Partie IV - Techniques et sciences   Chapitre XXXIX - Sciences   Astronomie   

Levi ben Gerson dit Gersonide (Bagnols-sur-Cèze, 1288 – Perpignan, vers 1344) fut un savant juif versé dans la philosophie, les mathématiques, la physique et l’astronomie pour laquelle il inventa le bâton de Jacob ou arbalistrille, servant à mesurer la hauteur des astres au-dessus de l’horizon en navigation.

Au XVIème siècle, le chronologiste Joseph Scaliger (Agen, 1540 - Leyde, 1609) donna le nom de « période julienne » - nom donné par Scaliger en hommage à son père Jules-César Scaliger - à un intervalle de temps de 7980 ans, obtenu en faisant le produit des trois nombre 28, 19 et 15 qui représentent, en années juliennes, la durée des cycles solaires, de Méton (ou lunaire) et de l'indiction romaine. Il a été convenu que la période julienne commence en l'an 4712 avant notre ère, qui a pour les trois cycles la valeur 1.

Pour relier entre eux les phénomènes astronomiques qui se produisent à des moments très différents, les astronomes utilisent le jour julien qui compte les jours un à un. Cette façon de compter les jours fut aussi créée par Scaliger.

Sautons quelques années pour nous intéresser à l’année 1610, année de grandes découvertes dans la longue histoire de l’astronomie. Galilée découvre d’abord les quatre satellites de la planète Jupiter. La Terre n’est plus la seule planète qui possède un satellite. Fabricius, astronome hollandais, découvre la présence de taches sur le Soleil. Galilée montre la présence de montagnes et de cratères sur la Lune. Dès le 26 novembre 1610, à Aix, à l’aide d’une lunette qu’il vient d’acquérir, Peiresc découvre la nébuleuse d’Orion, la première nébuleuse gazeuse découverte dans le ciel qu’on croyait jusqu’alors exclusivement peuplé de planètes, « astres errants », et d’étoiles, « astres fixes ». On peut lire dans le manuscrit de Carpentras : « Coelum non erat serenum adeoque magna apparebat nubecula in Orionis media ut vix distingui otuerint duae stellae. Ac in suprema quoque stella apparuit nubecula. »

Toujours en 1610, Galilée observe que la planète Vénus présente des phases comme la Lune et que le diamètre apparent de la planète Mars varie fortement quand elle parcourt son orbite. Ces deux découvertes prouvent la validité de l’hypothèse héliocentrique. Dès lors, Galilée se converti entièrement à l’héliocentrisme de Copernic (1473-1543). Galilée et Peiresc dirigent leur lunette vers la Voie lactée, appelée en langue d’Oc « Lou Camin de San Jacquo » puisque, à l’aube, celle-ci indique aux pèlerins le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. Ils apportent la preuve que cette traînée laiteuse dans le ciel est en fait constituée d’une myriade d’étoiles faibles comme l’avaient pressenti les astronomes grecs. En 1612, l’astronome allemand Mayer découvre la nébuleuse d’Andromède. L’astronome Hubble démontrera en 1924 sa nature de « galaxie extérieure » composée d’étoiles comme la Voie lactée, notre galaxie.

Kepler vient d’observer en 1604 l’apparition d’une nouvelle étoile (explosion d’une supernova) dans la constellation du Serpent. Kepler découvre aussi que les planètes décrivent autour du Soleil non pas des cercles mais des ellipses et qu’elles parcourent leur orbite avec une vitesse variable qui passe par un maximum à l’approche du Soleil. « Le cercle était le symbole de la perfection et de la beauté pour les astronomes grecs. Il est désormais remplacé par l’ellipse (Kepler dira d’abord l’ovale) qui devient le symbole de l’art baroque. Ce symbole sera repris dans le tracé des coupoles, places et façades par les grands architectes : Bernin et Borromini à Rome, Le Vau en France et Puget. [1]»

Ces découvertes imposent une nouvelle vision de l’Univers et se heurtent aux trois obstacles majeurs de cette époque: la doctrine d’Aristote, la vérité révélée par la Bible, et l’astrologie.

