Amplepuis
Ampliputeum, gros bourg et paroisse dans les montagnes du Beaujolais, Diocèse et Intendance de Lyon, Archiprêtré de Roanne, Parlement de Paris, Intendance de Lyon, Election de Villefranche, est divisé en Amplepuis Quartier d'en-haut et le bourg d'Amplepuis.
D'anciens titres donnent à Amplepuis le nom de ville, quoiqu'il n'y ait aucun vestige que ce lieu ait été fermé de murailles. On y paye les entrées de vin. Il y a un Bureau pour la marque des toiles que fabriquent les habitants, et dont il se fait un commerce considérable. II y a un marché tous les mardis, et cinq foires dans l’année; savoir, le 22 Janvier, le troisième samedi de Carême, le mardi avant la Pentecôte, le mardi avant la fête de l'Assomption, et le 2 Novembre. Le District de la Paroisse est assez considérable : on y recueille du seigle, de l'avoine et du blé noir. Cette Paroisse est desservie par un Curé, à la nomination du Cellerier de Savigny, et par deux Vicaires & deux Chapelains.
Dans le District d'Amplepuis, on remarque deux Chapelles rurales, l'une sous l'invocation de saint Roch, et l'autre sous celle de saint Fortunat.
L'ancien Château d'Amplepuis est entièrement détruit. Le Quartier d'en-bas qui fait les deux tiers de la Paroisse, dépend du Marquisat de Rebé ; le Quartier d'en-haut, de la Seigneurie de Rochefort. Amplepuis est situé près de la rivière de Reins.
En 1331, la Châtellenie d'Amplepuis fut donnée pour appanage, avec Thel, Ranchal et Chavigny-le-Lombard, à Guillaume d'Amplepuis, fils de Guichard VI Sire de Beaujeu. Jacques d'Amplepuis, petit-fils de Guillaume, fut père de Philibert, qui épousa Catherine d'Amboise, et qui fit avec elle une donation mutuelle.
Philibert fut baron de Linières et d'Amplepuis, comme son père, et seigneur de Chaumont, d'Alloignet, Meillan, Charenton, Autry, Saint-Trisson, Lamotte-Josserand, Trainel, Thizy, Montmelas, Chamelet, Lay, Ussel, l'Estours, Ranchal, Chavagny-le-Lombard, vicomte de Troyes, chambellan ordinaire de François Ier, et sénéchal d'Auvergne.
Ce Philibert eut un grand procès avec Pierre, duc de Bourbon, et Anne de France, pour les droits qu'il prétendoit sur les pays de Beaujolais et de Dombes, comme dernier mâle de l'illustre famille de Beaujeu, dont il y eut transaction le 5 octobre 1516, qui fut confirmée par Charles, duc de Bourbon, connétable de France, et Suzanne de Bourbon, son épouse, le 24 juillet 1518, par laquelle Mr le duc de Bourbon lui abandonna les seigneuries d'Alloignet, de Lay, d'Ussel, pour tous ses prétendus droits. Il acquit la seigneurie de Thizy du connétable de Bourbon, le 20 avril 1522. Le 8 juin 1524, il acquit la seigneurie de Montmelas, de Claire de Villars, veuve de Philippe du Croset, écuyer, seigneur de Greynieu, tutrice de leurs enfants. Il mourut environ l'an 1542, sans laisser d'enfants de Catherine d'Amboise, son épouse, fille de Charles d'Amboise, chevalier, seigneur de Chaumont, et de Catherine de Chauvigny, qu'il avoit épousée le 10 novembre 1501.
Elle étoit veuve de Christophle de Tournon, chevalier, seigneur de Beauchâteau, fils de Jacques, seigneur de Tournon, chevalier, conseiller et chambellan du roi, sénéchal d'Auvergne. Leur mariage est du 11 août 1497. Elle se maria en troisièmes noces à Louis de Clèves, comte d'Auxerre, et lui avait donné « en faveur de leur mariage, les seigneuries d'Amplepuis, des Tours et de Ranchal ». Louis était le fils d'Engilbert de Clèves, comte de Nevers, Rhetel et d'Auxerre, et de Charlotte de Bourbon-Vendôme.
La succession de ce seigneur de Beaujeu fut contestée par diverses personnes; Catherine d'Amboise, sa veuve, demandoit les seigneuries d'Amplepuis, l'Estours, Ranchal, Chavagny- le-Lombard, qui étoient les biens propres de Philibert de Beaujeu. Elle prétendoit encore les acquêts par lui faits d'Alloignet, Chamelet, Lay et Ussel, en vertu d'une donation qui lui en avoit été faite le 4 février 1540. Elle prétendoit, avec Antoinette d'Amboise, dame de Barbesieu, sa sœur, et avec Georges de Créqui, chevalier, seigneur de Ricey, une partie des biens provenus de la maison de Linières.
D'un autre côté, Antoine de Choiseuil, baron de Langres, Philibert de Choiseuil, abbé de Beaulieu, Benigne de Choiseuil, dame de Venières, Madeleine de Choiseuil, dame de l'église de Remiremont, Jean de Choiseuil, seigneur de Chévigny, et Anne de Choiseuil, sa femme, et Alix de Choiseuil, veuve de Nicolas de Choiseuil, baron de Charron et de Pralin, demandoient sept parts dans la succession des biens provenus de l'état de Beaujeu, comme descendants de Louise de Sully, fille de Marie de Beaujeu et Guillaume de Sully.
