Partie IX - Synthèse   Chapitre LXIV - Super-étoile (Superstar in english)   Villedieu, 25 décembre   

Villedieu Cantal, 25 décembre

Villedieu, est un village situé près de Saint-Flour, sur le petit ruisseau de ce nom, et abrité par une montagne au nord. Il n'a de remarquable que son église, de la Nativité de Notre Dame, qui est un très-bel édifice. Elle porte le caractère de deux époques très-différentes. La partie inférieure du clocher tient évidemment du style roman, et dénote l'existence d'une première église sur les débris de laquelle a été plus tard construite la nef actuelle. Cette nef est du XIVème siècle ; elle a été bâtie en 1363 par Pierre d'Estaing, après le traité de Brétigny de 1360, mais surtout après la mort d'Emerigot, roué en place de grève, quand le calme revint dans cette contrée ravagée, ruinée.

Pierre Ier, d'Estaing, était fils de Guillaume III, seigneur d'Estaing, et d'Eminarde de Peyre. Il était religieux de Saint-Victor, à Marseille, lorsqu'il fut élu évêque par le chapitre. Il fit construire sa belle église (1363). Les Frères prêcheurs, qui avaient résidé au faubourg quelques années, vinrent de son temps se fixer dans la ville. Jean, duc de Berry et d'Auvergne, leur fit de grands dons et contribua puissamment et la construction de leur église et du monastère. D'Estaing assembla un concile provincial, en 1368, et y fit décider que les ecclésiastiques ne pouvaient être poursuivis, eu aucun cas, par les juges séculiers. Mais comme cette décision était contraire aux droits de la couronne et aux règlements du royaume, sur les remontrances du duc de Berry, elle fut rapportée. Pierre d'Estaing fut nommé archevêque de Bourges en 1369, cardinal camerlingue des papes Urbain V et Grégoire XI, et légat en Italie. Il mourut à Rome en 1377, et enterré dans l'église de Sainte-Marie, au-delà du Tibre. Il fut évêque pendant le pontificat de Grégoire XI et le règne de Charles V, dit le Sage. Sous ce prélat, la surveillance était si rigoureuse, à cause du voisinage des Anglais, qu'en 1367 les consuls refusèrent à Pierre de lui ouvrir la nuit la porte du Tuile, parce que cet évêque voulait rendre visite au bailli du Gévaudan qui passait au faubourg, et malgré sommation de sa part.

Au centre de la nef, un puits de quatre mètres de profondeur donnait une eau que les pélerins buvaient et emportaient par dévotion. De l'édifice roman, construit au XIème siècle, sous le vocable de Notre Dame du Rozanet, il subsiste la tour carrée, bâtie en tuf rougeâtre. A l'intérieur, la tour est divisée en deux étages. Au niveau de la nef est située la chapelle aux voûtes d'arêtes surbaissées soutenues par des arcs d'ogives du XVème siècle. Sur un autel trône la statue de la Vierge en bois de chêne doré. Elle a dû être restaurée et représentait peut-être autrefois une Vierge assise. Dans le socle qui la supporte sont conservées trois reliques dont un morceau de linge de la Vierge noire qui passe pour être celle trouvée miraculeusement dans les ronces. On y trouvait une " matraca " roue à clochettes que l'on faisait tourner lors des cérémonies.

Un événement miraculeux du Xème siècle est, selon la tradition, à l'origine de l'église. Un cultivateur labourait son champ lorsque ses bœufs s'arrêtèrent en face d'un fourré de ronces. Il les excite de la voix et de l'aiguillon mais les animaux refusent d'avancer. Le laboureur s'avance, écarte les ronces et aperçoit une petite image de la vierge rayonnante de clarté. Il la porte au curé de la paroisse qui décide de la transporter en procession à Saint- Flour. Mais on la retrouve à la même place… Alors les habitants, comprenant que la Vierge a choisi ce lieu pour y être honorée, décident de lui élever une nouvelle église. Cette image de la Vierge fait partie du groupe énigmatique des " Vierges noires, qui ont suscité des récits miraculeux, sont devenues des objets de légendes transmises par la tradition orale. Ce sont des Vierges guérisseuses et protectrices ; celle de Villedieu rend l'usage des jambes. Attirées par l'écho des miracles accomplis, les foules se pressent, au cours de pèlerinages, vers leurs églises, et attendent d'elles les secours face aux calamités qui les frappent.

