Partie X - 22 v’la l’Tarot   Chapitre II - Kabbalisation du Tarot   IX - Hermite . XX - Jugement   

IX – L’Hermite – Archanges - Yesod - Cherubim - Gabriel - 30 mars - Joachim de Flore - Lune - Tet

XX – Le Jugement – 29 septembre – Michel - Samael - Resch

L’Hermite ou le Capucin

L'influence de Joachim s'exerce de manière très puissante sur la pensée de Mathias Bellintani (1534-1611). Il connaît l'œuvre de l'Abbé de Flore mais aussi la tradition qui en a véhiculé l'esprit dans l'Ordre des Franciscains. Pour lui, l'Observance franciscaine, expression suprême de la perfection évangélique, s'étant toujours relâchée davantage au cours des siècles, a été restaurée dans sa première ferveur par la réforme capucine, qui est la réforme définitive, annoncée par les révélations et les prophéties depuis Joachim de Flore jusqu'aux franciscains spirituels du XIVème siècle. Le Concile de Trente et la crise protestante expliquent l'insistance de Mathias sur l'Antéchrist, les fins dernières et une morale basée sur la crainte de l'enfer (Nouvelle revue théologique, Volume 125, Museum Lessianum: Section théologique, 2003).

La fin de Henri de Joyeuse illustre l’habillage de l’Hermite. Pressé par sa conscience et par les sollicitations de sa mère, qui était très-dévote, et piqué aussi par les railleries du roi, qui s'égayait quelquefois aux dépens du Capucin maréchal de France, P. Ange de Joyeuse – nom en religion d’Henri de Joyeuse -, reprit brusquement l'habit et la vie de capucin, le 15 mars de cette même année. Dans la suite, revenu de Rome en vrai capucin, c'est-à-dire à pied, et les pieds nus, il lui prit une fièvre violente, dont il mourut à Rivoli, près de Turin, le 27 de septembre de l'an 1608, âgé de quarante-un ans (http://auxerre.historique.free.fr/Melanges/les_ordres_religieux_a_auxerre.htm).

On a déjà rencontré comme autre capucin Benoît de Canfield.

Histoire de Tamar, unissant les deux cartes de l’Hermite, comme Juste, et du Jugement

Tamar est un personnage biblique, bru veuve de Juda, elle amène par ruse son beau-père à respecter la loi du lévirat. Juda violait en effet la loi du lévirat en refusant de donner comme époux à Tamar son troisième fils.

L'union de Tamar avec Juda pourrait être le souvenir d'un temps où le devoir du lévirat atteignait le beau-père s'il n'avait pas d'autre fils, comme cela s'est pratiqué dans d'autres peuples.

On en informa Tamar, et on lui dit : Voici ton beau-père qui monte à Thimna, pour tondre ses brebis. Alors elle ôta ses habits de veuve, elle se couvrit d'un voile et s'enveloppa, et elle s'assit à l'entrée d'Énaïm, sur le chemin de Thimna; car elle voyait que Schéla était devenu grand, et qu'elle ne lui était point donnée pour femme. Juda la vit, et la prit pour une prostituée, parce qu'elle avait couvert son visage. Il l'aborda sur le chemin, et dit: Laisse-moi aller vers toi. Car il ne connut pas que c'était sa belle-fille. Elle dit: Que me donneras-tu pour venir vers moi ? Il répondit: Je t'enverrai un chevreau de mon troupeau. Elle dit: Me donneras-tu un gage, jusqu'à ce que tu l'envoies ? Il répondit: Quel gage te donnerai-je? Elle dit: Ton cachet, ton cordon, et le bâton que tu as à la main. Il les lui donna. Puis il alla vers elle; et elle devint enceinte de lui. Elle se leva, et s'en alla; elle ôta son voile, et remit ses habits de veuve. Juda envoya le chevreau par son ami l'Adullamite, pour retirer le gage des mains de la femme. Mais il ne la trouva point. Il interrogea les gens du lieu, en disant: Où est cette prostituée qui se tenait à Énaïm, sur le chemin? Ils répondirent: Il n'y a point eu ici de prostituée. Il retourna auprès de Juda, et dit: Je ne l'ai pas trouvée, et même les gens du lieu ont dit: Il n'y a point eu ici de prostituée. Juda dit: Qu'elle garde ce qu'elle a! Ne nous exposons pas au mépris. Voici, j'ai envoyé ce chevreau, et tu ne l'as pas trouvée. Environ trois mois après, on vint dire à Juda: Tamar, ta belle-fille, s'est prostituée, et même la voilà enceinte à la suite de sa prostitution. Et Juda dit: Faites-la sortir, et qu'elle soit brûlée (Gn, 38)

