Partie XIV - Le Serpent rouge   Le voyage de l’âme   Le ravissement de l’âme   
SERPENT ROUGE SCEAU DE PALAJA RAVISSEMENT AME VILLEMAURY

Les hommes noirs, ravisseurs des femmes des environs de Villemaury, ont été rapprochés des Mages, qui, dans la Bible, étaient comparés aux charbonniers tant ils activaient le feu de leurs autels (chamarim). Dans l'optique du voyage de l'âme, décrit hypothétiquement par le Serpent rouge, les femmes ravies pourraient symboliser les âmes en extase (Autour de Rennes le Château : Les Bergers d’Arcadie et les Rois Mages).

Cette Religion, dont Zoroastre avoit été le Restaurateur, ou l'Instituteur, ayant souffert de grandes altérations , pendant le cours de huit cens ans, qu'elle cessa d'être régnante, sous la Domination des Grecs, & ensuite des Parthes, elle avoit besoin d'une nouvelle reformation. C'est ce qui obligea Artaxare de rassembler un Concile, composé des Principaux Mages de son Empire. On dit aussi que ce Prince voulut les consulter sur des doutes, qu'il avoit, touchant l'état des Morts, le Paradis & l'Enfer. Pour l'affermir dans l'ancienne Foi sur tous ces Articles, un Mage célèbre par sa sainteté, nommé Erdaviraph, eut une Extase, qui dura sept jours & sept nuits, pendant laquelle son Ame transportée dans le Ciel vit ce qui se passe dans ce Monde inconnu. Revenu de ce ravissement, il rendit compte au Roi de ses Révélations ; il attesta les veritez fondamentales, sur lesquelles la Foi de ce Prince avoit été ébranlée, & confirma son témoignage par quelques Prodiges. C'est ainsi que la Religion de Zoroastre fut rétablie dans tout son lustre, & reprit son ancien crédit. Il resta seulement un certain nombre d'Incrédules que l'on fait monter à quatre vint mille. (Isaac de Beausobre, Histoire critique de Manichée et du manicheisme, 1734 - books.google.fr).

Par curiosité, notons les saints patrons des charbonniers : S. Laurent, rôti sur des charbons ardents (fêté le 10 août : jour de canicule) ; s. Maur (fêté le 15 janvier) (parce que les charbonniers sont noirs comme des Maures) ; s. Thibault de Provins (fêté le 1er juillet), de la famille comtale de Champagne (dans la forêt d'Ardenne où il s'était retiré, il fabriquait du charbon de bois). Il y aussi sainte Barbe (fêtée le 4 décembre) et saint Alexandre de Comane (fêté le 11 août : autre jour de canicule).

Pour Platon "les poètes ne sont pas en possession d'eux-mêmes quand ils composent", mais "transportés et possédés", agités d'un véritable délire qui leur fait "perdre l'usage de la raison", ils n'en disent pas moins la vérité (Ion). Pour les néo-platoniciens, c'est le signe que l'âme du poète accède sinon à la contemplation de l'Un, du moins au « ressouvenir des choses célestes et divines ». Le poète-mage fait alors figure d'intermédiaire privilégié entre le monde surnaturel et le commun des mortels, auxquels il a mission de révéler des vérités cachées. Mais ici encore, un lien direct peut s'établir avec le travail de lecture initiale ; pour Platon en effet, l'inspiration divine peut se propager de poète en poète, comme le magnétisme de l'aimant : Orphée, Homère et quelques autres produisent ainsi sur certains lecteurs un transport ineffable qui ouvre à une nouvelle ardeur créatrice. Ronsard prête à Virgile ce pouvoir : les « extatiques descriptions que tu liras en si divin auteur [...] poète encore que tu fusses un rocher » (La Franciade). (Jean Vignes, 1500-1600, La poésie française du Moyen Âge au XXe siècle, 2007 - books.google.fr).

