Partie VII - Cohérence grand nonagone   Chapitre IL - Deuxième Etoile   Edern - Rennes-le-Château   

Edern - Rennes-le-Château

La dominante de cette diagonale repose sur saint Pierre et à l'occasion saint Paul.

Brouage, Bois, Ploemeur, Cravans, Champagnolles, Gémozac, Montpeyroux et Saint-Pierre-Quiberon possèdent des églises paroissiales dédiées à Pierre. Boudou en a deux sur son territoire, l'église paroissiale de Saint-Maurin était consacrée primitiviment à Pierre, et, sur la commune existe Saint-Pierre-del-Pech. Il y aurait eu à Rennes-le-Château une église Saint-Pierre selon Louis Fédié. Alaigne avait son couvent Saint-Pierre.

Pierre et Paul sont représentés par les églises d' Ajac, Guidel, Dieupentale, Le Trévoux, Casseneuil, Gasques, par les sculptures de Pompignan, Meursac. Edern, dépendait avant 1008 il est vrai, de Briec dont la paroisse est consacrée à Pierre et Paul.

Roquetaillade a son église vouée à saint Etienne, qui subit le martyre sous les yeux de Saül, pas encore Paul. Flourens possède dans l'église Saint-Martin une copie d'un tableau de Rubens, prénommé justement Pierre Paul, représentant la Crucifixion. Avignonet-Lauragais et Mas-Saintes-Puelles se placent sur le Canal du Midi dont le promoteur est... Pierre Paul Riquet. Paul est représenté à Donazac en l'église de la Conversion de saint Paul.

Saint Saturnin est lié à Pierre et Paul depuis la fixation de sa légende hagiographique qui en fait le disciple des deux apôtres. Une tapisserie conservée à Angers en témoigne. Au centre de la pièce, saint Paul, vêtu de blanc et portant l'épée qui servira à sa décollation, invite Saturnin à prêcher l'Évangile. Saint Pierre, couronné de la tiare papale et tenant les deux clefs de la ville de Rome, lui confère la dignité épiscopale, symbolisée par la crosse et la mitre. On trouve des églises Saint-Saturnin à Agnac, Montignac-de-Lauzun. Mas-Saintes-Puelles, où est né saint Pierre Nolasque, associe les deux par la légende des Puelles sur saint Saturnin et son église paroissiale premièrement consacrée à saint Pierre.

Pierre, qui n'en était pas à son premier reniement, a-t-il renié aussi l' " Eglise " de Jacques pour passer à celle de Paul avec lequel il entra en conflit lors de la " dispute d'Antioche " ? Pierre s'est-il retrouvé à Rome avec Paul pour finalement y souffrir le martyr comme le dit la légende ? Un dicton " Attacher Pierre avec Paul " pose la question. Pierre, d'ailleurs, disparaît des Actes des Apôtres au chapitre 15 pour ne plus y revenir, comme une passation de pouvoir entre lui et Paul. Mais il est vrai que les Actes sont rédigés par Luc, un fidèle de l'apôtre des Gentils.

La " dispute d'Antioche " révèle la fracture entre les partisans d'une Eglise suivant la loi de Moïse accomplie, fréquentant le Temple et appelant à la conversion au judaïsme et celle ouverte aux Gentils en rupture avec les temps bibliques. Selon Matthieu, " Jésus était venu pour les brebis perdues de la maison d'Israël " et envoya ses disciples évangéliser les Juifs de Judée. Les hellénistes, dont Etienne fut le premier martyr, subirent en premier les persécutions. Ils quittèrent Jérusalem et fondèrent à Antioche l'Eglise chrétienne. Paul approuva premièrement le supplice d'Etienne auquel il assista. Selon l'auteur des Actes, Etienne condamne le Temple comme limitation et enfermement du dieu d'Israël, il accuse le Sanhédrin de la mort du Juste. Les persécutions s'en prennent ensuite aux judaïsants. L'apôtre Jacques est exécuté et Simon-Pierre est emprisonné.

L'Eglise dont Jacques était le chef, aurait été anéantie lors de la guerre des Juifs et la destruction de Jérusalem en 70.

Paul renverse les valeurs sociales et les modèles de vertu qui sont ceux de l'Empire : Regardez-vous donc, frères, vous les appelés ; il n'y a pas parmi vous beaucoup de sages selon la chair, ni beaucoup de puissants, ni beaucoup de nobles. Mais Dieu a choisi ce qu'il y a de stupide dans le monde pour faire honte aux sages, et Dieu a choisi ce qu'il y a de faible dans le monde pour faire honte à ce qu'il y a de fort, et Dieu a choisi ce qu'il y a de vil dans le monde et de méprisé, ce qui n'existe pas, pour abolir ce qui existe, afin que nulle chair ne se vante devant Dieu (1 Cor. I, 26-29). Nul législateur, nul hiérarque, nul archonte, nul puissant ne saurait, désormais, se prévaloir d'une quelconque légitimation divine. La soumission à l'ordre établi affirmée dans les épîtres de Tite et de Timothée serait une falsification ultérieure de la pensée de Paul. Marcion et ceux qui se donneront pour disciples de Paul tireront toutes les conséquences de la rupture avec la loi : le dieu qui est au fondement de la loi n'est plus dieu ! Et puisqu'il faut qu'il y ait un autre dieu pour justifier une telle hardiesse, ce dieu sera étranger à la création.

