Partie XVI - Darmstadt   Aspects religieux et philosophiques   Frankenstein et le Cercle de Darmstadt   
DARMSTADT CERCLE FRANKENSTEIN DIPPEL

Johann Conrad Dippel, qui inspira le fondateur des Zionites Elias Eller, adopta le point de vue du piétisme luthérien et publia sous le pseudonyme Christianus Democritus (le Démocrite chrétien), du nom d'un philosophe grec du Ve siècle av. J.-C., le « philosophe rieur », considéré parfois comme le père de l'épicurisme et de la théorie atomique. [...] En dépit de sa réputation internationale de théologien, philosophe de la nature, physicien, alchimiste et chimiste, Dippel a été, sauf pour quelques spécialistes, relégué au statut d'homme de science oublié. Cela est dû en partie au fait que de nombreuses sources de première main ont été détruites lors des bombardements alliés des archives de Darmstadt et de Giessen (où il a fait des études) et même le manuscrit de sa thèse de doctorat est perdu. Dans les 70 livres qu'il a composés sur une grande variété de sujets, contenus dans les deux gros volumes de Chemin ouvert, qui comprennent aussi, dans le deuxième tome, son autobiographie, et dans les biographies que lui ont consacrées Karl Voss et d'autres, on peut glaner suffisamment de matériel pour une esquisse biographique de l'extraordinaire carrière de cet alchimiste. [...] Dippel fit des recherches alchimiques pour le compte d'Ernst Ludwig de Hesse (1667-1739) était un de ces principicules qui rêvaient de transformer sa médiocre cour de Darmstadt en une imitation de Versailles au petit pied, mais avec tout le faste et la pompe de la cour de France. Tout à la poursuite de ce but, le prince avait fini par épuiser son Trésor, qui présentait un énorme déficit. Et comme l'alchimie était à la mode en ce temps-là, le landgrave décida de combler ses pertes et de créer les revenus nécessaires en en engageant des alchimistes pour produire de l'or (Matei Cazacu, Radu Florescu, Frankenstein, 2013 - books.google.fr).

En vain.

Dippel est l'inventeur d'une huile ("huile de Dippel"), antispasmodique et stimulant du système nerveux, et du bleu de prusse, apprécié des peintres, dont le chimiste Scheele tira l'aide prussique ou acide cyanihydrique avce laquelle John Polidori, médecin de Lord Byron et précurseur de la littérature vampyrique, se suicida.

Le château Frankenstein connut un regain d'intérêt dans la dernière décennie du XVIIIe siècle lorsqu'il devint le sanctuaire d'un petit groupe de pèlerins littéraires, amateurs de vieilles ruines avec un penchant pour le gothique et sensibles aux beautés de la nature. La patronne de ce cercle de literati, connu sous le nom de « cercle de Darmstadt » était Henrietta Christina Caroline von Pfalz-Zweibrücke, l'épouse de Ludwig IX, comtesse de Hesse. Souveraine éclairée du siècle des Lumières, elle avait entretenu une longue correspondance avec Voltaire et admirait Frédéric II le Grand. [...]. Un de ses membres était la belle princesse Luisa de Mecklenburg-Strelitz, la future reine de Prusse qui charma Napoléon à Tilsit, accompagnée de sa soeur Fredericka. Le groupe passait des week-ends au château Frankenstein et chantait des chansons à leur endroit préféré, sous le tilleul qui domine l'entrée principale. Un des visiteurs du cercle fut Goethe, qui semble avoir apprécié ses visites à Darmstadt, à l'époque où " Faust était en train d'avancer et Goetz von Berlichingen se préparait dans ma tête" (Matei Cazacu, Radu Florescu, Frankenstein, 2013 - books.google.fr).

Le groupe se réunissait chez Johann Heinrich Merck, marié avec Louise Françoise Charbonnier de Morges (Suisse, canton de Vaud) avec laquelle il voyagea dans le sud de la France, à Marseille, avant d'aller en Italie. Il y avait aussi le franc-maçon (depuis 1766 dans la loge Zum Schwert de Riga) Johann Gottfried Herder, Johann Wolfgang von Goethe (appelé le Magicien ou le Pèlerin), Franz Michael Leuchsenring, mort à Paris en 1827, Caroline Flachsland (appelés Psyché), la femme d'Herder épousée à Darmstadt, et les dames de la cour Henriette Alexandrine de Roussillon (appelé Urania) et Luise von Ziegler (appelé Lila). En outre, le cercle Darmstadt était en termes amicaux avec Friedrich Gottlieb Klopstock, auteur de La Messiade, Christoph Martin Wieland, Johann Wilhelm Ludwig Gleim, Sophie von La Roche, Friedrich Heinrich et son frère Johann Georg Jacobi, Johann Kaspar Lavater (de.wikipedia.org - Darmstädter Kreis).

