Partie XIX - Tintin   Album   Objectif Lune   
NONAGONES OBJECTIF LUNE

- Regardez donc ! Les tours de montage sont iluminées, la fusée est prête au départ. C'est féérique ! (Tintin, OL, page 56)

252 : la révolution lunaire anomalistique, périgée et apogée

La période de Méton était importante surtout pour le calendrier, parce qu'au bout de 19 ans, toutes les fêtes qui se réglaient sur les nouvelles Lunes, tombaient derechef aux mêmes jours de l'année: et c'est peut-être par cette raison, qu'une certaine classe d'hommes qui, en Egypte, avaient le monopole des sciences, appelèrent cette découverte dans le sens propre le nombre d'or (aurea praxis), Cette période est composée de 6940 jours, ou 19 années juliennes plus 6 heures, ce qui fait 235 mois synodiques plus heures, 254 mois périodiques plus 7 heures, 252 mois anomalistiques moins trois jours et 18 heures, et 255 mois draconitiques plus 21 heures. Calippe rendit cette période plus exacte, en la quadruplant, et retranchant un jour: il la fit donc de 27759 jours, ce qui fait 76 années juliennes, 940 mois synodiques plus 6 heures, 1016 mois périodiques plus 6 heures, 1008 mois anomalistiques moins 16 jours, et 1020 mois draconitiques plus 2 jours 13 heures (Friedrich Theodor Schubert, Traité d'Astronomie théorique, Tome 2 : Astronomie Rationnelle, 1834 - books.google.fr).

Ce cycle qui correspond au temps que met la Lune pour aller d’un périgée au périgée suivant, dure en moyenne 27 jours, 13 heures et 18 minutes. C’est le cycle périgée/apogée.

La Lune se déplace sur une orbite elliptique dont la Terre est l’un des foyers. La distance de la Terre à la Lune varie donc régulièrement suivant sa position :

– Lorsque la Lune est au plus près de la Terre, on dit qu’elle est au périgée, sa distance avec la Terre est en moyenne de 356 500 km.

– Lorsque la Lune est au plus loin de la Terre, on dit qu’elle est à l’apogée, sa distance avec la Terre est en moyenne de 406 700 km.

La Lune met en moyenne 27 jours 13 heures et 18 minutes pour aller d’un périgée au périgée suivant. Ce cycle est appelé : révolution lunaire anomalistique.(www.calendrier-lunaire.fr).

The Apollo 11 moon mission left on 21 July 1969, six days before the July perigee, meaning the moon was 50,000kms closer to earth than it normally is. Because July was the month of closest perigee that year, another 10,000kms worth of rocket fuel was not required (www.predictweather.co.nz).

Patagons

Page 1 Haddock (au téléphone) : Cet olibrius parlait comme un Patagon.

En région pampéenne et patagonique, on distingue les Hets («anciens pampas» ou «querandís»), les Tehuelches (ou Tsonek) et les Mapuches. Les études anthropologiques des groupes de chasseurs et de cueilleurs considérés traditionnellement comme plus simples que les peuples agriculteurs, ont mis en évidence la complexité atteinte par ces cultures d'un haut degré de symbolisme, comme les Selknams, les Mánekenks ou Haush, considérés comme l'ethnie la plus ancienne de la Terre de Feu, les Yagans, les Alakalufs ou Kaweskars, de la Terre de Feu et du détroit de Magellan.

Des missions salésiennes sont développées jusqu'en Terre de Feu et sur l'île Dawson notamment avec le père Alberto Maria De Agostini. Une mission de pasteurs anglicans dirigée par Thomas Bridges s’installa dans les environs du canal Beagle en 1870, formant un premier établissement tout proche de l’emplacement de la future ville, Ushuaïa. De cette époque date la plus ancienne construction en Terre de Feu, la Casa Stirling édifiée par le missionnaire anglican Waite Stirling, futur premier évêque des Îles Falkland situées au large de l'Argentine. Martin Gusinde, jésuite vécut de 1918 à 1924 en Terre de Feu et étudia les Amérindiens qui y vivaient encore (fr.wikipedia.org - Patagonie).

En général, les Patagons sont d'une taille avantageuse et très-robustes. Leur couleur est olivâtre; leurs cheveux noirs, et coupés au sommet de la tête, en forme de couronne. Ils sont nus, à l'exception des épaules qu'ils couvrent de peaux de chiens de mer et de loups marins. Leurs armes sont la fronde et la flèche. Leur unique habitation est un demi-cercle de feuillage entrelacé, qui les met à peine à l'abri du vent. Les Patagons sont partagés en deux peuples, qui sont ensuite subdivisés en différentes tribus. Les Moluches, ou guerriers, habitent les Andes et la province de Cuyo. Les Puelches s'étendent depuis les bords de la mer Atlantique jusqu'assez avant dans les terres, le long de la rivière de los Camerones (L'art de vérifier les dates depuis l'année 1770 jusqu'à nos jours, Tome 11, 1828 - books.google.fr).

Zouaves

Selon Hérodote, «Les Zavèces touchent aux Maxyes; quand ils vont en guerre, les femmes conduisent les chars.» Les Zavèces sont bien évidemment les ancêtres des Zouaouas de l'Algérie actuelle, population essentiellement belliqueuse, dans laquelle ont été recrutés les premiers éléments de nos zouaves et qui a conservé son nom au travers des siècles. «Les Gyzantes habitent immédiatement après les Zaveces; les abeilles font dans leur pays une prodigieuse quantité de miel. Les Gyzantes se peignent tous avec du vermillon et mangent des singes. Ces animaux sont très communs dans leurs montagnes.» Les Gyzantes ou Byzantes étaient une des tribus de cette région chez lesquelles le sang aryen s'était conservé le plus pur, car Scylax les décrit comme étantencore de son temps blonds et remarquablement beaux. Ils formaient, du reste, une nation nombreuse, mais dont une petite partie seulement était restée indépendante et avait gardé ses anciennes moeurs. Le plus grand nombre s'était mêlé aux Libyphéniciens et aux colons carthaginois, dont ils avaient pris les usages et la langue, dans la province à laquelle ils avaient donné le nom de Byzacène (François Lenormant, Phéniciens, Arabes, Indiens, Tome 3, 1869 - books.google.fr).

Voici un avis sur les Indiens par un zouave de l'armée de Napoléon III qui est intervenue au Mexique dans les années 1860 :

Les indiens sont doux, paisibles et laborieux, ignorants et stupides, pratiquant avec toutes sortes de démonstrations fanatiques la religion catholique dont ils ne comprennent pas le premier mot. Avec la docilité naturelle propre au caractère de l'indien, si les gouvernements lui avaient donné les moyens de s'instruire et de développer quelque peu ses facultés intellectuelles, on aurait pu obtenir de lui tout ce qu'on aurait désiré. C'est l'indien qui nourrit les habitants des villes du produit de ses champs ou de son industrie ; l'indien seul est assez énergique pour se livrer à des travaux fatigants qui répugnent aux mexicains nés dans les villes (Les bivouacs de Vera-Cruz à Mexico par un Zouave, 1865 - books.google.fr).

L'empereur du Mexique Maximilien avait épousé une belge, Charlotte, fille du roi Léopold Ier de Belgique (nonagones.info - Arcadie Claret).

Totem

Dans l'aventure lunaire, Archibald tient le rôle de guérisseur, à son corps défendant. Il essaie de guérir Tryphon en le menaçant : «Tournesol, tu vas mourir !...» (OL, 48, 3) Mais c'est finalement en proférant l'insulte la plus blessante pour le professeur, en le traitant de zouave, que le marin, à la surprise du corps médical, parvient à le sortir de sa mélancolie : «On vient de tout m'expliquer : mon amnésie et le dévouement admirable avec lequel vous m'avez soigné... Merci, capitaine, merci, du fond du cœur...» (OL, 50, 5) L'épisode décrivant le mieux l'identification d'Hergé avec sa création se trouve dans l'album Objectif Lune. Il s'agit de la scène où, après avoir traîné Haddock à travers les bureaux de l'usine, un Tournesol enragé découvre au capitaine l'immensité de la fusée : «Voilà ce qu'il a réalisé, le zouave.» (OL, p. 40-42) Dans ces pages, Hergé oppose la petitesse du concepteur à l'immensité de la création. Il semble nous dire : ne jugez pas l'homme, ses faiblesses, ses fautes, son apparence grotesque ; attardez-vous seulement à la grandeur de la création. Seul compte le résultat. En même temps qu'il construit quelque chose d'immense, Tournesol restaure un ordre ancien, ébranlé de toutes parts, l'ordre patriarcal. Cette fusée est une machine qui doit porter Tintin et ses amis au-delà de leur condition terrestre ; elle incarne un des rêves les plus obstinés de l'humanité. De même, considérées comme un tout, les aventures de Tintin se présentent comme une immense machine à rêver qui entraîne des générations d'enfants et d'adultes dans l'aventure, qui les mène dans un au-delà de leur quotidien. Hergé prend conscience de la valeur de sa création. Ce n'est plus Tintin qui sert d'armure individuelle ; c'est la fusée qui tient lieu d'enveloppe collective et entraîne ses passagers dans le rêve même si les risques d'asphyxie les guettent. La fusée se présente ainsi comme un puissant totem de l'Occident. En elle se fondent de multiples significations. Elle est à la fois le sommet de la technologie et la figure du Père dans l'ordre symbolique. Elle n'est pas seulement un engin rationnel, fondé sur des calculs précis (calculs qui sont parfois une source d'angoisse pour Tryphon), elle est aussi une figure de l'imaginaire, celui de Georges Remi et celui d'une civilisation tout entière (Jean-Marie Apostolidès, Dans la peau de Tintin, 2010 - books.google.fr) .

Le terme général de «totémisme», utilisé par les anthropologues à des fins classificatoires des organisations humaines, se décline doublement. Il s'agit premièrement de qualifier un système de croyances complexes qui relie, par le biais d'une relation mystique, un individu ou un groupe à un esprit tutélaire. Cette relation se fonde sur un lien de parenté avec le totem qui dépasse la logique d'une simple généalogie par le sang. Deuxièmement, le totémisme désigne un ensemble d'attitudes et de gestes rituels qui entretiennent, dans la réalité du monde humain, une relation de mystère avec le monde des esprits et avec le monde non-humain. Les croyances et les pratiques totémiques influencent directement l'organisation sociale du groupe et la formation des personnalités individuelles. De ce fait, la singularité du totémisme observé chez tel ou tel peuple participe à la définition de son identité selon deux perspectives : d'une part, à travers le regard euro-centré de l’ethnographe qui va se servir de la typologie des rites pour classer la tribu sur une échelle de valeurs ; d'autre part à travers le regard que les indigènes posent sur leur propre lien à l'environnement et à leurs ancêtres via l'affirmation d'une relation privilégiée avec telle puissance plutôt qu'une autre. Cette spécificité les différencie des autres clans totémiques du même territoire.

Le totémisme ne peut s'épanouir qu'au sein d'une «cosmovision» qui reconnaît l'interconnectivité des êtres vivants quels qu'ils soient avec leur environnement, le monde végétal et le monde minéral. Cette vision affirme l'existence de forces spirituelles qui traversent les âges et animent le territoire. Comme la critique et romancière d'origine pueblo laguna16 Paula Gunn Allen le rappelle, les Amérindiens considèrent le cosmos selon un principe d'unicité où l'humain et le non-humain interagissent par le biais de pactes. Les Amérindiens visualisent leur environnement comme une organisation d'énergies selon un cercle vertueux animé par les échanges et la réciprocité

Si on se réfère à l'article «Totemism» de l'Encyclopaedia Britannica, le fondement du totémisme repose sur l'affirmation de la parenté et, de ce fait, dicte les unions.

Ainsi, lorsque l'Indien désigne l'ours comme étant son totem, il affirme un lien généalogique qui dépasse la logique familiale. Il reconnaît avoir un frère-ours ou une sœur-ours, esprit animal qui préside à sa destinée. De plus, par cette affirmation, il énonce que ce lien de parenté mystique le relie aux autres Indiens qui se réclament du clan de l'ours. Cependant la seule affirmation de la relation totémique exprimée de la sorte est insuffisante pour la rendre effective. Celle-ci est patiemment instaurée et ravivée par des actes de vénération, des attitudes respectueuses et des épreuves. En effet, la protection du totem n'est jamais totalement acquise et, en cela, elle se distingue de la conception chrétienne de l'ange gardien18. Les esprits tutélaires représentent des puissances magiques ambivalentes, difficilement contrôlables. Leurs colères sont susceptibles de plonger la communauté dans de grands tourments, tout comme leur bienveillance peut la sauver d'une mort certaine. Ainsi, les attributs du totem, son comportement et ses caractéristiques magiques, sont-ils en perpétuelle redéfinition, réévalués au fur et à mesure des événements traversés et des actions qui lui sont imputées. De même, l'individu qui se réclame de ce totem alimente la relation au gré de ses espoirs et de ses difficultés, et singularise par sa personnalité le lien établi.

Deux formes de totémisme ont été distinguées par les écoles anthropologiques, même si, à y regarder de plus près, elles sont rarement séparées totalement l'une de l'autre. On parle ainsi d'un «totémisme collectif», «social» ou «clanique» pour désigner une organisation clanique fondée sur l'appartenance commune à un seul totem. Ce totémisme est pratiqué par des groupes humains dont l'économie repose sur l'agriculture ou sur une activité mixte de chasse ou de pêche couplée à la récolte de fruits cultivés ou non. Le totémisme clanique est présent en Océanie (où son observation a servi de base à de nombreuses théories sociologiques), en Inde, en Afrique et en Amérique du Nord et du Sud. Cette forme de totémisme repose généralement sur des récits mythiques qui font état d'un lien étroit entre l'ancêtre premier du groupe et l'animal ou l'objet naturel. Dans certains cas, l'esprit animal s'est transformé en humain et a fondé le clan. Dans d'autres, l'ancêtre premier a vécu une aventure significative avec l'esprit animal, acte initial qui imprime l'appartenance de la descendance au totem. Claude Lévi-Strauss relève ce trait fondateur de la relation totémique qui dépasse un lien de ressemblance :

Dans un grand nombre de tribus d'Amérique du Nord […] aucune ressemblance [entre les ancêtres et leurs totems] n'est implicitement ou explicitement postulée ; la connexion entre les ancêtres et les animaux est externe et historique : ils se sont connus, rencontrés, heurtés ou associés. (Lévi-Strauss 2002, 114).

Cette appartenance impose à l'ensemble des membres du clan de suivre les attitudes prescrites vis-à-vis du totem. Malgré des pratiques très diverses du totémisme social à travers le monde, il est possible de relever les caractéristiques récurrentes suivantes : premièrement, de l'association mystique avec certaines catégories d'objets naturels découle une organisation sociale établie qui régule les unions en fonctions des appartenances claniques ; deuxièmement, on remarque généralement un mode de transmission héréditaire du totem. Selon les peuples, celui-ci suit une logique patrilinéaire ou matrilinéaire ; troisièmement, le totem désigné donne son nom, de façon plus ou moins directe, au clan ; quatrièmement, la relation totémique du groupe s'appuie sur un certain nombre de symboles et de règles que chacun est tenu de respecter ; cinquièmement, la puissance magique du totem est accréditée par les mythes et les légendes qui le mettent en scène etque le clan partage régulièrement pour en assurer la transmission.

Le totémisme individuel démarre par une rencontre significative entre l'individu et son esprit titulaire. Cette rencontre peut prendre trois formes : il peut s'agir d'un rêve envoyé à la mère avant la naissance de l'enfant lui signifiant quelle force présidera à la destinée de celui-ci ; la rencontre peut avoir lieu le jour de la naissance à travers un événement significatif (la venue d'un animal près des lieux de l'accouchement ou l'occurrence d'un événement climatique particulier) ; dans le cadre du totémisme d'épreuve, l'esprit tutélaire se révèle par le biais d'une vision acquise lors d'un rite d'initiation destiné à faire entrer l'enfant dans l'âge adulte (Caroline Durand-Rous, Le totem réinventé, Exploration de l'identité et redéfinition de soi dans la fiction amérindienne contemporaine, 2017 - tel.archives-ouvertes.fr).

Mélancolie

"Haddock à la surprise du corps médical, parvient à sortir Tournesol de sa mélancolie". La relation entre la lune et la rate, ainsi que saint Michel, le loup/lycanthropie (Wolff), la couleur verte (manteau traditionnel de Tournesol) est proposée dans (nonagones.info - La Croix d’Huriel, ses anges et les humeurs - Michel en vert et la mélancolie).

 

Les ours

Le totémisme animal est particulièrement représentatif des pratiques animistes traditionnelles des nations indiennes d'Amérique du Nord. En témoigne par exemple le totémisme clanique ojibwe organisé en cinq groupes distincts qui découlent du mythe fondateur. Ce mythe raconte comment six êtres surnaturels anthropomorphes sont sortis de l'océan primordial afin de venir vivre parmi les hommes. Il y a cependant une condition à cette vie communautaire : la puissance magique de l'un de ces êtres est telle qu'il lui faut demeurer les yeux bandés afin de ne pas risquer de causer la mort des humains lorsqu'il pose son regard sur eux. L'être désobéit à cette règle entraînant la mort d'un homme. Les autres créatures l'obligent alors à retourner dans l'océan pour disparaître à jamais et deviennent les cinq totems animaux d'après lesquels les clans sont nommés : le poisson, la grue, le plongeon (oiseau), l'ours et l'orignal (Warren History of Ojibways, 43 - William Whipple Warren (1825-1853) est le premier historien de la nation ojibwee). D'autres nations indiennes leur substituent des animaux endémiques de leur environnement dans des versions mythologiques qui diffèrent légèrement. Puisant dans cette tradition totémique animale, les romans amérindiens totémiques, qu'ils se déroulent dans le cadre des réserves indiennes, des réserves urbaines ou des champs de bataille, utilisent un bestiaire foisonnant.

