Partie IX - Synthèse   Chapitre LVII - Calendrier   Les Trois Marie   

Les Trois Marie

Les Trois Marie font écho aux Matres, Parques, Grâces etc. qui se comptaient généralement par trois.

La multiplication des saints permet de nombreuses interprétations de la triangulation de l'année. Une seconde couche se rajoute au triangle de la pénitence (8 décembre - 9 avril - 8 août). En effet, le 8 décembre a été, avant même la définition du dogme en 1854, une fête consacrée à l'Immaculée conception de la Vierge ; le 9 avril était fêtée Marie Cléophas. Cette association des deux saintes rappelle la vieille légende de saint Anne, que l'on disait mère de la Vierge Marie. La tradition médiévale avait ajouté des fioritures ; on croyait entre autres qu'après la naissance de la Vierge et après la mort de son premier époux, Joachim, elle s'était remariée deux fois, avec Cléophas d'abord, puis avec Salome, et qu'elle avait eu une fille de chacun d'eux. Les trois filles furent appelées Marie ; et elles épousèrent Joseph, Alphée et Zébédée, enfantant respectivement Jésus-Christ ; saint Jacques le Mineur, Joseph le juste, Simon et Jude ; saint Jacques le Majeur et l'Apôtre Jean. Cette légende est rédigée en 1357 par un carme de Lyon, Jehan dit de Venette d'après un récit populaire beaucoup plus ancien. Les deux premières impressions de l'ouvrage sont éditées en 1511. Cette croyance fut dénigrée en premier lieu par Jacques Lefèvre d'Etaples. Henri Cornelius Agrippa fut impliqué dans cette controverse parce qu'il avait défendu l'opinion de Lefèvre au cours d'échanges de points de vue qui avaient eu lieu à Metz, notamment avec l'aristocrate Nicole Roucel, et qu'il avait été dénoncé publiquement en chaire comme ignoble hérétique.

Reste donc à lier le 8 août avec Marie Salomé. Ce qui n'est pas une mince affaire puisque directement, rien ne la lie à cette date, apparemment.

Les Trois Marie, rue des Trois Marie, Lyon Saint-Jean

Le thème de la Vie de la Vierge est un sujet de prédilection dans l'iconographie du Moyen Age. A partir du XIVème siècle la tapisserie devient un support nouveau de l'iconographie. Robert de Lenoncourt, archevêque de Reims de 1509 à 1532, donne en 1530 une tenture de dix-sept pièces célébrant l'Immaculée Conception. Le prélat en choisissant une scène des trois Maries participe à la défense d'un culte controversé pendant le premier tiers du XVIème siècle. Il encourage ensuite une fête fixée dans la liturgie rémoise au 25 mai. L'association de l'Immaculée Conception à la légende des Trois Marie apporte de l'eau au moulin. (Sophie Savigny, Note sur la tenture de Robert de Lenoncourt de la cathédrale de Reims).

Le 8 décembre et le 8 août

Depuis la première moitié du VIIIème siècle, était célébrée en Orient la fête de la Conception de sainte Anne, mère de Marie (la Theotokos), le 9 décembre. Le 8 décembre (la conception de sainte Marie) est 9 mois avant le 8 septembre (la nativité de sainte Marie). Les monastères anglais, l'Église de Lyon et l'ordre des Franciscains furent des centres de rayonnement qui facilitèrent l'entrée de cette fête en Occident. En Angleterre, un missel anglais du XIème siècle témoigne de la fête de la Conception immaculée de Marie ; un récit de l'abbé Elsine, anglais raconte comment il fut sauvé miraculeusement pendant un naufrage, grâce à l'intervention de la Vierge qui en échange lui demanda la célébration de sa Conception. La fête anglaise passa, au début du XIIème siècle, en Normandie et de là, dans le reste de la France, en particulier par l'Église de Lyon vers 1130-1140. Bernard de Clairvaux envoya une lettre au chapitre cathédral de Lyon pour protester contre cette dévotion. Le débat se poursuivit au XIIIème siècle. Saint Thomas d'Aquin combattit la doctrine de l'exemption de Marie du péché originel. Les Franciscains militent cependant pour cette fête : en Italie le Chapitre des franciscains, à Pise, en 1263, sous le gouvernement de saint Bonaventure, établit la fête de la Conception de Marie obligatoire dans tout l'ordre franciscain ; le franciscain Duns Scot relance l'intérêt théologique depuis l'Angleterre en affirmant que c'est le Christ qui préserva sa Mère de tout péché ; le pape Sixte IV, aussi franciscain, autorise la messe du 8 décembre célébrant l'Immaculée conception, composée par L. Nogarole en 1477.

