Partie XVI - Darmstadt   La piste Darmstadtienne   Darmstadt, Charles Baudouin et Elie   
DARMSTADT CHARLES BAUDOUIN ELIE KEYSERLING

Keyserling

20 juillet 1880 Naissance à Könno (Livonie) de Hermann de Keyserling, originaire d'une vieille famille de noblesse balte, devenue russe sous Pierre le Grand. Education première par des précepteurs. 1885 Hermann Keyserling entre au lycée russe de Pernau (Estonie) après la mort de son père. 1897 Baccalauréat. Etudes supérieures de géologie, de zoologie et de chimie. 1897-1898 Université de Genève. 1898-1900 Université de Dorpat, où Hermann de Keyserling est grièvement blessé au cours d'un duel. Ce fait est capital pour l'évolution de la personnalité et l'orientation spirituelle du futur philosophe. 1900-1901 Université de Vienne. 1902 Thèse de doctorat sur Les Roches éruptives du Tyrol du Sud. 1903-1905 Séjour à Paris, où Keyserling rédige (en 1904-1905) sa première œuvre de philosophie critique : Das Gefüge der Welt (traduction française en 1907, sous le titre : Essai critique sur le système du monde). 1907 Cycle de conférences à l'université libre de Hambourg, réunies en 1910 dans Prolegomena zur Naturphilosophie. 1908 Keyserling entre en possession du domaine seigneurial de son grand-père Alexander (ami de Bismarck), décédé en 1901. Il se fixe à Raykûll, où il poursuit les travaux de drainage et de mise en culture entrepris par son père. Avril 1911 Participation au IVe Congresso Internationale di filosofia à Bologne, où Keyserling fait une communication sur «La réalité métaphysique» («Die metaphysische Wirklichkeit»). 1911-1912 Voyage autour du monde. Rédaction de Das Reisetagebuch eines Philosophen (1913 - 1914) dont la publication, en 1919, rend son auteur célèbre (traduction française en 1929, sous le titre : Journal de voyage d'un philosophe). Ruiné à la suite de la révolution russe, Keyserling quitte définitivement Raykûll et s'installe en Allemagne. 11 mars 1919 Mariage avec la comtesse Goedela Bismarck, petite-fille du chancelier. 3 juillet 1920 Naissance de Manfred de Keyserling.

23 novembre 1920 Par l'intermédiaire de l'éditeur Otto Reichl et avec l'aide du grand-duc Ernest-Louis de Hesse, Keyserling fonde une Ecole de Sagesse à Darmstadt. 9 février 1922 Naissance d'Arnold de Keyserling. 1920-1927 Grande période de l'école de la Sagesse. D'éminentes personnalités allemandes et étrangères (C. G. Jung, Alfred Adler, Charles Baudouin, Max Scheler, Rabindranath Tagore, Richard Wilhelm, entre autres) prennent la parole aux grandes sessions annuelles de Darmstadt (Mme A.-M. Bouisson, Dates de la vie de Keyserling, La Nouvelle revue de Paris, Numéros 5 à 6, 1986 - books.google.fr).

Fervent du Christ aryen, non judéen né en Galilée (non juif), le pangermaniste Houston Stewart Chamberlain (1855 - 1927) s'en prend à Rudolph Steiner. Keyserling était un de ses amis et ancien disciple qui avait repris son indépendance.

Il n'est pas beaucoup plus indulgent au comte Keyserling, son ancien ami et quasi disciple. Dans ses mémoires, il est vrai, celui-ci est présenté comme étonnamment instruit «et toujours volcaniquement excitant». Mais, dans une lettre du 23 mai 1919 au baron d'Uexkuell, à propos du livre de comte sur Lee vrais devoirs de l'Allemagne, on lit ces lignes peu bienveillantes : «Il ne manque certes pas d'esprit, de paradoxes excitants, de rapprochements imprévus, et tout cela procure un certain amusement. Mais quelle langue effroyable (entsetzlich) ! On a l'impression que cet auteur «ne se relit jamais avant de se faire imprimer. Et l'allure de la pensée répond à ce style : chaos d'idées ou de prétentions contradictoires et entièrement fausses pour la plus grande part, etc...» (Ernest Seillière, La sagesse de Darmstadt, 1929 - books.google.fr).

Christ aryen, Christ juif : Christ rien, Christ tout puisqu'il n'a jamais existé.

Le changement intellectuel des années 1930 le range parmi les tenants de l'irrationalisme et le nouveau régime national-socialiste considère d'un mauvais œil les travaux de cet aristocrate. Lui-même refuse d'adhérer aux thèses national-socialistes, qu'il considère comme l'expression de masses manipulées par un parti d'essence révolutionnaire et nationaliste. Il n'a plus le droit de publier ni de se rendre à l'étranger (fr.wikipedia.org - Hermann von Keyserling).

Franz von Stuck, Ernest Louis de Hesse-Darmstadt, 1907

Toute sa vie, le grand-duc Ernest Louis de Hesse se passionna pour les arts, et fut lui-même auteur de poésies, de jeux, d'essais et de compositions pour le piano. Il s'éteignit à Schloß Wolfsgarten près de Darmstadt en 1937. Son fils aîné Georges de Hesse, son épouse, née Cécile de Grèce (sœur de Philip Mountbatten, futur duc d'Édimbourg lui-même petit-neveu du feu grand-duc), leurs deux enfants Ludwig et Alexander, la grande-duchesse douairière née Éléonore de Solms-Hohensolms-Lich, la nurse des enfants et un ami de la famille périrent dans un accident d'avion pris pour se rendre au mariage de frère cadet. Près d'Ostende, l'avion heurta une cheminée, prit feu et s'écrasa, le 16 novembre 1937. La princesse Cécile était enceinte de son quatrième enfant, l'enfant mort-né fut retrouvé parmi les victimes. Un seul enfant de Georges et de Cécile de Hesse était absent. Il s'agissait de la petite Johanna Marina qui n'avait que quelques mois. Celle-ci fut adoptée par son oncle Ludwig et sa tante Margaret mais mourut d'une méningite en 1939 à l'âge de 2 ans. Ludwig et Margaret Campbell Geddes n'eurent pas d'enfants. On note l'inscription le 1er mai 1937 du prince Georges Donatus et de son épouse Cécile au parti nazi (fr.wikipedia.org - Ernest-Louis de Hesse).

Le comte Keyserling m’avait dit, naguère... (Charles Baudouin, Ma rencontre avec Freud, revue chrétienne de psychanalyse Psyché, 1955 - www.histoiredelafolie.fr).

Autour de Jung, trois femmes dont deux Américaines (Kristine Mann et Eleanor Bertine) et une Anglaise (Mary Esther Harding, qui fonde en 1922 le Club Psychanalytique de Londres) deviennent les principales militantes de son œuvre aux États-Unis et en Angleterre. Par ailleurs, le docteur Helton Godwin Baynes traduit les œuvres de Jung en langue anglaise. Au Club de Zurich, certaines dissensions aboutissent à des départs. Oskar Pfister notamment dénonce le culte de la personnalité autour de Jung. Face à ces critiques, Jung, Emma et Toni Wolff quittent un temps le Club pour n'y revenir qu'en 1924. Cette année, Jung, que l'on surnomme alors « le sage de Zurich », fait la connaissance de l'excentrique Comte Hermann von Keyserling, fondateur de la Maison de la sagesse (« Schule der Weisheit ») à Darmstadt, où il est souvent invité (fr.wikipedia.org - Carl Gustav Jung).

Avant Girard, Keyserling a compris que Jésus, certes grand initié au même titre que Bouddha ou Mahomet, était un piètre philosophe. L'obscurantisme de sa symbolique a détourné le dogme de la Parole. Tout dogme n'est qu'un modèle, un mode d'emploi du spirituel. Or la grande différence entre l'Orient et l'Occident tient dans ce que jamais l'Orient n'impose son modèle comme «la» vérité parce qu'il sait qu'il y a plusieurs moyens, plusieurs voies, plusieurs «yoga» pour réaliser Dieu (Alain Ribera, Le siècle de Keyserling, La Nouvelle revue de Paris, Numéros 5 à 6, 1986 - books.google.fr).