Antoine de Sully, écuyer, seigneur de Lurcy, Catherine de Sully, sa sœur, descendants de Pierre de Sully, et Pierre de Verges, écuyer, seigneur du Plessis, yprétendoient aussi leurs parts; Pierre de Barton, vicomte de Montbas, fils de Marie de Sully, Pierre Barton, seigneur de Lubignac, François Barton, baron de Fayoles, Jean Barton, évêque de Leyloure, François Barton, abbé de Saint-Augustin, Roland Barton, abbé de Sallières, Marie Barton, dame de l'Ile-en-Jourdain, Anne Barton, dame de Brillebaud, et Marguerite Barton, dame de Saint- Vaulais, ses enfants, y prôtendoient sept portions, lesquelles ils vendirent le 19 juillet 1577, à Ludovic de Gonzagues, prince de Mantoue, duc de Nevers, et à Henriette de Clèves, son épouse, qui avoit recueilli la succession de Louis de Clèves, comte d'Auxerre, son grand oncle, héritier de Catherine d'Amboise, sa femme.
Le duc de Nevers, voulant conserver ces biens, eut procès avec les descendants de MM de Choiseuil et de Sully, dont nous avons parlé, qui obtinrent un arrêt au parlement de Paris, qui leur adjugeoit la moitié de la succession de Philibert de Beaujeu, contre lequel Mr de Nevers ayant obtenu requête civile, qui fut évoquée au conseil du roi et renvoyée au parlement de Rouen, les juges se trouvèrent parties et le partage renvoyé au parlement de Grenoble, qui adjugea à Mr de Nevers toutes les terres du Beaujolais.
Ce duc vendit, en 1578, les terres d'Amplepuis, Thizy, la Goute, Chavagny-le-Lombard, Thil, Ranchal et autres terres, à Claude, seigneur de Rebé, qui vendit le fief de Rochefort, la paroisse des Sauvages et partie de celle d'Amplepuis au seigneur d'Auxerre, premier président au parlement de Toulouse, des héritiers duquel Benoit de Pomey, conseiller du roi, ancien président au bureau des finances à Lyon, l'acquit en 1611, auquel a succédé Hugues de Pomey, son neveu, prévôt des marchands de Lyon. Thizy resta dans la maison de Rebé jusqu'en 1614, qu'il fut vendu à Guichard Favre, conseiller du roi, trésorier des parties casuelles, qui en étoit originaire. Ses héritiers la vendirent à Renaud de Crémeaux, seigneur de la Grange et de Saint Verain, qui la laissa à Claude de Crémeaux, son fils (Louis Aubret, Marie Claude Guigue, Mémoires pour servir à l'histoire de Dombes, Volume 2, 1868).
Petit-neveu de l'archevêque, Claude de Rebé acheta en 1646 la baronnie de Couiza à la dernière héritière des Joyeuse, Henriette Catherine, duchesse de Guise. La seigneurie d'Arques, qu'il acquit en même temps, lui donnait droit de prendre place aux États de Languedoc (fr.wikipedia.org - Claude de Rebé).
L’archevêque était le second fils de Claude seigneur de Rebé, qui acheta les seigneuries de Thizy et d'Amplepuis, et de Jeanne de Meizé, et petit-fils de François de Faverges, auquel Jean de Merle son oncle maternel donna les terres de Rebé et de Chenevoux, à condition de prendre le nom de Rebé. Il avait pour frère aîné Zacharie seigneur de Rebé, baron d'Amplepuis duquel font descendus les autres seigneurs de Rebé, barons d'Amplepuis, marquis d'Arques, dont l'héritière, nommée Marie-Josèphe de Rebé, a épousé le 30 mars 1707; Leonor du Maine, marquis du Bourg, mettre de camp du régiment Royal cavalerie, brigadier des armées du Roy.
L’archevêque vivait le plus souvent à Paris, fréquentant, chez son parent le comte de Rebé, une société choisie où l'on voyait figurer, à côté de Godeau, évêque de Vence; Jean de Lingendes, évèque de Màcon, Guy Patin, le très caustique historien des grands et menus événements de ce temps (Louis Alexandre Expilly, Dictionnaire géographique, historique et politique des Gaules et de la France, 1761).
Un 17 novembre
En 1566, très puissante princesse et dame Henriette de Clèves, duchesse de Nivernais, femme de Ludovic de Gonzague, mit en vente les terre, seigneurie, baronnie d'Amplepuis, ayant titre de première baronnie du pays de Beaujolais.
Le 17 novembre 1567, Ludovic de Gonzague, duc de Nivernais, comte de Réthelois et d'Auxerre, pair de France, seigneur baron des terres et seigneuries d'Amplepuis, Thel, Ranchal, Thizy et Chevagny-le-Lombard, assises au pays de Beaujolais, se trouvant à Lyon, de retour d'un voyage en Piémont pour le service du Roi, Jullio Reste, gentilhomme milanais, demeurant à Lyon, se présenta devant lui et lui offrit la somme de 46.000 livres tournois des terres d'Amplepuis, Thel, Ranchal, la Goutte et dépendances, payables trois mois après que Mgr le duc de Nivernais et Mme la duchesse, sa femme, Henriette de Clèves, auraient obtenu arrêt définitif, à leur profit, contre Antoine de Choiseul, baron de Lauques ; en attendant l'issue de ce procès, ledit Reste offrit payer auxdits duc et duchesse annuellement à Paris, pour le revenu de ces terres, 1500 livres tournois, ce que le duc accepta.