Le midrash prétend que les gages avaient été perdus lorsque Juda condamne Tamar. Mais le Seigneur en procura d'autres à temps. Selon une autre version, Samaël, identifié à Satan, aurait caché les gages. Selon Rabbi Yohanane à partir du moment où les gages avaient été éloignés [subtilisés] Tamar est devenue semblable à une colombe muette. Les pléiades furent appelées les colombes ; le mot même Peleïas en grec signifie colombe.

C'est alors que Gabriel, l'ange des bonnes nouvelles, celui qui annonce le Messie (cf. Dn 9, 20-27), les aurait retrouvés au bon moment [selon le Talmud de Babylone, sotah 10b]. Pure invention du midrash mais ajout bien significatif : Satan a en effet intérêt à ce que le Messie ne vienne jamais au monde, et donc à interrompre la descendance de Juda. Tamar est juste lorsqu'elle se refuse à accuser Juda publiquement. Sa grandeur d'âme se révèle lorsqu'elle invite discrètement Juda à reconnaître sa faute sans l'accuser de front. « Reconnais, je t'en prie » (Gn 38, 25), lui dit-elle, utilisant les mots mêmes par lesquels Juda et ses frères avaient présenté à Jacob la tunique de Joseph. Rappel de leur propre faute, mais aussi de la pitié de Juda qui s'était refusé à ce que l'on tue son frère (cf. Gn 37, 26-27). Le Talmud en tire un précieux enseignement : II vaut mieux pour un homme de se jeter dans une fournaise de feu que d'humilier son prochain en public. D'où sait-on cela ? De l'expérience de Tamar.

Tamar donna naissance à des jumeaux, Zerah et Peretz, (Gn 38, 27) dont l'un prit la place de l'autre (comme pour Rébecca, cf. Gn 25, 24-25) : nouvelle histoire d'un choix de Dieu dont les pensées ne sont pas nos pensées et qui sait tirer parti des aléas des histoires humaines. Peretz est l'ancêtre de David et Salomon. A leur naissance, Zerah sort une main en premier à laquelle on attache un fil écarlate pour le reconnaître, mais c'est Peretz qui pousse le plus fort et sort le premier.

Peretz signifie "la brèche". C'est vrai, il s'est ouvert une brèche pour devancer son frère, mais les sages le réfèrent à la brèche que s'ouvrira le Messie pour s'introduire comme furtivement dans l'humanité. C'est le prophète Michée qui le pressent : (Mi 2, 13) : Celui qui ouvre la brèche marchera devant eux : ils entreront, passeront la porte, sortiront. Leur roi passera devant eux, le Seigneur à leur tête.

Tamar signifie « palmier ». Or qui est comparé au palmier dans l'Écriture ? Le juste (Ps 92,12). « Elle est plus juste que moi », reconnaît Juda. Le midrash interprète : Que moi (Mimmeni qui peut se lire « de moi ») : L'Esprit Saint s'exclama : C'est de moi que tout cela est arrivé.

Tamar tient sa « justice » de sa fidélité courageuse qui laissa au Seigneur le champ libre pour agir et transformer une histoire en définitive bien humaine en histoire de salut (Jean Longère, Michel Dupuy, Marie, fille d'Israël, fille de Sion, 2003, Dupuis, Origine de tous les cultes, ou Religion universelle, Volume 2, 1835).

