Partie XI - La Vraie Langue Celtique de l’abbé Henri Boudet   Le Calendrier de La Vraie Langue Celtique   19 février - Béat - Monein   

Béat (Bié), 19 février

pages 43-56

L'axe passe par Marmande, Monein, près d'Oloron Sainte Marie.

On conserva longtemps, dans l'église de l'abbaye de saint Mansuet, près de Toul, la pierre sur laquelle saint Martin s'était agenouillé : on la montrait aux pèlerins comme un monument qui attestait, à la fois, la piété de saint Martin et l'antiquité du culte de saint Mansuet : elle portait une inscription exprimant que saint Martin était venu à Toul et avait prié au tombeau de saint Mansuet (Achille Dupuy, Histoire de Saint Martin, évéque de Tours, 1865 - books.google.fr).

Toul se trouve sur l'axe du 22 septembre.

Jusqu'au Xème siècle, la tradition constante de l'église de Toul a été que saint Mansuet, son premier évêque, avait été disciple de saint Pierre et envoyé par ce prince des apôtres en notre pays pour y planter la foi. Cette tradition s'est maintenue dans l'histoire, dans les martyrologes et dans la liturgie Touloise depuis le Xème siècle jusqu'au commencement du XVIIIème (Charles Denis, Augustin Bonnetty, R. P. Laberthonnière, Annales de philosophie chrétienne, 1863 - books.google.fr).

Monein, Cagots et 19 février

François de Belleforest serait l'un des premiers à avoir parler des Cagots. Belleforest est né à Samatan en 1530 à Samatan (Gers), mort le 1er janvier 1583 à Paris. Samatan est sur l'axe du 2 février.

François de Belleforest, annaliste du royaume de France sous Charles IX, avait déjà présenté les mêmes objections, et d’une façon beaucoup plus précise : « D’autres dient que ce sont les restes des Goths demeurés en Gascoigne, mais c’est fort mal parlé, car la plupart des maisons d’Aquitaine et d’Espagne, voire les plus grandes, sont issues des Goths, lesquels, bien longtemps avant le sarrasinisme, avaient reçu la religion catholique pour quitter l’arianisme. » (L. Louis-Lande, Les Cagots et leurs congénères, Revue des Deux Mondes tome 25, 1878).

Le 19 février 1345, Philippe VI de Valois demande aux sénéchaux « de faire examiner par un médecin les prétendus lépreux chaque fois que la fréquentation journalière déplairait aux plaignants ; et de veiller à l'isolement de ceux qui seraient malades ». Il offre ainsi habituellement aux simples suspects de lèpre, aux crestiaas, d'échapper à la marque. Les bourgeois se retranchent derrière l'évêque d'Albi. Dans le même texte, l'évêque ordonne aux juifs le port d'un disque jaune, aux juives celui d'un chapeau en forme de corne et aux crestiaas un signe de drap distinctif. En 1407, les bourgeois du Languedoc réclament encore auprès du roi Charles VI le port d'un signal par les crestiaas. Le roi y fait droit, mais sans renier la visite médicale ordonnée par Philippe de Valois. La mesure est inopérante : la multiplication des mesures obligeant au port d'un insigne tend à prouver leur inapplication. Les consuls de Moumour rappellent aux crestiaas en 1471 : « Que les membres de cette famille ne puissent tenir du bétail ni faire des labours, mais qu'ils aient à vivre de leur office de charpenterie, comme il était antiquement fait et qu'ils doivent faire. (Jean Vermeil, Les bruits du silence: l'autre histoire de France, 2002 - books.google.fr).

En Béarn, Lucq et Monein furent des communautés très importantes de Chrestiaas. Enfin, il existait à Monein, comme dans tout le Béarn, une catégorie spéciale d'habitants, les « chrestiaas » ou « cagots », formant une caste à part dont l'origine est encore discutée : descendants de lépreux ou débris de populations vaincues.

Certains Maîtres-Charpentiers du Moyen-âge étaient cagots, c'est peut-être eux qui construisirent la charpente de l'église de Monein dans laquelle on a voit une image de nain sensée les représenter près du bénitier qui leur était réservé (www.saint-vincent-baises.com - Monein).

C'est un cagot de Lucq, le maître charpentier Biot, qui, assisté de son collègue Ramon de Lamotte, répare, en 1555, le toit de l'église et le clocher de l'abbaye de Lucq, à côté de Monein, dont Arnaud de Foix était l'abbé. (Victor Allègre, Les vieilles églises du Béarn: étude archéologique, Volumes 1 à 2, 1952 - books.google.fr).