Le samedi 17 janvier 1568, à Amplepuis, sous la halle dudit lieu, pardevant Claude Cognaud, docteur ès droits, juge ordinaire de la baronnie d'Amplepuis, comparut Estienne Reste, gentilhomme milanais, comme procureur spécialement fondé de Jullio Reste, son cousin, habitant à Lyon, baron dudit Amplepuis, la Goutte Thel et Ranchal, lequel, audit nom, prit et appréhenda la vraie, réelle, actuelle et corporelle possession desdites seigneuries, par le ministère dudit Claude Cognaud, en présence de la plus grande et saine partie des sujets et habitants de cette baronnie, pour lui servir et valoir en temps et lieu comme de raison, avec défense de l'y troubler, molester ou empêcher.
Le 22 juillet 1573, Etienne Reste, héritier par bénéfice d'inventaire de Jullio Reste, son cousin, était baron d'Amplepuis.
Le 5 juin 1574, Henriette de Clèves, duchesse du Nivernais, était rentrée en possession des seigneuries d'Amplepuis et de la Goutte et nommait son procureur noble maître Guillaume de la Perrière, son secrétaire et du duc son mari (Paul de Varax, Histoire d'Amplepuis: depuis l'époque gauloise jusqu'en 1789, 1896).
Saint-Symphorien-de-Lay, du Bellay et Rabelais
Saint-Symphorien-de-Lay a vu son importance et sa prospérité croître dès le XVème siècle, quand la route "royale" de Lyon à Paris, fixée jusque là et depuis le XIIème siècle sur l'itinéraire de Lyon, Amplepuis, Thizy, Marcigny pour éviter faute de ponts, deux passages de la Loire, emprunta l'itinéraire de l'Arbresle, Tarare, St-S"Saphorin" et Roanne.
En mars 1949, en tirant du sable d'une carrière sur le bord d'un chemin, commune de Lay, arrondissement de Roanne (Loire), on a trouvé un trésor de 1.127 deniers romains d'argent. La plus ancienne pièce est un denier de Marc Antoine Légion VI, la plus récente un denier d'Alexandre Sévère (n° 173 de Cohen et 160 de Mattingly), émise d' après Mattingly entre 222 et 228. La plus grande partie de ce trésor date de Caracalla et Élagabale. Il ya onze empereurs représentés et trois impératrices. Ce trésor, probablement contenu dans une capsa cylindrique, était caché sous le sol d'une maisonnette, qui devait servir de poste de garde (Revue archéologique, 1950).
Ancien poste militaire romain, place forte importante au Moyen Age, avaec un château attesté dès le XIème siècle, possession de la puissante famille de Lay dont le plus célèbre représentant est connu à cause de ses conflits qui l'opposèrent au monastère de Savigny. Au XIIème siècle ses descendants vendirent à Guichard de Beaujeu. Située à l'extrémité du Beaujolais, sur les confins du Forez, Lay fut souvent le théâtre de combats qui opposaient les sires de Beaujeu et les comtes de Forez. Elle passa aux Bourbon et retourna à la Couronne en 1549.
Sous le règne de François Ier, Charles de Bourbon et Anne de France, qui possédaient la châtellenie de Lay, la délaissèrent à Philibert de Beaujeu Lignières pour le désintéresser de ses prétentions sur le Beaujolais. Philibert la donna à sa femme, Catherine d'Amboise, qui en jouit paisiblement jusqu'à sa mort, arrivée en 1549. Elle était elle-même poétesse. Henri II, qui régnait alors, s'empara de Lay sous prétexte qu'elle faisait partie des biens paraphernaux. Le 7 juin 1558, les commissaires royaux vendirent la justice de Lay à noble Jean Dufournel, mais avec faculté de rachat, faculté qui fut exercée trois ans plus tard, le 15 janvier 1561, par le duc de Montpensier, seigneur du Beaujolais.
Au milieu du XVIIème siècle, Lay était toujours le chef-lieu d'une châtellenie qui comprenait, outre la ville de Lay, le gros bourg de Saint Symphorien, le village de Sainte-Marguerite de Neaux et partie des paroisses de Boisset, Fourneaux, Saint-Just-la-Pendue, Sainte Colombe, Neulise, Vendranges, Croizet, Chirassimont, Machézal, Saint-Cyr-de-Valorges et Chambost- Longessaigne. Cette châtellenie appartenait alors à Mlle de Montpensier, cousine de Louis XIV, appelée dans les documents du temps la Grande Mademoiselle. Toutefois, les droits féodaux et les droits de justice ne rapportaient plus les beaux deniers d'autrefois parce que certaines seigneuries avaient été engagées et que plusieurs justices seigneuriales avaient été soustraites à la juridiction ordinaire.
Au XVIIème siècle, le faubourg était devenu aussi important que la ville et comptait comme elle de cinquante à soixante feux ; et comme les jours des cinq grandes foires, le terrain attribué en ville aux marchands forains était trop exigu, on avait dû reléguer au faubourg les saltimbanques, charlatans, comédiens et diseuses de bonne aventure accourus en grand nombre.
La mort de Guillaume du Bellay
Suite à la mort du pape Paul III, le 10 novembre 1549, Henri II écrit une lettre à Urfé, de Paris le 18 novembre 1549, dans laquelle il annonce le départ, le 17 novembre, des cardinaux de Guise, Vendôme, Jean du Bellay, Châtillon afin de participer au conclave (Daniel Cuisiat, Lettres du cardinal Charles de Lorraine (1525-1574), 1998).