Parmi toutes ces bêtes se détache la figure de l'ours. Il occupe en effet une place prépondérante dans les cultes animistes des populations qui vivaient ou vivent au contact de cet animal. Il est particulièrement présent dans les rites initiatiques et dans les mythes premiers où il joue un rôle primordial (don du feu, institution de la mort...) qui instaure une cosmogonie au sein de laquelle l'homme prend conscience de son lien d'interdépendance avec les autres êtres vivants. L'ours mythique est incontournable dans les croyances et les rituels parce qu'il est une créature intermédiaire entre les mondes : entre le monde des morts et des vivants du fait de sa capacité à hiberner et à renaître, mais aussi entre le règne animal et l'humanité du fait de ses caractéristiques physiques qui évoquent un possible passage de la bête à l'humain et de l'humain à la bête. De par de cette richesse symbolique, l'ours est un animal totémique de choix dans beaucoup de cultures où

il représente l'ancêtre et guide les chefs de clan et les rois vers l'apprentissage du pouvoir.

Dans sa thèse intitulée «The Bear in Selected American, Canadian and Native Literature» Paul Lumsden analyse la portée de cette figure de l'ours guérisseur en mettant en lumière que son pouvoir de guérison procède à la fois de l'énergie vitale de la nature, mais aussi du potentiel de violence animale que Locke Setman associe directement à sa propre colère. Paul Lumsden rapproche cette figure littéraire de l'ours mythique, protagoniste des légendes indiennes et explique que, dans les deux cas, il est celui qui parvient à reconnecter l'individu à sa part animale et, dans le même temps, celui qui permet à ce dernier de réconcilier les contradictions qui l'habitent. Il souligne que la figure de l'ours a laissé une trace importante dans le reste de la littérature nord-américaine en y incarnant le lien symbolique et distendu qui lie les humains au monde naturel en s'appuyant, entre autres, sur l'étude de «The Bear», roman court de William Faulkner et «The Big Bear of Arkansas», nouvelle de Thomas Bangs Thorpe. Cependant, s'il relève un grand nombre de similarités symboliques, Paul Lumsden note également que la perspective culturelle oriente le contexte de ces rencontres littéraires avec le fauve tout comme elle en influence l'issue. Quand la vision occidentale tend à faire se mesurer le chasseur à la proie, la vision amérindienne insiste sur la perméabilité qui existe entre les deux entités (Caroline Durand-Rous, Le totem réinventé, Exploration de l'identité et redéfinition de soi dans la fiction amérindienne contemporaine, 2017 - tel.archives-ouvertes.fr).

L'ours vit en solitaire presque toute l'année, néanmoins durant la période de rut, il reste en couple pendant plusieurs semaines. Généralement le rut dure deux mois (dans les Pyrénées, fin avril à mi-juin). Cette période se traduit par d'importants déplacements des mâles à la recherche de femelles.

Comme d'autres mammifères, l'ours brun possède une gestation à nidation différée: deux à trois jours après la fécondation, il y a blocage du phénomène de segmentation de l'œuf. Il ne reprend que plusieurs mois plus tard, vers novembre, après l'entrée en hibernation. La période de gestation est de six à huit semaines et aboutit à la mise-bas, dans la tanière, de janvier à février. En général l'ourse donne naissance entre 1 et 3 oursons pesant chacun environ 300g. Ils passent les trois premiers mois de leur vie avec leur mère dans la tanière pour en sortir au mois d'avril. Ils restent toute l'année avec leur mère, puis s'émancipent au printemps suivant, après avoir passé encore un hiver en sa compagnie. Par conséquent, les ourses ne peuvent avoir une portée que tous les 2 à 3 ans (www.paysdelours.com).

La famille ours d'Objectif Lune n'est donc pas réaliste. Le mâle n'accompagne pas la femelle et ses petits qui ne sont pas plus de 3 ou 5 en une portée.

L'expédition de Tintin en montagne se situe après avril, époque où les oursons sortent. Ils ont moins d'un an puisqu'ils sont encore avec leur mère en troupe.

Cette famille ours exprime au moins la parenté que l'on retrouve dans le totémisme.

Autre est le désir instinctif et naturel, autre est le désir social, imitatif et raisonné, de devenir père. Le premier peut être constant; mais le second, qui se greffe sur le premier à chaque grand changement de meurs, de lois ou de religion, est sujet à des fluctuations et à des renouvellements séculaires. L'erreur des économistes est de confondre celui-ci avec celui-là, ou plutôt de ne considérer que celui-là, tandis que celui-ci importe seul au sociologiste. Or il y a autant de besoins distincts et nouveaux de paternité, dans le second sens, qu'il y a de motifs distincts et successifs pour lesquels l'homme en société veut avoir des enfants. Et toujours, à l'origine de chacun de ses motifs, comme explication de leur naissance, nous trouvons des découvertes pratiques ou des conceptions théoriques. L'Espagnol ou l'Anglo-Saxon de l'Amérique est fécond, parce qu'il a l'Amérique à peupler; sans la découverte de Christophe Colomb, combien de millions d'hommes ne seraient pas ! L’Anglais insulaire est fécond, parce qu'il a le tiers du globe à coloniser : conséquence directe, entre autres causes, de cette suite d'heureuses explorations et de traits de génie maritime ou guerrier, ou d'initiatives privées surtout, qui lui ont valu ses colonies. En Irlande, l'introduction de la pomme de terre a élevé la population de 3 millions en 1766, à 8 millions 300 000 en 1845. L'Aryen antique veut une postérité pour que la flamme de son foyer ne s'éteigne pas et soit arrosée tous les jours de sa liqueur sacrée, car sa religion lui persuade que cette extinction serait un malheur pour son ombre. Le chrétien zélé rêve d'être chef d'une famille nombreuse, pour obéir docilement au multiplicamini biblique. Avoir des enfants pour le Romain des premiers temps, c'est donner des guerriers à la république, laquelle ne serait pas sans ce faisceau d'inventions, d'institutions militaires ou politiques, d'origine étrusque, sabine, latine ou autre, dont Rome fut l'exploitation. Pour l'ouvrier des mines, des chemins de fer, des manufactures de coton, c'est donner de nouveaux bras à ces industries nées d'inventions modernes. Christophe Colomb, Wait, Fulton, Stephenson, Ampère, Parmentier peuvent passer, célibataires ou non, pour les plus grands multiplicateurs de l'espèce humaine qu'il y ait jamais eus. - Arrêtons-nous, en voilà assez pour me faire comprendre. Il est possible qu'on regarde ses enfants présents toujours du même vil depuis qu'il y a des pères; mais à coup sûr on envisage tout autrement ses enfants futurs, suivant qu'on voit en eux, comme le paterfamilias ancien, des esclaves domestiques sans droits éventuels contre soi, ou, comme l’Européen actuel, des maîtres et des créanciers peut-être exigeants dont on pourra être l'esclave un jour. Effet de la différence des mœurs et des lois, que les idées et les besoins ont faites. On le voit, ici comme partout, ce sont des initiatives individuelles, contagieusement imitées, qui ont tout fait, j'entends socialement. Depuis des milliers de siècles sans doute, l'espèce humaine, réduite à un nombre d'individus dérisoire, aurait cessé de progresser à l'instar des bisons ou des ours, si de temps à autre, au cours de l'histoire, quelque homme de génie n'était venu donner un fort coup de fouet à sa force de reproduction, tantôt en ouvrant de nouveaux débouchés, coloniaux ou industriels, à l'activité de l'homme; tantôt, novateur religieux, tel que Luther, en ranimant ou plutôt en rajeunissant sous une forme toute nouvelle la ferveur populaire et la foi générale dans la Providence, nourrice des oiseaux des champs. A chaque coup de fouet de ce genre, on peut dire qu'un nouveau besoin de paternité, dans le sens social, prenait naissance, et, ajouté ou substitué aux précédents, plus souvent ajouté que substitué, allait entrer à son tour dans sa voie propre de développement (G. Tarde, L'archéologie et la statistique, 2, Revue philosophique de la France et de l'étranger, Volume 16, 1883 - books.google.fr).

Dans un ouvrage fort intéressant intitulé: Chez les Peaux-Rouges, M. Joaquin Miller raconte comment un clan indigène de la Californie, les Indiens du mont Shasta, comprend l'origine du monde. Ces Indiens, qui ne manquent ni d'intelligence ni de bravoure, disent que le Grand-Esprit créa d'abord le mont Shasta, puis les animaux, enfin l'ours gris, qu'il établit maître sur tous. Ce maître était si puissant, que le créateur lui-même ne tarda pas à le craindre. Mais l'ours lui fournit l'occasion de le réduire å une position plus modeste. Un violent orage éclata et le Grand-Esprit envoya du sommet de la montagne la plus jeune de ses filles pour ordonner à la tempête de se calmer. L'enfant, n'ayant pas tenu assez de compte des instructions paternelles, glissa sur la pente lisse et durcie jusqu'à la limite des neiges, où elle fut trouvée glacée par une famille d'ours gris. Plus tard, on la maria avec le fils aîné du père ours. Alors, il est vrai, les ours marchaient droit, parlaient et se servaient de massues. Cependant une telle alliance, qui avait donné naissance au Peau-Rouge, ne pouvait avoir l'approbation du Grand-Esprit. Quand on voulut l'obtenir avec le pardon, il fut saisi d'un accés de colère, il descendit furieux du sommet du mont où il réside, il emporta sa fille sur ses épaules, et il condamna les ours audacieux à marcher à quatre pattes, excepté quand ils seraient obligés de se défendre. Les Shastas, qui n'ont aucun doute sur leur généalogie, ne chassent pas l'ours gris. Quand un de ces animaux est tué, on le brûle comme un Indien, et durant plusieurs années les passants jettent une pierre sur la sépulture jusqu'à ce qu'un gros tas se soit élevé (Dora d'Istria, Le culte populaire des animaux, Revue internationale, 1884 - books.google.fr).

Haddock parle deux fois de la Grande Ourse page 53 et page 56. Il l'associe toujours à Jupiter, qui est le père d'Arcas par Callisto, nymphe d'Artémis, et fille de Lycaon roi d'Arcadie (cf. Moulinsart). Callisto est métamorphosée en ourse, par la jalousie d'Héra (Junon), sera catastérisée en Grande Ourse pour éviter qu'elle ne soit tué par son fils chassant dans les montagnes. Arcas sera aussi porté au ciel en Petite Ourse.

Wolff - Loup

Les Indiens parlent couramment le langage figuré, symbolique, métaphorique, dont nous n'usons plus guère, si ce n'est dans la poésie ou la littérature fleurie. Chacun de leurs noms d'hommes ou de femmes renferme une comparaison prise dans la nature. En voici quelques échantillons :

Noms d'hommes : Quatre Ours, Loup trompeur, Buffle blanc, Ours rouge, Tête d'élan, Fiente de cheval, Fumier qui court, Mains sanglantes (Charles Letourneau, L'évolution littéraire dans les diverses races humaines, 1894 - books.google.fr).

Toux, lune, indien

"Des pastilles pour la toux ?" demande Tournesol à Tintin page 18.

Un Indien du Nouveau-Mexique, pour la troisième fois revient au village pour y acquérir une demi-douzaine de bouteilles de sirop pectoral. - Quelqu'un de malade chez vous ? questionne le pharmacien. - Non, non... répondit l'Indien. — Alors, que diable fabriquez-vous avec tout ce sirop contre la toux ? Et l'Indien, avec un bon sourire : — Si vous saviez comme c'est bon avec les crêpes ! (Le Digeste français, Numéros 130 à 135, 1950 - books.google.fr).

Il existait même, dans certaines régions de France, un déguisement en crêpe. Les jeunes gens se collaient sur la figure une crêpe percée de deux trous à la place des yeux. Leur visage de crêpe était alors l'image de celui de la pleine lune qu'ils reproduisaient ainsi. Cela protégeait, dit-on, de certaines maladies de peau. Mais tel n'était pas le seul but de cette coutume ; car cette crêpe était mangée. Dans beaucoup de mythes d'éclipse, la lune est ainsi avalée par un animal. Manger la crêpe était un acte de magie imitative réalisant l'absence de lune. Or, le 2 février des années antérieures, quarante jours après la pleine lune de Noël était une nouvelle lune. Et c'était Carnaval. Ainsi, de Noël aux Rois, préfigurait-on Carnaval, sous forme d'un «délire» qui n'était pas sans raison, ni raisons. Dans les liturgies orientales anciennes, la véritable naissance de Jésus était située lors de son apparition au monde, l'Épiphanie. Ce décalage de douze jours, nous le retrouvons quarante jours après les Rois, à la Saint-Valentin, qui constitue un doublet de la Chandeleur. D'après les dictons, c'est à l'une ou l'autre de ces dates que les oiseaux s'accouplent, et l'on comprend alors le patronage des amoureux à la Saint-Valentin. Le personnage appelé Valentin que l'on célèbre ce jour-là est par excellence, comme son nom l'indique (racine valere, valens), «celui qui est très fort». Cette caractéristique en fait l'équivalent d'une divinité (ou de l'enfant) de Carnaval. A Metz, par exemple, la confrérie de jeunesse responsable du Carnaval était celle des Valentins. Peut-on saisir le mécanisme qui associe durant ces périodes les jeunes gens célibataires, les amoureux et le Cocu ? Certains rites faisaient en effet intervenir alors des confréries de cornards, ou conards, d'hommes trompés. Cela s'explique naturellement si l'on rappelle que Carnaval, par définition, tombe toujours en nouvelle lune, c'est-à-dire au moment où la lune est cornue (Claude Gaignebet, Marie-Claude Florentin, Le carnaval: essais de mythologie populaire, 1974 - books.google.fr).

Prendre la lune pour une crêpe

Croire que la lune est une crèpe. Se dit familièrement d'une personne qui est portée, par sa simplicité, par sa naïveté ou par son ignorance, à croire aveuglément à tout ce qu'on lui dit (Louis Pépin, Gasconismes et choses de Gascogne, 1895 - books.google.fr, Armand-Georges Billaudeau, Recueil de locutions françaises: proverbiales, familieres, figurees, traduites par leurs equivalents anglais, contenant environ 50,000 phrases, 1903 - books.google.fr).

Le royaume a été créé par la magie d'Erichto, qui y emploie tous ses diables. Rien que des clowns, mâles ou femelles. La rue s'anime. A mesure que les réverbères s'allument d'un côté, des clowns les éteignent de l'autre. De même pour les magasins, dont les propriétaires sortent furieux sur leurs portes. La lune se lève, un clown monte sur un toit, la décroche et la met dans sa poche. Puis il va la jeter au fond d'un puits. Des femmes viennent tirer de l'eau et trouvent la lune dans le seau et s'enfuient épouvantées. Un qui la prend pour une crêpe la ramasse et l'avale. D'autres décrochent les étoiles et les mettent à leurs cravates, à leurs manchettes. On en voit qui attrapent des reflets sur des vitres comme on attrape des mouches. Douze-Bis et ses ministres restent atonifiés (La clé des songes) (Emile Bergerat, Ours et fours: théâtre en chambre. Préfaces et études dramatiques, Tome 2, 1886 - books.google.fr).

Émile Bergerat, né à Paris le 29 avril 1845 et mort à Neuilly-sur-Seine le 13 octobre 1923, est un poète, auteur dramatique, considéré à son époque comme un «excellent chroniqueur» à l'esprit «verveux et paradoxal». Il utilisa aussi les pseudonymes de «l'Homme masqué» d'«Ariel» et de «Caliban» (fr.wikipedia.org - Emile Bergerat).

Nouveau Mexique

Los Alamos ? La ville atomique. Elle est entourée de précipices. La main-d'œuvre est surtout composée d'indiens que l'on vient chercher dans les pueblos environnants. Les habitants de Los Alamos vivent dans une atmosphère de suspicion et de peur — peur aussi d'une explosion. On construit de formidables refuges dans les falaises à pic. On joue de la sirène d'alerte un peu partout dans les villes d'Amérique comme si l'état d'alerte et le rappel de la mort étaient indispensables au déploiement d'énergie nécessaire pour assurer le triomphe de la vie. Malgré la nuit et l'altitude, l'air reste sec en été. Il n'a pas plu depuis des mois. Il paraît que s'il y avait de l'eau, cette terre apparemment stérile serait d'une richesse fabuleuse. Il est question de faire venir l'eau du Pacifique, de transformer l'eau de mer en eau d'irrigation. Mais le Pacifique est loin, il y a, avant, les vastes déserts de l'Arizona. Il est aussi question de drainer les nuages et de faire pleuvoir scientifiquement. On se dispute déjà l'eau du ciel entre Utah, Arizona, Nouveau-Mexique et Texas. On peut goûter une certaine douceur de vivre à Santa Fé. Posées comme de vieilles poupées sous les arcades du Palais du gouverneur, des Indiennes vendent leur pacotille : colliers de grains de maïs teints, petites poteries aux couleurs éclatantes, bijoux Zuni ou Navajo ; elles sont silencieuses et ne vantent pas leur jolie marchandise. Peut-être ne sont-elles que des figurantes. Impossible de traverser la place, à plus forte raison de s'asseoir sur un banc sans être assailli par une nuée de petits cireurs munis de leur boîte et de leurs brosses. Indiens, Espagnols ou métis. En deux mois, j'ai du consentir plusieurs fois à faire cirer mes chaussures. C'est une volupté d'espèce un peu louche. De la Plazza on rejoint le Rio, bordé d'arbres verts et de tables en ciment pour pique-niqueurs. Santa-Fé est un centre de l'art indien, espagnol aussi. L'existence de cet art autochtone n'est pas pour rien dans l'afflux d'écrivains et d'artistes qui s'y sont installés. Mais les manifestations libres de cet art local sont encadrées, étudiées, classées dans toute une série de musées et d'écoles. Les édifices les plus harmonieux sont construits en blocs d'adobe selon une antique méthode indienne. De là vient que les Indiens aient pu être ici sédentaires, un pueblo étant un village. La nécessité pour les missionnaires de fabriquer avec les moyens du bord, non seulement les édifices mais les autels, les saints, les crucifix peints ou sculptés ont donné un art singulièrement hybride. En fait, on voudrait bien aujourd'hui rendre à César ce qui est à César. Les mélanges de race même semblent plus difficiles qu'au temps où les hommes volaient les femmes apaches des environs. Je n'ai rien tant admiré que les peintures de sables ; elles sont Navajo, faites de terres colorées. Le symbolisme de ces peintures, couleurs et formes a été étudié. Elles sont reliées au mythe de la création Navajo, mythe fort compliqué d'apparence mais au demeurant joli conte. Begochiddy (le Grand Dieu) dit : «Il nous faut nous hâter

et créer l'esprit de Nahastau (la terre) qui est l'esprit qui fait que les choses poussent, et aussi l'esprit du Ciel, de la pluie et des nuages. La face de la terre fut marquée de blanc au sommet, de noir sur les yeux, de bleu en travers du nez, de jaune à travers la bouche et orné de cornes bleues tachetées de noir. Elle avait des plumes d'aigle sur la la tête avec beaucoup de petits oiseaux dedans et tenait un panier plein de pollen et elle était enveloppée d'une couverture faite de toutes sortes de végétaux...» (Navajo Creation Myth - Museum of Navajo Ceremonial Art. Santa Fé, 1953). Don m'emmène chez Witter Bynner. C'est chez lui que D. H. Lawrence et Frieda passèrent leur première nuit dans la région. Les Indiens avaient surnommé Witte Bynner «l'antilope de la montagne», D. H. Lawrence : «le loup rouge», quant à Frieda, elle aurait eu droit au surnom de «Furieux Hiver». Witter Bynner est un poète. Il a vécu assez longtemps en Chine et possède une admirable collection de jades. Il a traduit Lao Tseu (André Bay, Taos et son prophète, La Table ronde, Numéros 73 à 84, 1954 - books.google.fr).