Le psychiatre et neurologue suisse Hermann Rorschach s'inspira de la typologie de Jung pour bâtir son test projectif portant son nom, publié dans Psychodiagnostic (1921) et très utilisé aujourd'hui (fr.wikipedia.org - Carl Gustav Jung, Darmstadt : La piste Darmstadtienne : Expiation et Dagobert II).

Pouvons-nous échapper dans nos efforts d'évangélisation à la volonté de puissance ? Et sans doute nous devinons qu'il y a une objectivité de la vérité qui n'est ni argumentation ni brutalité. La vérité ne doit pas séduire, de même que Saint-Exupéry nous rappelle qu'un chef ne doit pas séduire. Un chrétien qui désire œuvrer pour que la vérité se dégage de chaque homme, de chaque race et de chaque civilisation, doit comprendre comment le vrai est incarnation simple et candide. Ainsi était l'Enfant Jésus parmi les docteurs au Temple. S'il enseignait, il n'était en lui aucun pédantisme mais l'accord se faisait sur Lui à cause de la justesse du ton. Ainsi également devons-nous comprendre la présence du Christ pendant 30 ans silencieuse au milieu des hommes de sa génération, pour laisser la vérité se dégager d'elle-même, dans la clarté et la chaleur d'une vie laborieuse qui n'impose pas des prêches et des discours avant que ceux-ci ne soient nécessaires pour achever la signification des actes tangiblement vécus. [...] Respect d'autrui, accueil d'autrui, contact amical avec les civilisations les plus diverses, pour le chrétien et pour l'Eglise, voilà les impératifs. Et ces impératifs donnent le sens du plus profond de la volonté catholique sur l'univers, de cette tentative non pas de contraindre les hommes au salut, dans une unité réductrice, mais au contraire de réunir, en contact et en dialogue toutes les valeurs humaines hors de l'Eglise à la lumière qui demeure dans l'Eglise. De l'Eglise, ou plutôt, dans l'Eglise, vient et tient tout le salut des valeurs humaines qui sont autant d'ébauches d'un dialogue avec Dieu. C'est dans cet effort pour rejoindre toutes les recherches humaines, pour rapprocher toutes les tentatives de vérité que tient à l'essence d'une universalité dont le philosophe balte Keyserling a reconnu qu'elle naîtrait de l'Eglise romaine comme d'une « matrice historique ». La mission dès « barbares » aura donc été de nous rendre à des vues plus universelles, de nous redonner des entrailles. Au lieu de les considérer comme des populations soumises à nos apports et à nos temporels saluts, il est temps de revoir avec le Christ ce qu'ils peuvent arracher de nous. Dans l'Evangile, le Seigneur a jugé bon, pour notre avertissement, de requérir l'intervention, l'appui d'un impotent, d'une Samaritaine, d une fille de joie, d'un pécheur ou même d'un simple enfant (L'église et les civilisations: Semaine des intellectuels catholiques (13 au 20 novembre 1955), Centre catholique des intellectuels français, 1956 - books.google.fr).

Elie

La deuxième partie d'Elie le prophète, publié en 1956, nous montre Élie au Carmel. S'il faut abandonner le périlleux échafaudage d'une succession historico-canonique, il n'en reste pas moins vrai que la puissance archétypale d'Élie anime tout le Carmel. C'est ce que nous expliquent le P. Bruno de J.-M., C. G. Jung, Charles Baudouin et René Laforgue (Vivre et penser, Volume 64, Ecole pratique d'études bibliques (Jerusalem), Ecole biblique et archéologique française, 1957 - books.google.fr, P. Bruno de Jésus-Marie, Charles Baudouin, C.G. Jung, René Laforgue, Élie au Carmel, Élie le prophète, Volume 2, 1956 - books.google.fr).

Le P. Bruno de Jésus-Marie, Jacques Froissart (1892-1962), descendant du chroniqueur Jehan Froissart, cesse toute pratique religieuse en 1908 ; il s'adonne à la littérature, à la musique. [...] En 1914, il revient de la guerre avec une urémie. En 1915, il lit Histoire d'une âme de Thérèse de Lisieux, les Pensées de Pascal, l'Évangile. A Noël, il se confesse, communie, lit Jean de la Croix : « Saint Jean de la Croix me séduit, saint François m'exalte ». Le 16 juillet 1916, il est au carmel de Pontoise. En décembre, à vingt-quatre ans, il entre au carmel de Pontoise. En décembre, à vingt-quatre ans, il entre au noviciat carme ; sa santé ne lui permet pas d'y persévérer. Il suit pendant trois ans les cours de l'Angelicum, à Rome, où il se lie d'amitié avec Jacques et Raïssa Maritain. Le 14 septembre 1920, il revient au noviciat d'Avon, fait sa profession le 15 septembre 1921, fréquente les Facultés théologiques de Lille jusqu'en 1925. Il est ordonné le 14 juin 1924. En 1929, il publie sa remarquable vie de Saint Jean de la de la Croix, avec une préface de Jacques Maritain. Chez les Maritain, il rencontre certains de ceux qui seront ses collaborateurs. Quand on lui confie les Etudes carmélitaines, elles n'avaient plus que dix- sept abonnés. Le P. Bruno les veut « mystiques et missionnaires ». Il leur donne une orientation psychologique, confrontant la doctrine des saints du Carmel avec les données des sciences psychologiques, psychiatrique, bientôt psychanalytiques ; avec les autres mystiques aussi. Dans la Vie spirituelle de juillet 1931, le P. Chenu nomme quelques-uns des premiers collaborateurs : Dalbiez, Maritain, Massignon. [...] Le P. Bruno aura d'autres collaborateurs : Charles Baudoin, Marcel de Corte, Pierre Olphe-Galliard, Gustave Thibon... (André Bord, Jean de la Croix en France, 1993 - books.google.fr).

Les carmélites et les trois portes

Montrevel

Florent-Alexandre-Melchior de La Baume-Montrevel est né le 18 avril 1736 à Mâcon, de Nicolas-Auguste, maréchal de camp, et de Marie-Florence du Châtelet ; ayant demeuré en son hôtel à Mâcon et en son château de Challes. Entré au service, le 8 novembre 1750, comme sous-lieutenant au régiment du roi, il obtint, le 11 septembre 1755, le rang do mestre-de-camp de cavalerie, servit pendant la guerre de Sept-Ans en qualité d'aide-de-camp du prince de Soubise, et fut promu brigadier le 25 juillet 1762, puis maréchal de camp le 3 janvier 1770. Il avait épousé, le 10 avril 1752, n'ayant pas encore seize ans, Elisabeth-Céleste-Adélaïde de Choiseul, fille de César-Gabriel, comte de Choiseul, plus tard duc de Praslin, ambassadeur à Vienne, et d'Anne-Marie de Champagne-la-Suze. Il se sépara d'elle par acte du 17 avril 1760, « attendu l'incompatibilité d'humeurs ». Devenu veuf le 18 octobre 1768, il se remaria, le 22 juillet 1769, avec Marie-Jeanne-Catherine de Grammont, fille de Pierre, marquis de Grammont et de Villersexel, et de Marie-Henriette de Vaudrey. Ce mariage ne fut pas plus heureux que le précédent et, en janvier 1773, Montrevel, las des excentricités de sa femme, en vint à demander contre elle une lettre de cachet, en vertu de laquelle elle fut enfermée, au couvent de Sainte-Anne à Paris, puis chez les Carmélites et enfin chez les Récollettes (Les députés de Saône-et-Loire aux assemblées de la Révolution 1789-1799, Memoires, Société éduenne des lettres, sciences et arts (Autun, France), 1924 - books.google.fr).

Gisors

A Gisors, le carmel fut fondé en 1631 par Sublet de Noyers.