Parmi les dogmes d’Aristote, on peut citer la perfection des astres, la régularité de leur mouvement dans un univers limité et bien ordonné, l’incorruptibilité éternelle des cieux. Pour lui, le ciel constituait un parfait mouvement d’horlogerie. Comme son autorité était toujours très grande et ses disciples zélés et influents, il n’était pas possible de proposer d’autres explications, encore moins d’affirmer qu’Aristote s’était trompé.

L’année 1610 met à bas le dogme d’Aristote en montrant la naissance d’étoiles nouvelles, la découverte de nouvelles variétés d’astres et un certain chaos dans l’organisation de l’univers galactique qui apparaît même infini. Avec ses idées nouvelles, le jeune Gassendi fait vite les frais de son audace ; il est rappelé à l’ordre par Descartes, très respectueux de la doctrine d’Aristote. Gassendi devra attendre de longues années avant de publier son livre sur l’atomisme d’Épicure. Les idées de Gassendi contribuent à écarter l’astrologie du domaine scientifique.

Très jeune, Gassendi avait été séduit par la cosmogonie de Démocrite (460-370) qui imaginait un monde comprenant un nombre infini d’atomes tous semblables, en mouvement permanent dans un espace infini et vide, qui aboutissait à la naissance et à la mort d’un nombre infini de mondes. Cette théorie très moderne avait été abandonnée depuis Démocrite, Épicure (341-270) et Lucrèce (98-55). Gassendi « trouvait cette philosophie d’Épicure plus conforme à la raison que celle d’Aristote ; il l’embrassa et vengea Epicure de l’insulte qu’on lui avait faite ». Dans son histoire des mathématiques écrite au XVIIIe siècle, Montucla précise : « Tout le monde sçait que Gassendi travailla à relever de ses cendres la Philosophie Epicurienne, non cette Philosophie impie qui attribue au hazard l’origine de l’Univers & de tous les êtres, mais cette Philosophie qui admet les atômes, le vuide, […] & dont plusieurs dogmes paroissent assez conformes à ceux de la Physique moderne. » Gassendi avait en effet « l’esprit trop juste pour goûter toutes les extravagances dont les disciples d’Aristote avaient surchargé la philosophie ; il démontra la vanité, le ridicule de presque toutes les idées péripatéticiennes ». Ce livre soulève la colère des partisans d’Aristote et, devant la virulence de ces attaques, Gassendi décide de le retirer. Les interventions de Peiresc en sa faveur calment les esprits. Gassendi évite dès lors toute critique directe contre la doctrine d’Aristote. Sa philosophie du monde s’appuie sur une physique très moderne basée sur l’existence des atomes et du vide, sur des faits d’observation et sur une physique qualitative. L’aristotélicien Descartes, lui, croit à la méditation solitaire. Il a une vision mathématique et mécanique de l’Univers. Pour Descartes l’animal, le chien par exemple, n’est qu’un mécanisme osseux, musculaire, digestif, etc. Pour Gassendi le chien a une « petite âme », mais pas aussi grande que celle des hommes.

L’œuvre de Gassendi est immense. Son influence dans les milieux savants conduit à la création de l’académie Montmor qui annonce l’Académie des sciences. La modestie de Gassendi et l’amabilité de son caractère éclatent de toutes parts dans ses ouvrages. Son style est d’une grande clarté.

En ce début du XVIIe siècle, Nicolas-Claude Fabri de Peiresc (Belgentier, 1580 – Aix, 1637), seigneur de Peiresc (Peyresc), et Pierre Gassendi (Champtercier, 1592 – Paris, 1655), son ami de 12 ans plus jeune, sont à l’origine de la naissance de l’astronomie en France. Autour d’eux, de nombreux savants se regroupent.