Goethe hat dem Kreis in seinem Concerto dramatico (1772) den Namen Darmstädter Gemeinschaft der Heiligen gegeben (Gerhard Sauder, Der Empfindsame Kreis in Darmstadt, Darmstadt in der Zeit des Barock und Rokoko: Ausstellung, Magistrat der Stadt Darmstadt, Mathildenhöhe, 6. September bis 9. November 1980, Volume 1, 1980 - books.google.fr).

Les conventicules des piétistes sont les soupapes de sûreté qui lui ont permis de traverser, sans faire explosion un long siècle de souriant et calme scepticisme. Rares sont les grands écrivains « nationaux » de l'Allemagne du XVIIIe siècle qui ont échappé à l'influence du piétisme. Gellert, Klopstock, les Jacobi, le jeune Gœthe ont aspiré à plein gosier ce lait chaud et sucré. Wieland y a trempé les lèvres. Un type des plus intéressants de petite bourgeoise piétiste du milieu de cette époque est la mère de Gœthe, la digne Frau Rat, qui, malgré son robuste bon sens, s'est donnée corps et âme à ces débauches de sentimentalité dévote (Louis Reynaud, Histoire générale de l'influence française en Allemagne, 1914 - books.google.fr).

L'écriture des 20 chants ou 20 000 vers du Der Messias de Klopstock (ou La Messiade en français) s'étale de 1749 à 1773 et rencontre par son titre le MESSIAS de Martinès de Pasqually (M SAE SIS de la dalle de Coume Sourde) (Autour de Rennes le Château : Messie, Messias, Autour de Rennes le Château : PSPRAECUM ou PS PRAECUM : le petit frère des pieuvres - books.google.fr).

Il peut sembler curieux qu'un moniste de la trempe de Herder se réclame des doctrines manichéennes, cathare, albigeoise ou vaudoise, entachées toutes d'un dualisme impénitent que Herder a si souvent fustigé. Pour qu'il les admette parmi les précurseurs du luthéranisme, pour qu'il fasse abstraction d'une antinomie aussi abrupte — que seule une une vague épithète semble rappeler — il a fallu qu'il ait particulièrement apprécié leur refus de diviniser Jésus. Et c'est ce refus de l'idolâtrie que les répressions romaines ne parviendront jamais à vaincre (René Gérard, L'Orient et la pensée romantique allemande, Germanica, Volume 4, 1963 - books.google.fr).

Au sujet des sectes cathares il écrit d'autre part : « En particulier, les pays de langue provençale furent le jardin où elles fleurirent ; elles traduisirent le Nouveau Testament (entreprise inouïe pour l'époque) dans cette langue, formulèrent en vers provençaux leurs règles de perfection et, depuis l'introduction du christianisme romain, furent les premières à instruire et former le peuple dans la langue du pays. Mais en récompense, on s'ingénia à les persécuter eux aussi tant qu'on put » (Marcel Decremps, De Herder et de Nietzsche à Mistral, 1974 - books.google.fr, Johann Gottfried Herder, Idées sur la philosophie de l'histore de l'humanité, 1828 - books.google.fr).

En Allemagne, Herder établit enfin une nouvelle perspective historique et esthétique, dans laquelle il qualifia la poésie des troubadours, qui aurait reçu son impulsion principale des Arabes en Espagne, de mère de toute la poésie moderne en Europe (Claude Charles Fauriel, Histoire de la poésie provençale, Volume 1, 2011 - books.google.fr).

Cela permet de rapprocher Darmstadt du Languedoc.

Wieland demanda des nouvelles d'André Chénier par l'intermédiaire de la fille, de passage à Göttingen en Saxe, de Jean-Louis Brodelet, conseiller-secrétaire du Roi en 1787, administrateur des subsistances militaires alors une vague épithète semble rappeler — il a fallu qu'il ait particulièrement apprécié leur refus de (André Chénier, 1762-1794: exposition organisée pour le 200e anniversaire de sa naissance, Paris, Bibliothèque nationale, 1962 - books.google.fr).

A la demande de Marie-Joseph Chénier (et sans doute par l'intermédiaire de son compatriote et ami Johann Caspar Schweizer qui vit à Paris et qui a embrassé la cause de la Révolution), l'Assemblée nationale accorde, fin août 1792, à Pestazzoli avec Klopstock, Schiller et quelques autres étrangers, la citoyenneté française. (Manfred Gsteiger, Retlets helvétiques de la Révolution française avant 1798, Région-Nation-Europe, Unité et diversité des processus sociaux et culturels de la Révolution française, Actes du colloque international, Besançon 25, 26 et 27 novembre 1987, 1988 - books.google.fr).

Des analogies de détails entre le scénario de la Bataille d'Arminius et l'Hermannschlacht de Klopstock, sans compter l'identité curieuse des deux titres, donnent à croire qu'André Chénier a pu prendre une idée de la tragédie du une idée de la tragédie du poète allemand dans la traduction française qui en avait paru en Suisse (Paul Dimoff, La vie et l'œuvre d'André Chénier jusqu'à la révolution française, 1762-1790, Volume 2, 1936 - books.google.fr).