Déjà au début du XIVème siècle, on célébrait la Conception de la Mère de Dieu dans la cathédrale d' Anagni. Pendant le séjour à Avignon, la cour pontificale se réunissait le 8 décembre pour la célébrer. Le pape Pie V, pape de 1566 à 1572, voulant simplifier le missel, a supprimé la mémoire du 8 décembre, comme aussi de la Présentation de Marie et de la Visitation. Mais le pape Pie IX définit le dogme de la conception immaculée en 1854 (Ineffabilis Deus) en s'inspirant de la liturgie de L. Nogarole.

En ce qui concerne le 8 août, il faut se rendre à Veroli en Italie pour voir un rapport entre Marie Salomé et cette date. Veroli est en concurrence avec les Saintes-Maries-de-la-Mer car elle aurait accueilli Marie Salomé, elle seule, où ses reliques auraient été retrouvées en 1209. Après l'Ascension du Christ, les apôtres se dispersent pour porter l'Evangile aux peuples du monde. Sainte Marie Salomé, accompagnée de saint Blaise et de saint Démétrius gagne Veroli. La sainte trouve à se loger chez un païen qui sera baptisé sous le nom de Mauro. Ses deux compagnons sont martyrisés peu après. Leurs reliques seront retrouvées en 1196. Marie Salomé convertit Mauro au christianisme et meut six mois après un 3 juillet. Mauro recueille la dépouille de la sainte dans une urne de pierre et fait graver l'épitaphe suivante: " Hae sunt reliquiae B. Mariae Matris apostolorum Jacobi et Joannis ". Par peur du martyr, Mauro se réfugie dans la grotte de Paterno, et meurt 3 jours après.

Ce Blaise et ce Démétrius semblent être un doublet de Blaise de Sébaste et de Démétrius de Thessalonique. En effet, leurs reliques furent inventées à Anagni, près de Veroli, après l'an mille, où elles sont encore conservées. La proximité de Marie Salomé avec saint Blaise fait écho à celle calendaire de la fête de la saint Blaise du 3 février et celle de la Chandeleur, fête de la purification de la Vierge et de la Présentation de l'Enfant Jésus au Temple.

Le 2 février c'est exactement 40 jours après Noël. Dans la loi de Moïse, il était écrit que tout enfant premier-né de sexe masculin devait être présenté au Seigneur au Temple 40 jours après sa naissance, et que la mère devait se purifier en même temps. Pour respecter la loi, les parents venaient au Temple offrir un sacrifice, un agneau ou, pour les plus pauvres un couple de tourterelles. Joseph et Marie sont donc montés au temple de Jérusalem pour aller présenter Jésus au Seigneur. Il fallait donner le temps à la mère de se remettre de l'accouchement et au bébé d'être un peu plus fort pour sortir. Jésus reste 40 jours au désert, l'Ascension de Jésus a lieu 40 jours après Pâques. Rappelons surtout que 40,56 jours est la neuvième partie de l'année de 365 jours.

Le chercheur contemporain, Mehrdâd Bahâr, explique l'étymologie du mot "Sadeh" par son sens dans le persan ancien d'"apparition", et cette fête était célébrée quarante jours après celle de Yaldâ, la nuit qui précède le premier jour de l'hiver dans l'hémisphère nord, considéré comme jour anniversaire de la naissance du Soleil. Mehrdâd Bahâr écrit : "La fête de Sadeh était célébrée quarante jours après le début de l'hiver. Le même jour, il existait une autre fête avec une origine différente : une fête du feu puisant ses racines dans le mithraïsme, culte de Mithra, dieu de la lumière et de la sagesse dans la Perse antique, qui est devenu plus tard l'une des religions principales de l'Empire romain et le rival du christianisme dans le monde romain. Si la fête de Yaldâ célébrait la naissance du Soleil, la fête de Sadeh était la fête du quarantième jour de sa naissance, comme il est de coutume chez les Iraniens, depuis des temps immémoriaux, de célébrer le quarantième jour d'un événement important." (http://www.teheran.ir).

