Partie I - Généralités   Chapitre I - Construction   

La création des nonagones est partie d’un travail très localisé, dans le Gard, visant à savoir si la situation des établissements templiers de la région d’Uzès est due au hasard ou si elle pouvait être déterminée géométriquement.

La forme générale du département du Gard est prédestinée car "elle est à peu près celle d'un ennéagone très irrégulier, présentant deux angles rentrants l'un au N.-O., l'autre au S.-O (Emilien Dumas, Statistique géologique, minéralogique, métallurgique et paléontologique du département du Gard 1876)).

Je me suis attardé sur le nonagone, d’une part parce que les résultats étaient plus probants, et d’autre part parce que le 9 avait une importance particulière pour les Templiers.

J’ai construit un nonagone à partir d’un alignement de quatre sites qui sont la chapelle de Maransan, la chapelle Saint-Symphorien de la commanderie de Boussargues, sa jumelle, le dolmen de Vialès et le château La Tour à Saint-Chaptes qui serait templier. La distance de Maransan à la Tour est de 37 kilomètres. Cette distance serait, selon Louis Carpentier, la longueur des étapes effectuées par Hannibal lors de son périple à dos d’éléphant vers l’Italie, selon d'autres auteurs celle d'une étape le long du Rhône : « Les Gaulois qu'on lui a donnés pour guides lui apprennent qu'à environ vingt-cinq milles (37 km) au-dessus le Rhône se partage pour former une petite île, et que là, plus large et partant moins profond, il peut offrir un passage[1] ». C’est à proximité de ce nonagone, vers l’Ardoise au nord d’Avignon qu’Hannibal aurait traversé le Rhône avec ses 37 éléphants. A partir de ce segment je dessine un triangle équilatéral par élévation, ce qui me donne un troisième point près du hameau de Brougnac. Par division des angles j’obtiens un nonagone. Les angles internes font 140° et l’angle au centre 40°.

Puis je dessine un nonagone plus petit, de rayon la moitié de l’autre nonagone, inscrit, auquel je fais effectuer une rotation de 20°.

1)      Sommet du nonagone correspondant au hameau de Freyssinette

2)      Point sur la circonférence du cercle circonscrit au nonagone à 20 ° du point 1), les 20° correspondent à la moitié de l’angle de 40°, secteur du nonagone

3)      Sommet vide sur la commune de Saint-Julien-de-Peyrolas

4)      Point sur la circonférence du cercle circonscrit au nonagone à 20 ° du point 3),

5)      Sommet du nonagone correspondant à la chapelle de Maransan au nord-est de Bagnols-sur-Cèze. Un seigneur de la famille de Marensan fit obturer un puits, séjour d'un coulobre à 7 têtes et 7 queues qui dévastait la région et qui figure sur le blason des Marensan

6)      Point du nonagone du cercle circonscrit à 20° du point 5)

7)      Sommet vide sur la commune de Saint-Victor-la-Coste, à l’est de Pouzilhac

8)      Point sur la circonférence du cercle circonscrit au nonagone à 20 ° du point 7),

9)      Sommet vide sur la commune de Collias

10)  Point sur la circonférence du cercle circonscrit à 20 ° du point 9),

11)  Sommet du nonagone correspondant au château de la Tour, possiblement templier

12)  Point sur la circonférence du cercle circonscrit au nonagone à 20 ° du point 11)

13)  Sommet du nonagone au pied du mont Cavala, nom très suggestif

14)  Point sur la circonférence du cercle circonscrit au nonagone à 20 ° du point 13)

15)  Sommet du nonagone sur la commune de Saint-Julien-les-Rosiers au nord d’Alès

16)  Point sur la circonférence du cercle circonscrit à 20 ° du point 15)

17)  Sommet du nonagone sur la commune de Saint-Brès, au nord de Saint-Ambroix, tout à côté du hameau de Brougnac

18)  Sommet du petit nonagone

19)  Sommet du petit nonagone

20)  Sommet du petit nonagone

21)  Sommet du petit nonagone

22)  Sommet du petit nonagone

23)  Sommet du petit nonagone

Il s’agit maintenant de définir des sites par croisement de deux droites, au moins, définies par d’autres points déterminés de la même manière ou en dernier ressort par des points des deux nonagones. Afin de prétendre que la situation de ces chapelles, châteaux, établissements templiers, ne s’est pas faite au hasard :

24)  Point correspondant à la Maladrerie des Templiers sur un méandre de l’Ardèche, sur le prolongement de la diagonale 5) – 3). La distance de la Maladrerie au point 5) correspond à la mesure d’un rayon du cercle circonscrit au nonagone

25)   Point correspondant précisément à la commanderie de Jalès, croisement des droites issues de l’alignement des points 13 et 17, sommets du nonagone, et des points 1 et 3, autres sommets du nonagone

26)  Point intersection des diagonales 4)-8) et 11)-5) correspondant à la chapelle Saint-Symphorien de la commanderie templière de Boussargues