Le Cardinal Du Bellay reprend le chemin de Rome au mois d'avril 1553 parce qu'Henri II a besoin d'un homme expert pour négocier avec Jules III. Joachim, qui voit ses rêves se réaliser, est engagé à le suivre et, après être passé par Lyon, les Alpes, il arrive à Rome en juin 1553. En tant qu'intendant et gentilhomme suivant, il a géré la lourde organisation d'un somptueux palais et accompagné le Cardinal dans ses différentes obligations. Il a donc participé à la vie romaine, politique et religieuse, troublée à l'époque par les rivalités espagnole et française dont Les Regrets nous laissent un tableau satirique. Le cardinal du Bellay avait été chargé de négocier avec Jules III, puis d'œuvrer en faveur du renouvellement de la trêve signée entre Henri II et le Pape le 16 avril 1552. Mais, après l'élection de Marcel II dont le pontificat ne dure que 21 jours, celle de Paul IV signe la disgrâce du cardinal: il n'a pas observé les recommandations d'Henri II lors du conclave de 1555 qui fit de Giovanni Pietro Caraffa le pape Paul IV mais a préféré soutenir, au lieu du cardinal d'Este, celui qui va le nommer doyen du Sacré Collège et évêque d'Ostie. Aussi est-il bientôt déchargé de ses fonctions par Jean d'Avanson, chef de la délégation française auprès du Saint- Siège et ensuite par le cardinal de Lorraine, envoyé en mission à Rome. De plus, le neveu du Pape, Carlo Caraffa ayant appris les relations qu'il entretient avec le cardinal Carpi du parti impérial, va le desservir auprès du pape, hostile à cette tendance. Celui-ci veut en effet délivrer l'Italie des espagnols et, pour cela, cherche l'appui des français. La trêve de Vaucelles (15 février 1556) est finalement rompue par la France en septembre de la même année et les troupes de Monluc et de et de Strozzi répondent à l'appel du pape. François de Guise, attiré par Naples, arrive à son tour. Mais, à la suite de difficultés et de revers, il est bientôt contraint, après le désastre de Saint- Quentin (10 août 1557) de regagner la France où de nouvelles hostilités s'étaient déclarées avec les impériaux depuis le début de l’année. Le pape se voit donc obligé de traiter avec l'Espagne. Dès lors, la France n'a plus de rôle à jouer en Italie et, tandis que le cardinal du Bellay reste exilé à Rome où il mourra en 1560 (Françoise Argod-Dutardn, L’écriture de Joachim Du Bellay, 2002).
Guillaume du Bellay, frère du cardinal, seigneur de Langey, avait beaucoup de maladies et d'infirmités. Il demanda à être relevé de son gouvernement du Piémont, et, ayant obtenu son congé, il revint en France, porté en litière. Il mourut au mont de Tarare, entre Lyon et Roanne, le 9 janvier 1543, à l'auberge de la Tête-Noire, à "Saint Saphorin". Catherine d'Amboise en détenait la seigneurie en même temps qu'Amplepuis. Rabelais fut présent à la mort de Guillaume (il convoiera le corps, jusqu'au Mans, par étapes, derrière les chevaux : le récit de l'agonie de Guillaume de Langey fera un des plus belles et mystérieuses pages du Quart-Livre) (François Bon, Agrippa d'Aubigné, variations sur l'écriture et la biographie) :
"amys, domesticques du deffunct, tous effrayez, se regardaient les uns les aultres en silence, sans mot dire de bouche, mais bien tous pensans et prévoyons que de brief seroit France privée d'ung tant parfaict et nécessaire chevalier à sa gloire et protection" (Pantagruel - Livre IV - chap. 27).
Devant les douleurs terribles que rien ne peut calmer, l'ambiance est lourde. Le seigneur de Langey garde toute sa connaissance. L'angoisse d'une nuit trop longue débouche sur un petit matin blafard.
"Les troys et quatre heures avant son décez, il employa en parrolles vigoureuses, en sens tranquil et serain, nous prédisant ce que depuys, part avons' veu, part attendons advenir" (Pantagruel Livre III - chap. 21).
Quelques années plus tard, le cousin de Guillaume, Joachim du Bellay franchit à son tour nos collines. S'arrêtant lui aussi à St Symphorien, il y prend la couchée et y compose un sonnet sur la mort du grand Langey (http://saintsymphoriendelay.kazeo.com - Rabelais et la mort de Guillaume du Bellay).
D'VN SONGE QV'lL FEIT PASSANT A S. SAPHORIN.
Triste & rongé du soing qui plus me nuict,
Pour le regret qui m'englace, & m'allume,
Ie retournois fur l'hosteliere plume,
Mes membres las fous l'horreur de la nuict :
Quand le courrier, qui les vmbres conduict,
Deuant mes yeux, qu'en pleurant ie consume,
Feit apparoir plus grand que de coustume.
Ce grand Langé qui par les astres luict.
Lors effroyé de voir telle merueille,
Tout treffuant en sursaut ie m'efueille.
Ha (dy-ie lors) voicy le mefme lieu,
Où de l'Angé l’esprit inimitable,
Esprit fur tous à Charles redoutable,
Laissa le Roy, pour s en aller à Dieu.
(œvvres françoises de loachim Dv Bellay, gentilhomme angevin, avec une notice biographique et des notes, Volume 1, 1866).Chamard émet l'hypothèse raisonnable que le sonnet fait référence à l'escale que fit le poète à Saint-Symphorien en 1553 lors de son voyage en Italie. N'oublions pas cependant que Chamard a rassemblé cette série de sonnets posthumes de recueils divers ; par conséquent, ni l'ordre chronologique ni la date de composition ne peuvent être certains.
La version définitive du Quart Livre parut un an environ avant l'escale de Joachim du Bellay à Saint-Symphorien; la mort de Rabelais était d'ailleurs survenue un mois avant cette escale, si on accepte la date proposée par Jean Dupèbe.