Cela laisse penser à certains auteurs que Blaise de Sébaste serait une transformation d'une ancienne divinité perse (Gianroberto Scarcia, De Sivas a Montepulciano - L'Incontro tra Biagio et Maria).

D'après les Actes de saint Blaise, Blaise, qui avait étudié la philosophie dans sa jeunesse, était un médecin à Sébaste en Arménie, sa ville natale. Il fut martyrisé sous Licinius en Arménie en 316. Pour échapper aux persécutions de Dioclétien, le Saint gagna une caverne où il vécut en ermite. Lors d'une partie de chasse, les soldats du gouverneur de Cappadoce tombèrent sur cette grotte et ramenèrent le saint auprès du gouverneur. En route, Blaise sauva avec de la mie de pain, un enfant mourant qui avait avalé une arête de poisson. Un autre miracle implique un cochon qu'un loup (Bleiz en breton signifie justement " loup ") est venu ravir à une vieille femme dont il était l'unique bien. Blaise assure le retour de l'animal à la femme qui, pour le remercier, lui en portera dans sa prison la tête et les pieds avec une chandelle et du pain. La statue de Blaise est ainsi parfois accompagnée de la tête du cochon.Blaise fut alors torturé avec un peigne de fer servant à carder la laine, et décapité. Son culte est présent en Italie dès le IVème siècle, amené par des soldats romains suivis de moines arméniens. L'essor des bénédictins lui fera gagner la Suisse puis l'Allemagne de la Reichenau et du monastère Sankt Blasien, et au XIème siècle, Gorze dans l'actuelle Moselle. C'est par ce chemin que la vénération de saint Blaise serait arrivée jusqu'à Metz. Le 3 février, fête du Saint, des brioches de la Saint Blaise se vendent sur le parvis de l'église Saint Eucaire, dans le quartier Outre-Seille à Metz et qui possède une relique du saint depuis 1552, dans le but de protéger la gorge de tout mal. Cette dévotion est ancienne, puisqu'on peut la faire remonter à l'an 1400. C'est en effet cette année là que Collignon Desch, membre d'une importante famille patricienne, qui appartenait aux Paraiges de la ville de Metz, fonde dans l'église Saint-Eucaire l'autel de saint Blaise. La famille Desch a ses sépultures dans le cimetière qui entoure la petite église jusqu'à l'extinction de cette famille en 1604.

Blaise est l'un des saints auxiliateurs fêtés le 8 août. La liste de ces saints a variée dans le temps. Certains saints secourables auxquels on avait plus souvent recours furent groupés, honorés ensemble et très souvent représentés les uns avec les autres. Eustache Deschamps (mort vers 1407) énumère 10 saints dont le secours est particulièrement efficace :

"Saint Denis, saint Georges, saint Blaise

Saint Christofle et aussi saint Gile,

Saincte Catherine, il vous plaise,

Saincte Marthe et saincte Christine,

Saincte Barbe et saincte Marguerite… "

Nous retrouvons 8 de ces 10 noms dans les 14 saints "auxiliaires" ou "auxiliateurs", c'est-à- dire dont on peut attendre un secours (auxilium) prompt et efficace. Leur grande vogue date seulement du XVème siècle. L'origine de cette dévotion est germanique : elle se répandit tout le long du Rhin et en Italie. En France, on ajouta la Vierge Marie et le groupe fut de 15. La fête a été au 8 août, au 4ème dimanche après Pâques, etc. Tous ces saints, que la légende n'a pas oubliés, sont traités à leurs jours respectifs; rappelons seulement ici leurs emblèmes et leurs "spécialités".