Les peuples pueblos (désignés ainsi par les premiers espagnols à cause de leur habitat en villages) sont originaires du Sud-Ouest des États-Unis (Arizona et surtout le Nouveau Mexique). Ce groupe linguistique comprend un grand nombre de tribus (dont les Lagunas) qui sont issues des premiers habitants de la région, les Anasazis et les Mogollons. Les Pueblos sont des peuples sédentaires vivant d'agriculture, que les conquistadors ont décrits comme étant particulièrement pacifiques. Ils partagent le territoire avec la nation navajo et la nation apache qui appartiennent au bassin linguistique atabascan venus des Grandes Plaines et qui ont immigré dans le Sud Ouest aux alentours de l'an 1500 (Caroline Durand-Rous, Le totem réinventé, Exploration de l'identité et redéfinition de soi dans la fiction amérindienne contemporaine, 2017 - tel.archives-ouvertes.fr).

Peu de temps avant sa mort, Lawrence déclarait qu'il souhaitait presque «pouvoir aller sur la lune» (Cité par J. Meyers, D. H. Lawrence) (Catherine Millet, Aimer Lawrence, 2017 - books.google.fr).

Ces Indiens possédaient aussi leur mythologie et voici ce qu'on raconte sur la création du soleil et de la lune. Ceux-ci furent créés par des dieux qui avaient établi domicile sur la terre dans des endroits enchanteurs mais déploraient qu'elle fut plongée dans l'obscurité. Ces dieux, après délibérations, décidèrent d'offrir deux d'entre eux en sacrifice pour obtenir que la terre fût éclairée. Ils choisirent à cette fin le noble Tecuzistecati et l'humble Nanaoatzin parmi les divinités les plus puissantes Tous deux vécurent durant quatre jours dans la pénitence et offrirent au feu en sacrifice des offrandes suivant la classe sacerdotale à laquelle ils appartenaient. Tecuzistecatl se départit donc de plumes de diverses couleurs, d'arêtes de pierre précieuses. L'offrande de Nanaoatzin comprenait de modestes produits de la terre et des épines rougies de son propre sang. A quatre reprises, Tectuzistecatl tenta de sauter dans le feu, mais sans succès. D'autre part, du premier coup Nanaoatzin tomba dans le brasier et le soleil apparut. Jaloux, le premier se reprit et réussit enfin à parvenir au centre du brasier : la lune apparut à son tour. Les deux astres brillaient d'une semblable lumière. Un des dieux lança alors un lapin à la figure de Tecuzistecati, ce qui diminua la force de ses rayons. A la suite du soleil, la lune commença son mouvement de rotation qu'elle a toujours conservé depuis, dans le même ordre (Maurice Allaire, Le Mexique, pays de contrastes, 1947 - books.google.fr).

Thann

Haddock tient le télégramme de Tournesol qui leur demande de le rejoindre en Syldavie par ses deux pouces. Comme dans les Bijoux de la Castafiore, lorsqu'il lit le journal qui annonce son mariage avec la cantatrice. Cette figuration a été interprété comme une allusion à la légende des trois sapins brûlés de Thann et de saint Thibaut (au doigt coupé) (nonagones.info - Les Bijoux de la Castafiore).

Saint Thiébaut de Thann connu en Italie comme Ubaldo, évêque de Gubbio, ville où saint François d'Assise apprivoisa un loup (Wolff) féroce, est fêté au martytrologe romain le 16 mai.

C'est une date qui apparait à la page 50 d'Objectif Lune la case avant où Baxter annonce le départ de la fusée le 3 juin.

Saint Mauron s'est retiré en une grotte connue de lui seul, sur le coteau du Montglonne. Perdu en oraison, un sommeil miraculeux le prend et le ravit pendant 100 ans. Après de vaines recherches, la vie reprend dans le monastère. Le nouvel abbé, sans doute de moindre mérite spirituel, ne peut empêcher le progrès des "vices et de l'insubordination" et le retour à la terre gaste d'avant l'évangélisation du site. Une autre tradition rappelle que chaque jour un oiseau venait chanter le rocher fermant la grotte. Sortant enfin de sa léthargie, tel fantôme, Mauron retourne à la porte du monastère où l'on met bien du temps avant de le reconnaître : "(je suis) votre père à tous mes chers enfants", répond-il aux questions qu'on lui pose. On retrouvera dans ce récit l'absence du "souverain", ici celui de l'abbaye, comme cause de l'apparition du chaos sous la forme des trois fléaux de type indoeuropéen (immoralité, anarchie, famine), ainsi que la récurrence du nombre 100. Enfin, le retour du "père de ses sujets" semble tout résoudre. Voici donc réactualisé le schéma fonctionnel de la légende de Bouzillé : Gargantua et saint Mauron s'y montrent interchangeables. Il faudrait du reste analyser dans cette perspective l'exil volontaire de saint Maurille, devenu le jardinier des rois d'Angleterre, et les périls qui sont promis à la ville d'Angers s'il ne devait pas revenir. Le mythème du saint oubliant le temps dans une grotte n'appartient pas au seul Mauron. Mais l'intérêt que nous portons aux calendes d'août nous autorise à rappeler la légende des Sept Dormants d'Ephèse et de leur chien, miraculeusement endormis pendant 372 ans dans une grotte du mont Célion, et honorés le 27 juillet. Ce culte a donné lieu à la grotte des Sept Dormants de Marmoutier, le monastère tourangeau de saint Martin sur la Loire. Il pourrait également constituer un doublet chrétien des 7 frères Macchabées de l'Ancien Testament , pourtant honorés par l'Eglise dès les premiers siècles, à la date du 1er août précisément.

Le cas de saint Morand, bénédictin à Cluny et premier supérieur de la fondation Saint Christophe à Altkirch en Alsace présente d'étranges similitudes avec son quasi homonyme du Montglonne. On lit, dans la "Petite légende dorée de l'Alsace" de Paul Stintzi que saint Morand, en route vers la chapelle Saint-Blaise de Walheim, fut surpris par un violent orage. S'abritant dans une grotte près du chemin, il appuya sa tête contre la roche, laquelle céda "comme une cire molle" former une cavité. Une deuxième tradition l'y fait dormir 7 années. Une troisième tradition, en cela conforme point par point à celle de Mauron, l'y fait rester 100 ans et relate son difficile retour au monastère ainsi que le problème d'identité qu'il rencontre. Autre détail curieux, il est fait mention, dans ces deux légendes locales , mais géographiquement éloignées, des arbres qui, à l'entrée de la grotte, dissimulent le lieu du repos sacré et gênent la sortie du saint à son réveil. Or, en 1710, Claude Robin, vicaire de Saint-Florent-le-Vieil, entreprenant de rechercher la vérité sur saint Mauron, se fie à la légende pour localiser l'entrée de la grotte : celle-ci était signalée par un vieux chêne. "Il en est des traditions populaires comme des fables, elles couvrent toujours quelques vérités" écrit avec malice ce pourfendeur de superstitions. Nous nous rangerons pourtant de son avis. En effet, les légendes de saint Morand  d'Alsace et de saint Mauron d'Anjou, si elles sont le résultat évident d'une contamination, n'en sont pas moins précieuses parce que complémentaires. Ce Morant nous rappelle par ailleurs Bouzillé : c'est un saint délieur, patron des vignerons de surcroît (Pascal Duplessis, Des traces de Lugnasad dans l'origine de Bouzillé (Maine-et-Loire) par Gargantua, Mythologie française: bulletin de la Société de mythologie française, Numéros 185 à 189, 1997 - books.google.fr).

Dans la fusée, il y a bien 7 passagers, les 4 officiels (Wolff, Tournesol, Tintin, Haddock), les 2 Dupondt et le clandestin Jorgen, il faut aussi ajouter le chien Milou. La fusée est comme une caverne volante : "tombeau" selon Baxter. La caverne des 7 dormants "vole" dans le temps (théorie de la relativité).

Dans la suite On a marché sur la Lune, les indications de temps sont succintes, beaucoup de "quelques minutes" ou "instants plus tard" et un "trois jours après" comme Jonas dans le ventre de la baleine ou Jésus dans le royaume des morts.

Saint Ours de Loches est fêté le 27 juillet comme les 7 Dormants. Les grottes de Saint-Ours (de Cahors) se trouvent situées , à Loches , presque au - dessous de l'ancienne chapelle de Vignemont.

Aux XVIe et XVIIe siècles, les noms donnés aux maisons ou aux auberges étaient presque tous des noms d'animaux (à l'Ours, au Bouc, au Cerf, au Boeuf, au Corbeau, au Petit Cheval, au Saumon) ou des noms d'astres (à la Lune, à l'Étoile, au Soleil). Ces dénominations n'étaient pas immuables et pouvaient varier au fil du temps. Certains noms cités au XVe siècle n'apparaissent plus par la suite. Les deux maisons «À l'Arc-en-ciel» (Zum Regenbogen) et «À l'Ange» (Zum Engel), situées toutes deux en face du grand portail de la collégiale, sont citées en 1488 et 1508, mais on ne connaît aucune mention postérieure. Parfois le nom de l'enseigne s'est transmis aux habitants de la maison, par exemple Jacob zum Bockh, cité en  1488, Dilgli (Odile) zem Enngel et son beau-père (stieffvatter) Marti zum Regenbogen, cités en 1508, ou encore Conrad Regenbogen, cité en 1512 (Christine Heider, Thann, entre France et Allemagne: une ville de Haute-Alsace sous la domination des Habsbourg, 1324-1648, 2007 - books.google.fr).

La grotte

Epiménide, qui aurait vécu vers 595 av. J.-C., selon Aristote repris par Plutarque, naît dans une famille de bergers crétois, habitant à l'ombre du palais du roi légendaire Minos. Alors qu'il cherche un mouton égaré, il trouve une caverne dans laquelle il tombe endormi pendant 57 ans. C'est, en fait, la grotte d'un dieu à Mystères, qui lui donne pendant son sommeil la connaissance de la nature et de l'organisme humain, et lui accorde le don de divination. L'épisode inspire à Goethe le poème Le Réveil d'Épiménide (Des Epimenides Erwachen, 1815) (fr.wikipedia.org - Epiménide).

Cependant, quel que soit le but (didactique ou esthétique), il existe une permanence universelle (la valeur d'oxymore de la caverne) qui sous-tend les profondeurs de cet imaginaire. Gaston Bachelard met en relief la dualité de la caverne ou de la grotte dans son texte sur les rêveries de la terre. Il définit initialement la grotte comme espace de repos. De même, Gilbert Durand se réfère à la caverne sous la catégorie des symboles de l'intimité et l'associe à la maison. Il souligne la féminité des symboles de la descente et de la coupe et démontre le trajet étymologique du creux à la coupe proposé par Jung : «Kusthos grec signifie la cavité, le giron, tandis que keuthos veut dire le sein de la terre, alors que l'arménien Kust et le védique Kostha se traduisent par «bas-ventre». À cette racine se joignent kutos, la voûte, le cintre, kutis, le coffret et finalement kuathos, le gobelet, le calice.» Durand met en lumière ces caractéristiques féminines tout en confirmant les interprétations de la psychanalyse. Le creux est «tout l'organe féminin (et toute cavité est sexuellement déterminée, et même le creux de l'oreille n'échappe pas à cette règle de la représentation». Pour montrer la continuité du trajet du giron à la coupe, il cite «l'ensemble caverne-maison, habitat autant que contenant, abri autant que grenier» (Durand 275).

De plus, la caverne est aussi liée à la mort et à la bête sauvage puisqu'elle renvoie à la tombe et à l'antre. Elle représente les visages du temps par ses aspects thériomorphique (antre) et nyctomorphique (obscurité). Dans l'imaginaire nocturne, la caverne devient une image euphémique qui contient des éléments antithétiques, donc un espace d'oxymore. Bachelard relève de la sorte les caractères polaires de la caverne : le repos par opposition à l'angoisse, la vie et la mort, la fermeture et l'ouverture, la divinité et la bestialité, enfin, le cosmos et le microcosmos. Cette dualité éclaire le sens des personnages et de l'espace présents dans le premier récit chinois et arcadiens de la caverne.

Le récit «Han Zi zhuan» de Liu Xiang (79-8 av. J.-C.) de la dynastie des Han (206 av. J.-C. - 220 ap. J.-C.) nous présente des chiens qui guident leur maître Han Zi pour entrer dans une caverne divine. Ainsi, Han Zi et ses chiens deviennent immortels. De même, Liu Yiching (403 - 444) raconte un voyage fantastique du héros éponyme, Huang Yuan, qui visite une caverne divine en suivant un chien turquoise, couleur qui symbolise son  statut divin. Avec ses différentes connotations (féminité, mort, bestialité), le champ sémantique de la caverne est en soi un contenant maternel des antithèses. Mais elle représente plus qu'une coupe aux attributs féminins car elle est emboîtée dans la montagne, qui est le symbole du glaive. Ainsi, selon l'optique durandienne, on peut décrire la caverne comme une représentation complète du glaive au-dessus de la coupe. Un Chinois mentionnerait ici la complémentarité du ying et du yang. Bachelard insiste également sur le fait que la caverne constitue le seuil de mystère : c'est l'espace intermédiaire entre la lumière et l'ombre. Les taoïstes la voient comme l'espace mystérieux qui permet le passage de l'ombre à la lumière. Ceci est l'essence de la pratique taoïste qui est appelé l'alchimie interne (Françoise Dupeyron-Lafay, Poétique(s) de l'espace dans les oeuvres fantastiques et de science-fiction, 2007 - books.google.fr).

Pour la caverne-maison (qui vole dans les airs) on pense à la maison de la Vierge de Lorette :

Au lieu-dit Auf dem Rain à  Roderen, à 5 km au sud de Thann, la chapelle de pèlerinage Notre Dame de Lorette abrite un ermitage. Elle a été construite en 1716 ; restaurée en 1843 ; détruite en 1935 et

reconstruite en 1935 ; abritait des ex-voto qui ont disparu et des tableaux qui sont actuellement dans l'église paroissiale (www.pop.culture.gouv.fr).

Pour la caverne-antre, à l'ours (des cavernes) : cf. la pilosité exarcerbée des Dupondt dans la fusée.

Ephèse est la ville où se trouvait un grand temple d'Artémis, correspondant à la Diane romaine.

Le 3 juin, au Palatin, l'empereur César Auguste et Marcus Agrippa firent à Apollon et à Diane un sacrifice de neuf gâteaux, neuf galettes, et neuf gaufres (John Scheid, Rites et religion à Rome, traduit par Guy Stavrides, 2019 - books.google.fr).

Dans les carrés magiques, le carré de 9 est associé à la Lune.

Diane

Diane est en Arcadie une déesse essentiellement nationale. Ce caractère si frappant en elle s'explique peut-être par ses rapports avec la nymphe Callisto, mère d'Arcas et par conséquent du peuple arcadien tout entier. Callisto est fille de Lycaon, ou plutôt de Jupiter Lyceus : elle est changée en ours, symbole de la Diane arcadienne. Son tombeau se trouve sur la même éminence qu'un temple consacré à la déesse, et il semble que son nom ne soit qu'une des formes de celui d'Artémis: car nous trouvons non loin de Tricolonoi une statue d'Artémis Calliste. On peut donc croire qu'il y eut dans l'origine identité complète entre Callisto et Diane, et que ce fut la déesse elle-même qu’on introduisit sous un autre nom dans les antiques généalogies arcadiennes. Plus tard, il est vrai, la légende s'altéra d'une manière sensible : elle établit d'autres rapports entre Jupiter et Callisto : elle sépara complétement la nymphe de la divinité. Ce fut celle-ci qui fit périr Callisto à l'instigation de Junon, ou par dépit de voir qu'elle n'avait pas conservé sa virginité. L'enfant fut sauvé par Mercure, et Jupiter plaça la mère parmi les astres, où elle est la grande ourse. Mais, tout en transformant les idées primitives, ces fables conservèrent du moins d'étroites relations entre Callisto et Diane. «Elles chassaient sur les mêmes montagnes et portaient les mêmes vêtements : elles avaient juré de rester vierges, et Jupiter, pour s'unir avec Callisto prit la figure d'Artémis.» (Apollod., III, 2.) (M. Delacoulonche, Rapport sur l'histoire, les moeurs et les coutumes des peuples de l'ancienne Arcadie, Nouvelles Archives des missions scientifiques et littéraires, Volume 7, 1858 - books.google.fr).

Saint Morand

Saint Morand a une statue à Thann.