La prise en considération de l'ensemble des fragments midrashiques sur Tamar confirme que l’élaboration relative à Tamar est bien un midrash centré sur l’entrée des païens à la fin des temps, tout comme les récits de Rahab et Ruth. Même le texte biblique devient limpide à condition d'intègrer la double entente. Les trois fils de Juda ne veulent pas que Tamar (les païens) ait un fils (un messie). La bible ne nous disait pas pourquoi Er mourut, mais le Testament de Juda nous révèle le motif secret de Er : Er ne voulait pas que Tamar ait un fils. Onân, est puni, non pas parce qu’il commet une faute par rapport au mariage ou à la sexualité (merci aux Bibles de tous bords qui ont culpabilisé des millions d'adolescents pendant des siècles) mais parce qu’il ne veut pas que Tamar bénéficie de la loi du lévirat. Or la Loi n’ayant pas encore été donnée, cette loi du Lévirat ne peut être ici qu’une allusion au messie, ce pourquoi cette loi prend tant de place dans le livre de Ruth. Il s’agit d’un simple effet de gematrie (ybm, « accomplir la loi du lévirat », ayant la valeur de 52 qui est celle du messie). Quant à Shela, ce nom s’orthographie comme Shilo qui est un des noms du messie. Or Tamar commence à ouvrir les yeux (Tamar se tient même en un lieu nommé petaH ‘enayim, l’ouverture des yeux). Ce qui lui permet de commencer à apercevoir le vrai Dieu malgré son voile. Elle voit surtout que Shela grandit (le messie va arriver) et qu’elle n’y aura pas droit (elle n'est toujours pas entrée/mariée verbe kns). Le contexte eschatologique est indiqué par l’inversion : ‘Er (protecteur) s'inverse en ra’ (mauvais). Or à la fin des temps, les païens doivent entrer, au lieu qu’ici Juda veut faire sortir Tamar (Gn 38,24). Et la brûler, ce qui est la punition normale pour l'idolâtrie (Cf. Sodome, l'Apocalypse...). Mais ce terme brûler est ici trop expliqué (Tamar, fille de prêtre...) pour ne pas être lui-même une élaboration, d'autant que Juda est le Hama (beau-père/feu du soleil) de Tamar comme nous le rappelle le Targum Pseudo-Jonathan ou le Néofiti sur Gn 38,15 (www.lechampdumidrash.net).

A propos de Satan s'opposant à la naissance du futur Messie, l'on peut rappeler qu'en Apocalypse 12,4, le Dragon en arrêt devant la Femme en travail s’apprête à dévorer l’enfant aussitôt né.

La Fête des Tabernacles, Tamar et Pléiades

" Succoth Benoth," signifie " les tentes des jeunes femmes, allusion à la coutume des femmmes immorales à s’asseoir sous des tentes le long des routes, comme le fit Tamar pour séduire Juda. Astrologiquement, les femmes nées avec Vénus dans les Pléiades (Taureau) Appelées la poule et les poussin en Egypte, Succoth-Benoth en Syrie et Kima en hébreu rabbinique) sont d’un tempérament chaud (Plea for Urania Being a Popular Sketch of Celestial Philosophy, 2003).

C'est la fête de la récolte des fruits, mais surtout le rappel de l'errance des Hébreux pendant quarante ans dans le désert à leur sortie d'Égypte, et donc le symbole de la protection divine "Vous habiterez dans des cabanes pendant sept jours, afin que toutes vos générations sachent que J'ai fait habiter dans des cabanes les fils d'Israël, quand Je les ai fait sortir d'Égypte" (Lévitique, XXIII, 42-43) (www1.feujworld.com - Souccoth).

Il est prescrit dans la Torah de prendre le premier jour de Souccot quatre espèces, « du fruit de l'arbre hadar, des branches de palmier, des rameaux de l'arbre-avoth et des saules de rivière », ce que la tradition rabbinique a interprété comme une injonction à réaliser des processions en transportant ces espèces, qu'elle identifie respectivement à l’etrog (cédrat), au loulav (palme de dattier), au hadass (branche de myrte), et à l’arava (branche de saule), vers le Temple de Jérusalem (actuellement, vers la synagogue). Cette prescription est appelée netilat loulav (« port du loulav ») car le loulav est l’espèce la plus voyante et désigne donc les quatre espèces dans leur ensemble (fr.wikipedia.org - Souccot).

Les Hoshanot, poèmes liturgiques, accompagnent les processions durant la fête des Tabernacles nommée Hosanna Rabba, le Grand Hosanna, Iulav en main, et dont le refrain est tiré du psaume 118, 25 (Hoshana, qui signifie : « sauve, nous t'en prions »). L'origine de ce nom vient de ce qu'en ce jour là ils prient pour le salut et le pardon des péchés de tout le peuple. Dans l'une des séquences il est question de tamar, le palmier (l'une des plantes contenue dans le Iulav) symbole du juste, mais aussi Tamar, la belle-fille de Juda comme symbole du peuple juif.