L’école provençale étant alors le seul foyer d’astronomie en France, le choix de Gassendi s’impose comme professeur au Collège royal. Par modestie, Gassendi refuse cette haute distinction pour continuer à observer le ciel en Provence. Le cardinal de Richelieu confirmera son choix et le dispensera de résider à Paris en permanence.

En 1610, Pinelli, grand érudit génois, apprend à Peiresc que « Galilée, avec une lunette récemment inventée, avait découvert de grandes choses dans le ciel ». Peiresc fait venir d’Italie, de Hollande et de Paris plusieurs exemplaires de cette lunette. Le 25 novembre de la même année, il observe à son tour les satellites de Jupiter avec son ami Gaultier, astronome et prieur de la Valette. Peiresc observe tous les soirs avec étonnement la régularité de ce « ballet » incessant des satellites. Il est le premier à donner leur période de rotation avec une précision très supérieure à celle de Galilée. Il est aussi le premier à avoir l’idée d’utiliser cette « belle horloge » pour résoudre le vieux problème de la détermination des longitudes à partir des éclipses des satellites de Jupiter qui sont très fréquentes. Il « se réjouit d’apprendre que ce n’était pas venu auparavant à l’esprit de Kepler et de Galilée ni des Hollandais par qui le mystère des longitudes a été si considérablement exploré ». « L’instant même d’une éclipse donne un «top» de synchronisation visible simultanément sur toute la terre. Comme les tables astronomiques donnent, avec précision, l’heure de l’éclipse, il suffit de mesurer l’heure locale où on l’observe en mer. La différence des heures locales donne la longitude par rapport à un méridien de référence. L’idée de Peiresc était bonne. Les tables des satellites de Jupiter qu’il commence à établir sont suffisamment précises. Mais le maniement en mer de la lunette astronomique (pour déterminer l’instant de l’éclipse) et des cercles gradués (pour obtenir l’heure par la mesure de la hauteur des étoiles sur l’horizon) est trop difficile. Il faudra attendre deux générations, et l’emploi du sextant, pour que la méthode devienne opérationnelle en mer. Pézenas, un autre Marseillais, et La Caille contribueront à la mettre en œuvre. »

Dans la nuit du 12 septembre 1621, dans les environs d’Aix, Gassendi observe une forte illumination du ciel qu’il baptise aurore boréale. Il note l’évolution de sa forme en arc, en bandes, en draperie ou en faisceaux de rayons. Cette aurore boréale très spectaculaire a été également observée dans la direction du nord par ses correspondants à Grenoble, Paris, Rouen, Toulouse et même Alep. Il prouve ainsi que ces phénomènes lumineux se produisent à altitude très élevée à environ 100 km au-dessus des régions polaires. « Aujourd’hui, on sait que les aurores boréales sont provoquées par un flot de particules électrisées provenant du Soleil et canalisées vers les pôles par le champ magnétique terrestre. Lorsque ces particules pénètrent dans la couche ionosphérique, située à une centaine de kilomètres d’altitude, les particules chargées provoquent le phénomène de luminescence que Gassendi appelle « aurore boréale ».[2] »

Dès 1623, après une chute de neige, Peiresc observe au microscope que les flocons à la forme d’étoile à six branches, avec des facettes hexagonales réfléchissantes. C’est le point clé de l’explication des parhélies pressentie par Peiresc et Gassendi. C’est seulement au XIXe siècle qu’un opticien français, Bravais, professeur à l’École polytechnique, le démontrera. Les arcs-en-ciel sont dus à des gouttelettes d’eau en suspension dans l’air, à faible altitude. Les phénomènes de parhélies sont dus à la présence de cristaux de glace ou de neige dans la haute atmosphère. Ils sont obtenus par réflexion sur les faces planes des cristaux de glace qui agissent comme de petits miroirs. Les parhélies sont des très lumineuses et très rares. Les faux soleils peuvent être aussi lumineux que le vrai.