Saint Georges guérit les maladies dartreuses. Saint Blaise porte 2 cierges croisés et guérit les maux de gorge. Saint Erasme est indiqué pour les douleurs d'entrailles. Saint Pantaléon aux 2 mains clouées est invoqué pour les maladies de consomption. Saint Christophe qui porte l'Enfant Jésus protège les voyageurs contre la mort subite, les tempêtes ou la foudre. Saint Denis marche avec la tête dans ses mains et préserve de la possession diabolique. Le diacre saint Cyriaque est puissant contre le démon et il s'occupe des maladies des yeux. Saint Acace couronné d'épines est invoqué pour les maux de tête. Saint Guy est invoqué contre la maladie éponyme. Le chasseur saint Eustache préserve de l'incendie et du feu éternel. Saint Gilles, abbé bénédictin seul non martyr de la liste, accompagné d'une biche, apporte la paix aux fous et à ceux qui sont sujets à la panique ou aux frayeurs nocturnes. Sainte Marguerite est invoquée contre les maux de reins et par les futures mamans. Sainte Barbe, à côté d'une tour, garantit de la foudre et de la mort subite; elle est aussi la patronne des mathématiciens, des artilleurs et des pompiers. Sainte Catherine d'Alexandrie est la " sage conseillère " des philosophes, des avocats et des penseurs (http://home.scarlet.be).

Ainsi le 8 août se précise grâce à Veroli. En effet l'une des églises de la ville est Saint- Erasme. Des hameaux de la commune s'appellent San Cristofforo (Christophe) et San Vito (Guy) dont la chapelle fut consacrée par le pape Jean IX en 914.

Saint Érasme, dont une statue polychrome en diorite de la fin XVème siècle est conservé à la Maison d'Érasme à Anderlecht, était Évêque d'Antioche. Il s'enfuit au Liban pendant la persécution de Dioclétien. À peine rentré dans son diocèse, il fut arrêté. Un ange le délivra et le transporta miraculeusement en Occident à Sirmium (Serbie), puis il vécut en Italie à Formia, en Campanie ; il y fut martyrisé et mourut en 303. Son martyre consista à introduire une alène (poinçon) sous chaque ongle des doigts, à le brûler au fer rouge et à l'arroser d'huile bouillante. Patron des marins, il eut pour attribut un cabestan avec un câble enroulé qui fut pris pour ses intestins dévidés sur un treuil. Cette histoire aurait été créée au XIVème siècle, à Gaëte. À la suite de quoi, une nouvelle légende fut inventée, selon laquelle les bourreaux lui incisèrent le ventre et enroulèrent les entrailles sur un treuil. La statue porte au bas, du côté gauche, un écusson marqué du monogramme MS et les outils du charpentier : la houe, l'équerre et le compas. Le saint martyr retient ses viscères dans les mains.

Sur un navire, le cabestan est un dispositif qui permet de combiner la force de plusieurs hommes : un gros tambour à axe vertical, dans lequel on insère des bras de leviers que poussent les hommes, et autour duquel s'enroule un cordage. Il en résulte une force de traction suffisante pour lever une ancre, virer une aussière, hisser un espar ou une voile de plusieurs quintaux, voire tonnes. Cet appareil était autrefois souvent en bois d'orme. Comme c'est un bois résistant à l'humidité, il fut employé dans les constructions hydrauliques, les bateaux, les pilotis, les moulins à eau, pour construire les quille, couples, éventuellement bordés, les pompes, les affûts, caisses de poulies, barres, anspects, moques. Grâce à sa densité, il fut utilisé dans toutes les pièces soumises à frottement : charronnage, poutre, dents d'engrenage, billots (les poulies encastrées à travers desquelles passaient les cordages). Son écorce fibreuse fut employée à des cordages et nattes.

Le chouquet ou tête de More (on retrouve un Mauro dans l'histoire de sainte Marie Salomé) était une pièce de bois de chêne ou d'orme, de peu de longueur, et qui est posée comme une espèce de chapeau sur la tête d'un mât, pour établir, une liaison entre la tête de ce mât et le pied du mât partiel, qui sert au premier de supplément de hauteur. Les chouquets se distinguent par les noms des mâts aux quels ils appartiennent. Le chouquet du mât de beaupré n'a pas la forme de ceux des autres mâts; il est ordinairement enfer, avec deux ouvertures, l'une circulaire pour servir de passage an bâton de foc, et l'autre demi-circulaire pour ceindre la tête du beaupré.