Moine clunisien, natif de la région de Worms, Morand était entré à l'abbaye de Cluny à la suite d'un pèlerinage à Compostelle. Après avoir exercé ses fonctions en Auvergne, où il semble avoir rétabli la règle bénédictine à Mozat en 1095, il fut nommé, vers 1109, prieur du monastère Saint-Christophe, près d'Altkirch. C'est là qu'il mourut le 3 juin 1115. Canonisé à la fin du XIIe siècle, il reçut le surnom d'apôtre du Sundgau. Il est le patron des vignerons du Sundgau parce qu'il se serait nourri, pendant tout un carême, d'une grappe de raisin. Le passage du saint en Auvergne semble évoqué par le Col de la Croix-Morand. Il est représenté vêtu en bénédictin, il a pour attributs le bâton de pèlerin, la grappe de raisin et la serpette (Jacques Baudoin, Grand livre des saints: culte et iconographie en Occident, 2006 - books.google.fr).

Saint Morand est l'apôtre du Sundgau et d'Altkirch.  Il vécut au milieu du XIe siècle, et fit de nombreux miracles. Un jour, il quitta son couvent, tête nue selon son habitude, pour aller dire sa messe au village de Wahlheim. Comme il en revenait, il fut surpris par un violent orage et contraint de s'abriter sous un rocher surplombant la route. Celui-ci, comme une cire tendre, céda sous la pression de sa tête, forma un renfoncement et le protégea contre la violence de l'orage. Ceci se passa à quelques centaines de pas au nord-ouest de l'église du pèlerinage actuel de saint Morand, au bord de la route d'Altkirch à Mulhouse. A l'endroit du miracle, on construisit plus tard une jolie chapelle rustique et dans la paroi du rocher qui lui servait de fond, on remarquait l'empreinte d'une tête d'homme. C'était l'emplacement du crâne de saint Morand, et l'on appelait cette chapelle le «repos de saint Morand». Morandus descendait d'une riche famille de Worms. Il est le patron des vignerons du Sundgau. L'usage de l'honorer comme patron des vignerons semble être né à Steinbach, après que ce village eut obtenu par l'intercession du saint une vendange particulièrement abondante. Il y eut jusqu'au dix-neuvième siècle, dans l'église de Steinbach, une curieuse peinture où l'on voyait saint Morand tenant en main une grosse grappe dont il exprimait le jus (Jean James Variot, Légendes et traditions orales d'Alsace, Tome 2, 1919 - books.google.fr).

En 1125, Frédéric, fils de Thierry Ier de Montbéliard, hérite du sud de l’Alsace et devient comte de Ferrette. Ainsi, de 1125 à 1324, le Sundgau est administré par les comtes de Ferrette. Ulrich III (1310-1324) conquiert la vallée de Saint-Amarin mais meurt sans descendant mâle. Sa fille Jeanne de Ferrette mariée à Albert II de Habsbourg, la région devient ainsi les «Pays antérieurs autrichiens (Autriche antérieure)», administrés depuis Ensisheim par un grand bailli, et divisés en quatre bailliages (Landser, Thann, Altkirch et Ferrette). La Réforme n'affecte pas le Sundgau, et ce malgré la proximité de Bâle et Mulhouse. Le pays reste fidèle à la religion des Habsbourg, le catholicisme. Le début du XVIe siècle est marqué par la guerre des Paysans ou Rustauds qui veulent conserver le «vieux droit» transmis oralement et n'acceptent pas le droit romain que les seigneurs souhaitent introduire. La noblesse en sort affaiblie, la communauté villageoise se trouve au sommet de sa force. Aussi, de nombreuses maisons Renaissance datent de cette époque (Lutter, Obermorschwiller, hôtel de ville de Ferrette...) La fin de ce XVIe siècle est en revanche marquée par la grande Chasse aux sorcières qui, du début du quinzième siècle au début du dix-huitième, fit périr sur le bûcher des milliers de femmes accusées de sorcellerie. Un exemple fameux eut lieu dans le Sundgau : le procès d’Annele Balthasar de Willer, en 1589 à Altkirch, a fait l'objet d'une adaptation poétique par le poète alsacien Nathan Katz (fr.wikipedia.org - Sundgau).

Saint Morand passe pour avoir importé la vigne en Alsace et on le représente toujours tenant un cep à la main. Son sanctuaire se trouve aux portes d'Allkirch. Aux environs de 1050, Louis de Mousson, comte de Montbéliard-Ferrette ayant fondé l'abbaye de St-Christophe, y fit venir des moines bénédictins de Cluny, dont l'abbé Hugo et le comte Louis. Comme ils ne comprenaient ni la langue rauraque, ni la langue romance, il dut les remplacer par des moines de la région et il fit venir saint Morand (alors à Worms) pour les diriger. Un beau jour, le saint tomba en léthargie et dormit cent ans dans une grotte qui existe encore. Lorsqu'il se réveilla et rentra à l'abbaye qui portait son nom, la tenue des moines était telle qu'il entra dans une sainte fureur, les punit sévèrement, réglementant l'ordre sur d'autres bases (Olympe Gévin-Cassal, Légendes d'Alsace, 1917 - books.google.fr).

Vers 1360, le duc d'Autriche, Rodolphe IV de Habsbourg, qui possédait des domaines en Alsace , donna le chef de saint Morand à la cathédrale Saint-Étienne de Vienne (Louis Réau, Iconographie de l'art chrétien, 1958 - books.google.fr).

Jacques Martin

Jacques Martin, né le 25 septembre 1921 à Strasbourg et mort le 21 janvier 2010 à Orbe en Suisse, est un auteur de bande dessinée français. Il est surtout connu pour ses séries Alix (créé en 1948) et Lefranc (créé en 1952). Il a également collaboré à plusieurs albums de Tintin. Au sein du Journal de Tintin depuis 1848, Martin côtoie Hergé, alors directeur artistique de l'hebdomadaire, ainsi qu'Edgar P. Jacobs. Hergé lui demande parallèlement d'intégrer les Studios Hergé et de l'aider sur des albums des Aventures de Tintin. Leur collaboration dure 19 ans, de 1953 à 1972. Il participe ainsi aux scénarios et décors de L'Affaire Tournesol, Coke en stock, Tintin au Tibet, Les Bijoux de la Castafiore et Vol 714 pour Sydney (fr.wikipedia.org - Jacques Martin (auteur)).

Baxter

Baxter est un nom assez répandu dans le monde anglo-saxon. Il signifie "boulanger":

Ancient variations in the spelling of the surname include Bakster, Baxstar, Baxstair, Baxstare and Baxster. Also a reference to the rhyme “Fee-fi-fo-fum” where one of the MacMillan clan ground the bones of the English to make their bread. Hence the nickname Baxter (the Baker). Mac an Bhacstair is a branch of the Clan MacMillan.

The rhyme appears in the 1596 pamphlet "Haue with You to Saffron-Walden" written by Thomas Nashe, who mentions that the rhyme was already old and its origins obscure :

Fy, Fa and fum,

I smell the blood of an Englishman

In William Shakespeare's play King Lear (c. 1605), the character Edgar exclaims :

Fie, foh, and fum,

I smell the blood of a British man.

"Fee-fi-fo-fum" is the first line of a historical quatrain (or sometimes couplet) famous for its use in the classic English fairy tale "Jack and the Beanstalk". The poem, as given in Joseph Jacobs' 1890 rendition, is as follows : Illustration by Arthur Rackham in English Fairy Tales by Flora Annie Steel, 1918

Fee-fi-fo-fum,

I smell the blood of an Englishman,

Be he alive, or be he dead

I'll grind his bones to make my bread.

The verse in King Lear makes use of the archaic word "fie", used to express disapproval. This word is used repeatedly in Shakespeare's works: King Lear shouts, "Fie, fie, fie! pah, pah!", and in Antony and Cleopatra, Mark Antony exclaims, "O fie, fie, fie!"

Fe, Fi, Fo, Fum, and Phooey, five mice who traveled to and circled the Moon on Apollo 17 in 1972, four nicknamed after the poem(en.wikipedia.org - Baxter (name), Padraig Mac Giolla Domhnaigh, Some Anglicised Surnames in Ireland, 1923 - books.google.fr).

Baxter, bagster

In French, Baxter (with a capital) first appeared in medical literature in the late 1940s in Belgium and in the early 1950s in France (Onomastics in Contemporary Public Space, 2013 - books.google.fr).

baxter, n.m. PHARM. /en Belgique, où la marque a été déposée le 26 sept. 1949 sous le n° 66 842/ (n. dép.) 1. "appareil pour perfusion" - a t. lex. réf. 1954 - «Sur la table [.] une vingtaine de boîtes métalliques de moyenne dimension, les Baxters ! [.] Une fois les Baxters utilisés, il faut les renvoyer propres au complet. [.] L'appareillage des Baxters consiste en tubulures, aiguilles et un filtre coûteux, difficile à entretenir, de stérilisation délicate.» Médecin-Commandant Grauwin, J'étais médecin à Dien-Bien- Phu, 70 (France-Empire) [le s du pluriel indique un glissement vers le nom commun]. - [M.C.E.] Var. : bagster - 0 t. lex. réf. 1982 - «Si Jésus n'est pas ressuscité et si son corps de chair n'est pas présent dans l'Eucharistie, alors toutes les souffrances des malades dans les hôpitaux, [.] toutes les misères physiques et morales des mourants avec leur bagster dans le bras et leurs tuyaux dans le nez, tout cela est vain [.].» Abbé A. Léonard, «De la dignité chrétienne de la chair», in La Libre Belgique, 1er févr., 10e.-[M.C.E.] 2. "liquide pour perfusion" - 0 t. lex. réf. 1962 - «Dans son bras gauche, fermement maintenu, une aiguille dans la veine instille, goutte à goutte un baxter de sang. [.] Il faudra lui donner ce matin un baxter de sérum physiologique.» S. Berth, Souviens-toi, Barbara, 64 et 72 (Bruxelles Publimonde) (Bernard Quemada, Matériaux pour l'histoire du vocabulaire français: Datations et documents lexicographiques, Volume 4, 1998 - books.google.fr).

Le Baxter est la marque déposée et désigne, en Belgique, la perfusion ou le flacon utilisé pour celle-ci. C'est le «goutte-à-goutte» des Suisses. Un vrai belgicisme puisqu'il est également utilisé en flamand à la place de «infuus» et «infuusfles». Il semble que le mot ait été introduit au moment de la guerre et gardé chez nous et au Québec. Il trouve son origine dans l'activité de la société Baxter.  Elle fut créée aux Etats-Unis en 1931 par Donald Baxter: la «Don Baxter Intravenous Products Corporation». En 1937, au Canada, naissent les Baxter Laboratories of Canada. En Allemagne aussi Baxter AG est pionnière dans la thérapie de dialyse. Et en Belgique, trois unités, situées à Nivelles, Lessines et Ixelles, proposent la thérapie intraveineuse. Marcel Thiry a utilisé le mot «baxter» dans ses poèmes et cela a fait couler beaucoup d'encre. Les spécialistes s'en sont donnés à cœur joie: «Le mot famine, le mot perdue, / Barges d'assaut chassant marée au grand six-juin / Pour talonner les grèves dominantes, / Le mot malheur, le mot baxter / (haut fixé en fanal noir-pourpre sans lumière / Sur les vaisseaux des lits d'agonisantes)...» Ce sont des vers extraits de «Festin d'attente» édité en 1963 (Jacques Mercier, Monsieur Dico, 2004  - www.lalibre.be).

Fondée en 1931 par un médecin de Los Angeles, Donald Baxter, sous le nom de Don Baxter Intravenous Products Corporation (bientôt simplifié en Baxter Laboratories), l’entreprise se consacre à l’origine à la fabrication et à la distribution, en grandes quantités, de solutions intraveineuses dans un secteur alors encore artisanal. L’expansion est rapide, marquée par l’ouverture de nouvelles unités de production (dès 1933 dans l’Illinois, pour se rapprocher de ses clients), le financement d’activités de R&D, ainsi que l’entrée dans le secteur du matériel médical en 1939, avec le lancement de systèmes permettant le stockage longue durée du sang (plusieurs semaines, contre seulement quelques heures auparavant). L’entrée en guerre des États-Unis dope les activités de l’entreprise, seule capable de fournir des solutions intraveineuses et des conserves de sang aux forces armées – des unités de production provisoires permettent de satisfaire la demande brutalement accrue. Ce nouvel essor se poursuit dans l’après-guerre par la création de nouvelles unités de production permanentes dès 1950 et, dans la foulée, par les débuts de l’expansion hors Amérique du Nord avec l’ouverture d’un bureau en Belgique en 1954 (Marcus Wunderle, «Les groupes pharmaceutiques en Wallonie», Courrier hebdomadaire du CRISP, 2018/3-4 - www.cairn.info).

Baxter's investment in South Africa was $ 25,000 worth of surplus manufacturing equipment for producing intravenous solutions. Madsen returned to Cleveland, Mississippi, in the summer of 1950. From 1954 to 1960 he was in Brussels starting European manufacturing operations. Madsen described the period of early international expansion. “Both South Africa and Europe were initially defensive moves. Most countries were not going to import IVs and pay for them in dollars. Graham's timing was good. By the time we started manufacturing in Belgium we had had a distribution relationship with A. B. Christaens (société créée en 1835) that dated back to 1933. But Bill Graham said no more joint ventures."

And very early, dating from establishment of the first off-shore R & D Laboratory in Nivelles, Baxter began to scan and apply product advances from other countries. [...] (Thomas G. Cody, Innovating for Health: The Story of Baxter International, 1994 - books.google.fr).

En 1954, c'est le savoir-faire des Solvay et des Janssens qui a attiré chez nous le géant américain, tout autant que la localisation de notre pays au centre de l'Europe (www.rtbf.be).

A Nivelles dans la même rue que Baxter était installée la STBE, au n° 1 (bel.bizdirlib.com, Bruxelles medical, Volume 59,Numéros 1 à 6, 1979 - books.google.fr).

The SOCIETE BELGE DE THERAPEUTIQUE EXPERIMENTALE, at Nivelles, manufactures patent medicines based on organotherapeutic, products, vegetable extracts and amino-acids, patent medicines based on organotherapeutic products, vegetable extracts and amino-acids, as well as branded products for use in child and infant medicine  (Marketing in Europe, Numéros 194 à 199, 1979 - books.google.fr).

Vers 1966, la STBE, contrôlée par R. B. J. Noben, absorbe le groupe LAREPHA (aei.pitt.edu).

Un groupe formé par plusieurs sociétés établies à la même adresse et contrölées par les mëmes personnes désignées sous le nom de "groupe Noben", notamment la S.A. Mutuelle Pharmaceutique (qui existait dès 1955), la s.A. société Belge de Thérapeutique Expérimentale (S.B.T.E.) (au moins 1963), la S.A. Francirène et la S.P.R.L. Cosmedi (bib.kuleuven.be).

Nivelles/Denivelle

Dans cette petite ville alsacienne, au bord de la Thur, existe un complexe industriel de quatre sociétés juridiques liées entre elles. La plus ancienne, la Fabrique de produits chimiques de Thann & Mulhouse (en abrégé TM), a été fondée au début du XIXe siècle (1808) pour fournir les produits chimiques de base nécessaires à l'industrie textile locale. Reconstruite après la guerre 19 14-1918, elle s'associe en 1922 avec la Société des terres rares (STR), animée par J. Blumenfeld et Georges Urbain, en vue de fabriquer le dioxyde de titane Ti02, pigment blanc intéressant. En 1931, les Mines de potasse et TM fondent la société Potasse et produits chimiques (PPC). À la même époque s'associe aussi une petite société, «Organico ». Avant 1940, le site de Thann comprenait une électrolyse de chlorure de potassium produisant potasse, chlore, hydrogène, acide chlorhydrique, hypochlorite. A côté, des chambres de plomb fabriquaient l'acide sulfurique nécessaire à l'attaque de l'Ilménite pour l'obtention du dioxyde Ti02. Quelques autres productions complétaient l'ensemble (Cérium par exemple).

À la fin de 1944, Thann resta un long moment sur la ligne de front et l'artillerie acheva les démolitions, aggravées par l'enlèvement d'une partie du matériel. Une usine de repli à La Rochelle, un atelier à Serquigny étaient également en ruine ou pillés. Les conseils des diverses sociétés décidèrent la reconstruction sur place. Grâce à l'énergie de G. Blumenfeld et Jacques Ourisson, en 1945-1947, la production dans l'ensemble était voisine de celle d'avant-guerre. Mais à la fin de 1947, Jacques Ourisson décédait brutalement. Léon Denivelle, alors âgé de 42 ans, devint président-directeur général de PPC (1948-1977), vice-président de TM (1948-1956) puis président-directeur général (de 1956-1971) d'Organico. Pendant 30 ans, il sera le maître de Thann, au point qu'à sa mort la presse locale parla de sa «figure légendaire».

Léon Denivelle est né à Héricourt (Haute-Saône), le 30 août 1905 et mort en 1974 (Henri Wahl, DENIVELLE, Léon (1905-1992). Professeur de Chimie tinctoriale (1941-1974). In: Les professeurs du Conservatoire National des Arts et Métiers. Dictionnaire biographique 1794-1955. Tome 1 : A - K. Paris : Institut national de recherche pédagogique, 1994 - www.persee.fr).

Les années d'après-guerre voient surtout le vrai démarrage du traitement du zirconium auquel TM et STR travaillent à Thann en association depuis 1947. La fabrication de l'oxyde (ZrO2) pose des problèmes : un atelier de 500 kg/j est bien mis en service à la fin de 1948, mais les prix de revient sont trop élevés et la production est arrêtée en février 1953. De nouvelles recherches sont entreprises sur un procédé à la soude qui ne donnera pas non plus satisfaction. En revanche, la mise au point en 1950 d'un agent tannant au zirconium pour le cuir de semelle est un vrai succès : en 1952, un contrat est passé avec Progil qui se charge de la commercialisation du produit auprès des tanneries et, en janvier 1955, l'association TM-STR vend à la société américaine Heavy Minerals, affiliée elle aussi au groupe Crane, les plans d'une usine de 1000 t/an de tannant au zirconium contre 2,5 M de dollars ainsi qu'une licence des brevets contre une redevance de 1 % pendant vingt ans. Par ailleurs toute une série de produits dérivés du zirconium sont progressivement mis sur le marché : zircon broyé, blanc, micronisé, chlorure de zirconium acheté par le Commissariat à l'Energie Atomique pour la fabrication du métal, etc. (Marc Drouot, André Rohmer, Nicolas Stoskopf, La fabrique de produits chimiques Thann et Mulhouse: histoire d'une entreprise de 1808 à nos jours, 1991 - books.google.fr).