François Sublet, seigneur de Noyers, précurseur de Louvois et de Colbert, était issu d'une famille du Blésois. Son père, Jean Sublet, sieur de la Guerchonnière, puis seigneur de Noyers et baron de Nointel, anobli en 1578 pour services rendus à Charles IX et Henri III, intendant de la maison du cardinal de Joyeuse, secrétaire des finances et de la chambre du roi et trésorier de France en la généralité de Rouen, puis maître ordinaire de la chambre des comptes, résigne cette fonction à son gendre, Charles Le Provost et est pourvu d'une charge de secrétaire d'État qu'il transmet immédiatement à son fils François. Sa mère, Madeleine Bochart, fille d'un conseiller au parlement de Paris, avait apporté à son époux de précieuses parentés. Elle était sœur de Jean Bochart, seigneur de Champigny et de Bouconvilliers, bientôt sous-intendant des finances et enfin premier président du parlement de Paris; elle était petite cousine du cardinal Richelieu. Elle voyait fréquemment dans sa famille un capucin dont tout le monde admirait la vertu et à qui l'on attribuait même des miracles; c'était son beau-frère, le Père Honoré de Champigny, grand ami de Madame Acarie et naturellement au courant de ses intentions en faveur du Carmel français. Jean Sublet, devenu veuf, conseillé par le chartreux Dom Beaucousin, l'un des plus grands serviteurs de Dieu de ce temps, partagea son bien entre ses quatre enfants, reçut l'habit de chartreux en l'église de Notre-Dame de Vauvert-lès-Paris le 23 février 1617, à l'âge de 64 ans. Il vécut assez pour déposer en 1630 dans l'information relative à la vie et aux miracles de la Bienheureuse Marie de l'Incarnation. François Sublet, son fils, a fixé denuis longtemps l'attention des historiens, Il était entré dans l'administration dès sa jeunesse. Trésorier de France à Rouen, il épousa, en 1613, Jeanne Le Sueur, d'une famille de fonctionnaires de la Cour des comptes et qui le laissa veuf après dix ans de mariage. Successivement admis au nombre des secrétaires du roi, secrétaire des finances de Gaston d'Orléans, membre des Conseils d'État et privé, appelé par son oncle Bochart de Champigny, surintendant des finances, et par Michel de Marillac, son collègue, en 1624, à exercer les fonctions de contrôleur général de Paris, il sut par son zèle, par son intelligence et par sa modestie, mériter cette faveur et. après la nomination du maréchal d'Effiat à la surintendance, il fut promu à l'un des quatre postes d'intendant des finances ; dès lors il ne négligea aucune occasion de montrer de plus en plus des qualités d'ordre et d'économie d'autant plus appréciées qu'elles contrastaient avec le désordre habituel des bureaux. En 1631 il fut inspecteur des places fortes du Nord et du Nord-Est de la France, et c'est au retour de l'inspection qu'il traita de l'établissement des Carmélites. Déjà toutes les formalités se trouvaient remplies ; notables de la ville, ofliciers des diverses juridictions et établissements relevant du roi, échevins, commerçants, bourgeois, tous firent bon accueil au projet; une requête fut adressée à l'archevêque de Rouen en vue d'obtenir l'autorisation nécessaire. Elle fut aussitôt accordée le 15 février 1631 : «Les religieuses seront tirées et prises du monastère des carmélites établies en la ville de Pontoise». On obtint des lettres patentes du 16 mars 1631 qui permettaient l'érection de ce nouveau monastère et qui furent lues aux notables de Gisors. Ceux-ci y consentirent, bans s'obliger à loger ou à entretenir les religieuses, ni à leur bâtir un monastère. Jeanne de Jésus prit possession le 13 octobre 1631 de la maison provisoire qui lui était destinée. M. du Val posa le Saint Sacrement dans la chapelle. Le Carmel de Gisors était fondé. Cependant, cette maison, située au centra de la ville et louée moyennant trois cents livres, était petite, incommode et souffrait de quantité de vues sur elle. Aussi les carmélites cherchèrent une autre maison mieux accommodée à leur genre de vie. Ce fut le manoir du fief de l'Isle, assis dans la ville, en 1632, mais elles ne purent l'occuper de suite. A la fin de juillet de la même année, la peste ayant éclaté dans Gisors et ayant mis en fuite une partie de la population, elles reçurent obédience des supérieurs de sortir de la ville. M. Sublet leur ouvrit les portes de son château que son père avait fait construire de manière à le transformer au besoin en couvent. Elles y demeurèrent après la peste, jusqu'à la fin des travaux d'appropriation du manoir de l'Isle (Chanoine Pierron, Jeanne Séguier, Mémoires de la Société historique et archéologique de l'arrondissement de Pontoise et du Vexin, Tome 30, 1910 - gallica.bnf.fr).

Sublet père avait destiné son château de Noyers près Gisors à devenir couvent des carmélites. Aumale avait été préféré mais c'est à Paris que le premier des Carmélites en France vit le jour (Jean-François Senault, La vie de la mère Magdeleine de Saint-Joseph, religieuse déchaussée de la première règle de la réforme de Sainte Thérèse, 1670 - books.google.fr).

Barbe Jeanne Avrillot, épouse de Pierre Acarie, née à Paris le 1er février 1566, morte à Pontoise le 18 avril 1618. Animatrice d'un cercle religieux, elle introduit en France l'ordre des Carmes déchaux. Après la mort de son mari, elle entre au Carmel sous le nom de Marie de l'Incarnation. Grande mystique, elle est la première stigmatisée française officiellement reconnue. Le 15 octobre 1604, c'est la fondation du premier carmel déchaussé en France, le couvent des Carmélites au faubourg Saint-Jacques. Ce sera le carmel Saint-Joseph de Pontoise, ouvert le 15 janvier 1605. À sa mort, en 1618, on compte 27 carmels en France (fr.wikipedia.org - Barbe Acarie).

L'un des signataires du Serpent rouge habitait Pontoise (Le Serpent rouge : Etudes en rouge : Notre Dame des Cross).

Jarnac

Il n'y a pas de carmel à Jarnac.

Née en 1620, Claire du Saint-Sacrement, fille de Guy Chabot baron de Jarnac, avait été élue prieure des carmélites de la rue Saint-Jacques, à Paris, en 1672, puis réélue en 1681 et en 1690, année de sa mort (Marie de Rabutin-Chantal marquise de Sévigné, Correspondance, Tome 3, présenté par Roger Duchêne, 1972 - books.google.fr).

Au carmel de la rue Saint Jacques, on rencontre la favorite Louis de La Vallière, fille des La Baume Le Blanc, famille d'origine bourbonnaise, à ne pas confondre avec les La Baume Montrevel, qui s'y retira après avoir été répudiée par son amant Louis XIV.

Guingamp, près de l'intersection Darmstadt - Gisors et Rennes le Château - Jarnac

Françoise d'Amboise porta la couronne ducale de Bretagne, et la déposa avec joie pour revêtir la bure du Carmel. Le mariage de Françoise et de Pierre, alors titré comte de Guingamp, fut célébré avec une grande solennité en 1442. Les deux époux vinrent se fixer au château de Guingamp et ils y tinrent une cour brillante, que fréquentait la noblesse de Tréguier, de Saint-Brieuc et du pays de Cornouailles. Pierre et Françoise demeurèrent le plus souvent à Guingamp jusqu’à la mort du duc François, arrivée en 1450, et qui laissa le trône ducal au comte de Guingamp, son frère. A la mort de son mari, Françoise d'Amboise voulut prendre le voile dans le monastère des Clarisses de Nantes; puis elle entra en relation avec le Père Soreth, général de l’Ordre des Carmes, lui exposant son désir a de se rendre religieuse, ce qu’elle aurait taché d'exécuter par diverses fois, s'étant à cette fin retirée au monastère de Sainte—Claire ; mais qu’elle n'avait pu, pour ses maladies presque continuelles, supporterla rigueur et l'austérité de cet institut. Le Père Soreth l'écouta, l'encouragea et la dirigea vers l'Ordre du Carmel; il n'eut pas de peine à la décider à demander l'envoi d'une colonie de Carmélites, qui devait étre installée auprès de Vannes, dans l'ancien monastère du Bon-Don. Françoise vint alors se fixer dans cette ville (1460) et s'exercer avec les personnes de sa maison aux pratiques de la vie religieuse. [...] Françoise rompit définitivement avec le monde, poussée peut-être encore par le désir de prier plus ardemment pour ceux qui écoutaient si mal ses conseils. Le 25 mars 1461, elle prit le voile (Edouard de Barthélemy, Françoise d'Amboise, Revue du monde catholique, 1866) (Le Prieuré de Sion : Les documents secrets : 6 - Dossiers secrets de Henri Lobineau : Darmstadt et les trois portes).