Lorsque Paul oppose le Christ (Fils de Dieu) à Adam (qui ne l'est point), il dévoile la force d'une pensée dualiste qui ne peut plus considérer la créature terrestre autrement qu'en son état d'asservissement. La désobéissance à la loi de Dieu a provoqué la chute et la mort. L'homme tombe du ciel. Il perd le vêtement de gloire pour revêtir un corps de chair et de sang voué à la disparition. Il ne peut trouver son salut qu'en abandonnant ce corps terrestre naturellement possédé par la loi du péché[…] Paul n'est-il pas décidément au point d'origine de toutes les " hérésies " ?[1] "

Selon Bossuet, qui s'appuyait sur Guillaume Besse et Pierre de Marca, il y eut au départ les Pauliciens d'Arménie qui rejetaient les Ecritures sauf Paul, qui se réfugièrent en Bulgarie et dont les doctrines se répandirent en Italie, Allemagne et en France à Orléans.

Les cathares se référaient aux Epîtres de Paul aux Thessaloniciens en ce qui concerne l'obligation du travail : " Travaillez de vos mains, comme nous vous l'avons ordonné. - Si quelqu'un ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus. " Saint Bernard alors en tournée de mission dans le midi de la France s'étonnait de voir autant de tisserands parmi les hérétiques. Ceux-ci croyaient en la division tripartite de l'être humain : corps-âme-esprit comme l'avançait déjà Paul dans la première épître aux Thessaloniciens (5,23)? sans que celui-ci n'ait une doctrine bien fixée.[2]

Avignonet-Lauragais, Casseneuil qui connut le premier bûcher de cathares et dont l'église est consacrée à Pierre et Paul, Pujols, Baraigne marquent l'histoire de l'albigéisme. Lorsque les assassins des inquisiteurs établis à Avignonet-Lauragais cheminèrent vers cette cité ils passèrent par Baraigne et Mas-Saintes-Puelles, toutes trois situées sur la diagonale.

Du côté d'Edern et de la Bretagne, on rencontre Eon de l'Etoile ou Eudes de Stella, né peut-être sur la commune de Saint-Barnabé qui se disait appelé à être le juge des vivants et des morts, parce que, dans la formule qui termine les exorcismes de l'Église : Per eum qui venturus est judicare vivos et mortuos, et sæculum per ignem; et dans cette autre à la fin des oraisons : Per eumdem Dominum nostrum Jesum Christum, etc,. le mot Eum se prononçait comme Eon. Il aurait été un Ermite augustin, prieur du Moinet près de Concoret, qui refusa d'être déménagé à Paimpont. Il parcourut d'abord la Bretagne, accompagné d'une troupe de ses partisans, auxquels il avait donné des noms mystiques, l'un s'appelait la Sagesse, un autre le Jugement, d'autres encore portaient des noms d'anges et d'apôtres. Pour être à l'abri des poursuites, il campait dans les forêts, quoique dans toutes les Armoriques il eût de nombreux sectateurs. Il leur enseignait que le baptême ne peut être efficace que pour ceux qui croient, que le vrai baptême est celui du Saint-Esprit par l'imposition des mains, que la hiérarchie ecclésiastique n'est pas d'institution divine, que l'Église romaine n'est pas la véritable, parce que sa prétention a la sainteté est contredite par les mœurs de ses prêtres. Eudes niait en outre la résurrection des corps. Quant au mariage, il le rejetait comme sacrement, mais s'éloignait de la rigueur de la doctrine cathare, en prétendant qu'il est permis aux saints de mener avec eux des femmes. En 1145, le légat Albéric, cardinal d'Ostie, se rendit en Bretagne pour combattre ces hérétiques et prêcha contre eux à Nantes. Dans le diocèse d'Aleth beaucoup d'hérétiques furent saisis et livrés aux flammes. Eudes, qui s'était retiré dans les forêts de la Bretagne, quitta cette province pour parcourir l'Aquitaine. Finalement on le retrouve En 1148, captif au Concile de Reims en Champagne réuni par le pape Eugène III, qui présidait l'assemblée. Le concile, le prenant pour un insensé, le fit enfermer à perpétuité. Il meurt rapidement et ses disciples furent condamnés au feu.[3]

 


[1] Yves Maris, http://www.chemins-cathares.eu/030700_controverse_sur_paulinisme.php

[2] Les Cathares en Occitanie, ouvrage collectif, Fayard, 1982

[3] Carl Schmidt, Histoire et doctrine de la secte des Cathares ou Albigeois, http://books.google.fr/books?id=Vd2ZEJ48zvQC&pg=PA50&lpg=PA50&dq=cathare+eudes&source=web&ots=Rlc-pKcq5u&sig=2lctnfW2_gLMKeYuLhdcIPn7jKw&hl=fr#PPA49,M1