Le roi Henri IV surnommait Monein « le Paris du Béarn ». En 1385, le dénombrement des maisons du Béarn demandé par Gaston Fébus, fait apparaître 413 « foecs vius » (feu vivant, allumé : foyer), soit environ 2300 habitants (Orthez en comptait 436, Oloron 368, Morlaàs 304, Pau 126). Au XVIème siècle Monein avait 5000 habitants, pour 700 seulement à Pau.

Aussi, en 1464, forts de leur puissance et de leur foi, les Moneinchons se lancent-ils dans la construction de l'imposante « glisie nabère » (église nouvelle), saint Girons qui remplacera l’église saint Pé (Pierre). L'église Saint-Girons date des XVe et XVIe siècles. Elle est la plus grande église gothique du Béarn. Elle abrite une charpente construite en cœur de chêne de cinquante mètres de long et de dix-huit mètres de hauteur, ayant la forme d'une double coque de navire renversé (www.monein.fr - Les grandes dates, fr.wikipedia.org - Monein, nouvellefeuille.canalblog.com/).

Peyrotton du Peyrer, qualifié de bourgeois d'Oloron et maître d'oeuvre du roi de Navarre dans un acte du 19 février 1521, règle un compte avec un maçon qui devait le servir pendant cinq années. L'acte est passé à Navarrenx. Il entreprit, le 16 août 1523, la construction du maître-autel de l'église de Monein, moyennant 550 livres tournois et les matériaux. Il mourut vers la fin de cette même année. C'est l'ancêtre du capitaine ddes mousquetaires de Jean-Arnaud du Peyrer de Troisville, rendu célèbre par le roman d'Alexandre Dumas, les Trois Mousquetaires. On l'appelait Tréville à la cour, et lui-même prononçait Tresville avec l'accent gascon. (Jean de Jaurgain, Troisvilles, d'Artagnan et les trois mousquetaires, 1910).

Un arrêt du parlement du 19 février 1707 conservé aux archives de Monein rétablit la taille pour les Cagots, c'est l'abrogation du privilège créée en 1379 par Gaston Phœbus (Francisque Michel, Histoire des Races maudites, 1847 - books.google.fr, La Vraie Langue Celtique - Psaume 124).

En 1707, Pierre de Crestiaa, cagot de Cardesse, demanda d'être déchargé des tailles et cotises qu'on prétendait lui faire payer. L'affaire vint devant le Parle- ment, et le privilège fut aboli, car la Cour ordonna le 19 février 1707 que « les maisons et terres des anciennes cagoteries seraient imposées dans le regallement des tailles et autres charges de la communauté ». (Henri Marcel Fay, Lépreux et cagots du Sud-Ouest, 1910).

Madame Saqui

Jean-Baptiste Lalanne (1757 Monein - 1805 Tours), funambule au théâtre Nicolet à Paris dans la troupe des Grands-Danseurs du Roi ; Sa fille Marguerite-Antoinette Lalanne, dite « Madame Saqui » (1786 Agde - 1866 Paris) ; mariée à Tours à Jean Julien Saqui, artiste d'agilité ; nées au XIXe siècle.

Béat de Liebana

Beatus de Liébana était un moine espagnol du monastère de San Martín de Turieno, aujourd'hui Santo Toribio de Liébana, dans la comarca de Liébana) dans les Pics d'Europe (Région de Cantabrie), mort en 798, auteur, entre autres, d'un Commentaire de l'Apocalypse qui fut un des ouvrages les plus célèbres du Haut Moyen Âge espagnol, en raison de sa dimension théologique mais aussi politique. On appelle Beatus les manuscrits espagnols des Xe siècle et XIe siècle, plus ou moins abondamment illustrés, où sont copiés l'Apocalypse de Jean et les Commentaires de ce texte rédigés au VIIIe siècle par le moine Beatus. Beatus est un homme de grande culture chrétienne. Sans doute n'est-il pas originaire des Monts Cantabriques. Certains historiens pensent qu'il vient plutôt de Tolède, ou même d'Andalousie. Peut-être a-t-il choisi ce monastère de Liébana en raison de la proximité de Covadonga et de Cosgaya8, lieux que les chrétiens de l'époque considéraient comme miraculeux. Une affaire a eu un grand retentissement dans la Chrétienté, jusqu'auprès d'Alcuin et de Charlemagne (742-814) à Aix-la-Chapelle et du pape qui se range aux côtés de Beatus. C'est la fameuse querelle de l'adoptianisme, hérésie dont le théoricien était Félix, l'évêque d'Urgell. Ce dernier proclamait que le Christ n'était pas le fils de Dieu, mais avait seulement été adopté par lui, thèse en complet désaccord avec celle du Concile de Nicée sur la consubstantialité du Père et du Fils. Sous les pressions d'Alcuin, de Charlemagne et du pape, Félix abjure à plusieurs reprises, après être revenu à l'hérésie chaque fois. Synodes et Conciles ne viendront pas à bout des convictions du relaps. Elipand, archevêque de Tolède, nommé à cette chaire par les Arabes, se rallie à cette doctrine.