Ces Vierges noires sont les héritières d'un long passé de croyances, les dernières descendantes d'un culte rendu aux déesses-mères depuis la Préhistoire. L'exercice des cultes des religions antiques s'accompagnait, pur certaines d'entre-elles, de ce que l'on appelait les "mystères". Au cours de cérémonies secrètes, l'initiation était conférée au "myste" qu'après l'avoir éprouvé de différentes façons (terre, air, eau, feu) afin de s'assurer de sa force de caractère et de ses facultés spirituelles. L'enseignement n'était prodigué que la nuit, au cœur des temples ou dans les cryptes, où des souterrains obscurs figuraient les méandres dans lesquels l'âme serait projetée après la mort. La nuit symbolisait de ce fait la mort, non seulement au sens physique, mais aussi la mort au monde profane. Vierges mères et déesses noires étaient les maîtresses de l'initiation. La symbolique est double : mort puis renaissance à l'état d'initié. Les deux aspects sont complémentaires d'une même réalité ésotérique qui veut que des ténèbres (ignorance) naisse la lumière (connaissance). C'est pourquoi il a fallu que le christ naisse la nuit de Noël à minuit, c'est à dire à l'heure la plus noire de la nuit la plus longue, au sein d'une grotte (image terre-mère) et non d'une crèche comme cela est improprement traduit. L'enfant ne représente pas seulement Jésus, mais le "myste", qui, par l'initiation, devient le fils de la vierge noire. C'est pourquoi il est noir comme elle. Il est son enfant, par la connaissance des mystères et figure dans son giron pour faire comprendre littéralement qu'il sort des entrailles de sa mère comme des entrailles de la terre (www.onnouscachetout.com - Vierges noires).

Le Christ noir de Saint-Flour est là semble-t-il pour en témoigner.

Le père Jacques Branche, prieur-mage de Pébrac, situe cette invention en 1383, année de transmutation pour Nicolas Flamel. " Villedieu, proche Saint-Flour, célèbre par une image miraculeuse de Notre Dame, trouvée, dit-on, en ce lieu en 1383, couverte de broussailles. On ne la découvrit que par une espèce de miracle. Un bouvier qui conduisait ses bœufs, fut arrêté avec eux lorsqu'ils furent à l'endroit où était l'image. On la prit et on l'apporta plusieurs fois dans l'église de Saint-Flour ; mais on la trouvait toujours à Villedieu, ce qui fit juger à l'évêque, Pierre de Vissac, que la Vierge voulait être honorée particulièrement dans ce lieu-là. Il y fonda un petit chapitre et y transféra la paroisse, qui était auparavant dans le village de Chaseaux.

Il est faux, ajoute Audigier, que Villedieu ait eu une telle origine. L'église existait avant la fondation du chapitre. Pierre d'Estaing le reconnaît lui-même dans l'acte de fondation du chapitre ; il est de 1366, et il porte que l'antiquité avait vu cette église au même lieu, en avait reçu l'image, et admiré les miracles infinis que Dieu y opérait par cette image, ce qui obligea de fonder un chapitre. "

Audigier a raison. Il est certain qu'il existait avant 1277, à Villedieu, une chapelle dite de Notre-Dame-de-Rozanet, qui attirait une grande affluence de pèlerins.

