Partie V - Arts et Lettres   Chapitre XL - Section littĂ©rature   Penseurs socialistes   

PrĂ©curseur du socialisme, Saint-Simon, Claude Henri de Rouvroy, petit-neveu du mĂ©morialiste, nĂ© Ă  Paris en 1760, appuie Ă  la fin de sa vie sur l’idĂ©e que le but de la sociĂ©tĂ© est d’amĂ©liorer le sort de la classe la plus pauvre et que l’Etat doit favoriser son Ă©ducation et orienter le monde industriel dans le sens de l’intĂ©rĂŞt collectif. Des saint-simoniens comme Jules Le Chevalier seront attirĂ©s par la suite par la philosophie de Charles Fourier (Besançon, 1772 – Paris, 1837) qui prĂ´nait la constitution de « phalanstères Â», sorte de coopĂ©ratives de production et de consommation sous forme de sociĂ©tĂ©s par action. Pour Fourier, il ne s’agit surtout pas d’abolir la propriĂ©tĂ©. Entre 1841 et 1845, ses Ĺ“uvres complètes sont publiĂ©es posthumĂ©ment. Elles intègrent dans la thĂ©orie gĂ©nĂ©rale la transmigration des âmes et la possibilitĂ© pour les somnambules de communiquer avec l’au-delĂ , faisant de lui un prĂ©curseur du spiritisme en France. Un de ses disciples amĂ©ricains, Horace Greeley, thĂ©oricien de la frontière – « Allez Ă  l’Ouest, jeune homme, avancez dans le pays Â» - se fera le propagandiste, dans le New York Tribune, de l’expĂ©rience des sĹ“urs Fox de Hydesville, en 1847, qui lança la mode des tables tournantes dans le monde. Greeley sera le candidat dĂ©mocrate aux Ă©lections prĂ©sidentielles de 1872. Victor ConsidĂ©rant (Salins, 1808 – 1893), autre disciple de Fourier, lui aussi franc-comtois, s’en prendra violemment Ă  l’exploitation capitaliste des ouvriers dans le journal fouriĂ©riste La Phalange  et dans Le Phalanstère. ConsidĂ©rant, exilĂ© après le coup d’Etat de Louis-NapolĂ©on Bonaparte, fondera un phalanstère au Texas qui sera ruinĂ© par la guerre de SĂ©cession. Toujours inspirĂ© par Fourier, notons Jean-Baptiste Godin, crĂ©ateur du familistère Ă  Guise, grâce Ă  la prospĂ©ritĂ© de son entreprise de calorifères.

Autre pays de Fourier, Pierre Joseph Proudhon (Besançon, 1809 – Paris, 1865) s’en distingue par son indiffĂ©rence au spiritisme – « mystification Â» - mais le rejoint dans un socialisme utopique, associatif et pacifique. Ennemi de la centralisation, il prĂ´ne un Etat fĂ©dĂ©ratif et le groupement volontaire de travailleurs Ă©gaux et solidaires. Pour contrebalancer la puissance Ă©tatique, il reconnaĂ®t que la possession d’ « une portion de matière en toute souveraine Â» est nĂ©cessaire, ne condamnant pas la propriĂ©tĂ©. Il s’opposera Ă  Marx en rejetant toute menĂ©e rĂ©volutionnaire, allant jusqu’à approuver l’action de l’armĂ©e dans l’insurrection de 1848. L’influence de Proudhon sera manifeste sur le mouvement syndical. LĂ©on Jouhaux, secrĂ©taire de la CGT, lui rendra hommage en 1909. La charte d’Amiens, adoptĂ©e en 1906, s’inscrit dans le courant anarchisant initiĂ© par Proudhon Elle renonce Ă  la conquĂŞte du pouvoir et affranchit le syndicat de toute tutelle politique.