Le carmel breton de Guingamp est fondé en 1626. Des lettres-patentes du roi, du mois de Septembre 1631, approuvent les fondations faites à Guingamp, et ailleurs.

Elie et l'ivoire de Darmstadt

L'Ivoire de Darmstadt est une intéressante production de l'ivoirerie chrétienne. Il est d'une composition judicieuse, d'un burin exercé, d'un mérite avéré et d'un archaïsme agréable. La Revue de l'Art chrétien en a fait la critique en octobre dernier. L'article est d'une plume fort érudite ; mais il implique des assertions hésitées et où nous voyons, au au moins sur un point, autre chose que ce qu'elles insinuent. Nous prenons la liberté d'exposer une autre exégèse qui seule nous paraît vraie. Elle est fort simple et relève directement du texte biblique qui la rend aussi lumineuse qu'obvie et sincère. Les trois compartiments du volet de droite composent un même thème. Au centre, est le prophète Elie. Il est ravi en extase sur le sommet du Carmel ; un prodige lui apparaît très haut et très au loin. Il étend la main au-dessus de ses yeux pour abriter ses regards et en prolonger la portée. Ce geste seul nous a suffi pour reconnaître Elie ; nous l'avons vu dans d'autres documents allusifs à la même pensée. Le livre des Rois décrit fidèlement cette scène. Et Élie gravit la montagne du Carmel c'était son septième jour de prière et d'attente. Et voici qu'une petite nuée s'éleva du sein de la mer ; or, cette nuée portait une sorte d'empreinte d'homme (I Rois XVIII, 42,44). Quelle était cette nuée mystérieuse, marquée «d'une empreinte humaine» et quelle en était la configuration ? La version chaldaïque répond sans hésiter qu'elle avait «la forme d'une main d'homme, le creux de la main, sicut vola manûs hominis». C'est la seule interprétation que présentent les notes de Ménochius dans la Bible de Carrières. Or, d'après le sentiment unanime des auteurs d'herméneutique sacrée, la blanche nuée entrevue du haut du Carmel était la Vierge miraculeusement féconde, et «la main, le creux de la main» dont cette vapeur immaculée avait l'apparence, était l'image préfigurative du Dieu fait homme et la droite, déjà vue de loin, de son auguste personne. C'est cette apparition du Messie que le prophète Élie contemple. L'inscription du large phylactère qu'il tient à la main en fait foi : aspiciens a longe ecce video potentiam Domini, paroles évidemment calquées sur celles-ci de saint Paul aux Hébreux : Isti non acceptis promissionibus sed a longe eas aspicientes et salutantes (Hébreux XI,13). Elie attend le Verbe fait chair dont il entrevoit la main sacrée. Deux anges la lui apportent : ce sont Michel et Gabriel, les deux anges en quelque sorte personnels du Fils de l'homme, nobles gardiens, l'un de sa nature divine, l'autre de sa nature humaine. Généralissime du Dieu des armées, Michel a soutenu contre Satan la cause de son divin Maître, tandis que Gabriel a porté le décret de l'incarnation et en a transmis le message à la Vierge. Ces deux archanges accostent habituellement le Sauveur et constituent les attributs vivants de sa personne. Dans un nombre infini de pièces iconographiques, l'imagier les accouple, portant ensemble un emblème du divin Rédempteur: une croix, un agneau, le monogramme, la croix monogrammatique ; ces divers objets sont habituellement inscrits dans une couronne de laurier ou de palmes. Ces deux anges ressemblent à plusieurs d'entre nos ectypes des IXe, Xe, XIe siècles ; ils apparaissent, comme eux, serrés et engaînés dans une tunique en forme de fourreau, aux plis rares et plats, disgracieusement dessinés. La main divine ne tient pas la couronne comme lorsque Dieu veut couronner un martyr ; elle est, au contraire, elle-même couronnée, nimbée, ainsi qu'une chose divine mérite de l'être. C'est la main du Seigneur ; il la tend au prophète, ainsi que l'insinue la suite du récit de la vision du Carmel : et manus Domini facta est super Eliam. La Vierge Mère. Le compartiment inférieur de l'ivoire de Darmstadt complète la pensée de la vision ou plutôt la réalise. Le prophète Élie demandait la pluie au Seigneur ; sa prière fut exaucée. Il plut à torrents. Cette pluie miraculeuse continue très intelligiblement l'allégorie figurative de l'incarnation ; elle représente l'effusion du Verbe du sein du Père dans le sein de la Vierge Marie qui fut la nuée vue du Carmel et née de la mer. «Or, nous dit une charmante homélie du moyen âge, une nuée est faite des vapeurs de la terre et de la fécondante chaleur du ciel ; ainsi l'humanité du Sauveur est faite de la virginale substance de Marie et d'une brûlante effusion d'amour du Saint-Esprit. La nuée se dégage des eaux de la mer, mais ne retient rien de leur amertume. On n'y trouve plus ni odeur de marée ni saveur saumâtre. De même, la mystique nuée de l'humanité du Christ est née des flots de la mer du monde, mais immaculée, d'une Vierge, et vierge comme elle de toute ombre de souillure» (Jean de Carthagène, Homiliae catholicae). Voilà la nuée qu'Élie «a vu monter de la mer» et qu'il contemple d'un regard prolongé et profond. «Le propre de la nuée, ajoute l'ancien homiliaste, est de se résoudre en pluie bienfaisante; ainsi la Vierge s'épanche en pluies de grâce «en nous donnant JÉSUS». Tel est, en effet, le sens textuel du tableau dessiné au-dessous du prophète. La Vierge y paraît mettre au monde le divin Enfant ; elle l'allaite. Tous les deux sont étendus sur le sol et ne semblent faire qu'un avec la terre qui les porte : c'est la tige de Jessé et sa fleur délicate qui jaillissent de la terre eutr'ouverte. Qui ne voit, dans ce groupe d'une hardiesse candide, la vivante version de ce texte sacré : O cieux, épanchez vos rosées! Que les nuées pleuvent sur le juste ! Que la terre s'entr'ouvre et germe son Sauveur» (Isaïe 45,8). Cette allégorie prophétique se lit d'une façon non moins expresse dans les liturgies de l'Orient. O Créateur de toute créature, germe divin, vous étes sorti du sein de la Vierge au moment où la terre mourait de soif et vous avez rempli la terre des senteurs exquises de votre amour. Ainsi se déroule dans son ordre logique le thème du mystère de l'Incarnation. Le prophète Élie l'entrevoit à distance, sous la forme d'une blanche vapeur ; cette vision, c'est la Vierge qui conçoit le Verbe incarné dont on voit transparaître la main. C'est l'Alma tellus, devenu l'Alma Redemptoris mater qui donne au monde un Sauveur. La Vierge représente en quelque sorte toute la terre ; on la voit couchée sur le sol, oubliée, pauvre comme son fils «qu'elle sustente d'un peu de lait, lui qui ne laisse pas le plus petit «oiseau sans pâture». (Abbé Didelot, Ivoire de Darmstadt, Revue de l'art chrétien, Société de Saint-Jean, 1889 - books.google.fr).

Couverture ivoire et cuivre provenant de l'abbaye Saint Jacques de Liège, Hessisches Landesmuseum Darmstadt - commons.wikimedia.org

Certains voient Jean-Baptiste à la place d'Elie. Mais n'est-il pas un autre Elie selon les évangiles ?