Dès le chapitre 21 du Tiers Livre, la figure de Langey participe aux domaines naturel et surnaturel. Selon Pantagruel, il avait atteint en 1543 un âge symbolique, «le climatere». Le mot grec klimaktèr veut dire «degré», «échelle»: il indique donc le point critique d'un passage entre deux états, une frontière ou une région limitrophe. En effet, il s'agit dans tous ces épisodes d'un double passage, de la vie à la mort, et du niveau humain au niveau angélique. Ce moment est présenté également comme un tournant décisif pour la France, tournant que prévoit déjà Langey grâce au don prophétique que lui assure son statut d'agonisant: «les troys et quatre heures avant son décès il employa en parolles vigoureuses... nous praedisant ce que depuys part avons veu, part attendons advenir. » (Tiers Livre, p. 153). Il faut préciser que Langey figure dans cet épisode exclusivement comme un homme mortel, et non comme un surnaturels (Héros, Anges) qui, dans l'exposition de Pantagruel qui précède ce passage, accueillent et consolent les hommes mourants, leur communiquant l'art de la prophétie. Dans le Quart Livre, il apparaît à nouveau comme un des grands hommes dont la mort est accompagnée de mauvais présages ou d'autres perturbations. Cette fois, en revanche, Pantagruel utilise l'épithète «Héroïque» d'abord pour les âmes de ces grands hommes décédés, ensuite pour celle de Langey. Cette « promotion» de Langey au rang de Héros le fait participer lui-même au surnaturel proche; inversement, la catégorie de Héros en devient moins théorique, plus accessible à ceux qui habitent le monde sublunaire (Terence Cave, Pré-histoires, Cahiers d'humanisme et Renaissance, 1999).
Joachim du Bellay, Rabelais et Pic de la Mirandole
Comme le note G. Gadoffre, déjà en 1554 Du Bellay avait dit son admiration pour l'enfant prodige de l'humanisme italien, le divin Picus, dans un poème « Sur la mort de la Signora Silvia Mirandola » :
Tu es donques enclose en ce petit tombeau,
Et tout ce que le ciel en toy monstra de beau,
La vertu, le sçavoir, la jeunesse et la grace,
Et la merveille encor' du surnom de ta race,
Les pleurs de ton espoux, et de tes sœurs aussi,
N'ont sceu mouvoir la Mort, ni les Dieux à merci.
Mais quiconques voudra egaler ta louange
Par ses vers, ô Sylvie, il faudra qu'il se change
En ce divin Picus, honneur de tes aveux,
Le Phœnix de son temps, cogneu jusques aux cieux
Duquel, comme Italie, et tout le monde encore
Les immortels labeurs lit, apprend, et adore,
Ainsi nostre François studieux de ton Nom,
Envoyra jusqu'au ciel le bruit de ton renom.
Et pour avoir jadis allaicté ton enfance,
Superbe à tout jamais se vantera la France,
Ou soit qu'elle raconte avec l'honnesteté
Ta grace egalement joincte a la chasteté,
Soit la grandeur de cœur, la sagesse avant l'âge,
Et dans un corps de femme un virile courage.
(Joachim Du Bellay, Léon Séché, Oeuvres complètes: Recueil de poésie, suivi des Divers poèmes, Des amours et de Sonnets divers, Volume 2, 1549).Plus qu'en héros du cycle arthurien, Pantagruel nous apparaît, dans les chapitres V et XV de l’editio princeps de la Chronique qui porte son nom, sous les traits de l'un de ces scholastici vagabundi, de ces « clercs vagans » si nombreux au Moyen age et à la Renaissance. Plus spécifiquement, lui aussi « abysme de science » et « Phénix de son âge », il se présente comme un nouveau Pic de la Mirandole, un Ficus redivivus.
Pantagruel, en bon fils et en digne successeur de Pic, hante les bibliothèques et les « gens lettrez » de Paris, subit sans faiblir le cursus studiorum alors en vigueur, affiche ses omniscientes conclusions par tous les « quadrivies de l'urbe », et les soutient « publiquement, envers tous et contre tous », dans la plus pure tradition scolastique. Non pas, comme Balde, doctus Martis in arte, mais, comme Pic, Magister, « sçavant dessus la capacité de maintenant », et adepte de la « norma dicendi pari- siensis », du « celebratissimorum Parisiensium disputatorum dicendi genus ».
Il suffit, en effet, de comparer le Pantagruel à la Ioannis Pici Mirandulae viri omni disciplinarum génère consumatissimi vita, telle qu'elle a été rédigée en 1498 par son neveu Jean- François, et telle qu'elle a ensuite été traduite en anglais aux environs de 1510 par Thomas More, pour se convaincre que Rabelais connaissait parfaitement Pic de la Mirandole, et que la vie et l'œuvre de l'Humaniste florentin ont constitué pour lui une source d'inspiration non négligeable. Sans parler ici des allusions littérales, aussi exactes qu'explicites, que contient le Pantagruel à Pic de la Mirandole, on remarquera d'abord que, comme il convient à deux personnages appelés à un destin extraordinaire, leur naissance s'accompagne de signes et de prodiges.