Grotius, dans son Commentaire sur Matthieu, ch.2. v. 9. remarque que les Fêtes des Juifs ne signifiaient pas seulement leur sortie d’Egypte, dont ils célébraient la mémoire, mais aussi l'attente du Messie; et que même encore, le jour qu'ils portent ces rameaux, ils disent qu'ils souhaitent célébrer cette Fête à la venue de leur Messie. D'où il conclut que le peuple, en portant ces rameaux devant Notre-Seigneur, témoignait sa joie, le reconnaissant pour leur Messie. (M. Simon.) (Louis Moréri, Le grand dictionaire historique, ou Le mêlange curieux de l'histoire sacrée et profane, Volume 4, 1740).

La Fête des Tabernacles (chaumières) des juifs, se célèbre à l'époque où avait lieu à Babylone la fête de l'impudique Mylitta. La fête juive doit son nom aux chaumières des courtisanes de Babel, Succothbenoth. Les commentateurs juifs disent que Succoth-Benoth symbolise la constellation des pléiades. A cause des sept étoiles de cette constellation, ont lieu les sept processions dans le temple pendant sept jours, et qui au septième se réitèrent même sept fois. La colombe des pléiades est un emblème de Vénus (ou chez les Germains de Freya), et la tradition rattache les pléiades au sexe féminin. (Voir première partie- p. 45.) La pomme est aussi un symbole de la femme, et par ce motif elle figure à la Fête des Tabernacles avec la palme, emblème de la virilité (Revue d'histoire et d'archéologie, Volume 4, 1864).

Le cycle des Pléiades

Dans le traité Du Régime, composé vers 400, le médecin Hippocrate de Cos faisait des levers et couchers des repères saisonniers. On divise l'année en quatre saisons, que presque tout le monde connaît sous les noms d'hiver, de printemps, d'été et d'automne. L'hiver dure depuis le coucher des pléiades jusqu'au premier équinoxe; le printemps, depuis l'équinoxe jusqu'au lever des pléiades; l'été, depuis le lever des pléiades jusqu'à celui d'arcturus; l'automne, depuis le lever d'Arcturus jusqu'au coucher des pléiades (Hippocrate, Volume 2, Volume 7 de Encyclopédie des sciences médicales, 1837).

D'après les calculs de G. Hofmann pour l'année 430 à Athènes, les Pléiades feraient leur lever du matin le 19 mai, leur lever du soir le 19 septembre, le coucher du matin le 7 avril, le coucher du soir le 8 novembre, restant invisibles du 8 avril au 19 mai.

Selon le Talmud palestinien, le 17 de Marheshwan, nom issu de l’akkadien Arahsawan (8ème mois), correspond au coucher des Pléïades et au début du Déluge. La Nouvelle Année (1 de Tishri) ouvre la période du Jugement qui s’accomplit pendant le Déluge, situé dans les pluies d’hiver.

La copulation des Anges Veilleurs avec les habitantes de la Terre correspond avec la chute de la pluie considérée comme mâle et son mélange avec les eaux terrestres considérées comme femelle. L’arc-en-ciel réinstaure la séparation du Ciel et de la Terre. Le rituel du bouc émissaire se place dans le même rapport péché-expiation et serait une version populaire du Déluge. En témoigne le rapprochement d’Asa’el le Veilleur et d’Azazel, à qui était envoyé le bouc émissaire (Ellen Robbins, The Pleiades, the Flood, and the Jewish New Year).

Le lever des Pléiades le soir se faisait astronomiquement sept ou huit jours avant le coucher, astronomique de cette constellation au coucher du soleil. Mais ce lever astronomique était postérieur de plusieurs jours au lever visible et apparent; parce que, lorsque le soleil se trouve dans l’horizon en même temps que l'étoile, sa lumière empêchant qu'elle ne soit visible, on ne l'aperçoit que quand le soleil est plusieurs degrés sous l'horizon; et alors l'étoile, qui s'est avancée vers l'occident d'autant de degrés, est déjà élevée au-dessus de l'horizon quand elle commence à être visible ; ainsi le lever apparent du soir précède le lever astronomique Ptolémée, dans son calendrier latin (De apparentiis), marque le lever du soir des Pléiades sept jours avant l'équinoxe d'automne (Nicolas Fréret, Oeuvres complètes de Fréret, Volume 10, 1796).

Ce qui est proche du 12 septembre marquant l’épisode de la capture d’Asa’el par Raphaël.

Samaël

En ce qui concerne Samaël nous ne pouvons dire qu'une chose, c'est que, d'après la doctrine rabbinique, c'était à l'origine un archange. Il était même le plus élevé en grade des « anges du trône » et se distinguait des Séraphins par un nombre d'ailes supérieur (12).

