Partie I - Généralités   Introduction   L’ange Yéialel   

Le sceau d’un ange opposé au démon calomniateur Amy qui gouverne 36 légions d’esprits, est constitué d’un nonagone étoilé de deux en deux sommets[1]. C’est ange porte le nom de Yéialel, figure tutélaire des nonagones qui nous guidera par ses attributions. Le mettre en rapport avec les tracés, indiquerait qu’ils n’ont rien de satanique, même s’ils ouvrent sur des pratiques magiques. Les lieux traversés inspirent un sentiment religieux qu’il s’agit de discipliner, sinon « la superstition, la mystagogie, la sorcellerie apparaissent aussitôt, et des places désignées pour être des lieux de perfectionnement par la prière deviennent des lieux de sabbat [2]». Ce n’est que le détournement de ces pratiques, sans lien avec l’intention première, qui nous plongerait dans l’« Abîme ». Il est cependant vrai que l’on retrouve le chiffre 9 associé à des pratiques de sorcellerie aujourd’hui même avec le groupe qui se fait appelé l’Ordre des neuf Angles, célébrant des messes noires autour d’un exemplaire original de Mein Kampf. Le phénomène du romantisme noir, du gothique, qui s’amplifie depuis quelques années selon l’universitaire Jacky Cordonnier, et qui, comme mode, fait l’objet d’une exploitation commerciale, ouvre parfois sur des pratiques sataniques avec profanations de cimetières (23 en 2004), suicides et assassinat. On dénombre 4000 satanistes en France selon Paul Ariès. Le satanisme moderne commence avec la création de l’Eglise de Satan en 1966 par Anton La Vey (1930 – 1997) qui est l’auteur de la Bible satanique et qui fut conseiller de Polanski sur le film Rosemary’s baby. Michael Aquino fit scission et fonda de son côté le Temple de Seth en 1995. La France compte 50 groupes de ce type qui attirent l’attention de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Milivudes). Un autre film de Polanski inspiré par un ouvrage de Arturo Perez-Reverte (Carthagène, 1951), La 9ème porte, raconte la recherche de deux autres exemplaires d’un livre « satanique » - on ne s’attend pas à moins du réalisateur -, écrit par Aristide Torchia avec l’aide supposée de Lucifer, par un certain Corso qui finira par retrouver la dernière des neuf gravures signées LCF portant le dessin de la grande prostituée de l’Apocalypse montée sur la Bête qui lui ouvrira la neuvième porte : quête sexuelle illustrant la diabolisation de la jouissance et de la prostituée babylonienne qui initiait aux mystères de l’amour. L’une des scènes finales du film montre Corso en pleine action avec son garde du corps (jouée par Emmanuelle Seigner) qui est placée au-dessus de lui comme le souhaitait Lilith, dans le texte hébraïque de l’Alphabet de Ben Sira. Adam , lui, refusa cette sujétion et Lilith s’enfuit pour épouser le diable Samaël, signe du passage du matriarcat, rejeté dans l’interdit et le diabolique, au patriarcat, désormais norme sociétale.

Yéialel fait partie des 72 anges-génies de la cabale, groupés en 9 chœurs de 8 anges, auxquels sont associés 9 sefirot, la dixième étant Malkhouth, la Terre correspondant au Messie. Yéialel est un des huit archanges liés à la séphira Hod (Vérité).

Notons qu'à Lyon, un certain Hugand, disciple d'Etteilla, se faisait appelé Jejalel (transcription du nom de notre ange). Il aurait inventé une horloge planétaire, sorte de table où étaient inscrits les rapports entre les sept planètes et les 22 lames du tarot. Il publia Les Instruction d'Isis dévoilées où l'on peut apprendre comment tirer les cartes à la manière des Egyptiens. Etteilla, de son vrai nom Jean-Baptiste Alliette (Paris, 1738 - 1791), publie en 1770 son " Etteilla ou la Manière de se récréer avec un jeu de cartes " où il invente la cartomancie. En 1772, dans le Monde Primitif, l'égyptomane Court de Gébelin (Nîmes, 1725 - Paris, 1784), fils d'Antoine Court le refondateur du protestantisme français, écrit que les tarots (tharoth) sont les vestiges du Livre de Thot. Il est aussi économiste, et surtout franc-maçon : membre de la loge des Neuf Sœurs, qui reçut Voltaire, Benjamin Franklin et Lalande. Etteilla poursuivit les recherches de Court de Gébelin, et aurait fondé un ordre initiatique, les Parfaits Initiés d'Egypte.

