la source de l'approbation manifestée par son geste de la main. Mais uniquement du côté du vin transmuté en sang, véhicule du pneuma/esprit.

L'ancien canon romain demandait à Dieu de daigner bénir cette offrande [pain et le vin de l'eucharistie], l'agréer, l'approuver pleinement, la rendre parfaite et digne de lui plaire, afin qu'elle devienne pour nous le corps et le sang de ton Fils bien-aimé » (Stanislas Lyonnet, S.J., La nature du culte chrétien, Studia Missionalia: Vol.23, 1974 - books.google.fr).

C'est le Concile Vatican II qui, dans le rite catholique, insistera sur le rôle de l'Esprit Saint dans l'eucharistie, rôle qu'avait défini les Eglises orientales.

L'approfondissement de la théologie de la troisième personne de la Trinité provoque, en Orient, un développement de la première partie de la Prière eucharistique sous la forme d'une épiclèse : que l'Esprit vienne sur le pain et le vin pour qu'ils deviennent le corps et le sang du Christ. La sanctification de ceux qui reçoivent l'eucharistie est bien la conséquence de la consécration, qui est l'œuvre de l'Esprit.

Plaise à ta bonté que vienne ton Esprit saint sur nous et sur ces dons ici offerts, qu'il les bénisse, les sanctifie et manifeste ce pain comme le vénérable et propre corps de notre Seigneur, Dieu et Sauveur Jésus Christ, et ce calice comme le vénérable et propre sang de Notre-Seigneur, Dieu et Sauveur, Jésus-Christ, répandu pour la vie du monde. Et nous tous qui participons au même pain et au même calice, fais que nous soyons unis les uns aux autres dans la communion de l'unique Esprit. Fais qu'aucun de nous ne prenne part au Corps sacré et au sang de ton Christ pour son jugement ou sa condamnation, mais pour que nous trouvions miséricorde et grâce avec tous les saints en qui tu t'es complu depuis le commencement des âges (Robert Cabié, Histoire de la Messe: des origines à nos jours, 1990 - books.google.fr).

L'ange Uriel, uniquement reconnu par les Eglises orthodoxes et se dédoublant en Huriel, planait peut-être sur Léonard.

L'évêque Fulgence de Ruspe (Vème-VIème siècle) en Afrique du Nord, région d'origine de saint Augustin, écrit dans un ouvrage composé à la fin de sa vie contre l'évêque arien Fabien :

Puisque donc le Christ est mort pour nous par amour, quand, au moment du sacrifice, nous faisons la commémoraison de sa mort, nous demandons que nous soit accordé l'amour par la venue du Saint Esprit: nous supplions que, en vertu de l'amour lui-même, en vertu duquel le Christ a daigné être crucifié pour nous, nous aussi, en recevant la grâce du Saint Esprit, nous puissions tenir le monde pour crucifié et être crucifiés au monde (Stanislas Lyonnet, S.J., La nature du culte chrétien, Studia Missionalia: Vol.23, 1974 - books.google.fr).

Un des thèmes favoris de la philosophie du Portique est celui de l'assentiment en tant que fonction active d'une âme, passive par constitution. L'âme, pense Origène à la suite du Portique, a un double aspect: elle est active dans la mesure où elle peut s'abandonner librement soit à Dieu soit aux esprits méchants, et elle est également passive dans la mesure où elle constitue le lieu de l'activité divine ou démoniaque. L'âme, comme la femme, subit passivement le siège de ses amants mais se réserve le droit de choisir librement de se donner à celui qui lui plaît. Balançant entre le pneuma et le corps, entre Dieu et les esprits mauvais, l'âme, d'après Origène, qui opte pour le pneuma, tend vers Dieu tandis que l'âme qui se donne au corps est dominée par des esprits hostiles à Dieu. Il est vrai qu'il y a chez Origène une conviction de provenance platonicienne d'après laquelle l'âme est tenue de ne pas se consacrer entièrement au corps et à ses désirs irrationnels. Cependant cette profonde conviction d'Origène doit être comprise dans le cadre de la problématique chrétienne de l'âme comme miroir. L'âme est le sujet des métamorphoses. En effet, elle se transforme elle-même soit en âme "chamelle" chaque fois qu'elle cède aux désirs du corps et des esprits perfides soit en âme "spirituelle" chaque fois qu'elle cède à ceux du pneuma humain et de Dieu. Le qualificatif "charnelle" désigne souvent chez Origène l'âme qui vit exclusivement pour servir le corps et ses propres désirs (Georges Lekkas, La féminité de l'âme chez Origène, Revue de philosophie ancienne, Volume 16, n° 1, 1998 - books.google.fr).

Au dernier repas, le Christ-Âme donne son assentiment au pneuma, symbolisé par le vin et émanation du sang, plutôt qu'au corps, le pain. Sa main ouverte, devant le pain, est symbole de la représentation pour le stoïcien Zénon.