Cependant, chez Proclus, nous trouvons l'idée qu'à un niveau supérieur, il y a un autre véhicule de l'âme, un véhicule qui est toujours attaché à l'âme et qui est son véhicule céleste; ce véhicule rend l'âme encosmique; c'est son corps premier ; c'est avec lui qu'elle effectue sa descente à travers les sphères célestes; et elle ne se démettra jamais de lui. Et comme il ne la quittera jamais, il est immortel. Ce véhicule est fait d'éther, c'est-à-dire de la matière même des astres. Ficin jusqu'ici suit entièrement Proclus. [...]

Ficin va s'adresser, à propos du premier véhicule de l'âme, alors que Pléthon qu'il utilise n'en conçoit qu'un, qui est si important (puisque c'est le véhicule supérieur de l'âme), à une autorité supposée extrêmement ancienne, celle des premiers Prisci, des mages disciples de Zoroastre; il le fait à travers le Commentaire de Pléthon sur les Oracles [...]. Ficin expose ainsi le problème : il arrive dans certains cas et pour très peu d'hommes, certains miracles donc il faut rendre compte: certaines personnes sont ravies au ciel. C'est le cas de St Paul, d'Élie, de Tât, le fils d'Hermès; Augustin (Cité de Dieu, XIV, 24) rapporte l'exemple du prêtre de Calama, et l'on peut encore trouver d'autres exemples dans la littérature païenne. (Cette question importante du du ravissement sera examinée par Ficin à deux reprises, c'est-à-dire au livre XIII et au chapitre 4 du livre XVIII.) Or, dans les moments de ravissement, qui sont parfois très courts, le corps est inerte, comme mort, et pourtant on a des visions et on entend des voix. Comment l'expliquer? Les mages disent : « Ne souille pas l'esprit [le pneuma] et n'approfondis pas la surface»; c'est, explique Ficin, qui copie Pléthon, le véhicule lui- même qu'ils appellent « esprit » (pneuma) 3. Or, les mages disent également que «l'idole a aussi une place dans la région resplendissante»; le mot « idole », rappelle Ficin qui suit Proclus à travers Pléthon, signifie « image de l'âme rationnelle». Il faut donc comprendre que l'âme rationnelle se projette sur des écrans successifs, une idole étant simplement une projection de l'âme rationnelle ; Ficin distingue ainsi une multiplicité de projections et donc d'idoles : il peut y avoir à partir d'une même âme rationnelle des projections d'âme sur divers écrans, sur le véhicule éthéré puis sur le pneuma. [...] Il y aurait donc, selon Ficin, des sens et une imagination (une fonction imaginative et même sensitive), totalement indépendants du corps mortel et des organes des sens, c'est-à-dire des organes corporels ; c'est ce que le Commentaire de Pléthon lui indique, ou plutôt semble lui indiquer. Cette projection de l'âme sur le véhicule éthéré (sur le premier véhicule) développe donc, selon Ficin, de véritables images visuelles et sonores ; Proclus, lui, ne plaçait que l'akrotês de la fonction imaginative sur le premier véhicule. Quoi qu'il en soit, Ficin, une fois de plus a tenu, pour expliquer ce phénomène tout à fait exceptionnel du ravissement, à faire appel à l'autorité des plus anciens Prisci, celle des mages disciples de Zoroastre (Brigitte Tambrun, Pléthon, le retour de Platon, 2007 - books.google.fr).

Ficin rapporte «une opinion des Mages» sur le miracle du ravissement: «Les Chaldéens pensent que l'âme accomplit encore un autre miracle, qui consiste à entourer son corps d'une lumière en répandant sur lui des rayons et à le soulever par la légèreté des rayons, miracle que, selon quelques-uns, leur père Zoroastre a accompli sur sa propre personne » (commentaire de l'Oracle 7). Ficin explique que la lumière divine descend dans l'âme. «Ensuite, poursuit-il, elle passe dans l'"idole" de l'âme, où elle devient sensitive, mais non encore corporelle, puis dans le véhicule éthéré de l'"idole", [...] enfin dans le corps [...] réceptacle de l'éther» (Brigitte Tambrun, Marsile Ficin et le Commentaire de Pléthon sur les Oracles chaldaïques, Accademia: revue de la Société Marsile Ficin, Numéro 1, 1999 - books.google.fr).