Certains milieux juifs attendaient, comme précurseur du Messie, un retour du prophète Elie. L'accoutrement de Jean-Baptiste semblait une doublure du sien, avec pelisse de toison et pagne en peau ceignant les reins (2 Rois, 1,8). Le rituel purificatoire du baptême introduisait dans «le lot de Dieu» le pécheur qui avait appartenu au «lot» de son rival – Bélial pour Qumrân, « Zéboul» selon Elie. [...] La Bible rapporte qu'Ochozias, roi d'Israël, tomba du haut de la terrasse de son palais à Samarie. Alité, il envoya consulter l'oracle de Ba'al Zéboub, dieu d'Eqrôn, pour s'enquérir s'il guérirait. Elie, outré qu'il se fût adressé à l'idole d'un peuple étranger plutôt qu'à Yahwé, lui fit savoir qu'il ne se relèverait plus (2 Rois 1,24). Le nom de Ba'al Zéboub, «Seigneur des Mouches», n'est qu'un sobriquet forgé à partirde Ba'al Zéboul, «Seigneur Prince», titre divin déjà connu à Ugarit : zbl (Bernard Teyssedre, Le Diable et l'Enfer: Au temps de Jésus, 2014 - books.google.fr).

Psaume 38

L'inscription du large phylactère qu'il tient à la main en fait foi : aspiciens a longe ecce video potentiam Domini, paroles évidemment calquées sur celles-ci de saint Paul aux Hébreux : Isti non acceptis promissionibus sed a longe eas aspicientes et salutantes (Hébreux XI,13) :

C'est dans la foi que ces patriarches sont tous morts, sans avoir reçu l'effet des promesses; mais ils l'ont vu et salué de loin, confessant qu'ils étaient étrangers et voyageurs sur la terre.

Ce que la Bible de Jéruslem associe au psaume 38,13 : "car je suis l'étranger chez toi, un passant comme tous mes pères".

Un passage du psaume 38 est gravé sur l'obélisque du méridien de Paris dans l'église Saint Sulpice : Ps 38,6 "Ecce mensurabiles posuisti dies meos, et substantia mea tanquam nihilum ante te."

La toile d'araignée apparaît dans le psaume 38 (Vulgate). Ps. 38,12 : "Vous instruisez l'homme par le châtiment, à cause de son iniquité; vous rendez ses désirs fragiles comme une toile d'araignée: oui, la vanité est tout l'homme." Dans d'autres traductions, "araignée" est rendu par "teigne" (Bible de Jérusalem) (Autour de Rennes le Château : La dalle horizontale de Marie de Nègre : vers Montolieu).

On a en latin du moyen âge pour aranea, à la fois arena et irania.

L'araignée de la dalle horizontale de Marie de Nègre désignerait Irénée, disciple de saint Polycarpe, commune où se trouve Arrenal sur la ligne gnostique. Ce serait une autre araignée que l'hegemonikon situé vers Prouille ("NOBLe").

C'est à Saint Irénée à Lyon que le Codex Bezae était conservé avant qu'il ne soit volé et confié à Théodore de Bèze qui l'offrit à l'université de Cambridge (Autour de Rennes le Château : Superposition de dalles et Saint Sulpice).

La page 38 de La Vraie Langue Celtique est appariée à la page 193 (38 + 155) :

C'est sans doute parce que, les habitations gauloises affectant la forme ronde, une maison carrée construite dans la ville a excité un étonnement général et déterminé l'appellation de Nemausus. Peut être aussi toutes les maisons de la cité avaient-elles la forme carrée. (VLC, 193)

D'un point de vue mathématique, la question de la recherche des longitudes et celle de la quadrature du cercle n'ont rien de commun : évaluer à la règle et au compas la surface d'un cercle par rapport à celle d'un carré n'est en effet d'aucune utilité pour repérer une position sur une sphère. Certains n'hésitaient cependant pas à nier cette évidence pour lier les deux thèmes. Si la chymie a sa pierre philosophale, la géométrie a sa quadrature du cercle, l'astronomie ses longitudes, les mécaniques leur mouvement perpétuel (Autour de Rennes le Château : Superposition de dalles et Saint Sulpice).

Achab accuse Elie d'être un perturbateur, ce dernier lui renvoie son accusation pour avoir permis le culte des baals parmi les isréalites.

Le terme hébreu akar, est peu fréquent. En dehors de deux occurrences (1 Rois 18,17-18) il n'est attesté que douze fois dans la Bible hébraïque : une fois dans un psaume (Ps 39, 3 : "à voir sa chance (de l'impie), mon tourment s'exaspéra"), quatre fois dans le cadre d'un proverbe (Pr 11, 17, 29 ; 15, 6, 27) et sept fois dans un contexte narratif (Gn 34, 30, Jos 6,18 ; 7,25 - deux fois - ; Jg 11,35; 1 S 14, 29; 1 Ch 2, 7) (Alfred Marx, Mais pourquoi donc Elie a-t-il tué les prophètes de Baal ?, Revue d'histoire et de philosophie religieuses, Volume 78, 1998 - books.google.fr).

Le verbe 'akar a été diversement traduit. La Bible de la Pléiade, la Traduction œcuménique de la Bible ou encore la Nouvelle Bible Segond le traduisent par «porter malheur, attirer le malheur», la Bible de Jérusalem le rend par le substantif «fléau», la Bible des Editions Bayard, dite Bible des écrivains, par «fauteur de troubles».

akar a le sens de jeter un sort. Josué ne peut prendre la ville d'Aï après celle de Jéricho car il faut lever le sort qui a été jeté sur les israélites qui ont trangresser l'interdit de faire du butin. De même Jonas est jeté par dessus bord du navire où il fuit l'ordre divin de prêcher à Ninive pour lever le sort qui a produit la tempête. De même Elie en éliminant les centaines de prêtres de Baal lève le sort qui provoque la sécheresse dont le roi Achab accusait le prophète (Christian Grappe, Alfred Marx, Sacrifices scandaleux ? Sacrifices humains, martyre et mort du Christ, 2008 - books.google.fr).

Parmi les anciens Pères : Eusébe (mort en 340) et s. Nil (mort en 430) vivant dans les pays chauds de Palestine et d'Egypte, entendent cette expression, "démon de midi" (Ps. 90,), du démon de la paresse qui, afin de ruiner les âmes par ses tentations contre la pureté, s'efforce de faire prolonger la sieste de midi en usage dans ces pays. De même s. Jérôme (mort en 419) vivant aussi dans ces contrées pense que le psalmiste a parlé suivant l'opinion du vulgaire qui croit qu'il y a certains démons dangereux surtout à midi. S. Augustin (mort en 430) y voit la figure des persécutions durant lesquelles la rage des païens éclate au grand jour, où l'on ne se contente plus de faire mourir les chrétiens, mais on s'efforce de les faire apostasier en recourante la torture. Pour s. Jean Chrysostome (mort en 407) tandis que les dangers de la nuit représentent les tentations qui proviennent des adversités, le démon du midi serait le péché criard, la révolte d'orgueil ou de vanité, vers laquelle nous poussent la santé et le pouvoir. Parmi les écrivains du moyen-âge Richard de St-Victor (mort en 1175) et s. Bonaventure (mort en 1275) voient dans cette figure Satan en personne se transformant en ange de lumière, comme lorsqu'il tente le Christ, persuadant qu'en suivant ses suggestions on fera œuvre sage, pie et méritoire. De nos jours on a dit que le mot hébreu «quéteb» serait le nom propre d'un démon des plus violents qui ose attaquer en plein midi et à force ouverte, ou, suivant d'autres, qu'il s'agit d'un fléau, d'une maladie contagieuse qui opère ses ravages aussi bien le jour que la nuit. M. l'Abbé Pérennès pense qu'il s'agit tout simplement de « la chaleur écrasante du milieu du jour, ou peut-être des accès violents de paludisme qu'elle déclanche». On sait qu'un écrivain contemporain a pris cette expression (Paul Bourget) comme titre d'un de ses romans et lui donne encore une autre signification : le réveil des passions, vers le midi de la vie, que Dante, au début de son Enfer compare déjà « au milieu du chemin » où nous sommes assaillis par des animaux symboliques, la panthère (luxure), le lion (orgueil) et la louve (rapacité), qui semblent inspirés de notre psaume. [...] Dans l'ombre du Tout-Puissant les targums juifs voient un rappel de la nuée ombrageant le Tabernacle dans le désert. Les Pères, appliquant ce psaume au Christ, voient dans sa croix, notre unique espérance, la citadelle inexpugnable, et la cuirasse protégeant contre toutes les attaques de Satan ; et dans les bras du Christ crucifié, les deux ailes toujours ouvertes pour nous abriter. S. Ambroise dit que les pièges sournois de l'oiseleur sont « l'appât des honneurs, l'élévation des charges, les délicatessesde la vie et la beauté des courtisanes ». [...] D'après certains, l'aspicou vipère est le symbole des ruses diaboliques; le basilic, serpent portant une couronne, représente la mort, reine de ce monde ; le lion, la force, la violence des passions et le désir de vengeance ; et le dragon, Satan en personne. S. Irénée voit dans ces quatre animaux la personnification des vices capitaux d'obstination, d'envie, d'oisiveté et de gourmandise (D. H. Delogne, Qui habitat : psaume du carême, Revue liturgique et monastique, Volume 9, Abbaye de Maredsous, 1923 - books.google.fr).