Dès la fin juin 93, la Convention avait délégué dans l'Aude Berlier et Marie Joseph Chénier (frère du poète André Chénier), avec pour mission d'éclairer les Audois sur les événements du 2 juin qui avaient conduit à l'arrestation des députés girondins (Jean Guilaine, Daniel Fabre, Histoire de Carcassonne, 1990 - books.google.fr).

Vers l'an 1650, vivaient à Carcassonne un sieur Pierre Chenier, qualifié écuyer, et une demoiselle Marianne Chenier, qu'on suppose être sa sœur (Cartulaire et archives des communes de l'ancien diocèse et de l'arrondissement administratif de Carcassonne, Volume 6,Numéro 2, Didron, 1882 - books.google.fr).

Né à Montfort-sur-Boulzane (actuel 11) le 3 juin 1722, baptisé le 4, il est le fils de Guillaume Chénier, né à Carcassonne le 19 novembre 1684, mort le 17 ou le 27 octobre 1747, régisseur des forges de Castanier d'Auriac à Montfort, et de Catherine Garrigue, née à Limoux (actuel 11) vers 1684, morte à Carcassonne, inhumée paroisse Saint-Vincent le 5 octobre 1764, fille de François Garrigue, mort avant 1720, et de Jeanne Franc, mariés à Limoux le 10 septembre et le petit-fils de Pierre Chénier (fils de Claude Chénier, bourgeois de Chalaudray (actuel 86), baptisé le 12 mars 1620), secrétaire du Roi en 1674, et de Marie Ricardon, (fille de Nicolas Ricardon, marchand à Carcassonne) mariés à Carcassonne, paroisse Saint-Michel le 14 mai 1668, Il épouse à Constantinople, le 25 octobre 1754, Elisabeth Santi- Lhomaca, née vers 1729, morte à Paris le 6 novembre 1808 - fille d'Antoine Lhomaca, joaillier, drogman, antiquaire à Constantinople (1705-1793), et d'Arghiri Mamachi de Lusignan (1715-1735) - dont il a huit enfants, quatre filles (trois meurent en bas âge) et quatre garçons parmi lesquels André-Marie, né à Constantinople le 29 octobre 1762, baptisé à Saint-Pierre-Saint-Paul de Galata le 30 octobre 1762, guillotiné le 7 ou le 8 thermidor an II (24 ou 25 juillet 1794), poète, et Marie-Joseph-Biaise, né à Constantinople le 2 ou le 11 février 1764, mort à Paris le 10 janvier 1811, écrivain, membre de la Convention, un des fondateurs de l'Institut (Anne Mézin, Les consuls de France au siècle des lumières (1715-1792), 1998 - books.google.fr).

Les Chénier se rapatrient à Carcassonne chez une soeur de Louis, Madame Béraud, avant de joindre Paris plus tard. Pandant la parenthèse carcassonnaise, André Chénier ira à Notre Dame de Marceille (Raymond Jean, La Dernière nuit d'André Chenier, 1989 - books.google.fr).

Il existe deux toiles au Musée de Carcassonne, qui représentent le poète enfant & à trente ans : la première de Cazes fils, un peintre dont le nom n'a laissé aucune trace dans les arts; la seconde est l'œuvre de Jean-Baptiste Mallet (Revue des Pyrënëes, Volume 3, 1891 - books.google.fr).

Ce fut durant le règne de Ludwig II (son père, Ludwig Ier, avait adopté en 1806 le titre de grand-duc de Hesse) que commencèrent des travaux importants de restauration du château. Le troisième grand-duc de Hesse, un autre Ludwig, troisième du nom (1806-1877), était si intéressé par le château qu'il chargea l'architecte local de reconstituer dans une esquisse le château du temps de sa splendeur

À considérer l'étrange histoire du château Frankenstein, ainsi que la réputation internationale de certains de ses habitants aux aux XVIIIe et XIXe siècles, il semble impossible que les parallèles entre le château, Dippel et le roman de Mary Shelley soient une simple coïncidence. Nous avons déjà souligné les parallèles plus que fortuits entre la vie de Johann Konrad Dippel et celle de Victor Frankenstein, le principal personnage du roman de Mary Shelley. Tous les deux sont des esprits exceptionnels, très avancés par rapport à leur temps, peu compris par leurs supérieurs et par leurs pairs. Tous les deux des « Hamlets » scientifiques, ils furent condamnés à errer d'un pays à l'autre et même à souffrir l'emprisonnement à cause de leur travail. Tous les deux croyaient fermement en la capacité de l'homme de vaincre la mort et et de créer la vie par des moyens artificiels, et tous les deux ont travaillé en secret. Jusqu'à la fin, Mary ne dévoile pas la formule employée par Frankenstein pour créer le monstre, et Dippel ne révéla jamais son « secret » au langrave (Matei Cazacu, Radu Florescu, Frankenstein, 2013 - books.google.fr).