L'Apocalypse, que les Ariens refusaient de tenir pour un livre révélé, et qui est centré sur la divinité du Christ, devient, à partir du VIIIe siècle, le texte phare des chrétiens résistants. L'Apocalypse est donc un ouvrage de combat, véritable arme théologique, contre tous ceux qui ne verraient pas dans le Christ une personne divine au même titre que Dieu le Père. Le clergé des Asturies reprend l'injonction du IVe concile de Tolède (633) : sous peine d'excommunication, « L'Apocalypse doit être tenue pour un livre canonique; elle sera lue à l'Office entre la Pâque et la Pentecôte ». Une telle obligation ne concernait, de la Bible entière, que ce seul texte. Le Commentaire de l'Apocalypse mentionne que saint Jacques est l'évangélisateur de l'Espagne10. Certains historiens pensent même que Beatus est l'auteur de l'hymne O dei verbum, dans laquelle saint Jacques est qualifié de saint patron de l'Espagne.

Au début du IXe siècle le tombeau de saint Jacques est « découvert » au « Campo de la Estrella » (c'est-à-dire Compostelle, qui deviendra Saint-Jacques-de-Compostelle. C'est là qu'auraient été transportées les reliques du frère de saint Jean l'Évangéliste un siècle plus tôt, depuis Merida, pour les soustraire aux profanateurs musulmans11. L’Apocalypse étant à l'époque attribuée à saint Jean, Beatus a peut-être voulu honorer également son frère Jacques le Majeur, et faire des deux fils de Zébédée les vecteurs des valeurs de l'Espagne martyrisée, résistante et glorieuse.

Beatus meurt en 798, avant l'invention de la tombe du « Matamoros ». Il avait, par ses écrits et ses combats, posé les fondements culturels de ce qui allait devenir la nation espagnole (fr.wikipedia.org - Beatus).

© M. Moleiro Editor www.moleiro.com

baptism of Christ, f. 189r - Beatus of Gerona

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Le Beatus de Saint Sever est le seul Beatus connu copié à l'époque romane au nord des Pyrénées. Il comporte le Commentaire sur l'Apocalypse de Beatus de Liébana, ainsi que le commentaire de saint Jérôme sur le livre de Daniel. Il a été produit à l'Abbaye de Saint-Sever en Gascogne pendant l'abbatiat de Grégoire de Montaner qui dura 44 ans (de 1028 à 1072), donc vers le milieu du XIe siècle.

Le programme d'enluminure se répartit ainsi : 1.Les Évangélistes et leurs symboles. 2.La généalogie du Christ (ici très détaillée). 3.Le Commentaire de l'Apocalypse. 4.Le Commentaire du livre de Daniel. La généalogie du Christ ou arbre de Jessé est présentée Page de gauche, les premiers ancêtres de l'humanité avec Adam et Eve, puis Cain et Abel ; Les médaillons bleus détaillent la descendance d'Abel jusqu'à Noé et les rouges la lignée de Caïn, détruite par le déluge ; Sur la dernière colonne de droite, est inscrite la signature du directeur probable du scriptorium (beatus.saint-sever.fr).

p. 45 : Il ne faut pas descendre fort longuement dans la généalogie des enfants d'Adam...

p. 48 : Après la destruction violente du genre humain par le déluge, Dieu bénit Noé et ses enfants...

L'église de Monein est consacrée à saint Girons. Saint Girons est un saint chrétien du Ve siècle. Il serait, selon la légende, un des six compagnons de saint Sever, venus évangéliser la Novempopulanie, avec Clair d'Aquitaine, Justin de Tarbes, Babyle, Polycarpe et Jean. C'est le Sever de l'abbaye qui a produit la version française du Beatus.