Le fondateur de l'église, Pierre d'Estaing, établit auprès d'elle, en 1367, un chapitre de six chanoines, qu'il pourvut de bons revenus. Il voulait même y bâtir une résidence épiscopale ; mais les habitants de Saint-Flour s'effrayèrent de l'éloignement de leur évêque, et l'obligèrent à cesser ses travaux. Il paraît même que ceux de l'église furent interrompus. L'œuvre fut reprise en 1444 par Jacques Le Loup, successeur de Pierre d'Estaing. Mais les consuls et les habitants de Saint-Flour, se rappelant les attaques subies par leur ville à partir du château d'Alleuze par les bandes de Barnard de Garlan dans les années 1380, exposent au roi Charles VII les dangers courus par la ville en cas de prise du château de Villedieu par des troupes ennemies. Ils rappellent que l'évêque a fait construire ce château sans l'autorisation du roi ou de ses officiers. Le roi Charles VII, par une ordonnance du 25 juin 1444 donnée à Tours, ordonne le rasement du château.

Liens entre Saint-Flour et l'Aude

L'Evêché de Saint-Flour fut érigé par le Pape Jean XXII en 1317, celui d'Alet l'année suivante. Cette église n'était avant son érection en Evêché qu'un Prieuré de Bénédictins de la Congrégation de Cluny. Le premier Evêque fut le Prieur de ce Monastère, nommé Frère Raymond Valens de Monigol, que le même Jean XXII fit Cardinal dans sa suite, et transféra à l'Evêché de Saint-Papoul, saint fêté le 3 novembre comme saint Flour.

Géraud du Puy, dit de Miremont, serait natif de Saint-Flour. Prieur de la Voûte, il est élu évêque par le chapitre de Montauban, en remplacement de Bertrand Robert de Saint-Jal, le 27 septembre 1403. Il est ensuite transféré au siège de Saint-Flour, le 17 décembre 1404, mais il ne prend possession de ce diocèse que le 25 mai 1410. A la suite du décès de Pierre de Saluces, Géraud obtient l'évêché de Mende le 4 janvier 1413, mais il ne s'y rend pas Géraud ne réside guère dans ses évêchés, qui sont simplement des sources de revenu. Il suit une carrière diplomatique, comme ambassadeur en Angleterre et en Espagne, le roi lui confiant plusieurs missions et le chargeant d'intervenir en son nom lors du concile de Constance en 1417. L'évêché de Mende revient à Jean de Corbie, le 19 avril 1413, alors que Géraud reçoit le siège épiscopal de Carcassonne, qu'il conservera jusqu'à sa mort. Géraud meurt le 4 septembre 1420. Il est inhumé dans la cathédrale de Carcassonne.

Bon Vieillard

Jacques Paul Migne, dit l'abbé Migne, né à Saint-Flour (Cantal) le 25 octobre 1800 et mort le 24 ou 25 octobre 1875, est un prêtre français et un éditeur. Migne eut l'idée de publier pour la première fois des éditions à bon marché d'ouvrages de théologie, d'encyclopédie et des œuvres des pères de l'Église en langue originale avec traduction. Ces œuvres des Pères de l'Église, et d'autres documents médiévaux ont été réunis par Migne dans ce qui aujourd'hui est couramment appelé les Patrologies latine et grecque de Migne. En 1833, il fonde, puis dirige le journal L'Univers. En 1836, il crée la maison d'édition du Petit Montrouge. Les trois grandes collections qui ont fait sa réputation ont été Patrologiae cursus completus, collection de textes latins en 221 volumes (1844-45) ; collection de textes grecs, d'abord publiées en Latin (85 volumes., 1856-57) ; avec le texte grec et la traduction latine (165 volumes., 1857). Migne est continuellement cité comme référence dans les dictionnaires latins et grecs, notamment dans le dictionnaire grec-français d'Anatole Bailly. Ses Patrologies grecques et latines ont trouvé un relais de qualité à partir du milieu du XXe siècle dans la collection Sources chrétiennes. Sa concurrence souleva la colère des éditeurs accrédités par les Eglises car il leur prenait leur clientèle. Son évêque lui reprocha alors son militantisme ultra-catholique et, à la fin du Second Empire, il fut interdit à l'abbé Migne de dire la messe. L'un des évêques qui l'avait persécuté, Mgr Georges Darboy, fut fusillé par les communards. Le pape Pie IX sanctionna Migne pour avoir mis à la disposition du plus grand nombre des textes habituellement accessibles au seul "public plus averti", et il interdit au clergé d'utiliser les fonds paroissiaux pour acheter ses ouvrages. Du 12 au 13 février 1868, les ateliers de Migne furent presque complètement détruits par un incendie d'origine "inconnue" et les assurances ne couvrirent pas les frais de réfection. La maison d'édition Garnier frères racheta les droits sur ses éditions après sa mort (fr.wikipedia.org - Jacques Paul Migne).