Pour les premiers stoïciens, la phantasia, l'hègémonikon, et le pneuma forment un tout, unique et corporel. La séparation de ces divers éléments, la spiritualisation progressive de l'âme, sa distinction d'avec le pneuma, ont dû être l'oeuvre du moyen-platonisme, et notamment de Poseidonios. Ce dernier détient probablement la clé des origines du lumineux néo-platonicien. Hélas, seuls quelques fragments de son oeuvre nous sont parvenus. Alors que M. Laffranque voit en lui un matérialiste convaincu, J. Pépin, en revanche, le montre sensible à l'influence de Platon, au point de prôner, peut-être, l'immortalité de l'âme. Ce qui est certain, c'est que la notion de de phantasia, et surtout celle de pneuma, ont joué un trop grand rôle dans le stoïcisme, et que le stoïcisme a pesé d'un trop grand poids sur la philosophie antique, pour que les néo-platoniciens aient pu échapper totalement à son influence dans ces deux domaines. Le corps lumineux, ce pneuma aux frontières de la matière et et de l'immatériel, a dû naître d'une certaine convergence entre les deux doctrines, comme le suggèrent certaines lignes de Sextus Empiricus a propos de Poseidonios. Si ce demier n'est pas parvenu à un dualisme intégral, c'est, d'après G. Verbeke, "parce qu'il se représentait le monde comme une échelle, graduellement ascendante, de perfections étagées les unes au-dessus des autres, avec des transitions insensibles de l'une à l'autre, sans aucune fêlure, sans aucun hiatus, mais comportant une épuration graduelle à partir de la matière la plus grossière jusqu'au pneuma le plus subtil". Le pneuma phantastikon de Synésios garde encore des traces de cette continuité sans faille de la matière, de la plus basse à la plus haute condition. Chez Hiéroclès, en revanche, le corps lumineux est plus spirituel que matériel, et ne permet qu'une simple cohabitation entre la chair et l'âme. Dans le Commentaire sur les Vers d'Or, la phantasia est qualifiée de matérielle (hylikè), alors que le corps lumineux est un sóma aülon, un corps immatériel. L'Alexandrin, à l'encontre de Synésios, distingue donc nettement ces deux dernières notions, et sépare, par un fossé infranchissable, le spirituel du matériel. Il se libère ainsi, définitivement, sur ce point, de l'influence des stoïciens (Noël Aujoulat, De la phantasia et du pneuma stoïciens, d'après Sextus Empiricus, au corps lumineux néo-platonicien (Synésios de Cyrène et Hiéroclès d'Alexandrie), Pallas N° 34, 1988 - books.google.fr).

L'âme est corporelle, comme parcelle de la divinité qui est elle-même corps.

En descendant à travers les sphères célestes, le véhicule de l'âme recueille des éléments à partir de chaque sphère, en les intégrant à son corps pneumatique. Lorsqu'elle arrive sur la terre, donc, l'âme ressemble à une espèce d'oignon dont la couche extérieure est formée du corps sensible en chair et en os, et la couche intérieure du "nous" ou du "logos", étincelle du monde intelligible qui constitue ce qu'il y a de divin dans l'homme, son véritable soi-même. Entre l'âme et le corps se situe dorénavant le pneuma, étroitement lié, sinon identique, à l'âme inférieure ou irrationnelle.

Pour identifier le logos (ou l'hegemonikon des Stoïciens maîtres des cinq sens, de la voix, et du pouvoir de procréer, ou encore le corps lumineux de Macrobe entaînant avec lui les facultés nées des 7 planètes), au pneuma, il faudrait penser que ce logos n'est pas cette ultime couche, mais qu'en deça l'âme git. Le logos serait le noyau du pneuma, véhicule de l'âme (La Croix d’Huriel et l’alchimie : Triple correspondance : chemin de croix, oeuvres alchimiques et voyage de l’âme).

Les stoïciens, au prix d'un effort vraiment original, ont rendu l'hégémonikon corporel capable d'imaginer des incorporels. Quand on sait que le terme d'asómata sera employé par les philosophes néo-platoniciens pour désigner les êtres qui dépassent le monde sensible, on ne peut s'empècher de rapprocher, toute proportion gardée, l'hègémonikon stoïcien du thespésion soma du Traité des songes de Synésios (Les origines stoïciennes du corps lumineux, Pallas, Numéros 34 à 36, 1988 - books.google.fr).

La main ouverte devant le pain serait la "représentation" face au corps : "représentation corporelle" qui "est elle-même déjà une image de la chose, qui permet à la chose d'être présente à l'âme sur le mode incorporel" (Emmanuel Bermon, La signification et l'enseignement: texte latin, traduction française et commentaire du De magistro de Saint Augustin, 2007 - books.google.fr).