Si le rapprochement Pic-Pantagruel doit nous apprendre quelque chose, c'est que la Renaissance n'a d'abord nullement cherché à rompre avec le Christianisme, à exalter, voire même à « diviniser » les pouvoirs humains. Certes, Panurge affirme dans le Pantagruel qu' « autant vaut l'homme comme il s'estime ». Et Pic, dans son De Hominis dignitate, déclare que l'homme se fait ce qu'il veut être, qu'il « se feint, fabrique et transforme », qu'il est, pour reprendre les formules mêmes de la traduction de Guy Lefèvre de la Boderie, « arbitre, entailleur et peintre de soy-mesme ». Mais que Panurge soit le porte- parole de Rabelais, décidément rien n'est moins sûr. Et avant d'incarner l'idéal évangélique humaniste et de mourir aux portes d'un couvent, Pic fut, nous l'avons vu, un avocat éloquent des valeurs et de la philosophie scolastiques. Ce qui au contraire est patent, c'est que l'itinéraire spirituel de Pic le conduit des hommes à Dieu, c'est que, comme le montre l'attitude franchement réticente du nouvel Humanisme à l'égard du rationalisme arrogant et glorieux qu'il manifeste lors de l'épisode romain des 900 thèses, la Renaissance est d'abord née d'une réaction des consciences et des cœurs contre l 'hyper-intellectualisme du siècle. Plus que de raison, le xvie siècle naissant a soif d'amour et de charité. Il se soucie bien plus de croire que de comprendre. Voir en Pantagruel un Picus rediuiuus, un nouveau Pic de la Mirandole, c'est donc, au fond, tout en remettant une fois de plus radicalement en question l'interprétation traditionnelle du chapitre VIII, reconnaître l'appartenance de Rabelais à ce fort courant de scepticisme chrétien qui, d'Érasme à Montaigne, traverse tout le XVIème siècle (Defaux Gérard. Deux paraboles de l'humanisme chrétien: Pantagruel et Pic de la Mirandole, 1978).
Pantagruel est le premier livre de François Rabelais publié en 1532, et dont le titre complet est Les horribles et épouvantables faits et prouesses du très renommé Pantagruel Roi des Dipsodes, fils du Grand Géant Gargantua. Le personnage éponyme du livre, le géant Pantagruel, apparaît également dans Le Tiers Livre, Le Quart Livre et Le Cinquième Livre (fr.wikipedia.org - Pantagruel).
La Défense de la langue française
Le plus célèbre et le plus averroïste de tous les averroïstes juifs est précisément Lévi ben Gerson (1288-1344), originaire de Bagnols-sur-Cèze et auteur du Sefer ha-Baqbuq.
Ce philosophe est surtout connu pour son ouvrage de métaphysique, les Guerres du Seigneur, pour ses ouvrages mathématiques manifestant son intérêt pour l'Harmonie et le Nombre, pour ses pronostications et surtout pour ses commentaires des commentaires d'Averroès sur Aristote, traduits en latin par Abraham de Balmes (1460-1523) et Jacob Mantinus (mort en 1549) dans les différentes éditions des oeuvres complètes d'Aristote (Giunti, 1550, 1552, etc.). Or ces deux savants médecins sont des figures importantes de l'averroïsme juif padouan. Le premier a écrit une grammaire de l'hébreu de type philosophique et inspirée de Profiat Duran, publiée à Venise chez Daniel Bomberg. Le second, venu de Padoue et médecin personnel de Paul III, enseignait à Rome entre 1538 et 1541. Les autres personnalités juives que Rabelais pouvait avoir connues directement ou par leurs publications étaient des aristotéliciens hostiles à la kabbale pratique comme Elijah del Medigo (averroïste padouan notoire et ami de Pic de la Mirandole), ou favorables à elle comme Johanan Alemanno (également ami de Pic) et Leo Abravanel ou Léon l'Hébreu. Marie-Madeleine Fontaine rappelle l'existence de contacts entre Rabelais, les Padouans et les Vénitiens cicéroniens (bembistes et spéronistes). Même si Rabelais n'est jamais allé à Venise, les multiples éditions des textes averroïstes étaient à la disposition des lettrés, et, pour beaucoup, en latin. Toutes ces dates d'édition concordent et se placent dans ces années 1550- 1553.
Quel était l'apport spécifique des averroïstes juifs? Ils prônaient l'éternité du monde, sauf Kalonymos ben David le jeune qui a écrit un traité contre cette idée et a néanmoins collaboré avec Abraham de Balmes chez Bomberg. Ils soutenaient le déterminisme astral et une morale de l'intention ; de plus, ils niaient l'élection d'Israël, et ont été accusés de répandre une idéologie proche des conversos. Il n'est pas très étonnant alors qu'un texte parodique (sans irrévérence) ait pu naître dans une atmosphère intellectuelle favorable à la philosophie.
De Gersonides, Rabelais pouvait avoir eu connaissance des commentaires sur Aristote en latin, mais les commentaires sur la Torah, les Guerres du seigneur et le Sefer ha-baqbuq n'étaient pas traduits. Cela une fois constaté, il ne faut pas oublier que dans les années 1550 les hébraïsants ne manquaient pas, ni à Rome, ni à Paris. Il serait satisfaisant de savoir si, et comment, Rabelais a pu avoir connaissance du Livre de la Bouteille.
Si l'on prend le critère de fréquence des mots hébreux, on peut constater que celle-ci est la même pour le Pantagruel (à condition, bien entendu, de mettre à part l'hébreu du chapitre IX), Gargantua, le Tiers Livre, le Quart Livre de 1548 et l'Ile Sonnante. Quelle que soit la date de composition de cette dernière, il apparaît que Rabelais est revenu à l'hébreu entre 1548 et 1552, d'une manière assez différente de celle qui était la sienne dans les écrits antérieurs.