C'est en effet dans les mats que se manifestent les feux de Saint Elme - c'est-à-dire Saint Erasme qui a son église à Veroli - étaient mis en rapport avec Castor et Pollux. Ce phénomène a impressionné et intrigué les anciens. Pline l'Ancien le décrit comme suit : " Il se montre des étoiles dans la mer et sur la terre. J'ai vu, la nuit, pendant les factions des sentinelles devant les retranchements, briller à la pointe des javelots des lueurs à la forme étoilée. Les étoiles se posent sur les antennes et sur d'autres parties des vaisseaux avec une espèce de son vocal, comme des oiseaux allant de place en place. Cette espèce d'étoile est dangereuse quand il n'en vient qu'une seule ; elle cause la submersion du bâtiment ; et si elle tombe dans la partie inférieure de la carène, elle y met le feu. Mais s'il en vient deux, l'augure en est favorable; elles annoncent une heureuse navigation : l'on prétend même que, survenant, elles mettent en fuite Hélène, c'est le nom de cette étoile funeste et menaçante. Aussi attribue-t-on cette apparition divine à Castor et à Pollux, et on les invoque comme les dieux de la mer. La tête de l'homme est quelquefois, pendant le soir, entourée de ces lueurs, et c'est un présage de grandes choses. La raison de tout cela est un mystère caché derrière la majesté de la nature. "

On ne peut s'empêcher de rapprocher le nom d'Elme avec l'anglais Elm ou Elmo de l'italien Ulmo qui signifient orme.

L'église Saint-Erasme de Veroli possède en façade une pierre sculptée représentant ce que d'aucuns appellent la " Fiore dell'Apocalisse " qui apparaît dans de nombreuse œuvres alchimiques et dans les écrits de Giordano Bruno. Cette fleur est mise en relation avec Joachim de Flore qui, abbé du monastère cistercien de Corazzo depuis 1177, il se rend à Casamari - sur la commune de Veroli - et y travaille à ses deux premiers grands écrits, la Concordia et le commentaire sur l'Apocalypse, aidé de copistes dont Luc de Cosenza, son biographe ultérieur, en 1182 et 1183. Cette années-là, Joachim a une vision la nuit d'avant Pâques. " Dans le complet silence de la nuit, et, comme je le crois, juste à l'heure où notre "lion de Juda" (Ap.5,5) est ressuscité, pendant que je méditais, j'entendis une puissante voix " comme une trompette " (Ap.1,10), je saisis avec les yeux de mon esprit le mystère de l'Apocalypse et les principes de l'herméneutique concordataire " (Expositio in Apocalypsim, 1199 ca.). Joachim parle d'une seconde vision dans la Préface au Psalterium : il s'agit cette fois de la " vision de Pentecôte ", lors de laquelle Joachim aurait reçu la révélation de tous les mystères de la Trinité, et c'est à la suite de cette vision qu'il aurait conçu son traité de théologie trinitaire (http://www.granta.demon.co.uk).

http://angolohermes.interfree.it

Une telle "fleur" se trouve à Fiquefleur dans un mur de l'église Saint-Georges, saint auxiliateur comme Erasme. Elle serait un motif de sellerie, cloutée de surcroît. Fiquefleur se trouve au bord de la Morelle, nom qui proviendrait du terme more, sombre, et qui rappelle le Mauro de Marie Salomé.