Zirconium, Tournesol et silicone

Zirconium has industrial uses: for nuclear reactors; as a shielding material in high vacuum tubes and radio valves, chiefly because of its affinity for various gases; in steel manufacture as an alloy with silicon and manganese; as a constituent of alloys such as nickel and cobalt in order to increase wear resistance, or with nisobium and tantalum in the manufacture of noncorrosive chemical apparatus;as a substitute for platinum; in cast iron manufacture; as a refractory lining for electric furnaces; as an igniter for photoflash bulbs; as an alloy with lead for lighter flints; as a substitute for mercury fulminate for detonators; in a concentrated arch lamp which gives the nearest approach to a point source; in the ceramic and glass industries as an opacifier and a polishing powder for lenses in television tubes; as pigments in plastics; and as a catalyst in organic reactions (Occupational Respiratory Diseases, Numéros 86 à 102 de DHHS (NIOSH) publication, 1987 - books.google.fr).

Klaproth découvrit en 1789 la zircone (oxyde de zirconium) dans une pierre précieuse de l'ile de Ceylan, nommée zircon, qui est un silicate de zircone (Zr2O3,SiO3); il trouva plus tard de la zircone dans l'hyacinthe, minéral transparent et d'un rouge foncé, qui présente la même composition que les zircons. Le malakon (silicate de zircone hydraté) a été trouvé à Hitteroë (Suède) et à Chanteloube (Haute-Loire). Le zirconium se présente sous la forme d'une poudre noire, qui devient brillante sous le brunissoir; il ne conduit pas l'électricité, et il entre difficilement en fusion. Chauffé au contact de l'air, il s'enflamme bien au-dessous du rouge, et se transforme en oxyde de zirconium (zircone). Le nitre et le chlorate de potasse ne l'oxydent que lentement, même à la température rouge. Il est au contraire oxydé rapidement lorsqu'on le chauffe avec des alcalis libres ou carbonates, ou même avec du borax. Les acides chlorhydrique, sulfurique, azotique et l'eau régale n'attaquent pas sensiblement le zirconium; l'acide fluorhydrique est le seul acide qui le dissolve rapidement (Jules Pelouze, Traité de chimie générale, Tome 3, 1854 - books.google.fr).

Les dissolutions neutres de zircone rougissent le papier de tournesol, mais elles colorent aussi d'une manière nette en rouge brun le papier de curcuma, surtout si l'on ajoute de l'acide chlorhydrique ou de l'acide sulfurique étendu à la dissolution : pour les dissolutions étendues, la coloration n'est pas très forte. On ne peut bien juger de la coloration qu'après une dessiccation complète Brush) (Henry Rose, Traité complet de chimie analytique: Édition française originale, Tome 1, 1859 - books.google.fr).

Le nom de la fleur hyacinthe viendrait de la cynthion (violette d'Apollon) ou de la cynthos (seule fleur : fleur par excellence selon Fulgence). La fleur a donné son nom à la pierre (Antoine Furetière, Dictionnaire universel, Tome 2, 1690 - books.google.fr).

Cynthia signifie «qui vient de Kynthos», mont où serait née Artémis. C'est pourquoi on nomme parfois Artémis, Cynthia. C'est aussi le nom dont on baptisera la lune (Jean-Pierre Bocquet, Le maître du sceau, 2016 - books.google.fr).

Le Cynthien désigne encore Apollon, né sur le mont Kynthos à Délos, dieu de la musique et de la poésie et censé apporter l'inspiration (Roland Guillot, Epistolarum libri duo de Janus (Secundus), 2007 - books.google.fr).

M. Lebègue a découvert, au siècle dernier, une caverne artificielle au sommet du Kynthos. C'est là, sans doute, que la pythie de Délos prophétisait (Lazare de Gérin-Ricard, Histoire de l'occultisme, 1939 - books.google.fr).

Pour une interprétation chimique d'un album de Tintin cf. Le Sceptre d'Ottokar (nonagones.info - Le Sceptre d’Ottokar).

Un autre Baxter

On ne peut remonter avant 1954, pour trouver une relation Baxter/Nivelles. Si Baxter est à Nivelles en 1954 et qu'il avait des relations commerciales avec la Belgique depuis 1937, peut-être le projet d'installation était développé déjà avant 1950.

Un W.G. Baxter travaille dans le domaine nucléaire en 1954 (Reactor Handbook, Volume 1, U.S. Atomic Energy Commission, 1960 - books.google.fr).

Il étudie le zirconium dans les années 60 avec R. Van Houten (Reactor Materials, Volume 6, U.S. Atomic Energy Commission] Technical progress reviews, 1963 - books.google.fr).

In 1951, the General Electric Company accepted the challenge to develop a nuclear power plant for the propulsion of aircraft. The project began in Oak Ridge, TN, taking up at the point where the theoretical and feasibility studies carried out by the Fairfield Engine & Airplane corporation had been concluded. The preliminary studies were known as NEPA (Nuclear Energy for the Propulsion of Aircraft) (POPSEE ANP 50th Anniversary Biographical Sketches, Volume II, 2001 - leehite.org).

NEPA's principal concern was with nuclear aircraft, which were studied extensively from 1946 to 1951, when the project was finally disbanded in favor of a joint AEC/USAF Aircraft Nuclear Propulsion (ANP) program to carry out engineering development of aircraft reactors and engine systems (R. W. Bussard, Richard D. De Lauer, Fundamentals of Nuclear Flight, 1965 - books.google.fr).

L’extérieur du centre de recherche d'Objectif Lune est en tout point semblable au centre de séparation de l’uranium d’Oak Ridge, qui fut un lieu servant à l’exécution du projet Manhattan dans les années 1940 aux États-Unis (fr.wikipedia.org - Objectif Lune).

When GE undertook to carry on the development work and fabrication of a nuclear power plant, the project was moved to Evendale, OH and became the Aircraft Nuclear Propulsion Project (ANPP) in the Aircraft Gas Turbine Division. D.R. Shoults, formerly Director of Engineering at ARO, Inc., became Project Manager. Dr. M.C. Leverett, Manager of Engineering for NEPA, continued in that capacity on the ANP Project. Eighty-seven NEPA project people joined GE on May I, 1951, and others who had worked on the preliminary studies later became GE employees. The fifty-four people who had joined GE in May 1951 and were still at Evendale five years later in 1956 are shown in the photograph which was taken on the occasion of receiving their five-year service pins. In September 1953, the Project was transferred to the Atomic Products Division and received Department status, becoming ANPD. In October, 1954, the Idaho Test station, formerly referred to as the "remote site", achieved section status in ANPD. As growth continued, five new Sections were set up in 1955 to keep pace with the expanding projects. The Idaho Station facilities were also expanded for the growing number of employees. Significant progress toward nuclear powered flight capability was made. Considerable advancements were made in fuel element design and materials development, and in other related technologies. In late 1956, the HTRE-1 (Heat Transfer Reactor Experiment) air cooled reactor operated a prototype X-39 engine at the Idaho Test Station, demonstrating the feasibility of nuclear powered flight. In 1959 the X-211 turbojet engine designed for the nuclear powered aircraft, was built in Evendale and tested using conventional fuel combustors. However, the high temperature reactor for testing with the X-211 engine was never completed.

Sur la photo datant de 1956, W.G. Baxter a bien des lunettes mais pas de moustache (POPSEE ANP 50th Anniversary Biographical Sketches, Volume II, 2001 - leehite.org).

Les recherches de GE dans le domaine arérien serviront pour la propulsion nucléaire des bâtiments de la flotte américaine.

Le programme Aircraft Nuclear Propulsion (en français : «Propulsion nucléaire aérienne», abrégé ANP) et le projet précédent Nuclear Energy for the Propulsion of Aircraft (en français : «Énergie nucléaire pour la propulsion aérienne», abrégé NEPA) étaient des projets de développement d'un système de propulsion nucléaire pour un avion à très long rayon d'action. L'United States Army Air Forces (USAAF) initia le projet NEPA le 26 mai 1946. Après un apport de fonds de 10 millions de dollars en 1947, le NEPA fut opérationnel jusqu'en mai 1951, quand le projet fut transféré à l'ANP, fruit d'une entreprise conjointe entre la Commission de l'énergie atomique des États-Unis (AEC) et l’US Air Force. L'USAF poursuivit en envisageant deux types différents de moteurs propulsés par une réaction nucléaire : le concept «à cycle d'air direct» (Direct Air Cycle), qui fut développé par General Electric à partir du 21 mars 1951, et le concept «à cycle d'air indirect» (Indirect Air Cycle), qui fut attribué à Pratt & Whitney. Le programme avait pour but de développer et tester le Convair X-6, mais fut abandonné en 1961 avant que cet avion ne soit construit (fr.wikipedia.org - Aircraft Nuclear Propulsion).

Médecine nucléaire

La médecine nucléaire comprend l'ensemble des applications médicales de la radioactivité en médecine. On administre au patient (par injection intraveineuse, ingestion, inhalation...) des médicaments radio-pharmaceutiques ; ceux-ci peuvent être des radionucléides isolés (comme l'iode 123 pour la glande thyroïde) ou être constitués d'un vecteur et d'un radionucléide. Une molécule «vectrice» qui fait partie du métabolisme humain va être attirée vers un organe cible ou tracer une fonction de l'organisme. Le radionucléide-traceur rattaché émet des rayonnements ionisants qui peuvent être détectés (imagerie ou scintigraphie) ou servir à détruire des cellules (radiothérapie interne vectorisée). Cette méthode est très sensible et permet des diagnostics ou des traitements.

La découverte en 1934 par Frédéric et Irène Joliot-Curie des isotopes radioactifs (radionucléides) produits artificiellement marque l’émergence de cette nouvelle discipline médicale. Les premières applications des radio-isotopes ont été thérapeutiques. En 1936, le phosphore 32 est utilisé dans le but de traiter une leucémie. En 1938, John Livingood et Glenn Seaborg réussissent à mettre au point la production d’iode 131. En 1941 de l’iode radioactif est administré à des patients souffrant d’hyperthyroïdie. En 1946, Samuel Seidlin, Leonidas Marinelli et Eleanor Oshry montrent que l’ensemble des métastases d’un patient atteint d’un cancer de la thyroïde peuvent être détruites à la suite d'un traitement à l’iode 131. Ce traitement reste aujourd’hui encore la méthode la plus efficace dans ce cas de cancer (fr.wikipedia.org - Médecine nucléaire).

Caverne volante

La nature que dépeint Terence TILLER dans Unarm Eros, celle de l'Afrique du Nord où il séjourna pendant la guerre, est haute en couleurs, extravagante, à la limite du fantastique, sa poésie fait souvent preuve d'un remarquable don de vision. C'est ainsi qu'il dépeint Tripoli : Oh flowery white and military town, gapped like a boxer's mouth and pink with trees («Oh ville militaire blanche de fleurs béante comme la bouche d'un boxeur et rose d'arbres»). Cette poésie est néanmoins trop floue et d'un charme un peu facile. Récemment il s'est éloigné des thèmes spectaculaires et ses derniers poèmes utilisent une versification plus nerveuse et plus complexe sans qu'on puisse dire qu'il ait gagné en ordre ou en discipline.

The sun stands in the abyss of giving, and gives;

all in his corridor among the receding stars,

the vaporous yield of the field of wildfire, lives

by his yielding.  The keen path of Mars,

Earth's powdered highway upon emptiness,

and Venus' glittering zone, hold from his deep

music of bounty, balance of duress

by which together being spun they sleep.

Standing where all is well, he draws to him

by gravity of love what else would lie

rolled in those flying caverns on whose rim

of segregation they both seek and fly

the ardour of possession - and yet swing

forever home; neither can reel nor break

their tense their singing distance; they must sing

to the racked windlass and the vibrant lake.

(Se tenant là où tout est bien, il attirait à lui — par la gravité de l'amour ce qui autrement n'aurait été — qu'abandonné sur ces cavernes volantes sur le bord de - séparation desquelles ils cherchent et suient tout à la fois l'ardeur de la possession - ils oscillent à jamais vers un point d'équilibre ; ils ne peuvent ni changer ni briser - la tension de leur écart chantant ; ils doivent chanter — pour le treuil tourmenté et le lac vibrant)

For every broken coupling lashes hard

even in breaking, the act, the memory

of its united strains: there is one chord

by which all planets and all stars are free

in consort who would die in unison.

Follow the paths of the receding stars:

even the centre of your light is one,

and may not turn aside to follow yours (Michael Bakewell, La poésie depuis 1945, La revue des lettres modernes, Numéros 1 à 6, 1954 - books.google.fr, terencetiller.com).

On pense aussi aux OVNI appelés flying saucers par les médias américains à la suite du témoignage de Kenneth Arnold sur des phénomènes aériens en 1946 (fr.wikipedia.org - Objet volant non identifié).

Unarm Eros, titre du recueil de poèmes de Tiller, est tiré de la pièce de Shakespeare Antoine et Cléopâtre (Acte IV, scène XII ou XIV) située en Egypte où le poète a passé la seconde guerrre mondiale :

ANTOINE : Éros, ôte-moi mon armure : la tâche de la longue journée est finie, et il est temps de dormir (Œuvres complètes de Shakspeare: Antoine et Cléopatre, 1821 - books.google.fr).

Acte III, scène XI - Antoine : Hélas ! notre lune terrestre est éclipsée ; ce présage seul annonce la chute d'Antoine (Oeuvres complètes de Shakspeare avec une étude sur Shakspeare des notices sur chaque piéce et des notes traduction de M. Guizot, Tome 2, 1860 - books.google.fr).

Cléopâtre enceinte d'Antoine, le 25 décembre 40, met au monde des jumeaux : Cléopâtre VIII Sélène II (La lune) et Alexandre I Hélios (Le soleil), à qui Antoine reconnaîtra le titre de Roi et Reine (antikforever.com).

La première pensée d'Enorbarbus, après la défaite d’Actium, est de résister au mouvement de désertion qui se produit dans l'armée d'Antoine. [...] Vaincu à la longue par la tentation qui l'assiége, Énobarbus quitte le camp d'Antoine, qui, dans sa générosité, lui pardonne, lui écrit une affectueuse lettre d'adieu et lui renvoie tous ses trésors. Mais le déserteur n'a pas eu besoin d'attendre le message d'Antoine pour se repentir. [...] La tragédie ne dit pas qu'Enobarbus se tue. Il meurt littéralement de remords, au camp de César, pendant la nuit, en prenant la lune à témoin de son repentir; c'est un des morceaux les plus poétiques et les plus touchants de Shakespeare : «Sois témoin, ô lune sacrée, quand l'histoire jettera sur les traîtres un souvenir flétrissant, sois témoin que le pauvre Énobarbus s'est repenti devant ta face... O souveraine maîtresse de la mélancolie profonde, verse sur moi les humides poisons de la nuit, afin que cette vie rebelle, qui résiste à ma volonté, ne m'accable plus. Brise mon cœur contre le dur rocher de mon crime : desséché par le chagrin, qu'il soit réduit en poussière, pour en finir avec toute sombre pensée. O Antoine, plus généreux que ma révolte n'est infâme, pardonne-moi pour ta part, et qu'alors le monde m'inscrive sur le registre des déserteurs et des transfuges ! 0 Antoine ! Ô Antoine !» Tels sont les derniers mots d’Énobarbus, qui meurt en prononçant le nom de son maître; c'est le plus noble personnage de cette tragédie (Paul Stapfer, Shakespeare et l'antiquité: ptie. L'antiquité grecque et latine dans les oeuvres de Shakespeare, Tome 1, 1879 - books.google.fr).

On pense à la traitrise de Wolff (le loup).

ÉNOBARBUS ET ÉROS se rencontrent.

ÉNOBARBUS. - Eh bien ! ami Éros ?

ÉROS. - Il y a d'étranges nouvelles, seigneur.

ÉNOBARBUS. — Quoi donc ?

ÉROS. — César et Lépide ont fait la guerre à Pompée.

ÉNOBARBUS. - Ceci est vieux; qu'elle en a été l'issue ?

ÉROS. - César, après avoir profité des services de Lépide dans la guerre contre Pompée, lui a refusé ensuite l'égalité du rang, n'a pas voulu qu'il partageât la gloire du combat, et, ne s'arrêtant pas là, il l'accuse d'avoir entretenu auparavant une correspondance avec Pompée. Sur sa propre accusation, il a fait arrêter Lépide. Ainsi, voilà le pauvre triumvir à bas, jusqu'à ce que la mort élargisse sa prison.

ÉNOBARBUS. - Alors, ô univers, de trois loups, tu n'en as plus que deux ; jette au milieu d'eux toute la nourriture que tu possèdes, et ils se dévoreront l'un l'autre. Où est Antoine ? (William Shakespeare, Oeuvres complète, Tome 2, 1872 - books.google.fr).

Abyme

La caverne est un espace fini délimité. Volante, dans un espace fini ou infini. S'il est fini, l'enchâssement de la caverne en son sein pourrait laisser imaginer une succession d'espaces finis enchâssés les uns dans les autres (poupées gigognes, matriochka). A l'infini ? Avec une temporalité différente pour chacun (grotte des 7 dormants).

On apprend à la page 43 que la fusée doit décoller le 3 juin à 1h34, ce qui est confirmé par Baxter à la page 50. À cette page, puisque le départ à lieu dans une semaine, on peut supposer que le calendrier de la case C3 est celui du mois de mai. Le 15 mai étant un samedi, le 3 juin sera donc un jeudi. Hors, à la page 54, nous sommes à la veille du départ et Hergé nous situe «le lundi suivant». Le 2 juin serait donc un lundi et le 3 juin un jeudi ? (arnaudnono, Les erreurs dans "Objectif Lune", 2010 - www.forum-tintinophile.com).