Psaume 38 et psaume 90 : midi - méridien / lourdeur - plomb - perpendiculaire / queteb - Esaü

La page 38 de la VLC début l'histoire biblique, avec la création d'Adam et Eve. Le paradis terrestre n'est pas mentionné mais implicite. La page 90 parle d'un autre jardin, celui des Hespérides, à l'ouest alors que l'eden est à l'est.

Selon Dante, Adam, né au lever du jour, commit sa faute dès midi et fut chassé du Paradis terrestre aux premiers instants de l'heure suivante.

La précision géométrique, astronomique, de l'expression (mutar quadra) prouve bien l'intention de Dante : en toute action il y a un point exact à reconnaître, où le mal prend la place du bien Adam a manqué de discernement en écoutant le serpent (le démon de midi) ; il a franchi en aveugle la limite assignée par la justice de Dieu. Ce n'est pas un péché de gourmandise qui lui est imputé, ma solamenle il trapassar del segno (Annales: Lettres, Volumes 9 à 10, 1940 - books.google.fr).

On peut mettre en rapport le psaume n° 90 et l'angle droit de 90 degrés : midi.

"Je n'y demeurai que depuis la première heure jusqu'à celle qui est seconde, quand le soleil, à six heures, passe, l'arc du quadrant" (Paradis, Chant XXVII), c'est-à-dire : je n'y demeurai que sept heures. Voici la note de Lombardi : « Dante suppose que le jour est divisé en douze heures, et que la sixiême est mezzogiorno, midi. Or, comme dans tout pays on compute que le soleil à midi est élevé au-dessus de l'horizon de 90 degrés, qui forment la quatrième partie du cercle, appelée vulgairement quadrant, il dit qu'après la sixième heure, le soleil change de quadra. Au lieu de faire répondre par Adam, qu'il a habité le paradis depuis la première heure jusqu'à la septième, il lui fait dire qu'il l'a habité jusqu'à l'heure seconde après la sixième, en tout sept heures.» C'est une ancienne opinion qu'Adam n'est resté que sept heures dans le paradis terrestre (Voyez Pierre Comestor dans son chap. XXIV de l'Histoire scolastique) (La Divine Comédie de Dante Alighieri traduite en français par m. le chevalier Artaud de Montor, 1841 - books.google.fr).

Pour l'homme de la Bible, dans un monde où tout dépend de la causalité divine, la maladie ne fait pas exception : il est impossible de ne pas y voir un coup de Dieu qui frappe l'homme (Ex 4, 6; Jb 16, 12 s.; 19, 21 ; Ps 39, 11). En dépendance de Dieu, on peut y reconnaître aussi l'intervention d'êtres supérieurs à l'homme : l'Ange exterminateur (2 S 24, 15 s. ; 2 R 19, 35; Ex 12, 23), les fléaux personnifiés (Ps 91, 5), le Satan (Jb 2,7), les esprits malfaisants (surtout dans le judaïsme post-exilique) (Martin Pradère, De toutes les nations, faites des disciples: pour une évangélisation respectueuse des cultures, 2006 - books.google.fr).

Dans l'Hymne I (Les Hymnes sur le Paradis), S. Ephrem le Syrien nous montre le Paradis dans son ensemble, entourant la terre et la mer, comme son halo entoure la lune. Le Paradis apparaît ainsi comme une sphère d'existence transcendante au cosmos et l'enveloppant. Ce Paradis à son tour comprend des sphères concentriques superposées. Au delà de tout Paradis, se trouve le domaine transcendant de Dieu. Vient ensuite le Paradis supérieur, qui sera la sphère eschatologique des ressuscités, puis le Paradis intermédiaire, celui où Adam avait été établi à l'origine, enfin le vestibule du Paradis, qui est le lieu des pénitents. En deçà se trouve la trouve la géhenne, le lieu des pécheurs. On remarquera que cette structure reproduit celle du Temple de Jérusalem, dont on devrait plutôt dire qu'il est une reproduction de la structure du cosmos. Elle est rapprochée aussi de la structure du Sinaï et de celle de l'Arche (Jean Daniélou, Eschatologie, Recherches de science religieuse, Volume 38, 1951 - books.google.fr).

Evagre le Pontique (IVème siècle) dit que le démon de midi est le plus pesant des démons.

La prière de St Ephrem le syrien est utilisée par l'Eglise orthodoxe pendant la période de la sainte quarantaine qui précède la semaine sainte et la fête de Pâques (Carême) : Seigneur et maître de ma vie, éloigne de moi tout esprit de paresse, d'abattement, de domination et de vain bavardage. Accorde à ton serviteur l'esprit d'intégrité, d'humilité, de patience et de charité. Oui, Seigneur et Roi, donne-moi de voir mes fautes et de ne pas juger mon frère car Tu es béni pour les siècles des siècles. Amen. Nous voyons que dans le début de la prière de St Ephrem les deux premières intentions «éloigne de moi l'esprit de paresse et d'abattement» correspondent exactement à ce qui se passe lorsque l'homme est atteint par l'acédie (Père Syméon L'expérience contemporaine de l'acédie entre Orient et Occident, Tristesse, acédie et médecine des âmes dans la tradition monastique et cartusienne: anthologie de textes rares et inédits, XIIIe-XXe siècle, 2005 - books.google.fr).

On lit dans le Journal de Charles Du Bos (V, 1929) :

C'était en avril 1913, au cours de cette période où pendant plus de deux mois, je dus rester alité. Edmond Jaloux m'ayant parlé avec admiration du Fantôme de Paul Bourget, je lus le roman, le seul de Bourget que je me trouvais n'avoir jamais lu, et qui en effet, après le Démon de Midi est le plus beau de ses romans, et c'est dans le Journal de Malclerc, le héros du livre, que je rencontrai ces lignes : «Il y a dans la Bible un passage qui m'est tombé sous les yeux, par hasard, quand j'étais bien jeune, à l'époque de mes premiers élans vers la vie, et je ne l'ai jamais oublié, tant il s'appliquait dès lors, avec une exactitude saisissante, aux relations entre moi et ceux dont je descends. Il s'agit du prophète Élie, et de son découragement, lorsque, couché sur le sable du désert, dans l'ombre d'un genévrier, il gémit : «J'en ai assez, Seigneur; prends mon âme, puisque je ne suis pas meilleur que mes pères.» [1 Rois XIX,3-9]». Dès le premier contact ce texte m'avait «saisi» moi aussi et même il était descendu très avant en moi, mais ce n'est qu'en la période d'avril-mai 1917 - qui, dans mon histoire intérieure, marqua sans contredit une étape importante, mais que sur le moment je vécus sans en comprendre toute la portée, et dont je ne devais recueillir les fruits que beaucoup plus tard - que le texte assuma pour moi sa plénitude de signification (P. Bruno de Jésus-Marie, Charles Baudouin, C.G. Jung, René Laforgue, Élie au Carmel, Élie le prophète, Volume 2, 1956 - books.google.fr).