Salomé

Dans le Protévangile de Jacques, du IIème siècle, une Salomé est citée : " Or, voici qu'une femme descendit des montagnes, et elle me dit, à moi Joseph : "Homme, où vas-tu donc ?" Je répondis : "Je cherche une sage-femme de race hébraïque". Elle me dit : "Es-tu d'Israël ? " Et je lui dis : "Oui". Elle reprit : "Quelle est donc celle qui accouche dans la grotte ?" Et je lui dis : "Ma fiancée". Et elle reprit : "Elle n'est pas ta femme ?" Et je lui dis : "C'est Marie, celle qui fut élevée dans le Temple du Seigneur, et qui m'a été accordée comme épouse. Mais elle n'est pas ma femme, et c'est de l'Esprit Saint qu'elle a conçu ". Et la sage-femme lui dit : "Est-ce véridique ?" Et joseph répondit : "Viens et vois !" Et la sage-femme alla avec lui. Ils s'arrêtèrent à l'endroit de la grotte et voici qu'une nuée de lumière recouvrait la grotte. Et la sage-femme s'écria : "Elle a été glorifiée en ce jour, mon âme, parce que mes yeux ont vu des prodiges : un Sauveur est né pour Israël". […] Et, sortant de la grotte, la sage-femme rencontra Salomé. Et elle lui dit : "Salomé, Salomé, j'ai à te raconter une étonnante merveille : une vierge a enfanté, contrairement à la nature". Et Salomé répondit : "Aussi vrai que le Seigneur est vivant, si je n'y ai mis mon doigt et scruté sa nature, je ne croirai pas qu'une vierge ait enfanté". Et la sage-femme entra et elle dit à Marie : "Dispose-toi, car une question grave est agitée à ton sujet". Et Salomé ayant scruté du doigt la nature de Marie, poussa un cri, disant : "Malheur à mon impiété et à mon incrédulité ! J'ai tenté le Dieu de vie ! Et voici que ma main, comme desséchée par le feu, se détache de moi !" Et elle s'agenouilla devant le Tout-Puissant, en disant : "O Dieu de mes pères, souvenez-vous que je suis de la génération d'Abraham, d'Isaac et de Jacob ! N'étalez pas ma honte devant les fils d'Israël, mais rendez-moi aux soins des pauvres, car c'est en votre nom que je les soignais, vous le savez, et c'est de vous que je recevais mon salaire". Et voici qu'un ange du Seigneur lui apparut, disant : "Salomé, Salomé, le Seigneur t'a entendue. Approche ta main de l'enfant et prend-le dans tes bras : il sera ton salut et ton bonheur". Et Salomé s'approcha et elle prit l'enfant dans ses bras disant : "Je me prosternerai devant lui, parce qu'un grand roi est né en Israël". Et voici qu'aussitôt Salomé fut guérie et, justifiée, elle sortit de la grotte. Et voici qu'une voix dit : "Salomé, Salomé, ne fais pas connaître ces prodiges avant que l'enfant ne soit entré dans Jérusalem" (http://www.portstnicolas.org).

Au Moyen-Âge, cette Salomé fut identifiée à Marie Salomé, ce qui fait qu'elle aurait été présente à la naissance de Jésus-Christ ainsi qu'à sa mort, lors de son embaumement, portant le vase à parfum qui lui donna le nom de myrrhophore.