En tenant compte des études de Lazare Sainéan, Michel Bastiaensen et plus récemment de Katia Campbell, cette réinjection de l'hébreu dans le Quart Livre de 1552 correspond à une utilisation plus nettement fictive et ludique de la langue sainte. Dans les livres précédents, l'hébreu apparaissait sporadiquement, en liaison avec des questions exégétiques (l'épisode des pardons du Pantagruel, par exemple) comme la Massorah. Le réemploi de mots hébreux dans la dernière période de production rabelaisienne montre au contraire une volonté de détournement des mots hébreux par la transformation notable de noms communs en noms propres, comme dans Bacbuc. Les noms des officiers de la Quinte (Cinquième Livre, ch.19), et l'onomastique du Quart Livre de 1552 en témoignent.
Comment justifier un retour aussi marqué à la langue biblique? Le premier argument serait d'ordre historique, le deuxième d'ordre littéraire et le troisième d'ordre philosophique.
Sur le plan historique, la période qui concerne ces remaniements et ajouts s'étend sur les dernières années de la vie de Rabelais et son ultime voyage en Italie de 1548 à 1549. On sait que Rabelais a remis, en passant à Lyon, le manuscrit du Quart Livre de 1548, dont on ne connaît pas le mois de parution selon R. Marichal. Le 14 mars 1549, il est encore à Rome puisqu'il assiste à la Sciomachie et il serait revenu de Rome en septembre 1549. Dès son retour, il doit subir les attaques de Gabriel Du Puy-Herbault et de Calvin contre son «épicurisme» et son «athéisme». Ensuite, il vit probablement à Saint-Maur (1550) au moment où la crise gallicane est particulièrement aiguë : l'affaire de Parme éclate en 1551 quand Jules III veut donner cette ville à l'Empereur. On connaît la campagne «anti-papale» que mène le Quart Livre, avec ses Romipètes, ses Papimanes etc. Le Cinquième Livre poursuit (ou mène en parallèle?) le même combat. Or on peut rapprocher cette politique antifrançaise du pape de sa politique antijuive qui aboutira à l'interdiction de tous les livres hébreux et de leur impression en Italie (août 1553). Précisément, les années 1517-1552 avaient été florissantes pour l'imprimerie hébraïque, notamment à Venise avec les Bomberg, Marc-Antoine Giustiniani et des imprimeurs juifs ou convertis comme les Adelkind. Rabelais, qui avait rapporté les exactions du roi de Portugal contre les juifs expulsés, pourrait avoir réuni dans une réaction commune contre l'autorité papale la cause gallique et la cause juive. En ce cas, l'utilisation marquée de mots hébreux dans un ensemble avant tout hellénisant, serait une sorte de provocation contre l'intolérance. Que penser en effet de ce titre, accordé peut-être par un pseudo-Rabelais, à Bacbuc, celui de Pontife ? La papesse de la Bouteille reste fidèle aux intentions du Quart Livre, avec de notables inflexions protestantes. Comme l'écrivait avec justesse V.-L. Saulnier à propos du Cinquième Livre, «on dirait d'une création déviante». Cette façon de s'approprier l'hébreu n'est pas un nouveau mode de judaïser : elle se place moins sur le plan religieux que sur le plan politique, linguistique et philosophique.
En même temps Rabelais, qui défend la langue gallicane, participe à l'enrichissement de la langue vemaculaire par tous les moyens, dont l'emprunt. Or le passage par le nom propre n'est pas la meilleure façon d'opérer cette assimilation. Au contraire, les noms propres étrangers (même s'ils étaient noms communs à l'origine) restent avec leur étrangeté. Ni la Belimah ni les Razinuens ne sont passés dans la langue courante. Ni Bacbuc. Le nom propre garde la singularité du mot et de la langue à laquelle il appartient. L'auteur prend à l'envers les préceptes de la Deffence et Illustration de la langue françoyse en farcissant son texte de mots dont le rôle est de participer à la signification sans s'y intégrer complètement (Demonet-Launay Marie-Luce. Le nom de Bacbuc, 1992).
L'arrêt du parlement, du 17 novembre 1548, qui confirma le privilège des confrères de la Passion, lors de leur entrée à l'hôtel de Bourgogne, leur interdit la représentation des mystères, et ne leur permit d'offrir au public que des sujets profanes, licites et honnêtes (Artaud de Montor, Encyclopédie des gens du monde, Volume 6, 1836).
Trois mois après, du Bellay, dans la Défense, faisait ainsi appel au jeune poète de l'avenir : « Quant aux comédies et tragédies, si les rois et les républiques les voulaient restituer en leur ancienne dignité, qu'ont usurpée les farces et moralités, je serais bien d'opinion que tu t'y employasses, et si tu le veux faire pour l'ornement de ta Langue, tu sçais où tu en doibs trouver les Archetypes ».
Des Zacharie
Outre Zacharie de Rebé, fervent soutient d'Henri IV, on trouve un Zacharie dans le prieuré de Saint-Victor-sur-Rhins, et un abbé à Savigny.
De 1382 à 1406, les visiteurs répètent inlassablement qu’il n’y a qu’un moine à et qu’il en faut deux. Ils rappellent le précepte qu’ « un moine ne doit jamais être seul ». Les visiteurs s’occupent spécialement de la conduite des moines. Durant cette dernière période, on ne relève à St Victor qu’une défaillance : « Un moine nommé Zacharie Malvesin est accusé de vol et d’incontinence. Il est parti récemment de nuit de St Victor en emmenant avec lui le palefroi du sacristain, et on ne sait où il a été ni où il a emmené le cheval ». Le Chapitre décide que quiconque de l’ordre le retrouvera, le conduise ou le fasse conduire à Cluny pour y être emprisonné (saintsymphoriendelay.kazeo.com - Un prieur).