Le Démon de midi est un roman de l’écrivain français Paul Bourget (1852 - 1935) paru en 1914 aux éditions Plon-Nourrit à Paris. Ce roman à thèse à forte teneur idéologique, comme L'Étape (1902) ou Un divorce (1904), permet à l’académicien de développer les thèmes sociaux, politiques et religieux qui lui sont chers et qu’il a découverts en lisant Joseph de Maistre, théoricien de la Contre-révolution : la lutte contre les idées révolutionnaires et la défense de l’Église catholique romaine, de la famille traditionnelle et des valeurs patriotiques. En décrivant les milieux ecclésiastiques de l’époque, alors agités selon lui par des controverses dangereuses, Paul Bourget affirme la nécessité d’une discipline de l’esprit et des mœurs et, conséquemment, d’une autorité supérieure à toute discussion, d’un magistère infaillible qui règle cette discipline. Le livre s’inscrit au cœur de la crise du modernisme, qui, entre 1900 et 1910, remet en cause les valeurs traditionnelles de l’Église catholique et suscite l’émotion des théologiens proches du Pape Pie X. Paul Bourget se fait l’interprète des positions exprimées par le Saint-Siège dans les textes pontificaux publiés à cette époque et qui condamnent sans appel le courant moderniste. La publication du Démon de midi est l'occasion pour les historiens du modernisme de livrer leur interprétation sur la spiritualité et les thèses dégagées dans le roman et sur les limites de la vision conservatrice du romancier catholique.

Paul Bourget donne comme titre à son roman cette expression mais comprise dans son sens premier, l'acédie, un des sept péchés capitaux (fr.wikipedia.org - Le Démon de midi (roman)).

Paul Bourget, né à Amiens le 2 septembre 1852 et mort à Paris le 25 décembre 1935, est un écrivain et essayiste catholique français, académicien, issu d’une famille originaire d’Ardèche. On distingue traditionnellement deux périodes dans l'œuvre littéraire de Paul Bourget, avant et après son retour au catholicisme (il se convertit en 1901), ce retour s'effectuant progressivement dans les années 1890. Sont représentatifs du « premier » Paul Bourget et de son talent à étudier la psychologie humaine : Cruelle énigme, Cosmopolis, André Cornélis, Mensonges - inspiré du calvaire amoureux d'Octave Mirbeau - et du « second » Paul Bourget : L'Étape, Le Démon de midi, Nos actes nous suivent. Le Disciple (1889) est considéré comme le roman faisant la transition entre ces deux périodes (fr.wikipedia.org - Paul Bourget).

Charles Baudouin a une correspondance avec Paul Bourget, en 1922 (Bibliothèque de Genève, Catalogue des manuscrits, Papiers Charles Baudouin, 19e - 21e s., CH BGE Ms. fr. 5951-6074, 7510-7542, non catalogué (2017/4) - w3public.ville-ge.ch).

Et aussi, en passant, avec François Ducot-Bourget, que L'Enigme sacrée fait grand maître du Prieuré de Sion.

Germain Joseph Pierre Marie Maurice Ducaud, dit François Ducaud-Bourget (de l'usage des noms de ses deux parents), dit aussi François Ducaud, est un prélat franciscain et poète français, figure du catholicisme traditionaliste, né à Bordeaux le 24 novembre 1897 et mort à Saint-Cloud le 12 juin 1984 (fr.wikipedia.org - François Ducaud-Bourget).

Qeteb, boule de poils, comme Esaü, est pesant comme le plomb. Le midi rapporte aux points cardinaux et au code du nom d'Adam selon les Oracles Sibyllins (gréco-syriaques) 3, 24-26, acrostiche des mots "Anatolè", "Dusis", "Arktos", "Mesèmbria", désignant en grec les quatre points cardinaux (Su-Min Ri, Commentaire de la Caverne Des Trésors: Étude Sur L'histoire Du Texte Et de Ses Sources, 2000). Pour tracer la méridienne, on peut même se contenter de marquer l'ombre d'un fil à plomb sur le sol horizontal, à l'heure de midi (Charles François Antoine Leroy, E. Martelet, Traité de stéréotomie, Tome 1, 1857) (Autour de Rennes le Château : Signol - Sigzol : la lettre de Mantinée).

On parle de soleil de plomb chez Lamartine (Voyage en Orient, 1837), de soleil d'aplomb chez Brizeux (Les Bretons, poème, 1845) (fr.wiktionary.org).

C'était l'heure de midi, l'heure où le muetzlin épie le soleil sur la plus haute galerie du minaret, et chante l'heure et la prière de toutes les heures ; voix vivante, animée, qui sait ce qu'elle dit et ce qu'elle chante, bien supérieure, à mon avis, à la voix sans conscience de la cloche de nos cathédrales. Mes Arabes avaient donné l'orge, dans le sac de poil de chèvre, à mes chevaux attachés çà et là autour de ma lente, les pieds enchaînés à des anneaux de fer : ces beaux et doux animaux étaient immobiles, leur téte penchée et ombragée par leur longue crinière éparse, leur poil gris luisant et fumant sous les rayons d'un soleil de plomb. Les hommes s'étaient rassemblés à l'ombre du plus large des oliviers; ils avaient étendu sur la lerre leurs nattes de Damas, et ils fumaient, en se contant des histoires du désert, ou en chantant des vers d'Antar. Antar, ce type de l'Arabe errant, à la fois pasteur, guerrier et poête, qui a écrit le désert tout entier dans ses poésies nationales, épique comme Homère, plaintif comme Job, amoureux comme Théocrite, philosophe comme Salomon (Alphonse Marie Louise de Lamartine, Voyage en Orient, Oeuvres, 1837 - books.google.fr).

La mélôte est une peau de mouton ou de brebis avec sa toison, nom dérivé de "melon" brebis ou bétail. Les premiers anachorètes se couvroient les épaules d'une mélote, et vivoient ainsi dans les déserts. Partout où la Vulgate parle du manteau d'Elie, les Septante disent la mélote d'Elie ; saint Paul, parlant des anciens justes, dit qu'ils marchoient dans les déserts couverts de mélotes et de peaux de chèvres (Paul, Epître aux Hebreux c. 11, v. 37) ; c'étoit l'habit des pauvres. M. Fleury, dans son Hist. ecclés., dit que les disciples de saint Pacôme portoient une ceinture, et sur la tunique, une peau de chèvre blanche, qui couvroit leurs épaules ; qu'ils gardoient l'un et l'autre à table et sur leur grabat; mais que quand ils se présentoient à la communion, ils ôtoient la mélote et la ceinture, et ne gardoient que la tunique. C'est que la ceinture étoit uniquement destinée à relever la tunique quand on vouloit marcher ou travailler, et la mélote, à se garantir de la pluie; cet équipage ne convenoit plus, lorsqu'on vouloit se mettre dans une situation plus respectueuse; cette attention des solitaires prouve leurs sentiments à l'égard de l'eucharistie (Nicolas Bergier, Dictionnaire de théologie, 1852 - books.google.fr).

On rencontre une nouvelle fois le chapitre 11 de l'épître aux hébreux de saint Paul traitant de la foi, de ces témoins qui furent parfois persécutés.

Au chapitre 11 des Hébreux, saint Paul remontrant les tourments que les anciens martyrs endurèrent pour la foi, racontés en l'Ecriture, comme Zacharie qui fut lapidé; au second des Paralipomènes, chap. 24, de Jérémie qui fut moqué, fouetté et empoisonné (Jérem. 37,14). S. Paul, dis-je, au chapitre 11. des Hébreux, verset 35, dit : Distenti sunt, au grec il y a "etumpanisthèsan" (ils ont été étendus comme un tambour) ; dans le second des Machabées, chapitre sixième, verset vingt-huitième, au lieu que dans le texte latin il y a : Ad supplicium trahebatur, il y a au grec "eis to tumpanon", qui est le même mot qu'aux Hébreux, et on ne trouve point en tout le vieux Testament ce genre de supplice que S. Paul allègue, sinon en ce passage des Machabées (Jean Le Jeune, Le missionnaire de l'oratoire ou sermons pour l'Avent, le Carême et les fêtes, 1825 - books.google.fr).