Le Psaume dit de Thomas, appartenant au Psautier manichéen copte, met en scène Marie- Salomé et non Marie-Madeleine. " Compte tenu de la proximité de ces deux caractères de saintes femmes, il ne nous paraît pas exclu que des traditions relatives à Marie-Madeleine et à la tour aient pu glisser sur le personnage de Marie-Salomé, figure également ambiguë, oscillant entre prostitution et virginité. Ce dernier trait est mis particulièrement en relief par des traditions apocryphes coptes. C'est une tour toute symbolique que se bâtit Salomé, selon le Psaume dit de Thomas, dont nous proposons une traduction : " Salomé bâtit une tour sur le roc de la vérité et de la miséricorde. Les constructeurs qui la bâtirent sont les justes, les tailleurs de pierre sont les anges. Le plancher de la demeure est la vérité, les poutres du plafond sont les aumônes, la foi est le [ ] de [ ], l'intellect est le [seuil] de sa porte. Ceux qui entrent en elle se réjouissent, ceux qui en sortent, leur cœur cherche l'allégresse. Elle la bâtit et la munit d'un parapet. Salomé couronna le sommet de la tour d'un bord circulaire de pierres. Elle prit une branche de styrax [il s'agit du styrax officinalis, arbre dont on tire une résine destinée à la confection de parfums de prix] pour la purifier, elle prit le flacon d'encens dans la paume de sa main [...], [ ] dehors, elle le mit sur sa tête et elle pénétra en elle. Elle appela mon Seigneur Jésus, en disant [. . . puisses-tu] me répondre, Jésus, puisses-tu m'écouter, car je ne suis pas double, mais mon cœur et ma pensée font un seul, mon cœur n'abrite aucune pensée double ou divisée. Couronne-moi avec l'éclat de la lumière, amène-moi en haut à la maison de paix. Les gouverneurs et les chefs, leurs yeux me regardaient, ils s'étonnaient et s'émerveillaient du fait que le juste appartient à un unique Seigneur". Trois moments distincts sont présentés dans ce passage : la construction de la tour ; une double purification, du lieu et d'elle- même, que Salomé accomplit avant d'y pénétrer ; la prière que, une fois ce rituel accompli, elle adresse, d'un cœur pur, à Jésus. On distingue dans ce texte trois niveaux : l'ensemble du passage fait état, à nos yeux, de traditions rituelles ayant leur origine en milieu juif et relatives au temple de Jérusalem - la tour peut en effet être parfois un synonyme du temple ainsi que le montrent certains pseudépigraphes et des documents qumraniens. Néanmoins, un revêtement chrétien est également ajouté dans ce psaume, pour aboutir à une interprétation manichéenne de l'ensemble. […] Dans le Psaume manichéen, Salomé se consacre elle-même, en mettant l'encens sur sa tête. Dans la libre réélaboration de l'auteur manichéen, le caractère sacré de celui qui seul a le droit de pénétrer dans la partie la plus sacrée du temple, le saint des saints, est projeté sur Salomé pénétrant dans la tour. Les deux fonctions de bâtisseur de tour et de grand-prêtre dont le Psaume du Fayoum investit Salomé font d'elle un personnage privilégié et créent les conditions pour qu'elle adresse une prière à Jésus d'un cœur pur. Ce temple sur terre qu'elle s'est bâti lui servira à parvenir à la "maison de paix", située au ciel, dont le nom (paix-shalom) évoque le sien propre. "

M. Philonenko a observé que le thème de la jeune fille à la tour est un lieu commun des romans grecs et en a trouvé une trace dans une réélaboration tardive de la légende homérique d'Hélène, conservée dans les Recognitiones pseudo-clémentines II, 12, 4, et appliquée à la compagne de Simon le Magicien, une prostituée également nommée Hélène. Appelée en ce contexte Luna (Séléné), Hélène se tient dans une tour, une foule de gens la contemplant, et elle-même observant la foule à ses pieds. La scène s'inspire de la " teichoscopie " de l'Iliade et le rempart, par un glissement que favorisaient les différents sens de purgos est devenu tour.

Un exemple d'une allégorie sur Ulysse l'exilé, allégorie centrée surtout sur le thème du retour à la patrie, est présente dans un traité de Nag Hammadi, l'Exégèse de l'âme (NH II, 6). Non seulement le héros d'Ithaque mais aussi Hélène, loin des siens, a été, dans ce texte, l'objet d'une comparaison avec l'âme exilée sur terre, en proie aux passions, et désireuse de retourner auprès de son Père. Hélène, symbole de l'âme, est incitée par Aphrodite à l'acte adultère et à l'abandon de son époux : "Hélène dit [ceci : mon coeur] s'est détourné de moi, je veux retourner chez moi". Elle se lamentait en effet en disant : " C'est Aphrodite qui m'a trompée. C'est elle qui m'a emmenée hors de mon pays natal. Mon unique fille je l'ai abandonnée, ainsi que mon époux qui est bon, sage et beau " La citation est interprétée par l'auteur gnostique de la sorte : "En effet, lorsque l'âme quitte son époux parfait à cause de la tromperie d'Aphrodite - celle qui est dans la génération de ce lieu - alors elle subira des injures"(Maddalena Scopello, Femme, gnose et manichéisme).