Gassendi mesure l’ellipticité des orbites de la Terre et de la Lune grâce à sa grande maîtrise de la chambre-noire. Il la perfectionne en lui ajoutant une lunette de projection et un système mobile de graduation très efficace qui « glisse sur une poutre longue de 4 brasses ». Gassendi observe ainsi la variation du diamètre apparent de la Lune qui décrit une orbite elliptique autour de la Terre. Gassendi, plus précis que Kepler, donne 0,86 pour le rapport entre le petit axe et le grand axe de l’orbite lunaire (estimé aujourd’hui à 0,88). Par la même technique, il montre que l’orbite de la Terre autour du Soleil est quasi-circulaire. Il trouve 0,97 pour le rapport des axes (on admet aujourd’hui 0,99).

Kepler mourut pauvre et abandonné de presque tous, sauf de Gassendi, ami fidèle qui put d’observer l’événement tant attendu que Kepler avait annoncé, grâce à la loi des aires, deux ans à l’avance le jour et l’heure : le passage de Mercure devant le Soleil. Cette observation est effectuée avec une nouvelle rigueur scientifique élaborée par Gassendi en 1631.

En février 1633, Galilée comparaît devant les juges de l’Inquisition à Rome. Le pape Urbain VIII, autrefois son ami, veut faire de lui un exemple dans sa lutte pour l’affirmation des dogmes tirés des Ecritures saintes. Dès le début de « l’affaire » Galilée, Gassendi et Peiresc le soutiennent. Galilée répond à Gassendi en janvier 1633 : « Je vous en rends grâces et vous en suis obligé […]. En outre j’ai appris de bonnes sources que nos révérends Pères jésuites ont été dire en haut lieu que mon livre est plus exécrable et plus pernicieux pour la Sainte Eglise que les écrits de Luther et de Calvin ». Lors du procès, Peiresc écrit des lettres compatissantes aussi à Galilée qui lui répond qu’il ne peut que de se soumettre aux inquisiteurs. Peiresc use alors en vain de son influence auprès du cardinal Barberini, neveu du pape Urbain VIII, pour faire annuler la sentence et que liberté soit rendue à Galilée. Nous ne sommes plus trente ans plus tôt, où, en 1600, Giordano Bruno était brûlé vif à Rome. Galilée sera assigné à résidence dans sa villa d’Arcetri, près de Florence, et son dernier manuscrit qui servira de base à Huygens et à Newton pour la théorie de la gravitation universelle, sera publié à Leyde par Elzévir. Il mourra à Arcetri le 8 janvier 1642, aveugle depuis six ans, et ayant perdu l’une de ses filles.

À l’occasion de l’éclipse de Lune du 27 août 1635, Peiresc crée le premier réseau moderne d’observations astronomiques simultanées. Il envoie des astronomes en des points stratégiques de la côte méditerranéenne. Avec l’appui à Rome du cardinal Barberini et des congrégations des jésuites, des minimes et des capucins, Peiresc et Gassendi avaient pu recruter et former des astronomes laïcs et religieux. La bastide de Peiresc était devenue une école d’astronomie avec un enseignement théorique et pratique. L’éclipse de Lune de 1635 est l’occasion de mener l’opération longitude longuement préparée. Elle rassemble le père Agathange au Caire, les pères Célestin et Michel Ange à Alep en Syrie, le père Thomas d’Arcos à Carthage, Jean Lombard à Malte, le père Athanase Kircher à Rome, Argoli à Padoue, de Clairmont à Cesena, Molino à Venise, Glorioso à Naples, Gassendi à Digne, Wendelin et Corberan à Aix, Peiresc à Marseille… et le père Joseph Bressan au pays des Hurons, au Québec. « Ces astronomes doivent déterminer l’heure locale du début de l’éclipse. Comme à cette époque Huygens n’a pas encore inventé l’horloge à pendule, ils utilisent la méthode astronomique fondée sur la mesure de la hauteur des étoiles au-dessus de l’horizon. Au retour, les observations sont comparées : la différence des heures locales donne directement la différence de longitude. Le résultat est spectaculaire. La mer Méditerranée a 1 000 km de moins que la distance indiquée sur les cartes : 42° de longitude au lieu de 61°30’ selon la carte de Ptolémée. C’est la longueur de son bassin oriental qui, de Carthage à Alexandrie, était fortement surestimée. Les portulans de Méditerranée sont remis à jour et les problèmes de navigation rentrent progressivement en ordre. [3]»