Jeune Mort

Il s'agit du même que celui de La Chapelle-Geneste

: Antoine d'Urfé, évêque de Saint-Flour et abbé de La Chaise-Dieu.

Alchimie

Auprès de Villedieu s'élève une colline que le vulgaire nomme le Puy-de-Villedieu. Elle ne produit rien, pas même de l'herbe, contre l'ordinaire des montagnes les plus affreuses de l'Auvergne. On a conclu de là que cette colline avait été le théâtre d'un miracle rapporté par Pierre de Montboissier, abbé de Cluny, surnommé le vénérable, fêté le 25 décembre et sa mémoire le 11 mai. C'est lui qui préside à la consécration de son abbaye le 25 octobre 1130. Cluny est en effet proche de Saint-Berain-sur-Dheune. Un paysan d'Auvergne, dit-il, entendit dire que le vrai secret de conserver les abeilles était de jeter dans la ruche le sacré corps du Sauveur [A Villedieu ruche se dit "brusça" (Jean-René Mestre, Gaby Roussel, Ruches et abeilles: architecture, traditions, patrimoine, 2005).

Il le sortit de sa bouche après l'avoir reçu de la main du prêtre, et courut vers ses abeilles ; mais, ayant soufflé l'hostie avec impétuosité dans le trou de la ruche, elle tomba par terre, où les abeilles la recueillirent et la portèrent avec beaucoup de vénération à leur ruche, en présence du maître qui, ne faisant pas réflexion plus sérieuse à l'action de ces abeilles, s'en alla d'abord où l'appelaient ses autres affaires. Sur le chemin, le sacrilège se sentit troublé d'une terreur soudaine qui lui fit connaître enfin qu'il avait failli. Touché donc ou plutôt emporté d'une force intérieure, il revint sur ses pas, et, pour expier son impiété, il s'en prit aux mouches innocentes en répandant sur la ruche une quantité d'eau qui les étouffa ; il n'en voulut pas pourtant laisser perdre le miel ni la cire, qu'il se mit en état de tirer hors de la ruche. A l'ouverture, il trouva l'hostie en la forme d'un bel enfant, mais paraissant mort, comme si l'eau que le paysan avait versée l'eût noyé avec les mouches à miel. Le scélérat prit l'enfant entre ses mains profanes pour l'ensevelir secrètement, mais le sacré corps disparut aussitôt. Le paysan, effrayé, fut rendre compte de ce qui s'était passé à son propre prêtre (on qualifiait pour lors ainsi ce que l'on a nommé plus tard curé); celui-ci le redit à l'évêque de Clermont, et 1'évêque à Pierre le Vénérable, qui ajoute que Dieu prit soin ensuite de venger sa querelle sur le lieu où la chose était arrivée. La mort enleva tous les habitants, et ce ne fut plus qu'une solitude effroyable qui n'avait rien produit depuis (Déribier Du Châtelet, Dictionnaire statistique du département du Cantal, 1857).

Cette légende se rapporterait plus sûrement au deuxième passage des tours de roue, nécessaire au travail alchimique, au 25 décembre correspondant comme on l'a vu dans le chapitre concernant le Sceau de Palaja (Etoile hermétique : alchimie). La vierge noire de Villedieu et celle de La Chapelle-Geneste et le Christ noir de Saint-Flour relèvent plutôt du début de l'oeuvre comme materia prima (Vierges noires). Le nom de Villedieu, qui apparaît aussi à Sainte-Foy-Saint-Sulpice doit donc se lire "vil dieu" - sur lequel les Templiers auraient craché - : dans les Entretiens du roi Calid et du philosophe Morien cette matière "est une pierre vile, noire et puante ; qui ne coûte presque rien".