La mise en abyme — également orthographiée mise en abysme ou plus rarement mise en abîme — est un procédé consistant à représenter une œuvre dans une œuvre similaire, par exemple dans les phénomènes de « film dans un film », ou encore en incrustant dans une image cette image elle-même (en réduction). Ce principe se retrouve dans le phénomène ou le concept d'«autosimilarité», comme dans le principe des figures géométriques fractales ou du principe mathématique de la récursivité.

Au théâtre, il ne faut pas confondre la mise en abyme et le «théâtre dans le théâtre», où un personnage joue le rôle d'un comédien qui joue un rôle… Il faut que la deuxième pièce de théâtre (celle qui est insérée dans l'autre) représente le sujet ou les personnages de la première.

Il ne faut pas confondre la mise en abyme avec le récit enchâssé, qui consiste à faire raconter par le personnage d'un récit un autre récit, dans lequel peut apparaître un personnage qui en racontera encore un autre, comme dans les Mille et une nuits ou certaines des Lettres de mon Moulin (par exemple, La Chèvre de Monsieur Seguin et Le Curé de Cucugnan).

L'écrivain polonais Jean Potocki a écrit un roman aux multiples récits enchâssés, le Manuscrit trouvé à Saragosse (1797-1815) ; c'est aussi un exemple de mise en abyme, par le sens des histoires imbriquées et la dimension initiatique des récits.

La locution exacte «mise en abyme» dans son sens littéraire est apparue en 1950 dans l'ouvrage Histoire du roman français depuis 1918 de Claude-Edmonde Magny.

L'expression utilisée dans le sens sémiologique remonte à André Gide, lequel note dans son Journal en 1893 :

«J'aime assez qu'en une œuvre d'art on retrouve ainsi transposé, à l'échelle des personnages, le sujet même de cette œuvre par comparaison avec ce procédé du blason qui consiste, dans le premier, à mettre le second en abyme.»

Gide applique ce principe dans son roman, Les Faux-monnayeurs, construit sur une mise en abyme puisque l'oncle Édouard, écrivain, est présenté en train d'écrire un roman intitulé Les Faux-Monnayeurs, dans lequel il cherche à s'éloigner de la réalité, et qui a pour personnage principal un romancier (fr.wikipedia.org - Récit-cadre).

Reprenant exactement le même épisode que la pièce de Garnier et combinant récits et action sur scène, la pièce Antony and Cleopatra use de l’hybridité générique pour mieux humaniser ses personnages, sans la dimension moralisatrice des chœurs. Faisant feu de tout bois, Shakespeare réconciliait allégrement le théâtre dit «populaire» avec l’histoire romaine, tout en montrant à l’occasion qu’il connaissait le théâtre à l’antique et pouvait le pratiquer, dans des moments de mise en abyme (le récitatif d’Hécube dans Hamlet, celui d’Enobarbus dans Antoine et Cléopâtre), mais pour mieux faire ressortir le «naturel» de son propre langage dramatique. En adaptant le mot à l’action et l’action au mot, il imprimait durablement sa marque sur le théâtre anglais, qu’incidemment il libérait de la tutelle sénéquéenne (Line Cottegnies, Mary Sidney Herbert traductrice de Robert Garnier en 1592 In : Les théâtres anglais et français (XVIe-XVIIIe siècle) : Contacts, circulation, influences, 2016 - books.openedition.org).

The play thus opens on a visual event, the vanishing of an image that was believed to signify an identity. This gives us a cue for two major visual mise-en-abyme shows in the play, Cleopatra’s conquest of Antony by her appearance on the river Cydnus, and the staging of Antony’s apotheosis by Cleopatra in her Monument (Raphaëlle Costa de Beauregard, The notion of picturing in Early Modern Literature, The case of the miniaturist Isaac Olivier (c. 1585 - 1617), The Art of Picturing in Early Modern English Literature, 2019 - books.google.fr).

Sterne est le premier maître de ce que Gide a appelé la «mise en abyme» et qu'il a pratiqué dans Paludes : le roman présenté comme tel dans le corps du récit, les parties de cache-cache avec le lecteur, le grand art de la digression, le grand jeu de la séduction. Le tout avec un humour inimitable et une qualité si rare à notre époque : une démarche critique indissociable d'un regard généreux sur les êtres et les choses. Douce mélancolie, génie du XVIIIe siècle, Sterne est un auteur dont on ne se  remet jamais ; on devient sternien comme on devient stendhalien ou proustien : c'est un amour pour la vie. Tristram Shandy et le Voyage ont connu un succès immédiat, à Paris comme à Londres, et une heureuse  descendance chez les écrivains français du XVIIIe siècle. Je ne citerai que trois exemples, à commencer par le grand roman de Diderot, Jacques le fataliste et son maître, où l'épisode du marquis des Arcis et de Madame de La Pommeraye est comme un second roman dans le roman, les Contes immoraux du Prince de Ligne (qui auraient pu s'intituler Ceci n'est pas un roman) et le Manuscrit trouvé à Saragosse du Polonais francisé Jean Potocki (Jean Claude Masson, Eliza Draper et Lawrence Sterne, La Nouvelle revue française, Numéros 426 à 428, 1988 - books.google.fr).

Edmonde Vinel (1913-1966) entame au printemps 1940 sa collaboration à la revue Esprit sous le pseudonyme de Claude-Edmonde Magny, alternant les articles de réflexion (à propos d’Aldous Huxley en février) et les notes rendant compte d’œuvres littéraires récentes (fr.wikipedia.org - Claude-Edmonde Magny).

En 1919, Aldous Huxley fait la connaissance de Maria Nys, une réfugiée belge. Cette même année, John Middleton Murry, le second mari de la romancière Katherine Mansfield et proche ami de D. H. Lawrence, lui propose de rejoindre l'équipe rédactionnelle du magazine Athenaeum : Huxley accepte immédiatement cette offre et épouse rapidement Maria Nys9 à Bellem, le 10 juillet 191910. Ils ont ensemble un enfant, Matthew, qui devient épidémiologiste. Au début des années 1920, le couple part vivre avec leur jeune fils en Italie où Huxley rend de fréquentes visites à son ami D. H. Lawrence. Après la mort de ce dernier, survenue en 1930, Huxley publie sa correspondance (1932) (fr.wikipedia.org - Aldous Huxley ).

A lire les Lettres de D. H. Lawrence, que vient de publier l'Albatross, on ne peut se défendre d'un certain malaise. Il n'est pas une de ces pages, qui couvrent toute la période de l'après-guerre, où l'on ne trouve l'expression exaspérée de ce «mal du siècle» qui s'est emparé de la planète après 1918 : nous y découvrons en particulier en Lawrence l'un de ces «voyageurs traqués» dont la littérature des vingt dernières années a offert plus d'un exemple. [...]

Cette instabilité forcenée, il refuse de l'analyser, et, quand nous le voyons, pour la centième fois, fuir sans raison un lieu où il s'est installé la veille, nous évoquons irrésistiblement le poème en prose de Baudelaire, N'importe où hors du Monde, où se trouve si clairement formulée la veille sagesse latine touchant la vanité du voyage et, en général, de tout déplacement spatial comme remède aux maux de l'âme : «Cette vie est un hôpital, où chaque malade est possédé du désir de changer de lit. Celui-ci voudrait souffrir en face du poêle, et celui-là croit qu'il guérirait à côté de la fenêtre. Il me semble que je serais bien là où je ne suis pas, et cette question de déménagement en est une que je discute sans cesse avec mon âme...» [...]

Le «message» négatif de Lawrence est fort clair. Dans ses romans, comme dans ses essais ou dans ses Lettres, il affirme la nécessité pour l'homme de s'évader hors de la prison du Moi, pour atteindre, au-delà de sa personnalité finie, une réalité impersonnelle qui se trouve déjà en lui (différence essentielle avec le message du christianisme) et qu'il peut saisir à travers son  moi. La valeur des rites religieux des Mexicains ou des Étrusques réside en ce qu'ils constituent une technique pour saisir directement cette réalité. Sous cette forme abstraite, la doctrine de Lawrence ne diffère pas essentiellement de celle que Huxley dans La Fin et les Moyens présente comme le résultat à la fois de la science moderne et de l'expérience des mystiques : que le substrat dernier de la réalité est de nature impersonnelle, et la personnalité une illusion. Mais pour Lawrence ce n'est ni l'épistémologie ni la mystique qui sont chargées de nous introduire à cette réalité ultime, mais bien le corps et en particulier la sexualité (Claude-Edmonde Magny, D.H. Lawrence ou le mal du XXe siècle, Esprit, 1941 - excerpts.numilog.com).

Tintin finira par se poser.

Contrairement aux autres albums où Tintin voyage dans différents pays, l’histoire des Bijoux de la Castafiore se déroule intégralement dans un même lieu (le château de Moulinsart et son parc ainsi que quelques rares lieux à proximité), un même temps (quelques semaines) et une même action (l’intrigue porte sur la seule disparition d’une émeraude) reconstituant ainsi la règle des trois unités théâtre classique (fr.wikipedia.org - Les Bijoux de la Castafiore).

Ce qui se joue dans la fusée

Une puissance étrangère essaie de prendre le contrôle de la fusée par traitrise.

Durant l'expédition lunaire menée par le professeur Tryphon Tournesol et Tintin, Boris Jorgen est l'acteur majeur de l'opération Ulysse, organisée par Miller, dont le but est de prendre possession de la fusée une fois celle-ci posée sur la Lune. Il prend place, secrètement, dans la fusée, avec la complicité de Frank Wolff, à l'intérieur d'une caisse censée contenir du matériel d'optique. Sur la Lune, après avoir pris possession de la fusée, il ne parvient pas à la faire décoller, grâce à une intervention de Tintin. Maîtrisé, il est enfermé avec Wolff, mais réussit à s'échapper à cause des Dupondt. Il souhaite alors se débarrasser des occupants de la fusée, mais meurt d'un coup de revolver lors d'une altercation avec son complice, qui, lui, refuse leur mort. Son corps est alors jeté dans l'espace (tintin.fandom.com).

Jorgen : Georges, fêté le 23 avril, du grec "georgios" "qui cultive la terre". Hergé = Rémi Georges.

Miller : meunier comme l'allemand Müller (cf. L'Île noire).

Ulysse : Cheval de Troie.

Trahison à Thann

Dans le 9e siècle le champ rouge (champ du mensonge) entre Strasbourg et Bâle (probablement le champ des bœufs à Thann) fut le théâtre d'une trahison infâme que des enfants commirent contre leur père. Louis le Débonnaire y fut fait prisonnier en 833 par ses fils, Lothaire, Louis et Pépin. Cinq ans après l'Alsace échut en partage à l'empereur Lothaire et lui resta aussi par la paix de Verdun (843), après que ses frères Louis et Charles, s'étant enfin réunis près de Strasbourg, eurent terminé leur querelle avec lui par une bataille, dans le voisinage de cette ville (Adam Walther Strobel, Topographie abrégée de l'Alsace: suivie d'un précis de l'histoire de ce pays, 1839 - books.google.fr).

Entre Thann et Cernay, existent de vastes prairies que l'on appelle indifféremment Ochsenfeld (le champ aux bœufs) ou Rothfeld (le champ rouge). Les habitants du pays savent vaguement, qu'à cet endroit, s'est passé autrefois un évènement effroyable, et les vieilles gens, qui aiment le merveilleux, prétendent que, sous la terre, se trouvent d'immenses galeries, dans lesquelles dort une innombrable armée. On raconte qu'un jour un paysan pénétra dans ces souterrains. A peine y était-il, qu'il vit venir au devant de lui un guerrier à l'aspect terrible, dont le casque était surmonté de deux ailes d'aigle et de deux immenses cornes de taureau. Arrête-toi, esclave, cria le fantôme, ne réveille pas les soldats qui dorment ! Va dire à l'empereur Loïs, le fils du Grand Karle, que bientôt son armée secouera le sommeil et le vengera de la trahison de ses fils et de leur complice le pape Grégoire [IV]. Le paysan se sauva effaré ! (Édouard Siebecker, L'Alsace: récits historiques d'un patriote, 1873 - books.google.fr).

Wolff traitre

Haddock à Wolff (p. 46) : "Oui vide ton sac Judas !"

Les instruments d'optique de la fusée proviennent d'Iéna.

L'optique, en général n'a pas du tout la même importance chez les deux auteurs. Elle couvre dans l'œuvre de Newton un champ de réflexion et d'expérimentation considérable; le plus important après la mécanique céleste. Il est juste de signaler que le problème de la réfraction n'est pas — et de loin — celui qui préoccupe le plus Newton; on lui doit d'abord et surtout des pensées et expériences nouvelles et décisives en ce qui concerne la décomposition de la lumière blanche. On verra que l'optique est sans doute aussi le lieu le plus propice chez Newton pour prouver que l'on peut faire de la bonne physique sans a priori, voire avec des préalables vagues et fluctuants. Dans l'œuvre de Leibniz, l'optique joue un rôle quantitativement modeste et quasiment sans application ou découverte nouvelles. C'est par contre le lieu le plus propice pour montrer que l'on fait de la bonne physique a priori, c'est-à-dire selon les causes finales (Vincent Jullien, Le chemin de la lumière chez Newton et chez Leibniz.. In: XVII-XVIII. Bulletin de la société d'études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles. N°34, 1992 - www.persee.fr).

Le philosophe J. Chr. Wolff, professeur de mathématiques et de physique à Halle, s'était vu accuser par quelques théologiens d'enseigner des doctrines qui portaient atteinte à l'orthodoxie, et avait reçu brusquement, en 1724, du roi Frédéric Ier, l'ordre de quitter la Prusse sous deux jours. [...] Une enquête à Iéna fut ordonnée. Le professeur Syrbius fut chargé de rédiger un rapport au nom de l'Université; ce rapport déclara, comme celui de Tubingue, que les doctrines de Wolff étaient pernicieuses et subversives de la morale, en leur reprochant le «Déterminisme» ou fatalisme, en les accusant de nier le libre arbitre, la Providence, en les taxant enfin d'indifférentisme moral, d'athéisme, etc. (Louis Köch, L'Université d'Iéna, Revue bleue politique et littéraire, Volume 3, 1866 - books.google.fr).

Se soumettre volontairement au destin ou au déterminisme, ne pas croire qu'il n'y a pas de destin et que le déterminisme peut être utilisé et surmonté, c'est, pour Alain, une «position satanique». Voyant seulement dans la chute de Satan une allégorie, Alain approuve les théologiens chrétiens qui enseignent que «Satan est damné par sa propre volonté». Car celui qui renonce à sa liberté se condamne lui-même (Henri Giraud, La morale d'Alain, 1970 - books.google.fr).

L'idée d'une «harmonie préétablie» rend à Leibniz le grand service de concilier un déterminisme d'ordre mécanique avec la finalité des êtres vivants. Le préformisme le plus absolu, c'est ce qui caractérise la théorie leibnizienne de la génération des animaux et, bien entendu, de l'homme. Dans une perspective métaphysique où chaque devenir n'est que le «développement» ( au sens strict de déploiement) d'une «forme primitive» préexistante, la théorie biologique d'emboîtement des germes devient un simple corollaire d'un principe général de la structuration du monde. Partisan de l'ovisme au départ, Leibniz changea d'avis (probablement vers 1686) et adopta la «préexistence vermiste». Mais le rôle des idées du philosophe allemand sur la morphogenèse animale ne s'épuise nullement par ces  simples constatations : l'adhésion de Leibniz à une théorie fixiste comportait, et c'est presque un paradoxe historique, certains éléments destinés à influencer les biologistes du camp opposé et à s'intégrer dans l'infrastructure philosophique d'une conception dynamique de l'embryologie.  Les idées de Leibniz n'ont-elles pas trouvé un écho même chez Caspar Friedrich Wolff (1733 - 1794), fondateur de la théorie moderne de l'épigenèse ? (Mirko Drazen Grmek, La première révolution biologique: réflexions sur la physiologie et la médecine du XVIIe siècle 1990 - books.google.fr).

Emboitement

L'invention du microscope, qui fut le point de départ d'une ère nouvelle pour les sciences naturelles, introduisit dans la question de la vie de nouvelles données dont il n'était point possible de ne pas tenir compte. Swammerdam et Malpighi, en étudiant à l'aide de ce merveilleux instrument le développement du poulet, de la grenouille et du papillon, crurent reconnaître dans le germe les premiers rudiments de tous les organes de l'âge adulte. Ces observations étaient inexactes, mais à cette époque on n'était point en mesure d'en reconnaître l'erreur; aussi furent-elles acceptées sans contestation par les naturalistes comme par les philosophes. Ils furent ainsi conduits à imaginer le célèbre système de préexistence et de l'évolution des germes : système qui consistait à admettre que le germe, dès son origine, possède non pas virtuellement, mais réellement, tous les organes qui constitueront l'animal adulte. Le germe n'est donc en réalité qu'un abrégé, qu'une sorte de miniature de l'animal, et la transformation du germe en animal ne sera pas autre chose que l'accroissement en volume d'organes précédemment formés. Ce système amenait comme conséquence nécessaire celui de l'emboitement des germes. En effet, si le germe contient en lui tous les organes de l'animal futur, il contiendra également dès son origine les germes qui devront plus tard s'y développer. On pourra faire pour ces germes du second ordre les mêmes raisonnements que pour les germes du premier, et ainsi de suite jusqu'à l'infini; de telle sorte que l'on est conduit forcément à admettre que tous les germes des générations passées et futures existaient dès l'origine de l'espèce, même dans les organes du premier individu de chaque espèce. Cette doctrine de l'emboitement des germes, que Malebranche a nettement formulée, avait l'avantage, aux yeux de la philosophie spiritualiste du dix-septième siècle, de faire disparaître le reproche d'athéisme que l'on pouvait adresser à la théorie organicienne de la vie; car, tout en faisant de la vie le produit de l'organisation, elle ne voyait plus dans l'organisation le résultat du concours accidentel d'atomes doués de propriétés éternelles, un simple effet du hasard, mais un effet immédiat de l'action divine, qui dans le principe a créé l'organisation de chaque espèce, et a déposé dans les premiers individus de cette espèce toutes les générations futures (Camille Dareste, Jean Muller, ses travaux et ses doctrines physiologiques, Revue moderne (Paris. 1865), Volume 6, 1859 - books.google.fr).