Yéialel est selon une tradition cabalistique l’ange forgeron, il domine sur le fer et influe sur travailleurs utilisant ce métal, forgerons, serruriers, armuriers, couteliers. Ange de la justice, sur un plan intérieur, il aide à confectionner les armes qui nous permettent d’agir, et de défendre ce qui est juste avec l’épée, symbole de discernement. Yéialel est aussi ange médecin, guérissant particulièrement les maladies des yeux, de même que Thot soigna l’œil d’Horus que celui-ci avait perdu au cours d’un combat contre Seth. En hébreu, son nom s’écrit avec les lettres Yod, Yod, Lamed, Aleph et Lamed dont la valeur numérique est 10, 10, 30, 1, 30. La somme en est 81, 9 x 9, nombre correspondant au sceau de l’ange et aux nonagones. La planète Mars lui est attribuée.

La hiérarchie des anges utilisée dans la cabale pratique est celle élaborée par Denys l’Aréopagite et connue en Occident grâce au pape Grégoire le Grand au VIème siècle, distribuée en 9 chœurs, soit trois triades : Séraphins, Chérubins, Trônes ; Dominations, Puissances Vertus ; Principautés, Archanges et Anges. Le nombre des anges fut fixé à 72 vers le XIVème siècle par l’intervention de Moïse de Léon et Abraham Aboulafia. Leur nom fut déterminé selon les règles de la temura à partir des versets 19, 20 et 21 du chapitre XIV de l’Exode comprenant chacun 72 signes. Le nom du premier ange fut formé de la première lettre du verset 19, de la dernière du verset 20 et de la première du verset 21. Pour le second, la deuxième lettre du verset 19, l’avant-dernière du verset 20 et la seconde du verset 21. Ainsi de suite pour tous les anges[3]. L’apparition de l’ange Yéialel est ainsi assez tardive dans l’histoire des nonagones à moins qu’elle ne soit qu’une révélation tardive d’une existence plus ancienne. De la cabale pratique, il faudra remonter jusqu’à la kabbale, puisque Vauvert, haut lieu de la mystique juive, se trouve sur les tracés des nonagones.

Par la suite, une organisation infernale symétrique fut élaborée. Elle faisait correspondre aux 9 chœurs angéliques trois autres triades maléfiques de groupes de démons présidés par Belzébuth, le serpent Python, Bélial ; Satan, Asmodée, Abadon ; Merimim, Astaroth et Mammon.

Séraphins

Métatron

Keter

Couronne

Belzébuth

Orgueil

Chérubins

Jophiel

Hockmah

Sagesse

Python

Mensonge

Trônes

Zaphkiel

Binah

Intelligence

Bélial

Méchanceté

Dominations

Zadkiel

Hesed ou Gedulla

Grâce ou Grandeur

Satan

Faux miracles

Puissances

Camaël

Gebura

Justice

Asmodée

Vengeance

Vertus

Raphaël

Tiferet

Beauté

Abadon

Discorde

Principautés

Haniel

Netsah

Triomphe

Merimim

Pestilence

Archanges

Mikaël

Hod

Gloire

Astaroth

Accusation

Anges

Gabriel

Yesod

Base

Mammon

Tentation

[1] Pierre Marichal, « Le grand livre des démons et des anges déchus », Axiome, p. 104

[2] Maurice Barrès, « La colline inspirée », Emile-Paul frères éditeurs, p. 3

[3] Jean-Marc Fombonne et Marie d’Assignies, « Des anges et des hommes », Editions du Chêne