Marie Salomé, Blaise et Démétrius

Tesoro della cattedrale di S.Andrea, Veroli

http://www.prolocoveroli.it

Certains identifient Marie Salomé à Hélène, femme de Simon le magicien, réincarnation d'Hélène de Troie. La proximité de Saint Erasme et de Marie Salomé à Veroli donne un éclairage sur cette identification par l'appellation antique du simple feu de Sainte-Elme comme Hélène, soeur des Dioscures.

Daniel Massé dans son Enigme de Jésus-Christ amalgame les trois Marie, filles de sainte Anne selon la légende, pour en faire la Salomé-Marie aux neuf enfants, 7 garçons (Jésus, Simon, Jacques le Majeur, Jacques le Mineur, Thomas, Philippe, Ménahem) et deux filles (Martha - Thamar - et Marie) http://misraim3.free.fr).

Dans Marc (15:40, 16:1) seulement, Salomé est l'une des trois femmes, les deux autres sont appelées Marie, qui furent présentes lors de la Crucifixion et qui visitèrent la tombe le lendemain. Dans le passage parallèle de Mathieu (27:56), la troisième femme est décrite comme la mère des fils de Zébédée et par amalgame Salomé est devenue la mère de Jacques et de Jean. Salomé est vénérée comme sainte Marie Salomé, connue aussi comme Irène, la Paix. Sa fête est fixée au 22 Octobre.

Trois saisons

Dans le calendrier védique, il y a trois saisons seulement. Au Kauai's Hindu Monastery ces trois saisons décrites dans le Saiva Dharma Shastra sont les suivantes : Nartana Ritau, la saison de la danse avec Shiva, commencment de l'année hindoue, saison chaude allant de mi-avril à mi-août ; Jivana Ritau, la saison des pluies, saison de la vie avec Shiva de mi- août à mi-décembre ; Moksha Ritau, la saison froide, de mi-décembre à mi-avril. Ces trois saisons recoupent la triangulation du 8 décembre - 9 avril et 8 août. Les trois saisons védiques sont probablement liées aux trois saisons de l'ancienne Grèce. Les Horae appartenaient primitivement à la Béotie et à l'Attique. Elles étaient des espèces de Grâces. Auxo et Carpo, leurs noms, rappellent les deux Grâces Orchoméniennes, Auxo et Hégémone. De part et d'autre, on ajouta bientôt un nom nouveau à la dyade, et l'on eut une " trimourti ". Ce nom fut Thallo. Auxo, Thallo, Carpo, voilà donc les trois Heures du plateau béoto-attique ! Ces noms signifient accroissement, floraison, fructification, ou croissance, fleurs, fruits. Evidemment les Heures alors étaient les Grâces-fertilité, tandis que les Grâces ordinaires sont les Grâces dans toutes les parties de la nature, dans les formes, dans les lois cosmiques et physiques. Des trois Heures, ainsi localisées dans le règne végétal, il était facile de passer à trois Heures-saisons; car, d'une part, les Grecs avaient trois saisons, et, de l'autre, Thallo s'identifie bien vite à l'Ear (printemps-été), Carpo à l'Opôra (été-automne). Des saisons, on en vint à la loi des saisons, et peu à peu les Heures devinrent des rectrices des mondes matériels, des surveillantes de la loi qui meut les mondes avec harmonie, la loi même personnifiée et individualisée. Chez Homer elles ouvrent et ferment les portes du paradis, c'est-à-dire rassemblent et dispersent les nuages. Plus tard elles étaient les dispensatrices de la pluie et de la rosée. Dans l'art, la régularité et la récurrence des saisons étaient représentées par la danse que les Heures semblaient exécuter. La fille d'Hérodiade, Salomé, dansa devant Hérode Antipas pour demandé la tête de Jean-Baptiste, dont la décapitation est commémorée au solstice d'été, porte de l'été. C'est dans ce système que rentrent les légendes crétoises qui nomment les trois Heures, Dicé, Irène, Eunomie, c'est-à-dire justice, paix, harmonie. Irène fut vénérée comme une divinité à part entière à Athènes. Sa statue par Cephisodotus portrait l'enfant Plutos, la richesse s'accroissant en temps de paix. Quand les Grecs passèrent à quatre saisons, Irène fut associée ou continua à être associée à l'été.