Déterminisme

La physique classique postulait que la matière obéissait toujours à des lois universelles, que l’état de l’univers à un moment donné était entièrement déterminé par l’état précédent et les lois de la nature à l’œuvre. Selon ce point de vue, en connaissant l’état d’un système et les forces agissant sur lui à un instant t, on doit pouvoir connaître avec certitude l’état du système à l’instant t+1, et ainsi de suite.

La mécanique quantique, à partir de 1920, allait toutefois remettre en question cette théorie, en montrant que des alternatives étaient possibles. Au niveau quantique, connaître l’état d’un système à un moment donné et les forces agissant sur lui ne permet pas de prédire avec certitude l’état du système au moment suivant. C’est donc l’indéterminisme qui règne au niveau de l’infiniment petit. Cette indétermination de la matière, si elle remet sérieusement en question la thèse du déterminisme, en démontrant qu’il est possible d’y échapper, est cependant sans conséquences sur la question de la liberté. En effet, l’indéterminisme s’apparente au hasard, ou au déterminisme statistique, et non au libre arbitre. De plus, ce qui est vrai au niveau des particules élémentaires ne l’est pas nécessairement à l’échelle humaine.

«En physique quantique il n'y a plus de déterminisme, mais il y a encore causalité [...], une causalité sans déterminisme, où la prévisibilité exacte ne réapparaît que dans des cas exceptionnels «purs» [...] Supposer qu'il existe un déterminisme fondamental des phénomènes qui nous resterait caché est une hypothèse métaphysique, un acte de foi, et ce déterminisme ne serait pas celui que le physicien a seul le droit d'envisager et que nous avons défini par la prévisibilité rigoureuse.» (Louis de Broglie, «Réflexions sur l'indéterminisme en physique quantique», in Continu et discontinu en physique moderne, 1941) (www.profexpress.com).

Leibniz avait dégagé le principe déterministe qui se cache dans les sciences physiques et Wolf l'avait vulgarisé et rendu populaire sous le nom de principe de raison suffisante (Jean Blum, La vie et l'oeuvre de J.G. Hamann, le "Mage du Nord", 1730-1788, 1912 - books.google.fr).

Page 60 : Observatoire à Station de contrôle... Nous suivons la marche de la Fusée... Tout se passe conformément aux calculs établis...

Judas

Qui donc, demande le père de Tristram Shandy, consentirait à appeler son fils Judas ? Ce mot, annonciateur d'une trahison sordide, ne condamnerait-il pas l'enfant ou l'homme fait à l'avarice, à la coquinerie ? Les noms de baptême «par une étrange vertu magique», influent irrésistiblement, en bien ou en mal, sur notre caractère et notre conduite (Jean Pommier, Noms et prénoms dans Madame Bovary, Mercure de France, Volume 306, 1949 - books.google.fr).

Présenté comme un homme possédé par le diable par les évangiles, Judas se voit affublé de tous les stigmates dès le Moyen-Âge : nouvel Œdipe, il tue son père et épouse sa mère ; trésorier cupide, il trahit son maître ; Juif aux attributs biologiques féminins, et par conséquent diabolique, il offre son âme à Satan en se suicidant. L’étude des apparitions de ce personnage sur la scène médiévale nous a permis de comprendre comment la théologie de la possession et la pratique théâtrale se sont fécondées l’une l’autre. Marionnette entre les mains de Lucifer, instrument didactique dans celles de l’Église, incarnation du mal dans celles des fatistes, Judas est, de la même manière que l’acteur, un corps possédé : le phénomène de la possession est un moyen de représentation du mal et de la maladie. Et paradoxalement c’est parce qu’elle est devenue un élément de dramatisation que la possession se transforme en instrument de rédemption (Bao-Trang Ha-Minh, «Alors Satan entra en Judas» : vies, morts et possession de Judas sur la scène médiévale, 2016 - blogs.univ-tlse2.fr).

L’exemple de Judas le traître, tel qu’il est analysé dans la section 30 du Discours de Métaphysique de Leibniz, est éclairant : certes, il était prévisible de toute éternité que ce Judas-là dont Dieu a laissé l’essence venir à l’existence, pècherait comme il a péché, mais il n’empêche que c’est bien lui qui pèche. Le fait que cet être limité, imparfait (comme toute créature) entre dans le plan général de la création, et donc tire en un sens son existence de Dieu, ne le lave pas en lui-même de son imperfection. C’est bien lui qui est imparfait, de même que la roue dentée, dans une montre, n’est rien d’autre qu’une roue dentée : le fait que l’horloger l’utilise pour fabriquer une montre ne rend pas cet horloger responsable du fait que cette roue dentée n’est rien d’autre, rien de mieux qu’une roue dentée (www.clubpoker.net).

Dieu a créé un monde comportant la traitrise de Judas. Cependant, bien qu’il soit certain que Judas trahira le Christ, le monde dans lequel cet événement se produit n’est pas absolument nécessaire. Ce qui est nécessaire, c’est la traitrise de Judas, non le monde dans lequel elle advient. La nécessité porte sur la conséquence (la traitrise de Judas), non sur la condition (le monde dans lequel Judas trahit le Christ). Un monde comportant un Judas fidèle n’implique pas une contradiction. Par conséquent, ce monde est possible et la détermination du monde réel n’est qu’hypothétique. Ainsi, le déterminisme de notre monde est l’effet du choix de Dieu, non sa condition. Autrement dit, le déterminisme, pour Leibniz, a la liberté pour cause.

Cela ne nous renseigne cependant pas sur la liberté de la volonté humaine. L’homme est-il libre de faire des choix ? Quelle est la valeur des choix de l’homme s’ils ont été prévus de toute éternité par Dieu ? Tout d’abord, Leibniz s’oppose a la définition du libre arbitre par |’indifférence. L'homme n’est pas face a des choix comme l’âne de Buridan face a des chemins contraires, c’est-à-dire dans une situation d’indifférence. L’homme perçoit toujours des petites différences qui, même si elles ne parviennent pas jusqu’à sa conscience, l'inclinent à préférer une possibilité plutôt qu’une autre. C’est ce que Leibniz appelle l'inquiétude. Celle-ci ne correspond pas tant a de la peur qu’à de |’intérét. L’inquiétude est, selon |’étymologie, une absence (in-) de tranquillité (quies en latin). L’âme, pour Leibniz, est sans cesse agitée par de petites perceptions. C’est pourquoi, nous sommes toujours contraints de faire des choix. Notre nature nous oblige a prendre des décisions pour répondre a |’agitation profonde qui bouleverse notre ame. Le libre arbitre n’est pas, par conséquent, contraire a la détermination. Il s’agit d’une détermination de soi par soi. Cependant, le libre-arbitre par lequel le sujet se détermine a agir n’est pas nécessairement conscient. Pour Leibniz, nous pouvons agir librement tout en ignorant les raisons qui nous qui nous déterminent à agir (Philippe Staudt, Leibniz (Fiche philosophe): Comprendre la philosophie avec lePetitPhilosophe.fr, 2013 - books.google.fr).

Dans certaines régions (Vieux Thann et Kochersberg), on brûlait le Judas (Judafier). En mémoire de la trahison de l'apôtre, la veille de Pâques on établissait, devant l'église un bûcher recouvert d'un cône en rondins de bois comme pour les feux de la Saint-Jean. Sous ce cône prenaient place toutes les vieilles hardes et tous les vieux objets inflammables rassemblés lors du grand nettoyage de la maison pour Pâques. Ce feu avait en somme un double but : brûler le Judas (poupée en paille) mais aussi faire disparaître toutes les vieilles choses que la maîtresse de maison avait récupérées pour ce feu expiatoire. Cette coutume a disparu dans beaucoup de communes parce qu'en dialecte «Jud», pour Judas, a été confondu avec le mot «juif» et que l'on a eu peur de passer pour antisémite. Dans le Bas-Rhin, on prononce nettement Judas en mettant l'accent sur le s, et du coup cette confusion est moins fréquente et la coutume est encore vivante (Jean-Pierre Klein, Alsace, 1982 - books.google.fr).

Ordinateur

Page 54 : - Tournesol : Voici les indications qui vous permettrons de déterminer, à tout instant, grâce aux machines à calculer électroniques, la position et la vitesse exactes de notre fusée...

La mise au point des premiers ordinateurs est l’aboutissement d’un ensemble de recherches s’étendant sur plus de trois siècles. Une double parenté est a noter : celle des machines à calculer scientifiques, dont l’histoire remonte au XVIIe siècle, et celle de la mécanographie, née a la fin du XIXe siècle. La machine inventée par H. Hollerith en 1890 pour le recensement américain est a l’origine de la mécanographie (machines a calculer et machines comptables). Ces appareils, a fonctionnement électromécanique, visent 4 automatiser les opérations de calcul et de gestion des entreprises et des administrations. Les données sont conservées sous forme de cartes perforées.

La Seconde Guerre mondiale a fortement accéléré les recherches dans le champ des calculateurs. C’est le concept de «programme enregistré» qui a permis le passage des calculateurs aux ordinateurs. Deux mathématiciens ont contribué a cette révolution. A. Turing, dans I’article «On Computable Numbers» (1937), définit une machine universelle (appelée depuis machine de Turing) et montre qu’elle est capable de simuler le comportement de toute autre machine, c’est-a-dire de calculer n’importe quelle fonction «humainement» calculable. Il fonde la légitimité théorique des ordinateurs, et sa démonstration contient implicitement l'idée de programme enregistré, même si le terme n’est pas employé. La seconde contribution est l’œuvre de J. von Neumann, qui connaissait l’article de Turing. Dans son rapport intitulé First Draft of a Report on EDVAC (1945), il met en forme des discussions entretenues avec ses collègues Eckert et Mauchly. Il définit l’architecture de ce que l'on appellera plus tard un ordinateur et précise le concept de programme enregistré en mémoire. Dés lors, un ordinateur peut être défini comme un calculateur automatique au programme enregistré en mémoire. La mémoire est banalisée, elle contient et les données et le programme. R. Moreau souligne l’originalité de l’ordinateur par rapport aux calculateurs : «Un ordinateur peut, sans intervention manuelle, et c’est une différence essentielle avec les autres machines descendant de celles de Babbage, diriger lui-même |’exécution de tout traitement algorithmique qui lui est communiqué» (Moreau, 1982). Ce qui caractérise l’ordinateur numérique est son universalité, le fait qu’il suffise de lui faire effectuer un autre programme pour qu’il change de tache. Cette flexibilité n’est pas possible avec les calculateurs, qu'ils soient numériques ou analogiques.

IBM était, a la sortie de la guerre, une entreprise moyenne (20 000 salariés), leader mondial de la mécanographie avec une implantation internationale importante. La firme continua à cultiver la filière de la carte perforée avec la présentation en 1949 des calculateurs électroniques 604 et 605 connectés a un lecteur-perforateur de cartes, calculateurs qui se vendirent 4 plus de 10 000 exemplaires. IBM avait conçu dans les années 1945-1950 le SSEC mais ne croyait pas, elle non plus, au succès commercial des ordinateurs. Elle mit en place ce que |’on appellerait aujourd’hui une politique de veille technologique en prenant Von Neumann comme conseiller. Le premier ordinateur fut construit comme contribution a l’effort de guerre de Corée après commandes des administrations. Le Defense Calculator, rebaptisé IBM 701, fut livré en 1953 et réalisé & 19 exemplaires. Un second modèle, le 650, petite machine scientifique, marquera l’entrée a jamais victorieuse d’IBM dans le champ de |’informatique. Produit au total 4 1 800 exemplaires, il avait été introduit en décembre 1954 et s’était vendu à 175 exemplaires la première année, permettant a la firme de devenir dés 1955 le premier constructeur mondial. Sorti en 1956, le modèle 305, machine de gestion, sera vendu a environ 1 500 exemplaires. Simplicité d’utilisation et robustesse étaient les principales qualités de ces ordinateurs. IBM lança également, a cette époque, différents modèles haut de gamme, scientifiques ou de gestion, avec un succès moyen, comparable a ses concurrents (série 701, 704 et 702, 705).

Au total, il y avait en 1957 aux Etats-Unis six constructeurs commerciaux d’ordinateurs, les quatre producteurs d’appareils de mécanographie - Burroughs, IBM, NCR et Remington Rand - ainsi que deux firmes de l’électronique - General Electric et RCA (Christian Genthon, Croissance et crise de l'industrie informatique mondiale, 1995 - www.google.fr/books/edition).

Eckert et Mauchly fondèrent l’Electronic Control Company, la société qui construisit le Binary Automatic Computer (BINAC). L’une des principales nouveautés de cette machine, qui a été utilisée dès août 1950, était que les données étaient stockées sur bande magnétique.

Le docteur John Mauchly, alors directeur du département de physique de l’Ursinus College situé à proximité, était étudiant du cours d’été en électronique. L’automne suivant, il obtint un poste d’enseignant à Moore School. La proposition de Mauchly de construire un ordinateur numérique électronique en utilisant des tubes à vide, bien plus rapides et précis que les analyseurs différentiels Eckert fut nommé ingénieur en chef du projet ENIAC qui fut terminé fin 1945 et révélé au public en février 1946.

Quelques historiens de l’informatique, et Eckert lui-même, estimaient que le terme largement adopté d’architecture von Neumann aurait dû s'appeler l’Architecture Eckert, car le concept de programme stocké, central à l’architecture von Neumann avait déjà été développé à Moore School (fr.wikipedia.org - John Eckert).

Parmi les firmes qui travaillaient sur les machines à calculer électroniques était encore General Electric, en plus de Baxter.

BD

Le genevois Rodolphe Töpffer (1799 - 1846), inventeur de la bande dessinée, aura comme pensionnaire un fils d'Isaac Koechlin (1784 - 1856), manufacturier à Willer sur Thur à côté de Thann. La famille Kochlin donne deux auteurs dans le 9e art, Lionel (1948) et sa nièce Sophie (1956).

En 1833, le Suisse Rodolphe Töpffer publiait L'histoire de M. Jabot, puis en 1837, judicieusement conseillé par Goethe, il livrait à ses jeunes lecteurs Les amours de M. Vieux Bois. La bande dessinée était née, en tant que genre de lecture sinon genre littéraire. (fr.wikipedia.org - Rodolphe Töpffer, fr.wikipedia.org - Famille Koechlin, Léopold Gautier, Un bouquet de lettres de Rodolphe Töpffer, 1974 - books.google.fr).

Exposition de 1923

Du 5 mai au 1er juillet 1923, une double exposition aura lieu à Thann, réunissant, à côté des produits de l'industrie, du commerce, de l'agriculture, des arts, etc., un ensemble de travaux d'apprentis, de compagnons et de maitres artisans, tant de nos départements de l'Est que de la France toute entière. Cette exposition technique et professionnelle est organisée par la Chambre des Métiers d'Alsace et de Lorraine (Bulletin, Union technique des Syndicats de l'Electricité, Paris, 1923 - books.google.fr).

Exposition de Thann : 8 premiers prix, 30 seconds prix et 3 troisièmes prix ont été répartis entre les six maisons participantes : Monnier et Desjardins, Sautter Harlé, Société industrielle des Téléphones, Compagnie française Thomson-Houston, Compagnie Electro-Mécanique, Ateliers de Lyon et du Dauphiné (Bulletin, Union technique des Syndicats de l'Electricité, Paris, 1923 - www.google.fr).

 

On remarque sur l'affiche ci-dessus les trois sapins au premier plan comme les trois sapins noirs ou brûlés du magazine des Bijoux de la Castafiore.

La Compagnie française pour l’exploitation des procédés Thomson-Houston (CFTH) est une entreprise créée à Paris le 27 février 1893 comme filiale française de General Electric, en association avec la Compagnie des compteurs, pour construire et exploiter des unités de production et de transport d'électricité et des réseaux de tramways électriques

1879 : Elihu Thomson et Edwin Houston créent la Thomson-Houston Electric Company (THEC) aux États-Unis. 1885 : création de la Thomson-Houston International Electric Company dont l'objectif est de vendre des systèmes d'éclairage électrique dans le monde entier. Elle cède dès 1891 la licence de son compteur électrique à la Compagnie pour la Fabrication des Compteurs et Matériels d'Usines à Gaz, renommée Compagnie des Compteurs. 1892 : THEC fusionne avec la compagnie de Thomas Edison, la Edison General Electric Company, pour former la General Electric Company (aujourd'hui General Electric). La même année, une filiale est ouverte en France. 1893 : Création en commun avec la Compagnie des Compteurs de la Compagnie française pour l'exploitation des procédés Thomson Houston4, nom abrégé en Compagnie Française Thomson-Houston (CFTH), pour exploiter en France les brevets de Thomson-Houston Electric dans le domaine de la production et du transport de l'électricité (fr.wikipedia.org - Compagnie française pour l'exploitation des procédés Thomson Houston).

Eugène Schwarberg est né à Sainte Marie aux Mines (Bas Rhin) en 1864. La carrière de E. Schwarberg est tout entière dans le développement de la Compagnie Electro Mécanique, entreprise qui produisait des machines électriques (machines à courant continu, machines synchrones et asynchrones), des générateurs, des transformateurs, des turbines, du matériel roulant ferroviaire, de l'appareillage électrique, des équipements et installations d'électronique de puissance, etc.

En 1892, E. Schwarberg fut désigné pour occuper le poste d'ingénieur en chef de la Compagnie Electro-Mécanique, fondée en 1885 et à laquelle les établissements précités étaient intéressés ; quatre ans après, en 1896, il en devenait le directeur et c'est la mort qui récemment l'arracha à ce poste.