En 1636, Gassendi avec sa longue lunette offerte par Hevelius, l’astronome-opticien de Dantzig, et Peiresc avec sa meilleure lunette, un cadeau de Galilée, s’installent avec le graveur Mellan au sommet de la Sainte-Victoire. Pendant les nuits claires du 24 septembre au 7 novembre 1636, ils réalisent ensemble de nombreux dessins de la Lune. Mellan grave, en taille douce, dans l’airain, trois cartes de celle-ci à son premier quartier, à son dernier quartier et à la pleine lune. Avec sa parfaite maîtrise technique, il réussit à rendre parfaitement compte du relief, des ombres et des contours.

Sa carte du premier quartier est particulièrement réussie. On y voit, avec un excellent contraste, cirques, cratères, montagnes et « mers ». Mais Peiresc meurt en 1637. Le premier atlas lunaire reste inachevé. Ces gravures de la Lune sont aujourd’hui conservées à la Bibliothèque nationale. Elles ne seront égalées ni par Hevelius, ni par Cassini.

Peiresc et Gassendi constatent à cette occasion un phénomène d’oscillation (ou de libration) de la Lune jamais observé jusque-là. Qui permet d’observer des parties de la face cachée de notre satellite.

« Peiresc et Gassendi comprennent que la cartographie lunaire est indispensable pour augmenter la précision des mesures de longitude (lors des éclipses) et des mesures d’occultation d’étoiles et de planètes. L’astronome se laisse en effet toujours surprendre par le début d’une éclipse. Il attend le phénomène et s’aperçoit soudain que l’ombre de la Terre se projette déjà sur la Lune ; il a manqué le début du phénomène. Avec une carte lunaire, et en suivant le lent  défilement de l’ombre, on peut déterminer l’instant précis où l’ombre de la Terre se projette sur tel ou tel cratère. De même, lors des occultations d’étoiles et de planètes par la Lune, il est très important de savoir que l’étoile disparaît par exemple au niveau du cratère Philolaus et qu’elle ressort entre les cratères Hermès et Copernicus. Cela permet de connaître la trajectoire.[4] »

Poursuivons l’exploration sous l’angle astronomique des savants pris dans la toile des nonagones. Notons en passant  que Jean Mathieu de Chazelles (Lyon, 1657 – Marseille, 1710) effectua des mesures sur les pyramides d’Egypte qui permirent d’envisager des rapports entre leurs dimensions et des données astronomiques.

Joseph Lefrançais de Lalande (Bourg-en-Bresse, 1732 – Paris, 1807), royaliste et libre penseur, calcule la dimension du système solaire à partir de la distance de Vénus à la Terre. Il prévoit le décalage temporel de la réapparition de la comète de Halley.

La grande affaire française en ce siècle est la mesure du méridien de Paris. Jean-Baptiste Delambre, né à Amiens en 1749, est l’élève et le collaborateur de Lalande, faisant des observations sur les planètes dont la nouvellement découverte Uranus. Il est un des meilleurs astronomes de son temps. Elu à l’Académie des sciences en 1792 il est chargé avec Pierre Méchain (Laon, 1744 – Castellon de la Plana, 1804) de mesurer l’arc du méridien de Paris entre Dunkerque et Barcelone. Des mesures sur le méridien avaient déjà été faites dès 1669 selon des méthodes géodésiques de Jean Picard (La Flèche, 1620 – Paris, 1682) qui devient membre de l’Académie des Sciences dès sa fondation, perfectionna des appareillages d’observation qui donnent aux mesures astronomiques une plus grande précision et mesura la longueur d’un arc de méridien entre Sourdon au Sud d’Amiens, et Malvoisine au Sud de Paris. Philippe de La Hire, les Cassini père et fils s’y attelèrent suivi par l’abbé de la Caille en 1739.