Saint-Victor-sur-Rhins possède un bréviaire manuscrit datant de 1317, qui nous apprend comment les moines priaient chaque jour. Il présente une richesse de textes et de chants, de lettrines et miniatures. Cet ouvrage est classé (www.stvictorsurrhins.fr - Bréviaire).
Le bréviaire de Saint-Victor-sur-Rhins constitue de par sa rareté, sa beauté et son exceptionnel état de conservation, un témoin fabuleux du « scriptorium » (lieu ou les moines chargés des enluminures et manuscrits travaillaient) de l’Abbaye de Cluny dont dépendait le prieuré de Saint-Victor-sur-Rhins.
Etymologiquement, le mot « bréviaire » vient du latin "brévarius - abrégé". C’est condenser un document contenant toutes les offices de l'année. A partir du XI° siècle, le bréviaire est nécessaire pour les communautés réparties dans toute la France et qui n'ont pas une riche bibliothèque, comme dans les abbayes. Il est en même temps : lectionnaire (livre de textes latins), psautier (livre de cantiques) et antiphonaire (inscription musicale des chants).
Le bréviaire est en général un livre contenant tous les offices de l'année liturgique. Celui-ci porte comme inscription : « donné à l’église de Saint Victor en 1317, par Dom Guillaume de Montagny », alors sacristain de Cluny et patron de cette maison. Pour le salut de son âme et à charge pour les moines de célébrer à perpétuité, chaque semaine une messe à son intention.
Il est constitué de 625 folios de manuscrits sur parchemin. Plus de 60 peaux de moutons ont été nécessaires pour sa confection. Les dimensions du document sont de 340 x 240 et l'épaisseur est d'environ 150 mm. Le texte est écrit sur deux colonnes par folio ayant 31 lignes manuscrites. L'écriture gothique, est très régulière et datée du XIIIème siècle. La notation musicale est carrée et se fait sur quatre lignes rouges et aux chants grégoriens. Les majuscules sont rouges ou bleues ornées de filigranes. Certaines sont décorées de miniatures, représentant des scènes bibliques en couleurs, rehaussées d'or (enluminures). Un passage concerne le coutumier ; ce texte règle les différents rapports entre le curé de la paroisse et le prieur du prieuré de Saint-Victor.
Le bréviaire de Saint Victor est resté très longtemps à l’écart des chemins fréquentés par les historiens. Il a été étudié dans le mémoire présenté par Pascal Colomb, mais auparavant Joseph Déchelette (historien et archéologue, fils d’Eugène Déchelette) et Joseph Folliet ont signalé ce chef d’œuvre classé « monument historique » depuis déjà 1906.
Pour ce qui est de la date de rédaction de ce livre, la datation a été faite en examinant en détail sa composition. L’indice principal est l’absence de la fête de Saint Louis. Ce roi de France ayant été canonisé en l’an 1300. Il est donc indéniable que l’exécution de cette œuvre a été faite avant cette date.
Ce travail nécessitant des années, on peut dire avec certitude que le bréviaire de Saint-Victor-sur-Rhins date de 1285/1295, soit du XIIIème siècle (saintsymphoriendelay.kazeo.com - Le breviaire de Saint-Victor-sur-Rhins).
L’ampleur des destructions et la réoccupation des ruines à l’époque révolutionnaire expliquent que le site actuel de l’abbaye bénédictine de Savigny dont dépendait la cure d’Amplepuis au XIème siècle, ne se prête pas à une lecture immédiate de l’organisation des bâtiments monastiques. L’analyse archéologique des vestiges subsistants et l’exploitation de manuscrits liturgiques inédits ont apporté récemment des données essentielles, dont le croisement apporte un éclairage nouveau sur l’organisation spatiale du monastère roman.
Le liber ordinarius conservé aux archives départementales du Rhône (seconde moitié du XIIIe siècle) représente l'un des très rares témoins de la liturgie de l'abbaye de Saint-Martin-de- Savigny ; l'étude de son texte devrait permettre de dégager les particularismes locaux de son rit liturgique et de ses rituels (processions, etc.) propres (www.ehess.fr/fr).
L'abbaye de Savigny, de faible rayonnement spirituel, fut par contre le centre d'une seigneurie ecclésiastique relativement importante, « deuxième puissance lyonnaise après l'église de Lyon».
Sous l'abbé Zacharie (1234-1244), on signale un relâchement manifeste dans la vie des moines. Ceux-ci sortaient toutes les nuits de l'abbaye, qui comptait alors sept portes, pour se livrer à divers excès de boissons et autres, si bien qu'on en retrouvait au petit matin complètement ivres à Savigny, voire à Sain-Bel. Le pape Grégoire IX, informé, ordonna à l'archevêque de Lyon d'y mettre bon ordre. Ce fut un échec, malgré l'excommunication portée contre l'abbaye. De son côté, l'abbé Zacharie, convoqué à Rome pour répondre de diverses malversations, fut en fin de compte déposé. Les abus ne cessant pas, l'affaire fut reprise en mains par le pape Innocent IV, installé à Lyon entre 1244 et 1251. Il délégua à Savigny le cardinal Hugues de Saint-Cher, qui édicta une série de mesures qui furent efficaces (réduction du nombre des portes, gradation dans les sanctions encourues, du jeune à l'excommunication en passant par la coulpe et l'envoi dans un autre monastère (amis.arbresle.free.fr - Zacharie).