Antoine léguera à Athanase l'une de ses mélôtes et le manteau sur lequel il couchait, donné neuf, aujourd'hui usé; à Sérapion, l'autre mélôte; aux deux moines le servant, le vêtement de poils (V. Ant. 91, 8-9). [...] Le vêtement de poils grossier évoque le «sac» de deuil et de pénitence des Écritures (voir par exemple Genèse 37, 34; Jonas 3,5 ; Luc 10,13). [...] Evagre en dégage le symbolisme: «Ils ont la mélôte, parce qu'ils portent en tout temps dans leur corps la mort de Jésus, qu'ils musellent toutes les passions irrationnelles du corps... qu'ils aiment la pauvreté» (Philippe Walter, Saint Antoine entre mythe et légende, 2017 - books.google.fr).

On peut déjà constater le fait dans les récits légendaires qui circulèrent sur la vie de St Antoine. C'est en effet à midi, sous la pleine ardeur du soleil, que lui apparaît un être fantastique moitié homme, moitié cheval, un hippocentaure, bientôt suivi de satyres, faunes et incubes (Saint Jérôme, Vie de saint Paul Ermite) [...]. Il est clair que l'ascète a conscience de courir quelque risque en n'interrompant pas son voyage à midi et qu'il invoque Dieu pour qu'il le préserve du danger encore indéterminé qui le menace. A ce moment apparaît l'Hippocentaure. Il faut se rappeler que d'après les glossographes syriens, les Sirènes sont des êtres moitié hommes, moitié chevaux, et qu'encore aujourd'hui, en éthiopien et en arabe, les seriel ou les sedânatât (forme à -d-, dérivée de "seirèn") représentent toute espèce de monstres mystérieux habitant le désert, comme c'était déjà le cas à l'époque hellénistique, où les Septante emploient "seirèn" chaque fois qu'il est question des différentes espèces de nécrophages ou d'animaux supposés tels : le chacal, les «filles de la plainte», sans doute les autruches et les hiboux. Il ne peut donc subsister que très peu de doutes sur la nature de l'être qui apparaît à Antoine à midi. En général, d'ailleurs, ce ne sont pas les sirènes qui paraissent avoir influencé particulièrement la nature du démon de midi chrétien; leur rôle, sauf dans le texte ci-dessus, apparaît même insignifiant à côté de celui qu'assuma la figure composite de Diane-Artémis, qui dans tout le Moyen-Age représente avec un éclat exceptionnel les traditions «diaboliques» du paganisme pourchassé. Bien que depuis Callimaque et Ovide, l'aventure d'Actéon, qui, comme on sait, se passe à midi, ait joui d'une grande fortune littéraire et iconographique, il ne faut sans doute pas chercher en elle les raisons déterminantes de l'influence décisive de la déesse dans le folklore chrétien du démon de midi. Le motif de l'identification est apparemment beaucoup plus immédiat : c'est tout simplement, comme le remarque Korth, l'homophonie Diana, Meridiana. Au reste, dès l'antiquité, Artémis était déjà une déesse malfaisante d'un caractère très particulier, même indépendamment de toute identification avec Hécate : invisible, elle entre dans les maisons, souillée du contact des cadavres et des tas d'ordures des carrefours (Roger Caillois, Les démons de midi, 1991 - books.google.fr, Étienne Michel Faillon, Monuments inédits sur l'apostolat de sainte Marie-Madeleine en Provence, Tome 2, 1848 - books.google.fr, Le Serpent rouge : Le voyage de l’âme : La chauve-souris 2, reinedumidi.com).

Elie est accusé par Achab d'être un perturbateur et porte un manteau de poils d'animal, de même Jean-Baptiste avec Hérode Antipas : poil à gratter.

L’acédie, les nuits spirituelles, la mélancolie et nous le verrons plus loin, tous les états dépressifs, sont liées à la problématique de la perte de l’objet aimé avec ses effets sur le moi et le surmoi. Sont mis à l’épreuve «le moi avec son idéal», et par voie de conséquence le sens de la vie et sa place dans le monde. La quête de l’absolu n’est plus ce que le mystique avait projeté, et «ces questions existentielles, habitent souvent le malade somatique grave confronté à un réel danger de mort (Marc-Alain Descamps, « Les Psychothérapies Transpersonnelles » édit. Trismégiste, 1990, p 6)». C’est là que la foi «foire», car, comme dit Lacan : «la foi c’est la foire tellement il y a de sortes de fois («le triomphe de la religion, le discours aux catholiques», édit. Seuil, 2005, p 95)». Nous avons, aussi, comme lointain exemple, la traversée psychotique d’Empédocle. Sous l’action du manque et de la frustration, son amour désespéré le poussa à se précipiter dans l’Etna (Gaston Bachelard, La psychanalyse du feu, Paris, Gallimard, 1949). Il fut séduit et fasciné, tel les pyromanes ou les suicidés collectifs des mouvements sectaires qui s’immolent par le «feu», ou se passent par les armes (à feu). C’est pour cette raison que notre monde d’aujourd’hui à tant de mal à comprendre ces phénomènes, hélas récurrents, liés aussi aux croyances apocalyptiques, «profanes». Celles-ci couvent toujours dans les fantasmes collectifs (Gilbert Sescousse, Origines des Dépressions - www.gilbertsescousse.fr).

La foi est la base, et pour employer l'expression de saint Paul, la substance de notre espérance, et la lumière qui nous découvre les choses invisibles. Est autem fides sperandarum substantia rerum, argumentum non apparentium. On ne peut lire ce que cet apôtre dit de la foi, dans le chapitre 11 de son Epître aux Hébreux, sans chérir ce don divin, art-dessus de toutes les possessions; sans en être pénétré, et sans préférer ses mystérieuses obscurités a loutes les connaissances humaines. Sans elle les vérités, même les plus graves , n‘ont aucune consistance; c‘est la foi qui les tire de la faible et mobile lumière de la raison, pour leur donner la sanction et la stabilité (François-Xavier Feller, Biographie universelle, Tome 4, 1848 - books.google.fr).

Zénon enseignait que Dieu était sphérique, c'est-à-dire parfait, et la sentence si recommandée d'Empédocles, disant que Dieu est une sphère intellectuelle et incompréhensible dont le centre est partout et la circonférence nulle part, ne signifie pas autre chose que l'excellence et la perfection infinies de Dieu. (VLC, p. 245)

A partir de 1639, Olier s’enfonce dans la dépression et dans l’obscurité spirituelle. Il va rester pendant deux ans dans un état de prostration et de profond dégoût de lui-même. Le décès de son directeur spirituel, le père de Condren, en 1641, va le laisser désemparé. C’est au coeur de cette épreuve qu’il va s’en remettre complètement à Dieu, renonçant à s’en sortir par ses propres forces. Ce mouvement d’abandon va être pour lui une véritable libération et il va sortir complètement guéri de cette épreuve à Pâques 1641 (Gilbert Sescousse, Origines des Dépressions - www.gilbertsescousse.fr).

Le démon de midi est un monstre fait d'écailles et de cheveux, n'ayant qu'un seul œil, lequel est situé à la place du cœur Il ne sévit ni dans les rayons du soleil, ni dans l'ombre, mais dans la lumière intermédiaire. Il se roule en avant comme une boule et agit de 10 heures du matin à 3 heures de l'après-midi, surtout en été, du 17 du mois de Tammus au 9 du mois d'Ab. Tous ceux qui voient ce démon tombent morts sur le coup. Un Talmudiste invite pour pour cette raison les maîtres d'école à laisser, entre ces deux dates, les enfants sortir dès 10 heures, un autre à ne pas les frapper pendant cette période critique Le Talmud fait également mention d'un démon d'avant et d'après-midi (d'où il ressort que midi était sans doute aussi une heure de passage chez les Hébreux) : il est muni d'un cor, ne possède qu'un œil et tourne continuellement en cercle (Roger Caillois, Les démons de midi, 1991 - books.google.fr).

En plein midi nous trébuchons, atteste le Livre des Rois (2 Rois 4, 20). C'est l'heure où vient l'ange dévastateur : « en plein midi, j'ai fait venir le Dévastateur... une épouvantable confusion » Jér. 15, 8). Midi, c'est l'heure aussi où le prophète Élie se moque des rites endiablés des sectateurs de Baal (1 Rois 18, 27) (Bernard Forthomme, De l'acédie monastique à l'anxio-dépression: histoire philosophique de la transformation d'un vice en pathologie, 2000 - books.google.fr).