Elevé au collège Jésuite de Gênes, Jean Dominique Cassini (Périnaldo, 1625 - Paris, 1712) poursuit ses études en étudiant les lettres, la théologie et le droit. Après, il se rend à l'abbaye de San Fruttuoso (Camogli) près de Portofino. Il montre un grand intérêt pour la poésie, l'astrologie, les mathématiques et l'astronomie. Sur invitation du marquis Cornelio Malvasia, il travaillera à Bologne avec les pères jésuites Giovanni Riccioli et Francesco Grimaldi, deux astronomes de grande notoriété. Il rectifie alors le gnomon de la méridienne de l'église San Petronio. Il a l'intuition que la vitesse de la lumière est finie, mais, il rejette cette hypothèse, et c'est Olaüs Roemer, emmené à Paris par Philippe de La Hire, qui en calculera la vitesse. Colbert fait venir Cassini en France. En 1671, malgré les rappels de Pape, il s'installe à l'observatoire de Paris, afin d'effectuer des observations avec les instruments fournis par Colbert. Devenu directeur de l'observatoire, il enchaînera les observations pendant quarante années, faisant découvertes sur découvertes. Sa descendance occupera successivement le poste de directeur de l'Observatoire. Jacques, dit Cassini II, né à Paris en 1677, achète en 1717 le manoir seigneurial de Thury-sous-Clermont situé sur Fillerval. Le territoire de la commune de Thury se trouve sur le méridien de Paris que Jean-Dominique et Jacques ont mesuré jusqu'à Perpignan. Philippe de la Hire (Paris, 1640 - Paris, 1718) poursuivit la méridienne vers le nord, d'Amiens à Dunkerque. Il est le fils de Laurent de la Hire, peintre fameux qui s'illustra dans l'Atticisme. Philippe lui-même fit le voyage de Rome en 1660 (rencontra-t- il Poussin, mort en 1666 ?) mais il choisit bientôt la voie scientifique. Ses plus importants travaux portent en effet sur la géométrie. Il est le continuateur de Girard Desargues (1591- 1661) et de Blaise Pascal (1623-1662) en géométrie des coniques. Exploitant au maximum les propriétés d'invariance de la division harmonique, il raisonne presque uniquement dans le plan (et non dans l'espace). La Hire s'intéressa aussi à la géométrie de Descartes et aux courbes algébriques, et s'oppose dans les années 1690, au calcul infinitésimal. En mécanicien de la théorie des engrenages épicycloïdaux , il continue les travaux de Christian Huygens (1629-1695).

La Hire et cassini sont tous deux enterrés dans l'église Saint-Jacques-du-Haut-Pas à Paris (5ème).

Delambre est accusé de faire des signaux à l’ennemi du haut des clochers où il fait ses relevés. Plusieurs fois arrêté et emprisonné, il est intégré à la commission des poids et mesure lors de la suppression de l’Académie. Il termine son travail en novembre 1798 après plusieurs interruptions. Il utilisera en particulier la tour de Sermur dans la Creuse pour faire ses mesures. La longueur du mètre est finalement déterminée en 1799, comme la quarante-millionième partie du méridien de Paris. Membre de l’Institut dès sa création en 1795, il est nommé inspecteur général de l’enseignement par Bonaparte, puis succède à Lalande au Collège de France.