Dans un passage eschatologique du Midrach Alphabetot, les anges Samael le prince de Rome, et de Doubiel, le prince de Perse passent en jugement devant Dieu à la fin des temps, le «jour du grand jugement», et sont châtiés et précipités dans la Géhenne pour avoir accusé Israël (Edward Langton, G. Waringhien, La démonologie: étude de la doctrine juive et chrétienne, son origine et son développement, 1951).

Samael est mentionné parmi les «anges du jugement» dans les oracles sibyllins 2, 215. Aux époques tannaïque et amoraïque, il est mentionné comme se situant hors des rangs des armées de la Merkavah. Puisant dans la tradition juive, divers ouvrages gnostiques désignent Samael comme «le dieu aveugle» et l'identifient à Jaldabaoth, qui tient une place importante dans les spéculations gnostiques en tant qu'un des maîtres des forces du mal (Gerhard Scholem, La kabbale: une introduction : origines, thèmes et biographies, 1998).

Dans le Sefer Rabboth, Samaël est ainsi décrit : L'impie ange Samaël est le prince de tous les démons. A toute heure il calculait quand devait arriver la mort de Moïse. Mais dans les Chapitres du R. Eliézer, la supériorité de Samaël sur tous les autres anges en pouvoir et en dignité est décrite encore plus expressément. Voici ce qu'on y trouve : Samaël était le grand prince dans le ciel. Les Chérubins et les Séraphins, ont six ailes; mais Samaël en a douze. Or, il prit avec lui sa bande, et il descendit sur la terre et examina tous les êtres-qu'avait créés le Très-Saint, béni soil-il, et il n'en reconnut aucun aussi rusé pour le mal que le serpent. Et plus loin, se demandant pourquoi l'archange Michaël est appelé « celui qui a échappé », l'auteur répond que c'est parce que quand Dieu précipita Samaël et ses compagnons du glorieux séjour où ils avaient été établis, Samaël se saisit de l'aile de Michaël pour l'entraîner dans sa chute; mais Dieu l'arracha de ses mains. Voilà pourquoi Michaël est appelé ainsi, c'est-à-dire celui qui a échappé.

Dans la même section, on voit le Tout-Puissant qui charge successivement Gabriel et Michel de lui amener l'âme de Moïse; mais ils déclinent l'un et l'autre cette noble mission, sous le prétexte de leur incapacité. Alors il choisit Samaël, qui entreprend volontiers cet office, mais qui est frappé de terreur et d'impuissance à la vue resplendissante cl toute céleste du divin prophète. Il s'ensuit un dialogue dans lequel Samaël apprend à Moïse que toutes les âmes qui viennent dans ce monde lui sont abandonnées (Abbé Migne, Dictionnaire des Apocryphes, 1856).

Yesod

On se souvient du célèbre verset du livre des Proverbes (10, 25) : «Le Juste [tsaddiq] est le fondement [Yesod] de l'univers. » La sphère du Juste est naturellement Yesod, l'avant-dernière sefira, qui symbolise aussi le signe de l'alliance qui transmet à la dernière sefira, Malkhout, tous les influx reçus d'en haut. Cette position clé fait du Juste celui qui, au nom de la divinité, entretient la vie des mondes. Car, sans son intermédiaire, les canaux entre les différents niveaux d'être seraient obstrués. Le Juste garantit, par sa seule existence, la survie et l' avenir de toute sa génération. Il peut adresser ses prières à Dieu et obtenir ainsi la rémission des péchés de ses contemporains tout comme il peut se tourner vers les autres et les exhorter au repentir. Rabbi Siméon ben Yohaï est souvent cité pour avoir sauvé toute sa génération. Enfin, Joseph est l'archétype du Juste qui devient l'époux de la Sekhina en raison de son emplacement dans l'échelle sefirotique : yesod est intimement lié à malkhout, sefirà-réceptacle qui effuse sur le monde inférieur les bienfaits reçus d'en haut. Zohar I, 82a stipule que le Juste neutralise l'attribut du jugement, qui ne peut accomplir son terrible effet sur cette génération.

Au fond, l'humanité idéale dont rêve l'auteur du Zohar serait issue de la fête des Tabernacles et aurait à sa tête le Juste, le tsaddiq, qui la guiderait sur la voie de la rédemption et de la restauration de l'harmonie universelle (Maurice-Ruben Hayoun, Le Zohar : Aux origines de la mystique juive, 1999).