27)  Point intersection de la diagonale 5)-17) et 4)-7) correspondant à la chapelle Saint-Martin sur la commune de Bagnols-sur-Cèze

28)  Point intersection de la droite 17)-23) et de celle issue du centre et passant par le point 20) et 6) correspondant à la chapelle Saint-Martin de Jussan sur la commune de Tresques, au milieu d’une olivette. La légende raconte qu’à cet endroit, ce serait Pépin le Bref, dont un ruisseau aux alentours conserve le prénom, qui aurait fait construire une chapelle en souvenir d’une victoire sur les Sarrasins, envahisseurs du pays. Les comtes de Voguë ont aménagé un tombeau dans le sol de la chapelle qu’ils ont cédée à la commune en 1976

29)  Point intersection des diagonales 9)-6) et 12)-7) et 4)-8) correspondant à une chapelle en ruine, sur la commune de Pouzilhac, au pied d’une colline surmontée de la statue d’une vierge

30)  Point sur un côté du petit nonagone et traversé par la droite passant par le centre et le point 29) correspondant à la chapelle Saint-Saturnin sur la commune d’Allègre

31)  Point sur la diagonale 5)-11) et sur la droite 15)-30) correspondant au dolmen de Vialès sur la commune de Cavillargues

32)  Point sur le côté du petit nonagone 20)-22) et sur la droite 13)-22)-31) correspondant à la chapelle Saint-Jean d’Orgerolles datant du XIIème siècle, à laquelle au XVIème on rajouta deux travées, un clocher de 20 mètres et une tour pentagonale. Sur la commune de la Bastide-d’Engras

33)  Point intersection des droites 25)-32) et 24)-18) correspondant au menhir des Concluses sur la commune de Lussan

34)  Point intersection des droites 9)-32) et 15)-33) correspondant à la chapelle Saint-Sauveur de Talazargues, du XII et XIIIème siècles, qui aurait été construite sur les restes d’une ancienne infirmerie des Templiers

35)  Point intersection du prolongement de la diagonale 3)-17) et de droite 5)-34) correspondant à la chapelle Saint-Laurent sur la commune de Robiac

36)   Point intersection des droites 26)-19) et 10)-30) correspondant à la Chapelette sur la commune de Saint-André de Cruzières

37)  Point intersection des droites 27)-33) et 25)-36) correspondant à une chapelle près d’un pont sur l’Auzonnet sur la commune de Rousson

38)   Point intersection des droites 13)-14) et 30)-37) correspondant à la chapelle Saint-Andéol sur la commune de Laval-Pradel

39)  Point intersection des droites 22)-38) et 2)-24) correspondant à la Tour Bécamel, reste de fortification templière, et ornée de sculptures énigmatiques

40)  Point intersection des droites 11)-30) et 31)-39) correspondant au château du Bouquet

41)  Point intersection des droites 34)-7) et 5)-7) correspondant à la chapelle Saint-Jean sur la commune de Gaujac

42)  Point intersection des droites 3)-27) et 35)-31) correspondant à la chapelle Notre-Dame de Mayran, dépendance templière, sur la commune de Saint-Victor-la-Coste

43)  Point intersection des droites 5)-42) et 33)-7) correspondant à Notre-Dame de Rochefort, qui abritait une Vierge noire

44)  Point intersection de la droite 35)-20) et de celle passant par 38) et le centre, correspondant aux ruines de la chapelle Saint-Martin, dont le clocher était construit sur un cippe funéraire antique, site d’un marché transféré par Louis VIII à Bagnols, sur la commune de Saint-Victor-la-Coste.

Boussargues, près de laquelle se trouve la chapelle Saint-Symphorien, dépendit des futurs seigneurs de Luynes. Parmi eux, Thomas Alberti, mort en 1455, fut bailli de Viviers et de Valence, et viguier de Bagnols et de Pont-Saint-Esprit. Léon d’Albert, leur nom ayant été francisé, seigneur de Sagriès, acquit la seigneurie de Luynes, en Indre et Loire, en 1555, par mariage avec Jeanne de Ségur. Le fils de Léon, Honoré d’Albert fut gouverneur de Beaucaire, et eut trois fils : Charles, fait premier duc de Luynes par Louis XIII ; Honoré, seigneur de Cadenet, comte puis duc de Chaulnes par mariage – on rencontre, en 1704, un duc de Chaulnes dans l’affaire de l’alchimiste ou faux-monnayeur Vinache qu’il protégeait - ; Léon, seigneur de Brantes, duc de Luxembourg-Piney lui aussi par mariage.