Au XIXème, la spectrographie marque une importante évolution de l’astronomie dans la connaissance physique des constituants des astres. Robert Wilhelm Bunsen (Göttingen, 1811 – Heidelberg, 1899) qui perdra un œil au cours de ses recherches dans le domaine de la chimie, invente en 1859 avec Kirchhoff les premières méthodes d’analyses spectrales en découvrant que les raies du spectre sont caractéristiques des éléments chimiques. Il perfectionne aussi le bec de gaz à introduction d’air et la pile qui portent son nom. La pile Bunsen dérive de celle de William Robert Grove (Swansea, 1811 – Londres, 1896), avocat de profession, qui menait des recherches en électricité et en magnétisme en amateur. L’interdisciplinarité permettra la découverte de l’hélium, qui était présent dans le spectre solaire et qui était inconnu jusque là sur Terre, par William Ramsay (Glasgow, 1852 – High Wycombe, 1916), prix Nobel de Chimie en 1904, qui l’isola, en 1895.

Angelo Secchi (Reggio nell’Emilia, 1818 – Rome, 1878), qui observa en 1859 des tâches sur Mars nommées par lui « canaux », est un pionnier de la spectrographie stellaire et eut l’idée de classer, dans les années 1860, les étoiles selon leur spectre. Cette classification modifiée fut utilisée pour la mise en relation entre températures et types spectraux. Mais celle de l’équipe Pickering de Harvard fut considérée comme plus opérationnelle. Daniel Barbier (Lyon, 1907 – Manosque, 1965) et D. Chalonge sont aussi les auteurs d’une classification spectrale quantitative des étoiles. La spectrographie astronomique en infrarouge est le domaine de recherche de Gerald Neugebauer (Göttingen, 1932) qui étudia à Cornell et fit carrière au California Institute of Technology. Il fit une carte infrarouge du ciel définissant plus de 20 000 nouvelles sources.

Les instruments sont importants pour la précision des observations. Aussi, à près de trois siècles de distance deux normands se rejoignent dans l’attention portée à la qualité du matériel utilisé. Adrien Auzout (Rouen, 1622 – Rome, 1691), est considéré comme l’inventeur, avec Jean Picard (La Flèche, 1620 – Paris, 1682), du micromètre à fils mobiles pour mesurer le diamètre apparent des petits corps célestes. Nicolas Cassegrain (Chartres, 1672) a donné son nom à un type de télescope qui s’imposa face au modèle de Newton. André Danjon (Caen, 1890 – Suresnes, 1967) conçut des instruments de haute précision et découvrit l’influence de l’activité solaire sur les aspects de la Lune durant les éclipses. Le satellite de la Terre a été l’objet de toutes les attentions de Marie Charles Théodore de Damoiseau (Besançon, 1768 – Issy-les-Moulineaux, 1846) qui s’est fait connaître pour sa théorie et ses tables du mouvement de la Lune, et de Julius Schmidt (Eutin, 1825 – Athènes, 1884) qui a dessiné la carte de la Lune la plus complète jusqu’aux atlas photographique, avec 32 856 cratères, et publiée en 1878. Mais l’observation peut être trompeuse. Par exemple, l’existence de canaux de Mars, étudiés par certains astronomes comme Schiaparelli en 1877, fut contestée en premier par Mentore Maggini (Empoli, 1890 – Collurania, 1941). Ils étaient dus à une illusion d’optique.

Dirk Brouwer (Rotterdam, 1902 – Connecticut, 1966) est à l’origine du nouveau système de constantes numériques adopté en 1964 par l’Union astronomique internationale.

Bruno Rossi (Venise, 1905 – Boston, 1993) étudia les particules cosmiques et montra que le mésotron n’était pas un méson cosmique.


[1] Yvon Gorgelin et Simone Arzano, de l’Observatoire de Marseille, « Les astronomes érudits en Provence, Peiresc et Gassendi »

[2] Ibid.

[3] Ibid.

[4] Ibid.