De 1921 à 1923 Eugène Schwarberg fut président du Syndicat professionnel des Industries électriques devenu ultérieurement le Syndicat général de la Construction électrique; en sa qualité de président, il représenta ledit Syndicat à l'Exposition de Gand relative aux applications de la mécanique et de l'électricité, et à celle de Thann, ayant pour objet des travaux d'apprentis (Revue générale de l'électricité, 1930 - books.google.fr, fr.wikipedia.org - Compagnie d'électro-mécanique, Girod Es Van Ee, Exposition industrielle et commerciale, 5 mai - 1 juillet, Thann 1923 - Ch. Bahy - gallica.bnf.fr).

L'Exposition de Gand, dont M. Schwarberg présidait le groupe de l'électricité, fut organisée du 16 juin au 16 septembre au parc des Floralies de Gand, ville, ortographiée Ghand, dont il est question dans le Paris Flash des Bijoux de la Castafiore page 27, et connue pour ses champs de tulipes (Revue universelle des mines, de la métallurgie, des travaux publics, des sciences et des arts appliqués à l'industrie, 1923 - books.google.fr).

 

La surface du Parc Albert 1er (du nom du roi-chevalier de Belgique) à Thann était à l'origine un terrain vague situé au bas du vallon du Steinby. En 1923, il a été aménagé pour accueillir l'exposition industrielle et commerciale du 5 mai au 1er juillet 1923. La partie centrale du parc est aménagée à la française. En son centre, une statue datant d'environ 1933 et représentant le buste d'Auguste Scheurer-Kestner (1833 -1899) est visible.

Auguste Scheurer-Kestner (1833 - 1899), gendre de Charles Kestner (marié à Céline Kestner en 1856, il a ajouté à son nom celui de son épouse), chimiste et ami de Clémenceau, a eu un rôle dans l'affaire Dreyfus, comme dreyfusard. D'origine protestante, Auguste Scheurer fut directeur de la première usine française uniquement consacrée à la chimie : «Thann et Mulhouse», située à Thann  (fr.wikipedia.org - Auguste Scheurer-Kestner, nonagones.info - La Vraie Langue Celtique de l’abbé Henri Boudet - Trésors - Les Bijoux de la Castafiore).

Hergé entre dans la troupe scoute du collège Saint-Boniface, à Bruxelles, où il recevra le nom totémique de Renard curieux. Ses premiers dessins paraissent dans "Jamais assez", la revue scoute de l'établissement scolaire puis, à partir de 1923, dans “Le Boy-Scout belge”, le mensuel des scouts de Belgique (www.tintin.com).

Norbert Wallez fut directeur de Presse et Industrie de 1924 à 1933 et maintint à flot le Vingtième Siècle contre vents et marées. [...] Après l'Abbé Norbert Wallez, c'est Raymond de Becker qui devient le maître à penser d'Hergé (Philippe Decraene, Le dessinateur Georges Rémi, dit Hergé, Belgique Wallonie-Bruxelles, une littérature francophone: actes du huitième colloque international francophone organisé à Salviac, Reilhaguet, Saint-Cirq-Lapopie, Gourdon et Le Vigan, 1999 - books.google.fr).

L'abbé Wallez réclamera – sans succès – la moitié des droits générés par les albums en tant que coauteur de Tintin (Emile Brami, Céline, Hergé et l'affaire Haddock, 2004 - books.google.fr).

Couleurs de la fusée, de Thann et de Monaco

 

En 1469, le duc Sigismond d'Autriche concéda à la ville de Thann un écu parti présentant au premier le blason de l'Autriche et au second un sapin de sinople posé sur un champ d'argent. En 1498, Maximilien Ier modifia la partie sénestre, l'azur substitué à l'argent et le sapin devenant d'or (fr.wikipedia.org - Thann).

 

 

 

Les armes de Monaco portent Fuselé d'argent et de gueules (fr.wikipedia.org - Armoiries de Monaco).

Ce n'est que par des circonstances exceptionnelles et fortuites que la maison de Monaco est arrivée à compter parmi les plus puissantes de la Haute - Alsace : il n'a fallu pour cela rien moins qu'une conquête, un acte de libéralité souveraine, et trois ou quatre transmissions par les femmes. On sait que les articles 73 et 74 du traité de Münster stipulèrent la cession au roi de France du Sundgau, du landgraviat de la Haute et Basse-Alsace, et en général de tous les domaines qui avaient jusqu'alors appartenu dans cette région, soit à l’Empire, soit à la maison d'Autriche. En décembre 1659, Louis XIV, voulant récompenser le cardinal de Mazarin des services qu'il avait rendus à la France et notamment de la part qu'il avait prise dans la conclusion du traité des Pyrénées (7 novembre 1659), lui fit une importante donation, comprenant le comté de Ferrette et les seigneuries de Belfort, Delle, Thann, Altkirch et Isenheim, c'est-à-dire la majeure partie du Sundgau, le tiers environ du département actuel du Haut-Rhin. Le cardinal Mazarin, à défaut d'héritiers de son nom et voulant cependant le perpétuer, désigna l'une de ses nièces, Hortense Mancini, pour être l'héritière d'une grande partie de ses vastes domaines, à la condition expresse que son mari quitterait son nom et ses armes, pour prendre le nom et les armes des Mazarin; le roi ayant promis d'ériger en duché-pairie féminin, sous le nom de duché de Mazarin, soit un des domaines du cardinal, soit un autre qui serait acquis à cet effet. Ces duchés féminins, qui, à défaut de descendance mâle, passaient aux femmes, donnaient à leurs maris le titre et le rang de pair de France. Armand-Charles de la Porte, duc de la Meilleraye, accepta cette position et, en février 1661, il épousa Hortense Mancini, reçut en dot le duché de Mayenne avec une somme de douze cent mille livres et prit le nom de duc de Mazarin. Peu de jours après, dans le mois de mars 1661, le cardinal de Mazarin mourut après avoir, par ses testament et codicille des 6 et 7, par ses testament et codicille des 6 et 7 du même mois, légué tous les biens meubles et immeubles dont il n'avait pas disposé, à Hortense Mancini, sa nièce, et à Armand-Charles, duc de Mazarin, époux de cette dernière, à la charge par eux de les transmettre, par suite de la substitution qu'il instituait, à l'aîné de leurs enfants mâles, ou, à défaut de mâles, à l'aînée de leurs filles, dont le mari serait tenu de prendre le nom et les armes des Mazarin; les biens situés en Alsace et provenant de la donation faite par Louis XIV, étaient compris dans cette substitution.

Louise-Félicité-Victoire, héritière des Aumont-Mazarin, eux-mêmes héritiers des Duras-Mazarin, qui avait épousé, en 1777, Honoré (IV) Anne-Charles-Maurice Grimaldi, duc de Valentinois, prince héréditaire de Monaco, lequel avait été dispensé par un édit du roi de prendre personnellement le nom de Mazarin. La substitution, dont faisaient toujours partie le duché de Mazarin, institué par Louis XIV, le comté de Ferrette et les autres seigneuries situées en Alsace, fut alors recueillie par le duc et la duchesse de Valentinois.

Les Grimaldi perdirent la jouissance de cet héritage pendant la Révolution mais la retrouvèrent, en 1825, sous la Restauration (Ernest Lehr, L'Alsace noble: suivie de Le livre d'or du patriciat de Strasbourg, Volumes 1 à 3, 1870 - books.google.fr).

 

La Fée électricité

La Fée Électricité est une peinture de Raoul Dufy, né le 3 juin 1877 au Havre et mort le 23 mars 1953 à Forcalquier.

«Mettre en valeur le rôle de l'électricité dans la vie nationale et dégager notamment le rôle social de premier plan joué par la lumière électrique», tel était l'objectif de la commande passée à Dufy par la Compagnie parisienne de distribution d'électricité pour être montrée au Pavillon de l'Électricité à l'Exposition universelle de 1937. Cette vaste peinture (60m par 10m) retrace de l’antiquité à  l’usage de la TSF en 1937, le fébrile apprentissage des premières découvertes de l’électricité. Le tableau est formé de 250 panneaux en contreplaqué indéformable parqueté sur bois et cintré (afin d'épouser la courbure de la charpente métallique du Palais de la Lumière de Robert Mallet-Stevens), mesurant chacun 2 m de hauteur sur 1,20 m de largeur. Les deux-tiers du temps prévu pour l'exécution de la Fée Électricité ont été consacrés à la documentation sur les hommes et les machines. Dans la partie inférieure, 108 savants et penseurs qui ont contribué à l'invention de l'électricité sont représentés. Parmi eux : Edison (Lampe à Filament), Leibniz, Elihu Thomson (Produits électroménagers), Goethe (Théorie des Couleurs)...

En 1953 à l’époque du décès du peintre, son éditeur a tiré à 350 exemplaires  une lithographie de la fresque qui se compose de 10 feuillets de 1 m par 0,60 m correspondant à un linéaire au 1/10eme de l’œuvre originale (fr.wikipedia.org - La Fée électricité, www.clubrodin.fr).

Belges, Thann et... électricité

Henry Jean Poulet, né le 16 février 1874 à Thiaucourt, décédé le 27 mars 1941 à Neuilly-sur-Seine fut secrétaire particulier d'Émile Loubet (président de la République de 1899 à 1906), puis conseiller d'État. Préfet du Haut-Rhin de 1918 à 1920, il est l'auteur de plusieurs articles de revue sur l'histoire de Thiaucourt et de ses environs (fr.wikipedia.org - Henry Poulet).

Henry Poulet est un des administrateurs de Electricité de la Seine qui appartient au groupe belge Empain de 1934 à sa mort en 1941. [...] En 1936, les besoins de la Ville de Paris et des moyens de transport le (Métropolitain) était en alimentés par la Société d'électricité de Paris et la Société d'électricité de la Seine, toutes deux appartenant au groupe belge Empain. En 1947, Électricité de la Seine est absorbée par l'EDF.

Ses travaux d'historien sont consacrés à la Lorraine, à l'Alsace et à la révolution. Il publie Les volontaires de la Meurthe en 1910, La société des Jacobins de Thann en 1919, Le général Humbert en 1928, La vie et la mort de Saint Thiébault en 1919. Il a également publié un ouvrage juridique sur les sociétés de secours mutuels (Caroline Suzor, le groupe Empain en France 1883-1948, 2009 - dial.uclouvain.be).

Les nombreux investissements à l'étranger n'empêchent pas Edouard Empain (1852 - 1929) d'être un bon patriote. Il finance un grand journal catholique intitulé Le XXe siècle, dans lequel Hergé lancera plus tard la série Tintin. Pendant la Première Guerre mondiale, Empain, qui est un fervent défenseur de l'expansion territoriale belge, met son personnel au service de de Broqueville, le ministre de la Guerre. Il s'implique personnellement dans le transport, le ravitaillement et l'armement des troupes. Élevé au grade de général, il dirige la commission d'achats et du service technique de l'armée belge. Comme Léopold II, il a laissé son coeur en Égypte. Avec l'aide de Georges Eid, fils de Jean Eid, le premier consul belge qui avait guidé Léopold lors de son voyage de noces en Égypte, il investit massivement dans ce pays. En 1895, il fonde la Société des tramways du Caire, en 1896 celle des Chemins de fer de la Basse-Égypte ( Lucas Catherine, Léopold II: la folie des grandeurs, 2004 - books.google.fr, fr.wikipedia.org - Edouard Louis Joseph Empain).

En août 1905, s'était constituée à Bruxelles la Société anonyme belge, Les Travaux Publics du Caire. Une convention fut conclue par elle avec une autre, égyptienne celle-là, formée en février 1906 sous le titre The Cairo Electric Railways and Heliopolis Oases Company. Soulignons, dès à présent, l'appellation d'oasis qui est accolée au nom d'Héliopolis, car il s'agit de réaliser à bref délai tout un programme : faire surgir du désert une oasis résidentielle à visage de cités et de jardins, et reliée par des moyens modernes de transports. Le général baron Empain s'y fera inhumé.

Les souscriptions, on peut le deviner, sont belges en majorité , mais il y a aussi des participations égyptiennes, anglaises et françaises. Edouard Empain et Boghos Pacha Nubar, de leurs côtés, ont fait apport gratuitement à la nouvelle société des concessions de terrains acquises par eux. Ils sont du reste respectivement président et vice-président du conseil d'administration. Ce dernier compte aussi en son sein d'autres Belges, en particulier Jules Jacobs, Léon Carton de Wiart, avocat installé au Caire et cousin d'Edmond, le chef de Cabinet du roi Léopold II, ainsi que François Empain, le frère puîné d'Edouard, qui venait de terminer ses études de droit à Louvain. Il y avait également quelques Anglais, tels Lord Armstrong, Sir John Rogers Pacha, le Colonel Sir Auguste Fitzgeorge et George Todd Symons, et un Français, André Berthelot, rapporteur au conseil de Paris du projet de Métro qu'Empain réalise, et qui entre dans le groupe Empain en 1902 (Africa-Tervuren, Volume 22, 1976 - books.google.fr).

(www.senat.fr).

Le père d'André Berthelot (1862 - 1938), Marcelin Berthelot (1827-1907), rend visite à Scheurer-Kestner à Thann en 1897 au sujet de l'Affaire Dreyfus (Joseph Reinach, Histoire de l'affaire Dreyfus: le procès de 1894, Tome 7, 1911 - books.google.fr).

Lord Armstrong est le neveu et héritier de William George Armstrong (26 novembre 1810 – 27 décembre 1900), industriel britannique du bassin de la Tyne, fondateur du trust industriel Armstrong-Whitworth, l’une des plus puissantes compagnies industrielles du XIXe siècle (fr.wikipedia.org - William George Armstrong).

Au Caire, Lawrence Durrell prit la direction du Service de Presse étranger et créa avec des poètes en exil, Bernard Spencer, Robin Fedden et Terence Tiller, une petite revue, Personal Landscape, qui durera jusqu'en 1945. On trouvait parmi les collaborateurs, Keith Douglas, Georges Seferis, Olivia Manning, Robert Liddell, G. S. Fraser, Diana Gould, la grande danseuse qui épousera Yehudi Menuhin, Gwyn Williams, etc. ( Robert L. Tignor, Egypt: A Short History, 2011 - books.google.fr, Frédéric-Jacques Temple, Lawrence Durrell En Méditerranée, Lawrence Durrell: actes du colloque pour l'inauguration de la bibliothèque Durrell, 1998 - books.google.fr).

Raoul Dufy - Thann par Joffre

Créée en novembre 1914, la revue Le Mot est dirigée par Paul Iribe, avec comme collaborateur privilégié Jean Cocteau. Patriotique et artistique, y participent aussi Sem ou Raoul Dufy. Dans les dernières semaines de l’année 1914, Raoul Dufy dessine ; il proclame La Fin de la Grande Guerre en deux gravures, dont la première est publiée dans la revue d’avant-garde Le Mot. Cette fin supposée n’était que prémices d’une guerre que les combattants espéraient de courte durée, dont ils souhaitaient qu’elle mette fin à l’idée même de la guerre et qu’elle établisse la victoire définitive de la paix. Dufy a compris que la guerre était grande avant d’être longue. C’est ce qu’il représente dans La Fin de la Grande Guerre, où il épouse les canons de l’avant-garde et de l’art populaire, dans la tradition de l’imagerie patriotique née à l’époque napoléonienne : "Voilà de l’excellente tradition d’Épinal tricolore", dira Cocteau. Autour d’un coq gaulois, l’artiste met en scène les violences commises, dès les premiers jours de la guerre, contre les civils qui se trouvaient sur les voies d’invasion. Comme tant d’autres, il mêle vraies atrocités, exagérations et rumeurs colportées par les réfugiés venus de Belgique et de France du Nord et de l’Est. Le jaune monochrome (économies de l’éditeur, la polychromie coûte désormais trop cher) et le texte poétique d’avant-garde sans doute dû à Jean Cocteau donnent un aspect crypté aux petites images qui entourent symétriquement, deux par deux, la figure centrale du coq triomphant de l’aigle.

Auréolé de sa popularité des premiers temps de la guerre, le général Joffre domine la gravure. L’homme du miracle de la Marne en septembre a aussi prononcé le discours de Thann en décembre : "Notre retour est définitif, vous êtes Français pour toujours. […] Je suis la France. Vous êtes l’Alsace, je vous apporte le baiser de la France." Dufy oppose le patriotisme historique du sacrifice français, un patriotisme à la croix de guerre, accrochée au sommet de la gravure sur l’arc-en-ciel, aussi arc de triomphe ; croix accompagnée du pape lui-même. Mais Pie X est mort le 20 août 1914, bouleversé par la déclaration de guerre : "Le Saint-Père mourut de peine". Son successeur, Benoît XV, évoquera le "suicide de l’Europe". Dufy, en ce temps de la configuration des deux camps dans les imaginaires des belligérants, oppose l’esprit du sacrifice français à la barbarie qui s’en prend aux innocents enfants de Dieu – assassinés –, aux femmes – violées –, et enfin à la cathédrale de Reims, bombardée et brûlée. Devant ce symbole de la nation-France par excellence, l’héroïne Jeanne d’Arc, originaire de Lorraine, dont la France fut partiellement amputée en 1871, est enveloppée des fumées de son propre bûcher et des flammes qui montent de la cathédrale, sacrée par le sacre, profanée par les ennemis. "La grande fille / de Lorraine / exalte les cœurs / de l’Angleterre, / miraculeusement ! Car les valets / des Hohenzollern / avaient vitriolé / le visage / de la Cathédrale / du Sacre". D’un côté, le camp du bien et du droit : blancheur, pureté, le tricolore belge, britannique ou français. De l’autre, les barbares, le mal : incendies, pillages, assassinats, tout est noir. En contraste avec le pacifique et élégant ruban montant des maisons quittées par les soldats français pour défendre leur patrie, des fumées sombres s’échappent des bâtiments détruits par les Allemands. Les ruines de maisons deviennent des êtres humains et les églises démembrées présentent au regard l’incarnation vivante et visible du martyr (Annette Becker, La Fin de la Grande Guerre, publié dans la revue Le Mot, numéro du 6 mars 1915, 2014 - expositions.bnf.fr).