Le mont Cavala, qui domine un des points du nonagone, me rappelle une citation de Fulcanelli, qui fait la liaison entre le cheval et la cabale hermétique : « Le latin caballus et le grec kaballhs signifient, tous deux, cheval de somme ; or, notre cabale soutient réellement le poids considérable, la somme des connaissances antiques et de la chevalerie ou « cabalerie » médiévale, lourd bagage de vérités ésotériques transmis par elle à travers les âges. C’était la langue secrète des cabaliers, cavaliers ou chevaliers. Initiés et intellectuels en avaient tous la connaissance. Les uns et les autres, afin d’accéder à la plénitude du savoir, enfourchaient métaphoriquement la cavale, véhicule spirituel dont l’image type est le Pégase ailé des poètes helléniques. Lui seul facilitait aux élus l’accès des régions inconnues ; il leur offrait la possibilité de tout voir et de tout comprendre, à travers l’espace et le temps… ».

La commanderie de Jalès en Ardèche, près des Vans, possédait une chapelle, encore debout, dédiée primitivement à la vierge Marie. Elle est mentionnée dans un acte de vente passé "in ecclesia Sancte Mariae virginis que sita est in Galese". Mais, un acte de 1229 est passé "in porticu, ante portam ecclesie Beate Marie Magdelene". L'abside de la chapelle est caché aujourd'hui par l'enceinte construite par les Hospitaliers au XIVème siècle [2]. Que Marie Madeleine succède à la Vierge Marie comme patronne d'un édifice religieux se retrouve à Vézelay primitivement dédiée à la Mère de Dieu. Ce n'est que lentement et après sans doute invention de légendes, et surtout sous la ferveur populaire que Marie Madeleine s'impose à Vézelay. Pèlerinage ruiné par la " découverte des vraies reliques de la sainte " à Saint-Maximin, Vézelay attira cependant de grands noms de la littérature, des arts, et de la politique : Romain Rolland, Jules Roy, Georges Bataille, Désiré-Émile Inghelbrecht, Max-Pol Fouchet, Maurice Clavel, François Mitterrand…

On peut trouver à Champlieu dans l'Aisne l'église d'un prieuré qui dépendait de Saint-Crépin de Soissons. Sur le tympan de l'édifice on peut lire l'inscription suivante : " Res spectatur in hoc templo veneratur Maria quam rosa pulchra magis matris imago Dei " : On vénère ne ce temple Marie, qui plus que la rose est l'image de la Mère de Dieu. Elle semble désigner Marie-Madeleine, qui en temps que Marie de Béthanie est l'Epouse du Logos (par l'oreille), Epouse divine et image de la Vierge Marie.

L'assimilation de Madeleine à Marie de Béthanie se retrouve dans ses représentations les doigts croisés. " Avoir les doigts croisés " signifie " ne rien faire " et c'est bien ce qui oppose Marie de Béthanie, qui a choisit la meilleur part, à sa sœur, la très active Marthe.

Marie Madeleine est la " Veuve Tourterelle " (selon Alain de Lille), " bienheureuse amante du Christ " qui pleure son ami perdu et qui annonce sa résurrection. Patronne des parfumeurs et des gantiers, Marie Madeleine peut être cette femme parfumée qui symbolise le Mercure de l'œuvre au blanc qu'il faut unir au rouge. Notons que, vers le XIIème siècle, l'Eglise de Provence avait le 19 juillet pour la fête des deux sœurs et le 22 juillet pour Madeleine.

Or allons donc (pour veu que tu le vueilles)

Seoir soubs cest Orme à si espaisses fueilles.

Car là se plaint la Tourte vefve et triste,

Et la Palombe, aupres qui se contriste :

L'aure, et le vent y sifflent, et frisonnent :

Ou ma voisine Echo t'escoutera,

Qui apres toy tes beaux vers chantera.

Maurice Scève, La Saulsaye

Le culte de Marie Madeleine a pu avoir été influencé par l'ismaélisme espagnol, représenté par les Frères au Cœur Pur ou de la Pureté établis à Bassora et auteurs une encyclopédie qui a pu donner quelques idées à Raymond Lulle et qui fut importée en Espagne par Maslama de Madrid en 1006 et à Saragosse par le médecin al-Karmani en 1065. Pour l'ésotérisme ismaélien, le " Hojjat " (représentant, signe ou preuve) de Jésus est soit Madeleine soit sa mère Marie, établissant une certaine équivalence entre elles. Fatima, fille du prophète, a les aspects des trois femmes évangéliques : Mère des croyants (Vierge Marie), Réceptacle de la parole divine (Marie de Béthanie) et Femme humiliée à la chevelure dénouée comme Marie Madeleine.

Les dimensions de ce nonagone gardois ont servi à la définition du grand nonagone qui se déploie sur le territoire français et sur la partie romande du territoire suisse. Par multiplication et rotation autour du centre du grand nonagone, il a servi à la construction du petit nonagone « templier ».

 


[1] Tite-Live, « La seconde Guerre punique, XXI-27, http://hannibal-dans-les-alpes.com/tite-live-26-29.htm »

[2] Robert Saint-Jean, « La commanderie de Jalès : les bâtiments XIIe-XVIIIe siècles », Revue du Vivarais, 1987